Catégorie : Poésie du dimanche

  • La tête dans le compotier

    La tête dans le compotier

    La tête dans le compotier, à l’heure du petit déjeuner,
    Vous me verrez trancher la chair juteuse des fruits répandus.
    Pommier, poirier, abricotier, tout le verger sans se gêner
    Fait la fête et la bonne chère sur ma planche à couteau fendu.

    Je commence par du melon qui me rappelle le mamelon
    Avec sa gougoutte de lait qui me flatte tant le palais.
    Mangue, kiwi et ananas qui plaisent tant à ma nana
    Qui aime tellement son homme qu’elle en croque encore la pomme…

    …D’Adam qui, du fond de sa gorge, réclame encore son sucre d’orge
    Et la liqueur blanche et nacrée des noix de coco bien sucrées.
    Je dégoupille une grenade servie avec la citronnade
    Mais bientôt n’ayant plus de fruit, ce sera tout pour aujourd’hui.

    Tableau de Jean Metzinger.

  • Réflexions félines

    Une jolie chatte de gouttière vivait seule en appartement
    Avec son chat comme complice qui lorgnait sur les luminaires.
    La fenêtre servait de chatière au gré de leurs comportements
    Afin que jamais ne faiblisse leur liberté d’imaginaire.

    Paris, l’après-midi s’ennuie de ces deux félins casaniers ;
    Leur besoin d’imagination provoque propos discourtois.
    Mais à la tombée de la nuit, chacun cesse de se chicanier
    Et s’mettent en collaboration pour une sortie sur les toits.

    Alors la chatte assez brûlante de bosser pour des clopinettes
    Commence à grimper au balcon en quête d’autres découvertes.
    Le matou d’une voix dolente miaule dans les bras de la minette
    Quand elle l’envoie, d’un air abscons, chercher des mansardes ouvertes…

    Tableaux de Yannick Corboz.

  • Photomaton au poil

    Sur vos photos d’identité, coup de canif à la morale !
    C’est dans le plus simple appareil qu’il faut se montrer désormais.
    La requête est commanditée après la crise électorale
    Où des burqas toutes pareilles auraient triché comme jamais.

    Ainsi dans nos photomatons, vous trouverez porte-manteaux
    Et équipements de chauffage pour ne point vous y enrhumer.
    Tandis qu’un scanner à tâtons prendra rapports fondamentaux
    Dans la cabine-sarcophage protégée d’un voile embrumé.

    Pourtant ne soyez pas perplexe quand vous vous retrouverez nu(e) ;
    Votre précieuse intimité ne fera aucune victime.
    Laissez-vous faire sans complexe car le résultat obtenu
    Offre en toute légitimité la protection la plus ultime.

    Et voilà, abracadabra ! Le sexe est cryptographié.
    Ah ! Les seins apparaissent encor’, c’est une question de réglage.
    Alors de grâce, baissez les bras et laissez-vous photographier
    De face et de dos tout le corps pour votre meilleur profilage !

    Illustrations d’Enki Bilal sur https:www.passion-estampes.comproduits-derives-artistiquesindexbilal.html .

  • L’énergie du baiser

    L’énergie du baiser

    La force gravitationnelle, la force électromagnétique
    Et les deux forces nucléaires font la physique fondamentale.
    Quand l’énergie émotionnelle et la synergie romantique
    Deviennent ensemble colinéaires, la physique est sentimentales.

    La matière pourtant constituée presque essentiellement de vide
    Entre les atomes épars n’est qu’une alliance de ces forces.
    Quant à l’amour substitué entre deux corps, deux cœurs avides,
    Il est l’énergie qui répare ou brise les noyaux sous l’écorce.

    Tableau de Graham Dean.

  • Projet Coquelicots

    Projet Coquelicots

    Avant que le printemps survienne, je me suis projeté l’écran
    D’un Dieu en camaïeu orange sur coquelicots en pâture.
    Je ne doute pas qu’il y parvienne ; après l’hiver, Il est à cran
    Et nécessite cette étrange transformation de la nature.

    Plaise au Dieu-Soleil d’embellir, de l’aurore jusqu’au coucher,
    Et de jouer de sa lumière, sur mon champ toute sa chaleur.
    Plaisent aux étoiles en délire et à la Lune effarouchée
    De répandre sur ma chaumière une aura de même valeur.

    Photo de l’East Yorkshire par Alastair Graham.

  • Mon amie Pascale

    Lundi de Pâques, jour de la Lune, Pascale sort la grande échelle.
    Au premier quartier, elle cueille un croissant chaud, sorti du four ;
    En pleine Lune, bonne fortune pour le chien de Jean de Nivelle
    Qui n’aboie pas mais se recueille posément jusqu’au petit jour.

    Lorsque les phases se terminent, Pascale lave sa récolte
    Au son d’un violon qui chantonne un air vif et bien inspiré.
    Petit à petit s’éliminent toutes les larmes désinvoltes
    Tombées d’étoiles monotones et d’une Lune désespérée.

    Quand la Lune se renouvelle et s’en va pour une semaine,
    Pascale alors sort sa roulotte pour vendre sa compilation.
    « La Lune, la Lune nouvelle ! Profitez de la bonne aubaine ! »
    Crie-t-elle dans un éclat de glotte aux poètes sans inspiration.

    Tableaux de Lisandro Rota sur http:www.lisandrorota.itgalleria-2-dal-2003-al-2010 .

  • Le week-end de Pascale

    Vendredi-saint, prenant son bain avec les carpes qui dégorgent,
    Pascale explore sa baignoire car, au fond, elle n’est pas si bête.
    Après une semaine de turbin, viendra demain son ami Georges
    Avec qui, vêtant son peignoir, elle prévoit de faire la fête.

    Le samedi, elle pique une tête avec Jojo dans la piscine ;
    La cuvette est ainsi nommée pour amplifier leurs ébats
    Qui virent vite à la tempête qui secoue bien fort la bassine
    Et qui étend leur renommée deux ou trois étages plus bas.

    Dimanche enfin, portes ouvertes, elle étend un soleil radieux
    Chauffé toute une nuit d’amour au bain-marie dans la cuisine.
    Après toutes ces découvertes, il est temps de se dire adieu ;
    Jojo s’en va au petit jour et Pascale repart à l’usine.

    Tableaux de Lisandro Rota sur http:www.lisandrorota.itgalleria-2-dal-2003-al-2010 .

  • Les vieux miroirs infidèles

    Les vieux miroirs infidèles

    Méfiez-vous des vieux miroirs pleins de poussière dans vos greniers !
    Certains retardent, certains avancent et ainsi déforment le temps ;
    D’autres perdus au fond d’un tiroir ou encore au fond d’un panier
    Le ralentissent en connivence ou le renversent à contretemps.

    Si vous vous y voyez plus grand alors ils altèrent l’espace ;
    Si vous paraissez plus petit, c’est dû à leurs points d’inflexion.
    Quoi qu’il en soit, il est flagrant que leurs distorsions se surpassent
    Et que sous leurs tains aplatis se cachent de fausses réflexions.

    Ainsi les vieux miroirs déclinent et réfléchissent distraitement ;
    Ils perdent la mémoire, en outre, oublient ce qu’il faut renvoyer
    Car avec l’âge, la vitre s’incline de moins en moins discrètement.
    Faites attention à ces jean-foutres qui ne font que vous fourvoyer !

    Illustration de Jérémie Almanza.

  • L’étang de la réflexion

    L’étang de la réflexion

    J’aime jouer d’anamorphoses à la surface de l’étang
    Comme des miroirs déformants qui ne sont pas si infidèles.
    Souvent dans ces métamorphoses, ridées par quelques mauvais temps,
    Évoluent des poissons dormants entre fonds de sable et ridelles.

    J’y pêche des images en 3D surgies de tous ces hologrammes
    Qui se répètent en motifs qui s’apparentent à de la moire.
    Il s’en dégage des dégradés émergeant des stéréogrammes
    Comme un souvenir émotif qui remonte de ma mémoire.

    Ce ne sont que des incidences ! me dit-on la plupart du temps
    Et de trop d’imagination, je devrais plutôt m’abstenir.
    Mais je n’y vois que coïncidences ; non pas l’erreur du débutant
    Mais plutôt l’accumulation d’indices sur mon avenir.

    Illustration de Nadezhda Illarionova sur https:www.artstation.comartworkkrP1z .

  • Parle-moi de toit

    Parle-moi de toit incliné, parlez-moi de voûte en plein cintre,
    Parle-moi de tes chiens assis, parlez-moi de vos beaux clochers !
    J’aime voir l’esprit décliné, coloré à l’âme du peintre
    Et exposé sur un châssis de toile brute effilochée.

    Entre le cœur et la raison, s’établit une architecture
    Qui parfait le corps féminin et le porte sur le toit du monde.
    Ce parallélisme « maison » entre la femme et la toiture
    M’est apparu simple et bénin dans une vision vagabonde.

    Mesdames, ne tournez pas le dos à cette image terre-à-terre
    Car j’ai placé l’intelligence et votre pensée féminine
    Devant ce lever de rideau que la nature vous confère
    Et qui vous élève d’exigence au-dessus des lois masculines.

    Illustrations de Tran Nguyen.

  • Mon dimanche des rameaux

    Pour célébrer l’arbre de vie qui bourgeonne tous les printemps
    Dans ma structure végétative abreuvée du sang de la Terre,
    Mes os pleurent de synovie en honneur à la nuit des temps
    Et à l’aube commémorative de ma lignée humanitaire.

    Greffé de l’arbre de connaissance qui a mûri sous les étoiles,
    J’en ai goûté l’humidité comme un eau-de-vie fondatrice
    Et j’en tisse en reconnaissance cet humble vêtement de toile
    Qui transforme ma nudité en fontaine fécondatrice.

    Avant-hier j’étais minéral, ma vie était d’année-lumière ;
    Hier j’étais encore végétal, nourri au sein des fleurs du mâle.
    Ce matin le puits sidéral qui coule de ma moelle épinière
    A transmuté tous mes pétales en nouvelle flore animale.

    Tableaux de Keith Perelli sur https:supersonicart.compost79969072754keith-perelliamp .

  • Prête-moi tes étoiles

    Prête-moi tes étoiles

    Souvent, lorsque j’écris un mot, je délaisse un instant ma plume
    Et ouvre sur ma feuille blanche une fenêtre détachée
    Pour activer la dynamo de l’intuition à plein volume
    Qui, par l’orifice, me branche sur l’histoire qui m’était cachée.

    Les mots surgissent en couleurs comme pluie d’étoiles filantes
    Et me font découvrir un ciel lumineux sur des vers en friche.
    La mécanique sans douleur de l’esprit redevient détente
    Qui ne contrôle que l’essentiel en y plaçant des rimes riches.

    Illustration d’Akira Kusaka sur https:akira-kusaka-illustration.tumblr.com .

  • Concerto pour pissenlits

    Concerto pour pissenlits

    Toutes ces notes, d’un air soufflé par une bouche printanière,
    Transmettent l’accord harmonieux aux graminées dociles à sol.
    Qui, elles-mêmes, vont insuffler l’inspiration et la manière
    D’offrir un chant cérémonieux dédicacé aux tournesols.

    Ainsi pensé-je aux dandelions et à leurs croches vaporeuses
    Par leur effet boule-de-neige sur l’ensemble de la prairie
    Qui va semer la rébellion auprès des plantes valeureuses
    Qui participeront au manège dans une florale frairie.

    Tableau de Roman Velichko.

  • Vois comme l’oiseau !

    L’œil du corbeau est goguenard, suite à l’histoire du renard
    Qui l’a d’un fromage abusé et s’est de sa voix amusé.
    Grâce à son expérience acquise, il conseille Madame la Marquise
    À ne pas se laisser leurrer par des valets trop délurés.

    L’œil du flamand pourtant morose permet de voir la vie en rose
    À cause d’un cou en question en forme d’interrogation.
    Il sert avec délicatesse les vœux de Madame la Comtesse
    Et, sait comment lui retourner éloges et hommages bien tournés.

    L’œil de la colombe pacifiste s’accorde avec tous les sophistes
    Qui brandissent leurs drapeaux blancs quand il le faut, sans faux-semblants.
    Entre la paix et la sagesse, elle offre à Madame la Duchesse
    Un regard doux condescendant envers ses nombreux prétendants.

    Photos de Flóra Borsi sur https:www.2tout2rien.frdes-auto-portraits-avec-des-yeux-danimaux-par-flora-borsi .

  • L’œil domestique

    Domestiquer un animal dépend de la bête sauvage
    Qui va choisir de se soumettre ou de dominer au besoin.
    Le chat adopte un demi-mal et, sans tomber en esclavage,
    Cherchera à supplanter son maître et lui piquer ses meilleurs coins.

    Mais pour le chien, aucun problème, il est tout à son avantage ;
    Il est content, remue la queue du moment qu’il vous accompagne.
    Une créature qui, sans dilemme, gardera vos biens et davantage,
    Mordant le voleur belliqueux qui viendrait nuire à vos compagnes.

    Le chaud lapin est infidèle et donc difficile à dresser
    À moins d’avoir mille lapines vacantes dans son marigot.
    Il faut lui tenir la chandelle, l’avoir à l’œil pour redresser
    Ses tendances qui galopinent à niquer à tire-larigot.

    Photos de Flóra Borsi sur https:www.2tout2rien.frdes-auto-portraits-avec-des-yeux-danimaux-par-flora-borsi .

  • Quelque part au centre des arbres

    Quelque part au centre des arbres

    Semblable au télégraphe optique, le soleil parle à la forêt
    Par l’alphabet arboricole que la nature garde secret.
    Sans doute existe un œil magique dont l’acuité élaborée
    Permet aux terres agricoles d’en connaître le sens sacré.

    Bien sûr, je capte ces messages sans les comprendre toutefois
    Mais je sais que la Terre écoute, reste attentive et informée
    Sur le temps qui est de passage mais qui explique à chaque fois
    Que si les nuages dégouttent, c’est pour pouvoir la transformer.

    Tableau de Claude Monet.

  • La nuit au musée

    La nuit au musée

    Les grands maîtres improvisateurs avaient laissé pour s’amuser
    La liberté à leurs modèles de pouvoir tenter l’aventure.
    Lorsque le dernier visiteur a enfin quitté le musée
    Les Vénus tiennent la chandelle aux amourettes en peinture.

    Sans vergogne, les naturistes se mêlent avec les beaux habits
    Dans des rassemblements grandioses avec agapes bien nourries.
    En revanche, les miniaturistes d’un bien plus petit acabit,
    Préfèrent rester en symbiose avec les rats et les souris.

    Car les animaux participent à cette parade de nuit
    Tous profitent du même droit selon sa muséologie.
    Même les enfants s’émancipent et chacun tromper son ennui
    En changeant quelquefois d’endroit lorsqu’il regagne son logis.

    Tableau de Conor Walton.

  • Impudiques regards

    La femme-grue empanachée observe du bout de ses seins
    Mais ferme ses yeux impudiques de peur de révéler son âme
    Et lance un esprit détaché relatifs aux sombres desseins
    De ses visiteurs sporadiques qui viennent entreprendre la femme.

    Regards croisés dans les harems dont les seins indiscrets se croisent
    Car ils s’évaluent du regard autant du cœur que la raison.
    Ainsi le corps sert de barème et de graduation grivoise
    Pour amener le mâle hagard à la maîtresse de maison.

    Vous, petites saintes nitouches, qui entraînez à la fenêtre
    L’effet de vos visions mammaires qui guettent le héros olympien,
    Fermez les yeux, ouvrez la bouche, sentez votre pouvoir renaître
    Quand votre corps devenant mère deviendra regard œdipien.

    Illustrations de Willy Maltaite extraites de l’album « Le jardin des couleurs ».

  • La faim du monde

    La pyramide des saveurs n’a jamais été étudiée ;
    Pourtant le goût est important, vu qu’il nous met l’eau à la bouche.
    Le goût est-il une faveur, un privilège dédié
    Ou une offense se rapportant au sacrilège qui en débouche ?

    Or l’arbre de la connaissance n’était qu’un péché végétal
    Tandis que tuer de pauvres bêtes est un pouvoir de droit divin.
    Nous apprenons à la naissance à maîtriser ce droit létal
    Grâce à notre esprit de conquête sur les ovins et les bovins.

    Ne soyons pas plus royalistes que Notre Seigneur Carnivore
    Qui nous fait manger de sa chair et même boire de son sang.
    Mais ne soyons plus fatalistes et si le démon nous dévore
    Tuons ces petits êtres chers car nous sommes les plus puissants.

    Tableaux de Henri Rousseau.

  • Tempête d’étoiles

    L’Europe sème ses étoiles sous l’ombre immense que le taureau
    Étend au cours de leur voyage vers la liberté de s’aimer.
    Soudain quelque chose se voile au-dessus des champs pastoraux ;
    On entend comme un mitraillage dans le firmament clairsemé.

    Sans doute Zeus qui s’est trahi car il s’était dissimulé
    Sous l’apparence d’un taureau et s’est pris un coup asséné
    Par la belle Europe ébahie de s’être fait manipuler
    Par des stratagèmes immoraux sans cesser de l’ morigéner.

    Europe sème désormais ses quelques étoiles en solitaire
    Et se refuse à tous les dieux qui font des plans sur la comète.
    Elle restera vierge à jamais et Zeus lui sera tributaire
    D’une rente au montant dispendieux qu’assidûment il lui soumette.

    Illustration de Valera Lutfullina

  • Poussière d’étoile

    Je cherche les nuits alchimiques où l’air, chargé de météores,
    Permet aux âmes en errance de redevenir persistantes.
    Dans l’atmosphère cyclothymique, les voix qui s’expriment au-dehors
    Prennent soudain une apparence de nitescences intermittentes.

    Si je décompose un éclair qui jaillit et zèbre le ciel
    Avec ses flammes de cristal qui s’échangent entre terres et nues,
    Je vois les feux follets bleu-clair d’un flambeau accrémentitiel
    Agité par une vestale vers des anges circonvenus.

    La Terre agit comme un aimant d’impact météorologique
    Dont l’énergie qui ascensionne porte ses souffrances et ses cris.
    Bien sûr la science dément ce phénomène liturgique
    Et les religions n’en mentionnent aucun écho dans leurs écrits.

    Illustration de Charles Vess pour le roman de Neil Gaiman

  • Pervers Noël

    Pervers Noël cache son jeu toute l’année à l’atelier
    En créant des contrefaçons de nos voitures électriques.
    Bien sûr, nous connaissons l’enjeu de ce bonhomme fou à lier :
    Attirer filles et garçons par ses tendances égocentriques.

    Les poupées qui disent « Maman ! » conditionnent les petites filles
    À souhaiter très rapidement pouvoir rencontrer les garçons,
    Ceux-là même qui, innocemment poussifs à l’esprit de famille,
    Sont amenés perfidement à jouer dans leurs caleçons.

    Pervers Noël qui sévissait les nuits de décembre dans les rues
    A enfin été arrêté par la police persévérante
    Pour les crimes qu’il assouvissait et ce matin a comparu
    Devant le juge décrété suite aux plaintes proliférantes.

    Tableaux de Matt Watts

  • La couleur de l’amour

    Bleu comme la première nuit qui rendit l’amour électrique ;
    Nos premiers frissons qui parcourent nos corps sensibles et tendus.
    Bleue comme l’aurore qui luit au petit matin féérique
    Sur deux amoureux qui concourent à figer le temps suspendu.

    Blanc comme la deuxième nuit qui rendit l’amour éternel ;
    Nos premiers baisers qui apaisent cette soif de nous reconnaître.
    Blanche comme la liqueur qui fuit de par l’organe maternel
    Qui accueille celui qui la baise de l’envie d’un enfant à naître.

    Rouge comme la troisième nuit qui rendit les amours fécondes ;
    Nos premières cellules échangées pour le meilleur et pour le pire.
    Rouge comme la vie qui se poursuit dans la matrice rubiconde
    Où pulse à l’abri du danger un petit ange qui soupire.

    Illustrations de Lorenzo Mattotti

  • La plume de l’ange

    Le temps passait seul, sans son ange qui n’avait pu se libérer
    Et j’écrivais à cœur perdu, l’esprit crissant sur le papier.
    Lorsque dans la lumière orange d’un crépuscule réverbéré,
    Une plume blanche, éperdue, vint atterrir juste à mes pieds.

    La nuit était-elle tombée ou était-ce entre chien et loup ?
    Toujours est-il qu’un ange blanc se posa à proximité.
    Et moi bien sûr, j’ai succombé, ce qui rendit le temps jaloux
    Qui suspendit l’ange tremblant entre deux airs illimités.

    J’ai pris sa plume que j’ai trempée à l’encre d’une nuit sans Lune
    Et j’ai raconté cette histoire du temps et de l’ange qui passent.
    Plaise au lecteur que j’ai trompé avec cette idée opportune
    Qu’il prenne conscience notoire de mes errances dans l’espace.

    Illustration d’Andrej Mashkovtsev

  • Miss Caméléonne

    Sans doute un prénom qui déteint sur ses tenues vestimentaires
    Tant celles-ci sont assorties aux murs de son appartement.
    Quant à ses cheveux et son teint, également complémentaires,
    Ils s’adaptent à chaque sortie au ton de ses emportements.

    Point ne s’arrête son mimétisme à sa peau et ses vêtements ;
    En effet tout son caractère prend la couleur de l’air du temps.
    Conséquence du magnétisme de la Terre et ses éléments
    Sur cette fille pleine de mystères mais qui se dévoile pourtant.

    J’ai connu Miss Caméléonne au cours d’une de mes tournées
    Celle-là même la plus étrange, je dirais même atmosphérique.
    Elle venait de Sierra Leonne et, le soir en fin de journée,
    Elle prenait la couleur orange d’un coucher de soleil d’Afrique.

    Tableau de Louis Treserras sur http://wombart.net/emotion-research-by-louis-treserras

  • L’œil, l’expression et l’impression

    L’œil, miroir indiscret de l’âme, reflète mon étonnement
    Devant tout ce que je découvre et que j’ai du mal à comprendre.
    Mais il trahit souvent la flamme dont fuse le rayonnement
    Des raisonnements que j’entrouvre sur le peu que j’ai pu apprendre.

    L’œil, sentinelle défensive, explore mon environnement,
    Attentive à ce qui se passe derrière son intime frontière.
    Parfois elle se montre offensive pour pallier le foisonnement
    Des imprévus qui la dépasse et la font trembler tout entière.

    L’œil, porte-parole du cœur, exprime mes ressentiments
    Comme les joies et les pressions sur ce que j’ai envie de vivre.
    Il sait occulter mes rancœurs, mes craintes et mes sentiments
    Et ne renvoie que l’expression de mon intérieur comme un livre.

    Illustrations de Jean-Pierre Gibrat

  • Réflexions lunaires

    J’aime ma fenêtre propice aux réflexions fort opportunes
    De son miroir qui me démontre sa silencieuse complétude
    Au seuil des meilleures auspices que m’envoie un rayon de Lune
    Qui perce et qui vient à l’encontre de mon cœur chargé d’inquiétudes.

    Lune, Ô ma Lune taciturne, que me révèle l’avenir
    À travers la neige qui tombe d’une incertitude impassible.
    J’en appelle à l’astre nocturne dont le halo sait convenir
    À m’indiquer ce qui m’incombe dans la nuit de tous les possibles.

    C’est l’heure où je vais me coucher, lorsque le temps se superpose
    Que m’apparaît la direction vers laquelle je dois lâcher prise
    Je laisse mon cœur accoucher du germe que le jour dépose
    Quand le soleil en érection m’illuminera sans surprise.

    Illustrations de Jean-Pierre Gibrat

  • Sol’œil couchant sur mer de larmes

    J’aime l’iris à l’horizon du soleil qui cligne de l’œil
    Lorsqu’il me darde un rayon vert pour me souhaiter bonne espérance.
    Et quand la Terre est en prison de ses souffrances et ses écueils,
    Il ouvre en grand tout l’univers ravivant sa persévérance.

    Observez les yeux dans les yeux le regard de l’astre couchant
    Qui reflète l’âme de Dieu et ses voies incommensurables.
    Souvent clément et merveilleux, parfois terrible, effarouchant,
    Mais toujours miséricordieux envers nos conflits incurables.

    Tableau d’Alexander Grey

  • L’attente gauloise

    L’attente s’en va en fumée sans rien laisser qu’un peu de cendres
    Sur lesquelles le temps soufflera vers une amnésie dominante.
    Juste des pensées consumées par l’esprit qui aime descendre
    Vers le cœur qui m’insufflera l’espoir d’une fin imminente.

    L’attente cesse brusquement, le train de vie reprend son cours
    Qui m’emporte avec mes pensées que j’enferme dans ma valise.
    Mon rêve né fantasquement soudain n’est plus d’aucun secours
    Mais j’y reviendrai dépenser d’autres absurdes psychanalyses.

    Illustration de Jean-Pierre Gibrat

  • À la recherche de Dame Nature

    Difficile de se représenter Dame Nature concrètement ;
    Sans doute faut-il l’imaginer lorsqu’elle était vierge et nubile.
    Mais étant moi-même exempté de remonter discrètement
    Dans mon génome enraciné dans l’ADN, c’est difficile.

    Pourtant dans mes rêves éveillés, j’ai aperçu ma créatrice
    Naissant elle-même du néant, laissant le champ libre aux envies.
    Dans cet Éden émerveillé, elle a établi sa matrice
    Pour créer terres et océans pour, enfin, abriter la vie.

    Un jour, elle s’est mise en couleurs – c’était là son premier printemps –
    Et accordé le sacrifice de sa nature alimentaire
    Pour accoucher dans la douleur deux humains âgés de vingt ans
    Dont je suis à moitié leur fils et à moitié fils-de-la-Terre

    Créations de Kathryn Blake sur https://www.artstation.com/artwork/Z53mnm

  • Du côté des belles dames du temps jadis

    J’aime déshabiller le temps et lui ôter la carapace
    De la vieillesse dont il enduit la peau des beautés éphémères.
    Mot fugitif, presque insultant, qui évoque le temps qui passe
    Et qui tristement éconduit le souvenir de nos grands-mères.

    Le curseur du temps dans leurs rides où sont gravées leurs émotions
    Fait chanter l’écho de leurs cœurs avec une ardeur impatiente.
    Combien de jours, de nuits torrides, avec l’amour en promotion
    Ont induit les rires moqueurs de leurs jeunesses insouciantes ?

    Les belles dames du temps jadis, quelque part immortalisées
    Par les vibrations de leurs âmes qui pulsent en ondes maternelles,
    Pour que jamais ne s’affadissent leurs présences cristallisées,
    Nous ont intégré ce sésame comme une intuition éternelle.

    Photos de Marie Doro, Maude Fealy, Ione Bright & Paulette Navier

  • En quête d’ailleurs

    Je suis en transit dans ce monde où je n’accepte nulle attache
    Et où j’attends à chaque instant de sauter dans un train qui passe.
    Mais cela ne prend qu’une seconde ; si ma vigilance s’en détache
    Je reste suspendu au temps et reste coincé(e) dans l’impasse.

    Or, si je n’ai pour tout bagage que le sac de mes souvenirs,
    Si je ne porte que l’habit de mes connaissances acquises,
    Alors aussitôt je dégage et prends le train de l’avenir
    Vers des gens de mon acabit selon mes qualités requises.

    Illustrations de Jean-Pierre Gibrat

  • Réflexions au fil de l’eau

    Toutes ces gouttes au fil de l’eau pareilles au flot de mes pensées,
    Pareilles au flux du genre humain, pareilles aux nuages qui passent,
    Partent dans l’oubli, à vau-l’eau, un autre cycle où dépenser
    Leurs vies vers un nouveau chemin, nouveau monde et nouvel espace.

    Qu’il est hypnotique l’effet de l’existence qui s’écoule
    Et qui m’attire comme un aimant de ressentiments magnétiques !
    Sans doute vers l’univers des fées d’où ma propre magie découle
    Et qui revient comme un amant sentimental et pathétique.

    Illustration de Jean-Pierre Gibrat

  • Les couronnes des reines

    Après avoir tiré les Rois, on continue avec brio
    À se préoccuper des reines non pas vraiment pour les tirer
    Mais les honorer toutes les trois puisqu’elle forment un trio
    Dont l’association pérenne est assidûment désirée.

    Commémorons Épiphanie, Reine magicienne oubliée,
    Puis consacrons la Chandeleur, Reine des crêpes et des chandelles !
    Célébrons enfin Stéphanie, Reine qui n’a rien publié
    À ce jour mais dont la valeur reviendra comme l’hirondelle !

    Que feront les reines au printemps ? Elles prendront leurs quartiers d’été
    Bronzer de Pâques à l’Assomption jusqu’en automne, fin des vacances.
    Puis elles reviendront en leur temps avec leurs trois rois répéter
    Contre toutes nos présomptions, les mêmes faits sans conséquences.

    Tableaux de Georgia Th sur https://justlikehopey.tumblr.com/post/114981137204/georgia-th/amp

  • Les voyages perpétuels

    À la ville, comme à la campagne, les cœurs solitaires s’assemblent
    Pour trouver un terrain d’entente et pour naviguer de conserve.
    Ainsi, compagnons et compagnes cherchent la voie qui leur ressemble
    Et répondra à leurs attentes et à ce que l’avenir réserve.

    Tous les voyages sont chaotiques – on dit qu’ils forment la jeunesse –
    Et l’amour n’aime ni la routine ni le quotidien ressassé ;
    Il se cherche un milieu biotique pour s’épanouir en finesse
    Afin que ses fruits s’agglutinent sur les tuteurs entrelacés.

    Alors les cœurs partent en voyage sur de grandes lignes érotiques
    Ou pour dormir en wagon-lit ou batifoler en croisière.
    Et puisque l’amour n’a pas d’âge, vers une retraite exotique,
    Ils s’aimeront à la folie sur le chemin du cimetière.

    Car l’amour ne s’arrête pas là où la mort figure une escale
    Mais il repart en fusionnant pour procréer un nouvel être.
    Ni Paradis, ni Walhalla, ni aucune évasion fiscale,
    Mais un retour occasionnant des épopées au kilomètre.

    Illustrations de Pascal Campion sur https://positivr.fr/pascal-campion-dessins-couple/?amp

  • La revanche du bonhomme en pain d’épice

    Révolution chez les amantes, les laïques et les religieuses !
    Les bonhommes ne perdent plus la tête pour une partie de jambes en l’air.
    À moins qu’on ne nous le démente par une pirouette prodigieuse,
    Ils sont partis à la conquête des droits dont ils sont titulaires.

    Désormais, pour la parité, ils goûtent avant d’être mangés
    La garniture dont ils enrobent les vêtements de leurs promises.
    Tandis qu’en solidarité, lorsque le tout est mélangé,
    Elle ôte et lui offre sa robe comme si elle lui était soumise.

    Après qu’il eut été mangé, croqué et sucé jusqu’à l’os,
    Il ne resta plus que la tige de ce bonhomme en pain d’épice.
    C’la dut alors la démanger, la fille, de s’enfiler gratos,
    En coupant court à tout litige, son petit bâton de réglisse.

    Tableau de Nicoletta Ceccoli sur https://vigilantcitizen.com/latestnews/disturbing-mkultra-and-child-abuse-paintings-displayed-on-billboards-in-italy

  • L’entre deux mondes

    Monde intérieur imaginaire qui me rappelle d’où je viens,
    Qui fait sonner les expériences acquises de mes vies antérieures.
    J’aime tant son imaginaire qu’à travers lui, je me souviens
    De l’écho d’une clairvoyance vers l’itinéraire ultérieur.

    Monde extérieur immatériel car j’appréhende sa matière,
    Sa dureté et ses dangers à jamais de moi différents.
    Pourtant l’organe sensoriel qui me fait vivre tout entière
    Lui est à la fois étranger et cruellement afférent.

    Je suis ce monde intermédiaire, je suis assis sur la fenêtre
    Avec la peur de basculer dans un destin irréversible.
    Comme une question subsidiaire qui me décidera à naître
    Pour une vie immaculée de mes mémoires inaccessibles.

    Illustration de Jean-Pierre Gibrat

  • L’amante religieuse en herbe

    Comme il faut bien qu’elle s’habitue,
    les bonhommes en pain d’épice
    Sont principales gâteries
    qui enchanteront sa jeunesse :
    « Je te grignote et je te tue
    à petit bout mais sans malice ;
    J’aime ta camaraderie
    et ta saveur toute en finesse ! »

    Elle chantonnait cette comptine
    en dégustant chaque bouchée
    De ses petits amis sucrés
    à la tête aromatisée.
    Petite habitude enfantine
    qui allait plus tard déboucher
    Sur une litanie consacrée
    à ses victimes traumatisées.

    Comme elle n’a pas beaucoup d’amis,
    elle prend son déjeuner au lit
    De la rivière au chocolat
    en compagnie de ses copains ;
    Pour ne pas avoir d’ennemi,
    elle va au bout de sa folie
    En grignotant sans tralala
    sa bonne bouille en massepain.

    Dans son école des Nougatines
    de l’ordre des Saintes Amantes,
    Elle apprendra l’anatomie
    et le meilleur côté des hommes :
    Leurs têtes en chocolatine
    battues dans du thé à la menthe,
    Bases de la gastronomie
    inscrite dans ses chromosomes.

    Tableaux de Nicoletta Ceccoli sur https://ilmondodimaryantony.blogspot.com/2013/08/gli-incubi-celesti-di-nicoletta-ceccoli.html ainsi que sur https://www.irancartoon.com/site/artists/nicoletta-ceccoli

  • Nourrir son imaginaire

    Nourrir son imagination exige en guise d’introduction
    Un sens aussi vrai qu’un mensonge qui grandira avec le temps.
    Le cœur d’enfant en gestation développera son addiction
    Avec des rêves et des songes qui se bousculent à contretemps.

    Bien sûr, au train où vont les choses, son appétit grandit encore,
    Devient de plus en plus exigeant et tout son cœur s’en réconforte.
    Le plaisir se métamorphose en lui transformant tout son corps
    Et son esprit intransigeant envers des émotions plus fortes.

    Au printemps, premières amours, tout son être s’épanouit
    Mais dès qu’on lui pose un lapin, l’imagination se rebiffe.
    Elle se console non sans humour sur ses désirs évanouis
    Avec un pignon de sapin pour un besoin impératif.

    Tableaux de Nicoletta Ceccoli sur https://ilmondodimaryantony.blogspot.com/2013/08/gli-incubi-celesti-di-nicoletta-ceccoli.html

  • La porte intérieure

    Nouvelle Lune de l’année, la porte reste verrouillée
    Suite à on ne sait quel dilemme qui l’avait maintenue bouclée.
    Elle semble vraiment condamnée – d’ailleurs ses gonds sont tous rouillés –
    Pourtant ce n’est plus un problème car on a égaré la clef.

    Mais cette nuit de pleine Lune, six jeunes filles en robe blanche
    Ont accompli le rituel de l’ouverture de la porte.
    Sans autre procédure aucune, on entendit craquer les planches
    Selon le sens spirituel que le chant consacré comporte.

    Une fois la porte entrouverte, les jeunes vierges sont entrées
    Dans le mystère et le silence de la foret du bois-des-chênes.
    Puis la clairière s’est recouverte de ronces tellement concentrées
    Qu’on en a omis l’existence et ce, jusqu’à l’année prochaine.

    Illustration d’Olga Baumert

  • L’amour verdurera

    Partout l’amour verdurera dans la nature déflorée
    Quand le printemps réveillera campagnes, vallées et forêts !
    Partout la vie bourgeonnera et fera jouir les fleurettes
    Que la pluie badigeonnera d’eau fraîche sur les collerettes.

    Revivront d’amours végétales les nouveaux rameaux érectiles
    Qui exposeront leurs pétales autour de leurs pistils fertiles.
    Et mûriront les fruits bénis par d’indispensables abeilles,
    Petites fées dont le génie nous remplit de vie les corbeilles.

    Tableau d’Igor Morski sur https://www.espritsciencemetaphysiques.com/illustrations-controverse-dun-artiste-polonais-revelent-cote-noir-de-societe-moderne.html

  • Ma vie en couleurs

    Je vis en vert la nuit, le jour, entre le cœur et la raison ;
    Quant au blues et aux bleus de l’âme, je les mets en périphérie.
    Qu’il est utopique, le séjour d’un poète resté à la maison
    Qui écrit sur le cœur des femmes dans les bras de son égérie !

    L’égérie voit la vie en rose car, après tout, c’est là son rôle
    Et reste jaune très longtemps dans une jeunesse éternelle.
    Elle a sauvé mon cœur morose – je vous en donne ma parole –
    Qui vit un retour de printemps de ses amourettes charnelles.

    Le soir, ma femme devient violette, comme la couleur des montagnes
    Où la Chèvre de Monsieur Seguin s’enfuit en quête d’aventures.
    Je sèche mon encre obsolète dans l’encrier de ma compagne
    Pour qui j’ai l’éternel béguin au parfum de littérature.

    Photos de Julius Ise sur http://blog.julius-ise.de/colorgames

  • Le choix du Roy

    Le Roi possède tous les droits et c’est normal, il est le Roi ;
    Il est aussi de droit divin né de la cuisse de Jupiter
    Ou de n’importe quel endroit, cheville gauche ou genou droit,
    Quoi qu’il en soit, quoi qu’il advint, le Roi est Maître, pas de mystère !

    La Reine ne possède rien et c’est normal, elle est la Reine
    Mais elle règne dans son lit surtout quand le Roi n’est pas là ;
    Lorsqu’il part chasser les vauriens de ses provinces souveraines,
    Elle y accueille à la folie tous ses amants sans tralala.

    La courtisane fléchit le Roi ; c’est normal, c’est la plus jolie
    Que le Roi séduit sans retard car, des folies, il n’en a guère.
    Là, bien serrés, tout à l’étroit, Il oublie sa mélancolie
    Et lui fait deux ou trois bâtards qui, plus tard, iront à la guerre.

    Les autres cartes font les corvées ; c’est normal elles n’ont aucun titre
    Sinon leurs chiffres décarrés qui tiennent lieu de patronyme.
    Parfois les As sont réservés à faire jouer leur libre arbitre
    Lorsqu’ils s’annoncent en carré d’un consentement unanime.

    Tableaux de Jake Baddeley sur https://www.jakebaddeley.com/collection/paintings/paintings-2007

  • Danse autour du marais salant

    Te souviens-tu, esprit de sel, quand ton âme a quitté ton corps
    Pour s’enfoncer en haute mer vers les abysses ténébreuses ?
    Puis ton fantôme universel peu à peu s’est mis en accord
    Avec l’élément outremer happé par d’essences fibreuses.

    Et tu t’es matérialisée, déesse du marais salant
    Qui danse sur la fleur de sel dans sa métamorphose rose.
    Et puis tu t’es cristallisée dans des fragrances exhalant
    Ce goût divin qui ensorcelle ma soupe et tellement de choses.

    Image trouvée sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue. Si l’auteur de cette image reconnaît son travail, je serai heureux d’en mentionner le nom avec respect.

  • Petit déjeuner au chat

    Au saut du lit je me détends, je m’étire et je me toilette,
    Puis je prépare guilleret mon petit-déjeuner sacré.
    Le rituel se répétant mais sans devenir obsolète,
    Je lui consacre tout l’intérêt des aliments salés-sucrés.

    Tasse de lait dès potron-minet, la première gorgée me sourit.
    Quelques tranches de jambon fumé pour une première mise en bouche
    Que j’ai à peine terminée que je hume sur la cuisinière
    Une omelette parfumée à l’ail des ours et des souris.

    Mais voici que mes maîtres grognent et m’envoient illico presto
    Redescendre au plancher des vaches pour je ne sais quelle raison.
    Alors tant pis, je me renfrogne et abandonne mon resto,
    Puis avec un air de bravache, je m’enfuis hors de la maison !

    Tableau de Kenne Gregoire

  • La soupe à la grimace

    Mon œil, que Marianne soit soumise à ceux qui prétendent épouser
    Ses formes courbes et ses réformes et s’adapter à ses valeurs
    Quand elle se révèle promise à un avenir piquousé
    De rappels pénibles et conformes à plusieurs années de malheur.

    J’ai un mauvais goût dans la bouche à force de m’être alléché
    Aux beaux discours des candidats qui sont devenus mes bourreaux.
    Je crains que la France n’accouche de lois qui me font trébucher
    Dans un ersatz de corrida où j’ai le rôle du taureau.

    Alors si je tire la langue, ce n’est pas par impolitesse
    Mais par fatigue accumulée à subir les mêmes erreurs
    Que l’on m’impose et me harangue à force d’indélicatesses
    Par les médias assimilés à la seule voix de la terreur.

    Tableaux d’Annica Klingspor sur https://ello.co/annicaklingspor

  • Les cœurs en carême

    Après les fêtes on récupère les cœurs demeurés solitaires ;
    On les purge et on les décrasse de toutes mauvaises pensées.
    On les récure et l’on repère les endurcis célibataires
    Afin qu’il ne reste nulle trace de vieilles douleurs expansées.

    Puis on recoud les cœurs brisés, c’est le travail du cœurdonnier
    Qui rafistole les blessures et les fractures du myocarde.
    Une fois qu’ils sont cicatrisés, on les confie aux façonniers
    Qui vont effacer les sutures et rentoiler le péricarde.

    Puis on repeint les cœurs moroses avec la couleur du bonheur
    Qui élimine les bleus de l’âme sous plusieurs couches de vernis.
    On les parfume à l’eau de rose, on les cite au tableau d’honneur
    Et on galvanise à la flamme les carapaces qui ont terni.

    Enfin les cœurs, entrés en cure, passent en thalassothérapie
    Et ne se nourrissent que d’amour durant trois ou quatre semaines.
    Après un temps de sinécure et de kinésithérapie,
    Ils sont remis au goût du jour pour vivre une expérience humaine.

    Illustrations de Heinz Geilfus

  • La route de Samarcande

    Parfois la route de la soie se joue de méandres en lacets
    Qui donnent un peu le mal de mer mais qui valent bien le coup d’œil.
    Il faut garder par devers-soi tous ces virages entrelacés
    Qui apportent un goût doux amer dans un voyage sans écueil.

    Et puis Samarcande apparaît se découpant sur ciel d’azur
    Et ses mosquées, ses mausolées, médersas ornées de faïence.
    L’inquiétude alors disparaît et change au fur et à mesure
    Les appréhensions désolées pour un sentiment de vaillance.

    Illustration de Thomas Thiemeyer

  • Le baiser du dieu-paon

    L’amour est une dimension de l’espace-temps métaphysique
    Dont la lumière a pour valeur l’intensité de l’intention
    Avec deux pôles en extension aux méridiens géodésiques
    Qui en transmettent la chaleur et les couleurs de sa tension.

    Du féminin incandescent au masculin vif et ardent,
    La synergie devient divine dès qu’un baiser est échangé.
    L’univers n’a rien d’indécent quand ses étoiles vont s’attardant
    Vers un trou noir où se devine un futur Big-Bang louangé.

    bodypainting & photos de Bella Volen sur https://bella-volen.com/fine-art-body-painting.html

  • Z’animaux

    D’une lointaine descendance avec Noé et Emzara,
    La Reine Rouge sur son trône surveille la montée des eaux
    Tandis que son chat violet pense à l’aubaine d’un bon débarras
    Pour les chienchiens à leurs patronnes et leurs délits de sale museau.

    Alors on trie de préférence les animaux de compagnie ;
    On vire les hippopotames, les affreux et les déficients ;
    On choisit avec déférence sans faire de zoomanie
    Ceux qui plaisent à Monsieur-Madame et les distraient à bon escient.

    Lui, n’a gardé qu’un chat qui fume en robe noire de havane ;
    Elle, n’a pris qu’un rhinocéros pour un usage cosmétique
    Dont elle abuse et se parfume tandis qu’à côté se pavane
    Une grenouille dont l’air féroce n’est avant tout qu’hypothétique.

    Illustrations d’Enki Bilal