
Le voyageur n’est pas le sage qui sait voyager dans l’espace
Le conquérant n’est pas le sage qui a construit dans tous les âges.
Le maître n’est pas plus le sage qui sent la matière qui passe
La sagesse n’est pas le sage, c’est la sagesse qui fait le sage.
C’est la raison existentielle de l’écho prononcé par Dieu
Qui a semé et tout l’espace, et la matière, et le temps.
C’est ce mouvement essentiel dont on voit le poinçon radieux
Dans chaque ombre ou rayon qui passe, dans chaque cil papillotant.
Le voyageur
Le voyageur entra dans la grande salle. Il y avait des hommes assis, les yeux fermés, silencieux.
La doyenne l’invitât à s’asseoir ainsi que sa compagne. Une atmosphère d’une étonnante légèreté flottait dans l’atmosphère. Ce lieu inspirait la détente, la paix, le recueillement. C’était comme si tous étaient portés par une musique invisible. Invisible était le mot. Cela se passait ailleurs tout en étant le support de l’entente. Le voyageur était à son aise. Sa vie était peuplée de voyages, de rencontres, d’échanges et d’amour. Cette assemblée singulière était harmonique à son cœur. Il avait l’impression de rentrer chez lui. De rencontrer ses frères et ses sœurs. Il n’eut pas besoin de parler. Il s’assit, se détendit et attendit.
La doyenne prit la parole : « Nous sommes les gardiens de la vie. Notre existence est liée à l’équilibre du monde. Nous avons établi un accord eurythmique entre nos deux univers. Les hommes et les femmes que tu as rencontrés ont installé une harmonie entre deux réalités. Les hommes s’appuient sur les femmes ; les femmes s’appuient sur les hommes. Les hommes sont consacrés à la prière, à la méditation. Ils ont la charge d’apporter continuellement leur amour pour aider le monde. Les femmes ont la charge de la nature. Elles sont spirituellement physiques ; ils sont physiquement spirituels ; l’échange. Ils apportent aux femmes une source d’amour. Elles apportent aux hommes le reflet de l’amour. »
Le voyageur approuvait. Il avait ressenti, en effet, une entente parfaite entre les habitants de l’île. Pourtant, ils lui cachaient quelque chose. Il l’avait deviné depuis le début. Il était certain que sa présence n’était pas fortuite. Pourtant, il y avait eu tellement de circonstances nouvelles ces derniers temps qu’il ne voyait pas comment elles auraient pu être manipulées. Alors il les questionna.
« Pourquoi nous avoir attirés ici ? »
Ils échangèrent des murmures entre eux. Le voyageur discernait une imperceptible tension. Il patienta en attente de leur réponse. Ils hochèrent la tête.
« Nous ne t’avons pas attiré ! » expliqua l’un des hommes assis. Il semblait aussi vieux que la cheftaine et, comme elle, conservait pourtant un corps remarquable malgré sa peau parcheminée. « Ou plus exactement, nous n’avons pas désiré t’attirer. Mais nous décelons, qu’entre toi et notre monde, il existe une simultanéité. Si tu as pu découvrir le passage entre nos deux univers, c’est que tu as autant à nous apporter que nous avons à t’apporter. Reste avec nous et partage notre méditation pour l’heure. Après cela, tu viendras avec nous. Nous t’amènerons consulter la table de la vie. »
Le voyageur accepta l’invitation. Il s’assit avec eux. L’air était mêlé de parfums pendant que les chants s’élevaient. Des chants à l’unisson entre les chanteurs et les chanteuses. Doux et profonds à la foi. Relaxants et reposants. Profondeur et légèreté de l’être. Un fragment d’éternité. Et toujours cette force invisible du chant. Tout semblait vivre au ralenti dans l’instant présent ; un ralenti mesuré. Tiens ! Il ne l’avait pas remarqué au début mais, à présent, au fur et à mesure qu’il laissait son esprit ouvert et détendu, il se dégageait de ces chants des mots, des idées, un message subtil comme une image qui serait cachée dans une fresque sonore. Il serait intéressant, plus tard, d’étudier ces chants, voire d’y participer.
Lorsqu’ils se levèrent, il faisait nuit. Ils apportèrent des torches puis, se mirent en marche. La procession suivit une route qui partait du village vers le centre de l’île. L’allée qu’ils foulaient était bordée de pierres noires qui pointaient vers les étoiles. Ils parvinrent après des heures de marche dans un promontoire circulaire. Au centre, une dalle irradiait. Tous s’ordonnèrent autour. Le patriarche et la doyenne firent signe au voyageur d’approcher. Au fur et à mesure qu’il avançait sur le passage, il ressentait la profondeur du lieu. Au premier abord la statique des pierres, ensuite leurs vibrations, enfin, la transmission. La stèle noire était gravée d’une écriture que connaissait le voyageur. « Du grec ancien » remarqua-t-il. Il savait la lire mais la transcription lui demandait beaucoup d’énergie. La marche dans l’allée l’avait progressivement marqué. À présent, au milieu de la nef cristalline, il sentait des vibrations intenses comme s’il avait été à proximité d’un magnétisme très prononcé. Alors, il se concentra sur le texte.
Il est éternel. Il n’a ni début, ni fin, Il est l’infini. De l’infini, Il a découpé et créé un morceau d’éternité, l’a regardé, l’a observé, l’a aimé. Il a délimité une portion de l’éternité du temps, une portion de l’éternité de l’espace, une portion de l’éternité de la vie. Il a expérimenté son échantillon. Il peut le déformer, le compresser et le détendre, le chauffer et le refroidir. Il peut le regarder de près, de loin, l’éloigner, le rapprocher tandis que, faisant partie de lui-même, l’éternité l’enveloppe sempiternellement. Alors qu’il le courbe, son échantillon se met en relation avec chaque point d’éternité. Aussi loin qu’il peut aller dans l’infini, chaque point d’éternité est en relation avec un point de l’échantillon. L’éternité tout entière se retrouve reflétée dans l’échantillon. Lui-même y est présent. Il a transmis la vie à son échantillon et s’est donné en héritage. Il l’aime. Il en désire d’autres. Il a découpé alors un second morceau à partir du premier. Il a fait attention à son découpage ; l’assemblage doit pouvoir se faire et se défaire ; l’assemblage doit pouvoir se reproduire à partir d’autres emplacements du morceau afin de créer de nouveaux échantillons. L’assemblage doit le représenter. Il a créé, alors, un assemblage de vie. Le morceau s’est fragmenté et s’est défragmenté dans une activité croissante. Désormais, beaucoup d’échantillons ont pris vie, se reforment, redonnent de nouveaux échantillons qui eux-mêmes s’assemblent. Il s’est mis à modeler certains échantillons afin de construire son œuvre. Certains segments se sont cassés, d’autres sont revenus à leur position de départ, d’autres ont résisté jusqu’à la rupture, d’autres, enfin, se sont pliés à ses désirs. Rapidement pour certains, plus lentement pour d’autres. Chaque épreuve est une nouvelle direction bénéfique pour chacun des fragments. Lorsque les segments se seront assemblés et que le réseau sera ordonné, une nouvelle dimension irradiera l’ensemble. À ce stade, la création contiendra son créateur.
Il sourit. Il vient d’accoucher de son fils. Il vient enfin de créer un être délimité qui lui est supérieur.
« Comprends-tu ce que cela signifie voyageur ? » lui demanda le patriarche. Le voyageur prit son temps pour répondre. Il ne fallait pas chercher à déchiffrer le message mais trouver l’écho au plus profond de lui-même. Il avait l’habitude, lorsqu’il se posait des questions insolubles, de laisser jaillir la source de la réponse du plus profond de lui-même.
« Cela signifie que Dieu a créé le monde pour lui transmettre sa puissance infinie et qu’il a voulu que sa création soit supérieure à lui. Cela voudrait dire que l’homme est dans l’erreur depuis la nuit des temps de croire en l’être supérieur. C’est Dieu qui nous a créés supérieurs à lui. Et c’est à nous de respecter sa volonté et de croître. La véritable puissance de Dieu serait alors celle de l’homme qui grandit avec Dieu dans son cœur ? En tous les cas, l’homme aurait dans son cœur le reflet infiniment grand de son créateur. L’homme est alors la frontière entre les deux infinis. Il ressort de tout cela qu’être limité donne un pouvoir supérieur par rapport à celui qui est infini ! »
Le voyageur était pensif. Si cette stèle était révélée au monde. Ce serait le plus grand schisme parmi les religions de la terre. Fini le pouvoir des hommes sur les hommes et la crainte de Dieu. Elle avait donc été placée sciemment dans ce lieu. Ce lieu même avait-il été créé pour abriter cette révélation, pour la mettre à l’abri ? Et dans ce cas, quelle était la raison de sa présence ? Était-il ici pour rapporter la connaissance dans son propre monde ? Et dans ce cas, le laisseraient-ils faire ?
Le voyageur entreprit de le découvrir, il se fit enquêteur et, du tac au tac, posa ses questions :
« – Qui vous a enseigné votre science ?
– Les pères de nos pères, les mères de nos mères, depuis toujours.
– Qui a déposé cette stèle ici ?
– Nous sommes les gardiens de la stèle au plus lointain de nos souvenirs.
– Qui a créé ce monde ?
– La réponse est inscrite sur la pierre, voyageur.
– Quel est mon rôle ?
– Tu le découvriras par toi-même.
– Comment repart-on de cette île ?
– Celui qui arrive par l’eau repart par l’eau ; l’eau délimite notre monde, elle en est le début et la fin ; l’eau est l’infini.»
Une lueur subtile dans le regard du voyageur. Dans leur langue, l’eau avait plusieurs consonances. Il y avait différents mots pour l’eau selon sa direction, en haut, en bas, autour. Dans la réponse de l’ancien, ces mots résonnaient comme une carte, comme une orientation. Il y avait là un sens. Il nota cette information dans sa tête ; il savait qu’elle lui servirait plus tard.
« D’où vient l’eau des rivières ? Du centre de l’île ? Qu’y a-t-il au sommet de l’île ? Existe-t-il un passage qui mène au cœur de cette terre ? Mais oui ! L’île a l’air d’être le centre de ce monde, c’est encore plus près du centre qu’il faut aller ! »
Les uns et les autres se concertèrent silencieusement. Enfin, la cheftaine s’adressa au voyageur. « Demain, nous te conduirons. Mais, avant, il faut nous préparer à l’expédition. Il y a quelque chose de sacré dans ce lieu. Sacré et dangereux aussi. Dangereux pour nous, les femmes. Les hommes nous protègent cependant et tu es un homme. Rentrons au village à présent. »
Le groupe reprit le chemin du retour. Celui qui arrive par l’eau repart par l’eau pensait le voyageur. Un monde créé et délimité par l’eau ? Qu’est-ce que cela signifiait réellement ? La nuit était l’attente de nombreuses questions. L’aube apporterait peut-être une réponse. Le voyageur savait qu’il n’avait pas encore rencontré la véritable force qui avait créé ce monde, qui l’y avait plongé et encore moins ce qu’elle attendait de lui.
Le voyageur marchait seul sur la plage cette nuit, il n’arrivait pas à dormir. Beaucoup de questions dans la tête. Dans sa tête humaine. Cette arrivée non désirée dans cette île d’où l’on ne pouvait s’échapper. Ces gens très communicatifs, trop même. Cette révélation révélée beaucoup trop facilement. Hasard ou préméditation ? Il finit par se persuader qu’il avait malgré tout besoin de repos. Son esprit avait besoin de faire le point et de décanter. Mais il savait, à présent, que son combat ne faisait que commencer. Combat ? Il n’était pourtant que le voyageur. Serait-ce son don d’observation qui était mis à contribution ? Il rentra chez lui. Elle l’attendait. La fièvre dans le corps, il s’abandonna. L’amour panse les plaies, l’amour soulage, l’amour rend fort.
Le conquérant
Le conquérant se réveilla avant son tour de garde. Il se leva et écouta. Le silence de la nuit. Rien n’avait bougé depuis qu’il s’était endormi. Apparemment. Il se dirigea vers la sentinelle.
« – Rien à signaler ?
– Non. Il fait trop sombre. J’ai essayé d’augmenter les lumières pour mieux distinguer les détails des parois mais je ne voulais pas vous réveiller.
– Il est certain que la lumière du jour ne nous atteindra plus désormais. Nous allons attendre que tout le monde soit réveillé et nous déciderons alors de ce qu’il convient de faire. »
Le garde rejoignit les autres, laissant le conquérant seul gardien dans la nuit. Il se retrouvait en cet instant. Il était dans une période d’attente. Il le savait. Il connaissait cette sensation. Elle faisait partie de sa vie. Il faisait l’équilibre entre ses doutes et ses évolutions. Bien sûr, ils pouvaient descendre sans fin, sans intérêt, sans but. Bien sûr, il avait senti l’opportunité, la coïncidence subtile de la rencontre avec l’au-delà, l’ailleurs, l’autre. Mais il ne pouvait risquer ainsi la vie de ses compagnons, de son amie, de ses guerriers. Il avait la responsabilité des échanges, de l’initiative, de la force motrice. Il se concentra sur lui-même, à l’intérieur de lui-même. Il chercha l’ouverture au plus profond de son être.
Elle s’était réveillée. Elle ne le chercha pas ; elle savait où il était. Sans un bruit, elle se leva et s’approcha à pas légers vers son ami. Elle le sentait préoccupé et plongé dans l’incertitude. Elle s’assit à ses côtés et lui prît simplement la main.
Sa présence fit sortir le conquérant de ses pensées. Ils ne disaient rien. Ils restaient ensemble dans le silence des ténèbres. Seules les vibrations et le craquement de la nacelle leur rappelait leurs origines. La montgolfière descendait imperturbablement dans sa course aveugle.
Il faisait plus chaud à présent. C’était indéniable. Plusieurs heures avaient passé, le conquérant avait fini son tour de garde, il avait été relayé et s’était rendormi. À son réveil, il remarqua tout de suite la différence de température.
« Il y a une lueur en bas. Elle est très faible » dit le conquérant. Il alla s’enquérir auprès du scientifique de la distance parcourue depuis leur départ. « C’est difficile à formuler en raison de l’impossibilité de nous repérer depuis le début. Mais à supposer une descente de 10 kilomètres par heure environ et une journée écoulée, cela nous donne approximativement un parcours de 240 kilomètres sous la surface de la terre. Ce qui me semble formidable. Mais, à cette distance, nous aurions dû rencontrer des nappes volcaniques. »
« À moins que la lueur au-dessous de nous ne soit le feu de l’enfer ! » soupira le commandant qui tenait mal en place dans l’attente.
« Il n’y a pas de feu dans nos légendes. On y parle du domaine des dieux mais il n’a jamais été question de feu ! » Précisa la princesse, comme pour les rassurer.
Le conquérant réfléchissait rapidement. « Prenons la plus longue corde et lestons la. Puis laissons la descendre et attachons l’autre bout. Ainsi, si la tension de la corde faiblit, nous saurons qu’il y a quelque chose en dessous. »
« S’il y a quelque chose, ce n’est certainement pas du feu » annonça l’écologiste. « Voyez les parois : De la moisissure, une sorte de mousse ? En tous les cas c’est verdâtre et végétal. Impossible de trouver ça ici si nous étions dans une cheminée volcanique ! »
En effet, la consistance des parois avait changé et on commençait, enfin, à les apercevoir sorties des ténèbres. La lumière continuait de s’intensifier. La chaleur également. L’air devenait tempéré. C’était comme un matin. Comme le point du jour qui achève la nuit mais, sans soleil.
« La corde se relâche, il y a quelque chose en dessous ! » Hurla le commandant.
« Augmentez la puissance du brûleur ! » ordonna le conquérant. « Il faut freiner notre descente. »
La longueur de la corde avait été calculée. La chute fut amortie et, lorsque la nacelle atteignit le sol, ce fut en douceur. Pendant l’arrêt de leur vaisseau, ils avaient été tous attentifs à leur propulsion et au sol qui se rapprochait. Lorsqu’ils eurent atterri et qu’ils eurent immobilisé la montgolfière par des ancres et des grappins, ils regardèrent enfin autour d’eux.
C’était incroyable ! Ils avaient atteint une vaste cavité baignée d’une lumière blanche qui semblait venir de toutes les directions à la fois. Un parterre fait d’une herbe très courte et aux feuilles assez larges. La botaniste en préleva immédiatement un échantillon. Tout autour, le paysage se fondait dans la lumière. Seul un côté offrait la perspective de quelque chose qui aurait pu s’apparenter à des constructions. Ils laissèrent les brûleurs en veille afin de pouvoir repartir précipitamment. Un des guerriers, armé d’un fusil en guise de signal, resta à l’affût dans la nacelle. Ils prirent quelques provisions et partirent en direction de la cité incertaine. Ils marchèrent une heure environ dans le silence.
Dès l’entrée dans la citadelle, toujours le silence. On aurait pu croire à une ville morte cependant, rien ne montrait une activité passée ou actuelle. Les pierres étaient nues, parées de couleurs chaudes. Les murs étaient intacts. Pas de porte, pas de fenêtre, des ouvertures aveugles donnaient aux maisons un regard incertain. Les constructions étaient très grandes, très hautes. Comme si des géants avaient érigé leur cité. Ils arrivèrent bientôt sur la place principale du village étrange. Les grandes rues s’y concentraient. De vastes allées très lumineuses. Pas d’ombre. Comme si la lumière venait de partout à la fois. Tandis qu’ils projetaient leurs regards, l’homme de science était à la recherche d’indices, d’inscriptions, de traces de civilisation.
« Tout cet endroit ne cadre pas ! » déclara l’écologiste. Les pierres et les murs ne sont pas érodés, la poussière et la moisissure ne recouvrent rien. Comme si cela avait été figé pour l’éternité. C’est comme si nous marchions dans une photographie. À première vue, on a l’impression que tous les habitants de la cité se sont cachés, emportant avec eux toutes leurs richesses. En revanche, vu la proportion suffisamment vaste de cette cité, cette hypothèse est extravagante. J’ai l’impression qu’on nous cache quelque chose. Cette ville est apparemment abandonnée, je dis bien ‘apparemment’. Aucun signe de mort ni d’abandon n’est visible. Ou alors, quelqu’un a voulu nous faire une mystification gigantesque en nous bâtissant ce décor. »
Le conquérant ne disait mot, il ne parlait pas. Les paroles de la femme biologiste reflétaient sa propre pensée. Quel était cet endroit ? Qui étaient ses habitants ? Que voulaient-ils cacher ? Que voulaient-ils vraiment ?
Ils continuèrent à explorer les environs. Aucune trace de vie. Nul indice d’une civilisation. Sur la place du village, une construction singulière se dressait comme un signe d’autorité. Ils gravirent les marches qui y conduisaient. Toujours ce silence ! Lorsqu’ils parvinrent à l’entrée, nulle porte ne leur barrait la route. Ils entrèrent et débouchèrent dans un grand couloir plein de lumière. Au fond, une autre porte d’où irradiait un rayon vert. Ils avancèrent prudemment. Lorsqu’ils furent près de la porte, le faisceau était plus profond. Ils franchirent alors la dernière porte et pénétrèrent dans une immense salle voûtée. D’énormes piliers supportaient des arcs impressionnants. Au centre, sous le dôme, une dalle gigantesque, parfaite, rayonnait d’un vert très intense. D’un vert émeraude. À l’instant où le conquérant s’avançait pour toucher la table de pierre de sa main, ils entendirent distinctement un chant. Ils se regardèrent tous interloqués, tous les sens aux aguets. Seule la princesse restait calme. Elle se dirigea aussitôt vers la sortie. Tous lui emboîtèrent le pas. Lorsqu’ils sortirent, ce fut pour assister à un spectacle insolite.
Au plus haut du plafond de la caverne fantastique, des hommes lévitaient. Ils étaient assez nombreux, une centaine. La princesse levait les bras pour les accueillir. Lentement, ils descendirent. Lorsqu’ils eurent tous atterri, leur chant se tut et la cité changea de couleur.
Le conquérant resta sur la défensive. Il les avait reconnus. C’étaient bien le peuple d’en haut qu’il avait déjà rencontré. Quelle était cette comédie, ou plutôt, quels étaient leur but ? Il était le conquérant ; il se retrouvait pion dans un jeu qui n’était pas le sien. « Le véritable enjeu de la bataille se présente maintenant » pensa-t-il.
Le maître
Le maître observa l’endroit où ils étaient tous rassemblés. Très lumineux. Un blanc éclatant. Pas de mouvement perceptible. C’était comme s’ils étaient immobiles. La pièce était de forme circulaire. Pas trop grande. Une dizaine de mètres de diamètre. Des sièges étranges mais très confortables étaient arrangés sur la circonférence et dirigés vers le centre. Chacun s’assit à sa place.
Rien ne se passait, apparemment. Ils se retrouvaient seuls, se regardant les uns les autres. Tout était calme ; pas de bruit ; pas de nouvelles. Le maître, alors, se leva. Il avait compris.
« Mes amis, je dois vous expliquer et vous faire comprendre que nous avons tous autant de mal à correspondre avec nos hôtes qu’ils en ont à communiquer avec nous, pour l’instant. Je vous propose tous d’être détendus, réceptifs et d’offrir la paix de vos cœurs. Les liens sont en train de s’établir. Nous devons les concrétiser et les sentir germer en nous. »
À ses mots, la magicienne se leva de son siège. Elle se plaça au centre du cercle et très lentement d’abord, harmonieusement ensuite, inspirée enfin, elle se mit à danser. Tandis que son corps évoluait, chacun se détendit et se mit en vibration avec elle. Chacun observait les volutes captivantes de sa danse et ressentait dans son propre corps les mêmes rythmes. Se concentrer sur elle leur permettait de s’accorder les uns et les autres. Lorsqu’ils furent au diapason, la voûte s’éclairât.
D’abord des formes surgirent du néant. Leur taille augmentait et diminuait sur un rythme indéterminé. Puis, ce fut un ballet de contours et de figures. La lumière devenait de plus en plus intense. Finalement, trois formes se stabilisèrent et prirent, chacune, une apparence humanoïde.
Dans le silence qui s’ensuivit, l’initiée commença son chant. D’abord des sons à bouche fermée puis une voix claire et primitive, enfin, une mélodie rythmée. Particulièrement rythmée. Suivant la mesure inspirée, ils s’alignèrent autour de la voûte afin de former une figure remarquable. Au fur et à mesure que chaque compagnon s’accordait, une couleur émergeait, différente pour chacun. Quand le maître ferma la figure, les couleurs devinrent d’un blanc éclatant, comme au commencement, et la pièce dans laquelle ils étaient rassemblés s’effaçât. Ils étaient passés.
« Soyez les bienvenus, hommes et femmes de la Terre ! »
Une assemblée de personnages difficiles à discerner tant la lumière était à la fois forte et dépourvue de contrastes. Il régnait une paix douce et accueillante. Bien plus que cela. Il se dégageait de l’assemblée insolite un amour qui irradiait non seulement le lieu mais chacun de ses habitants. Les invités terriens étaient dans l’accord et en goûtaient plaisamment la consistance. Trois êtres plus petits. Des enfants ? Ils s’avancèrent présentant un plateau chargé de cristaux. À chacun des terriens un cristal fut offert. Chacun des minéraux reflétait une couleur différente. L’initiée se vit offrir une pierre d’un indigo profond, la femme médecin était ravie de son émeraude, la magicienne porta sa pierre bleue sur son cœur, la reine accueillit son rubis, l’ermite se recueillit et referma sa roche jaune dans les mains et sur ses seins tandis que l’astronome se reliait à son étrange caillou orange. Puis, les hommes acquirent leur présent. Des roches brunes et noires ; celle du maître était blanche. Chacun se focalisa sur son symbole de communication. Enfin, le maître prit la parole et s’adressa à ses hôtes :
« – Quel est le lieu dans lequel nous nous trouvons ? Sommes-nous sur une autre planète ?
– Pas tout à fait, répondit l’être de lumière qui s’était approché. Afin d’être le plus clair possible, nous allons nous présenter. Nous sommes des créateurs de mondes. Voyez-vous, après avoir, comme vous, vécu et progressé à la surface de la terre, nous avons gravis et expérimenté tous les échelons de la vie humaine et nous avons découvert la quintessence de notre vie. Nos cœurs se sont épanouis, nos yeux se sont ouverts, nos sens se sont développés. Nous avons alors quitté le monde terrestre non pas pour un autre monde matériel. Nous avons appris à créer des mondes. Aujourd’hui notre civilisation profile des univers dans lesquels nous nous établissons. C’est l’étape actuelle de notre connaissance. Bientôt, nous le savons, il y aura de nouvelles dimensions que nous acquerrons et qui nous porterons sur d’autres plans. Mais pour le moment qui nous importe, le moment où nous vous accueillons, nous vous souhaitons la bienvenue dans ce monde nouveau qui est le nôtre.
– N’avez-vous plus aucune base terrienne ?
– Autrefois, nous avions beaucoup de cités à la surface de la terre. Puis, vous vous êtes multipliés et vous avez progressé sur les continents. Alors, nous avons commencé à nous dissimuler, puis à nous enfouir très loin dans les profondeurs. Nous utilisions encore la voie des airs pour communiquer. Enfin, nous avons émigré nos postes sur une planète de votre système jusqu’à en sortir définitivement et physiquement pour la plus grande partie ; des relais sont toujours en activité, toutefois. Nous sommes toujours en relation dans d’autres dimensions avec vous. Nous n’avons jamais rompu le contact. Nous sommes les veilleurs. Cependant, bien que toutes les précautions aient été entreprises, deux de ces arrières-postes ont été accidentellement mis en relation avec des hommes de la terre. Deux coïncidences ? Une troisième porte a été franchie également. Un homme de votre planète est en train d’atteindre la conscience pour devenir créateur de mondes et par conséquent donner ce pouvoir à votre civilisation. »
Tandis qu’ils parlaient, l’environnement avait changé. À présent, des tables s’étaient concrétisées. Des sièges autour. De grands plateaux étaient disposés sur les tables. Des couleurs chaudes et attirantes se dégageaient de ces plats. D’autres êtres, maintenant, étaient apparus. Ils échangèrent un signe avec les trois représentants.
« Venez à présent, nous vous avons préparé une collation. »
Ils s’approchèrent des tables. Des essences agréables s’en échappaient soutenues par un effet d’arrangements de ces couleurs chaudes accueillantes. Il y avait des fruits, tartes et gâteaux. Il y avait tout un jeu de consistances et de saveurs. Ces substances nouvelles étaient l’aboutissement d’une civilisation très avancée.
Lorsqu’ils eurent terminé les agapes, le décor changea de nouveau. Ils se retrouvaient à présent dans une grande clairière bordée d’arbres majestueux. L’air était très doux et le sol absorbait leur pas. L’herbe était très duveteuse. Ils furent priés de s’asseoir. La pelouse épousait la forme de leurs corps comme un coussin moelleux.
« Je vais vous révéler, maintenant, la raison de votre présence ici, ce que nous attendons de vous et ce que nous allons vous apporter. »
En prononçant ces mots, les êtres étaient tout sourire. Comme s’ils avaient attendu cet instant avec beaucoup de patience et d’amour.
« Nous y voilà » pensa le maître. Il sentait la signification de ces paroles. Il se concentra sur l’âme de leur confrérie. Sans les regarder, il savait que ses compagnons faisaient de même. Ils avaient besoin d’être ensemble. En unissant leurs ressources, ils allaient affronter leur destinée.
Le sage
Le sage avait froid. Il avait les pieds couverts de boue. Il était sale et ne s’était pas lavé depuis plusieurs jours. Depuis plusieurs jours où il était bloqué avec d’autres compagnons de fortune. Ses vêtements ruisselaient de sueur et de boue. La morsure du froid avait altéré sa peau. Les balles sifflaient à ses oreilles et les obus détonnaient à l’horizon. Quelquefois c’était tellement près que la terre tremblait sous ses pieds. Il faisait nuit. Il avait été décidé que l’attaque aurait lieu de nuit. Il avait été désigné avec d’autres pour participer à l’assaut. Il avait vu la mort frapper plusieurs de ses camarades. Il avait vu l’horreur de leurs blessures. Lui-même n’avait pas encore été touché. Ils n’avaient plus de nouvelles depuis longtemps. Ils étaient acculés et les ordres étaient d’avancer. Le signal de la charge explosa dans ses oreilles. Tous ensembles, ils se ruèrent l’arme à la main. Lorsque la rafale de mitraillette lui perfora l’abdomen, il eut d’abord l’impression que l’on déchirait l’univers. Lorsqu’il sentit sa chair éclater sous l’impact des balles, il eut l’impression que l’on éventrait la terre. Lorsque son souffle fut tranché, il eut l’impression que le temps s’était figé comme arrêté par la main de Dieu. La douleur avait été tellement forte et tellement courte qu’il resta longtemps avant de comprendre qu’il était mort.
Il flottait tout en se sentant relié au monde terrestre qu’il venait de quitter brutalement et au creuset du monde d’où il appartenait. Le passeur qui se tenait à côté de lui le rassura.
« La première fois, tu ne te rends pas compte tant est la brièveté du moment du passage. C’est parce que tu es très attaché à ce que tu quittes et extrêmement étonné de ta nouvelle situation. Tu viens de franchir pour la première fois de ton existence la frontière. Les deux états opposés sont trop forts pour que tu puisses discerner le passage. C’est pourquoi, si tu le désires, nous allons faire une expérience alchimiste et réitérer l’expérience jusqu’à ce que le temps infiniment nul du passage s’ouvre à toi et devienne infiniment grand ».
Le sage tendit sa main. Il était alchimiste.
Le froid encore. Le froid lui transperçait le corps. Ils étaient en marche depuis des jours et des jours. La colonne était interminable. Leur empereur les avait amenés aux confins du monde. Leurs pas ralentissaient d’heure en heure. Déjà, plusieurs avaient succombé au froid, à la faim, à leurs blessures. Lui, il continuait encore à mettre un pas devant l’autre. Un pas insensible. Il ne sentait plus ses pieds. Ils avaient commencé à geler depuis la veille. Il savait que l’heure où il ne pourrait plus bouger ses jambes était proche tant la douleur du gel remontait dans ses membres. Il n’avait plus la force de penser ni de regretter son sort. Il ne verrait pas le soleil se coucher ce soir. Il ne le verrait plus jamais. Ses forces le lâchaient petit à petit. Au début, il avait trouvé un peu de vigueur, un peu d’espoir. Puis, la mort avait entamé sa chair. Comme un chant final qui va decrescendo, comme la flamme diminue lorsque le feu n’a plus rien à dévorer, il sentit le souffle de sa vie devenir un point infime. Ses jambes fléchirent, il tomba en arrière, il eut juste le temps de percevoir son âme exister d’une brève étincelle sans espace et sans durée.
Lorsqu’il se retrouva avec le passeur, il était songeur. « Pourquoi la mort fait-elle si mal ? ». Le passeur écouta sa question. Il mit un temps avant d’y répondre. « Ce n’est pas la mort qui fait mal. Ni le mal en lui-même d’ailleurs. Le mal n’est rien par lui-même. Le mal existe du fait que nous l’affrontons. Plus nous combattons le mal et plus il devient fort. Le mal est une frontière inexistante entre deux mondes. Un seuil. Si nous tentons de le combattre, si nous tentons une répression contre lui, alors nous lui donnons une existence. Et plus nous resserrerons l’étau contre lui et plus nous jouerons un jeu négatif et plus nous augmenterons la douleur qu’il provoque en nous. Arrête de voir le mal comme un ennemi. Tu l’as déjà expérimenté lors de ton premier passage. Vois-le comme la limite subtile entre deux univers et passe de l’un à l’autre sans le craindre. Au pire, comme la douche glacée d’une cascade qui cacherait un passage. »
Il faisait toujours et encore froid. Mais ils étaient mieux équipés. Ils étaient tous à cheval. Leurs vêtements de peaux et de fourrures les protégeaient de la morsure glaciale de l’hiver. Ils avaient déployé leurs lignes devant la ville endormie. Le raid allait avoir lieu aux premières lueurs de l’aube. Ils avaient mangé leur viande crue afin de ne faire aucun feu qui aurait trahi leur présence. Les armes étaient sorties des fourreaux, les chevaux étaient frais. Au signal, tous poussèrent leur cri de guerre. On les appelait barbares, ils s’appelaient hommes de courage. Leur chef était considéré comme sauvage, ils le voyaient comme un réconciliateur. Ils s’élancèrent tous ensemble comme un seul. Ils prirent leurs ennemis par surprise. La victoire leur était acquise. Lorsqu’il fut transpercé par la lance de l’adversaire, il sentit ses organes éclater, son corps se crever, sa vie imploser dans l’acier qui le pénétrait et exploser avec son sang et ses tripes qui se déversaient sur le sol. Il mourut au combat d’une mort détonante. Un temps lui fut nécessaire pour s’apercevoir qu’il était disparu de son monde.
Le passeur établissait toujours le relais. « Le passage a été beaucoup plus bref, cette fois-ci. Il faut que tu prêtes attention à la manière dont il se déroule ; à son mécanisme. Lorsque tu passes de la vie à la mort, tu empruntes une direction nouvelle, tu découvres en réalité une nouvelle dimension. Concentre-toi sur le passage et non sur le début et la fin. C’est le passage qui marque l’ouverture, qui élève l’esprit. Tu dois apprendre et maîtriser. Ta première mort était souffrance, tu n’avais pas demandé à être là. Pour la deuxième mort, bien que la souffrance soit encore présente, tu avais décidé de suivre ton chef. Tu es beaucoup plus acteur et volontaire dans la troisième. Ces trois morts t’ont permis de discerner la différence. Cette différence est le passage. »
L’air était glacial mais ils en étaient protégés par leur équipement et leur habitude du climat. Ils étaient sur leurs terres et avaient tous décidé d’offrir leurs vies pour la défendre. L’ennemi les acculait chez eux, ils allaient leur montrer leur courage. Il fit faire quelques moulinets à son glaive afin de mieux l’associer à son poignet puis, il le remit au fourreau. Il sella son cheval et vint se poster avec ses camarades. Il sentait la puissance de ses muscles prêts pour l’attaque et pour la défense. Au signal, ils s’élancèrent comme une vague guerrière. Les tournoiements de son épée décapitaient, tranchaient, tuaient. Lorsqu’il s’élança, ensuite, à pied dans la bataille, sa lame frappait toujours. Lorsqu’il fut entouré d’ennemis, elle frappait encore. Lorsqu’ils se rapprochèrent et le tuèrent, elle était éternellement dressée vers le ciel. Au premier coup, il sut que sa vie le quittait. Au deuxième il comprit que son combat était terminé. Au troisième il perçut qu’il avait gagné. Il ne sentit pas le quatrième car il avait ouvert la porte.
« Alors, comment as-tu ressenti le passage ? » lui demanda le passeur avec compassion. Le sage répondit immédiatement, fort de sa dernière expérimentation. « Le passage est très étroit, pris entre les deux mondes de la vie et de la mort. Il ouvre une nouvelle dimension que l’on ne peut voir si l’on est en vie et qu’on ne voit plus lorsqu’on est mort. C’est à l’instant intemporel du seuil qu’on peut l’atteindre et le découvrir. C’est comme si un troisième œil s’ouvrait dans un temps figé. » Le passeur sourit de sa haute taille. « Maintenant, tu es, toi aussi, un passeur. Tu as ouvert ton âme à une nouvelle dimension. C’est le résultat de l’expérience du feu. Tu vas apprendre à connaître ce pouvoir davantage. » Ainsi, le sage se préparait mentalement à grandir dans son apprentissage.
Le vent glacial du désert avait chassé le feu dévorant du soleil. À présent, seuls les feux des étoiles perçaient la voûte céleste. L’astre du jour reviendrait le lendemain s’ils donnaient tout leur courage dans la bataille. On le leur avait dit. Ils étaient tous prêts à donner leur vie afin que renaisse le jour. Ils s’étaient positionnés derrière la crête des rochers découpés par les rafales de sable. L’ennemi était en bas. Ils s’étaient déployés en arc, comme une gigantesque tenaille. Lorsque le signal d’attaque fut lancé, ils bénéficièrent de l’effet de surprise et frappèrent sur plusieurs fronts à la fois. Chaque fois qu’il abattait son arme il voyait la vie de son ennemi partir. Chaque fois qu’il donnait la mort, il voyait l’âme de son adversaire se dégager et partir dans une brèche de l’espace. Lorsqu’il fut frappé à son tour, il ne mourut pas tout de suite. Au fur et à mesure qu’il quittait son corps, il expérimenta ses mouvements. Il allait et venait dans et hors de son corps. Cela devenait de plus en plus difficile d’y rentrer. Lorsqu’il n’y parvint plus, il comprit qu’il était mort. Il vit l’ouverture et rejoignit celui qui l’attendait.
« Tu te demandes pourquoi la guerre ? » lui demanda le passeur. « Lorsque le vieil homme meurt, le passage s’effectue naturellement d’un potentiel vers un autre. Généralement, le corps est las de la vie et sa vie s’écoule comme l’eau d’un fleuve vers la mer. Lors d’un accident brutal, le passage est trop soudain, trop rapide pour le discerner. Nombreux sont ceux qui ne le réalisent que longtemps après. La guerre est une énorme machine de mort. On y donne la mort ; on y reçoit la mort. L’homme est acteur de sa propre vie. Ce baptême de feu permet de comprendre et réaliser le passage. C’est la raison pour laquelle tu as revécu toutes les batailles dans lesquelles tu as participé. L’expérience a été répétée jusqu’à ce que tu accomplisses ton entreprise. Maintenant que tu maîtrises le passage, tu vas apprendre à créer des mondes.
Le sage ne disait rien pour l’instant. Il était heureux et il ressentait la tristesse l’envahir. La tristesse de ses vies passées, de ceux qu’il avait rencontrés, du bonheur qu’il y avait trouvé. Il laissa le chagrin lui rappeler la marque de l’amour. « Je suis à l’entrée du chemin. Je l’ai foulé de mes pieds et j’y suis entré. C’est maintenant que je vais véritablement quitter ma demeure humaine pour acquérir mon évolution ». Il laissa cette dernière pensée rejoindre celles qu’il portait en son cœur.
Tableau de Laureline Lechat
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