Catégorie : Sirènes

  • Sirènes en mer noire

    Sirènes en mer noire

    Après le détroit du Bosphore, en remontant vers Odessa,
    Les eaux deviennent bouillonnantes mais ce n’est pas de la chaleur.
    Illuminées par le phosphore des poissons dansant la salsa
    Les sirènes tourbillonnantes dans un trio font un malheur.

    La première, pieds et mains liés, entièrement gobée par un thon ;
    La deuxième juchée par-delà la meute des poissons-volants ;
    La troisième, juste reliée à un requin en demi-ton ;
    Toutes chantant a capella un récital affriolant.

    Les pauvres marins subjugués par la prestation aquatique
    Se font engloutir sous les eaux noires sises sous les coulisses.
    Ils se trouvent alors conjugués au passé le plus dramatique
    Et finissent parqués dans le zoo du plus grand vivier des abysses.

    Tableau de Juan Carlos Verdial.

  • Curiosités abyssales

    Là où il n’y a pas de lumière dans les abysses en entonnoir,
    Là où on ne peut rien capter tellement les ténèbres sont ternes,
    Dans l’obscurité des chaumières comment faire lorsqu’il fait noir ?
    Les sirènes se sont adaptées en se transformant en lanternes !

    Cheveux d’anges luminescents pour attirer la faune ambiante ;
    Tête au visage étincelant pour charmer les poissons rebelles ;
    Un appendice phosphorescent comme séduction irradiante ;
    Tout le reste du corps, égalant le buste, rend leurs queues si belles.

    Hélas elles sont si petites que jamais l’homme ne pourra
    Ni distinguer, ni attraper ces feux follets évanescents.
    De plus, elles sont contredites toujours par l’homme qui ne saura
    Jamais plus son front se frapper de vérité en l’acquiesçant.

    Finalement le feu sacré aux tréfonds des mers contesté
    Par la « Science » existerait par celles qui n’existent pas.
    Laissons les rêves consacrés à l’imaginaire délesté
    De tout ce qui subsisterait si « Elle » disait « mea culpa ».

    Illustrations d’Artwood.

  • La sirène des coraux

    La sirène des coraux

    Une sirène décorée sur la barrière de corail ;
    Un monstre marin trop marrant souriant de toutes ses dents ;
    Des poissons venant de Corée rejoignant le caravansérail
    Des plus grands migrateurs errants depuis l’orient vers l’Occident ;

    Et dans ce monde du silence de paix mêlée de cruauté,
    Personne ne vient admirer notre sirène encoquillée
    De nacres dont la rutilance apparaît de toute beauté
    Mais qui n’est pourtant désirée de nul regard écarquillé.

    Pour qui se pare la sirène avec tout autant d’attention
    Sous la protection d’animaux mais qui ne font pas vraiment peur ?
    À voir son allure de reine, je pense qu’elle a l’intention
    D’attendre un capitaine Nemo et son Nautilus à vapeur.

    Tableau de Tony Sandoval.

  • Compter les poissons

    Compter les poissons

    Comment la sirène s’endort quand l’insomnie vient la frapper ?
    Elle remonte entre deux eaux et compte les poissons volants
    D’argent, de cuivre, d’étain et d’or en tentant de les attraper
    Dans une nasse de roseau ou un filet batifolant.

    Aussitôt le sommeil venu, en fait elle ne dort que d’un œil
    Car l’autre est l’œil d’un merlan frit afin de percer le crachin
    Et voir ce marin saugrenu, à qui elle a fait bon accueil,
    Qui hier encore lui offrit la promesse d’un retour prochain.

    « Bon pied, bon œil et bonne queue ! » Dit-elle au milieu de ses songes
    « S’il revient, mon joli rouquin aura le cœur de sa sirène
    Mais gare à l’amant belliqueux qui ne sait dire que mensonges ;
    J’ai des amis chez les requins qui ont repéré sa carène ! »

    Tableau de Lena Krashevka.

  • La sirène anonyme du bois-joli

    La sirène anonyme du bois-joli

    Elle chantonnait en dormant en plein milieu des nénuphars
    Dans un étang non d’eau de mer mais d’eau douce toutefois saumâtre.
    Elle semblait rêver en formant des aquarelles de tous fards
    Avec dégradés outremer, turquoise et délayés d’albâtre.

    Je l’ai aperçue dans la mare entre la Töss et la colline
    Qui monte au château de Kyburg, à pic, bordée de précipices
    Or juste avant que je démarre, j’avais plutôt l’humeur encline,
    Puisque n’étant pas à la bourre, à m’asseoir sur un banc propice.

    J’eus presqu’envie de renoncer et continuer à l’observer
    Mais, pensant à tout le turbin que cela allait provoquer,
    Je ne m’voyais pas annoncer à ma femme de réserver
    Toute notre salle-de-bain pour une sirène évoquée.

    Alors j’ai repris l’ascension en abandonnant la dormeuse
    Qui continuait à m’évoquer un joli babil envoûtant.
    Mais je bénis mon abstention car après une nuit brumeuse
    De gros remous ont provoqué des effluves assez dégoûtants.

    Je compris enfin ma méprise quand je revins le lendemain
    En voyant le convoi funèbre conduit par des nymphes en folie.
    Elle était morte sans surprise et elle avait pris le chemin
    De l’Eden tristement célèbre des sirènes du bois-joli.

    Image trouvée sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue. Si l’auteur de cette image reconnaît son travail, je serai heureux d’en mentionner le nom avec respect.

  • Conversation en queue de poisson

    Conversation en queue de poisson

    Lorsque la sirène rencontre un amateur de belles lignes,
    Elle s’enquiert de ses conseils sur sa précieuse silhouette.
    Si celui-ci va à l’encontre des espoirs dont elle s’assigne
    Alors soit il vient de Marseille, soit il s’en va en cacahuète.

    Il est vrai que dans les calanques, lorsque l’on croise une sirène,
    C’est soit Fanny, soit Marinette qui vient bronzer sur les rochers.
    Par ailleurs jamais il ne manque un nigaud menant sa carène
    Qui s’fait griffer par la minette qu’il avait tenté d’approcher.

    Quand la sirène prend forme humaine, campée sur deux jambes sublimes,
    Et vient aborder un marin sur le quai de la Joliette,
    Il lui plaira une semaine, puis mourra en pleine déprime
    Avec un brin de romarin et de fenouil dans son assiette.

    Tableau de Abel Roy.

  • Les eaux claires

    Les eaux claires

    Quand j’ai plongé dans les eaux claires et lumineuses du lagon,
    Je m’attendais à rencontrer toute une faune sous-marine
    Et dénicher un exemplaire d’un pégase – ou poisson-dragon –
    À prendre en photo pour montrer leurs vues sur fond bleu azurine.

    En fait d’animal aquatique, j’ai croisé une jeune sirène
    Juste vêtue d’un paréo enroulé autour de ses hanches
    Et quelques fleurs fantasmatiques qui lui donnaient un port de reine
    Dont des roses de Bornéo, quatre fuchsia et une blanche.

    Si j’ai pu la photographier je n’ai pu suivre son sillage
    Encore qu’elle ait su me séduire par la beauté de ses appas
    Et bien qu’un requin gougnafier vienne faire ses enfantillages
    En me conseillant de m’enfuir ou de partager son repas.

    Tableau de Phil Roberts.

  • Lire entre les lignes de la sirène

    Plus je lis, j’écris et je rêve et plus d’histoires de sirènes
    Poussent mon cœur à naviguer de bonne humeur dans leurs eaux troubles.
    Et plus j’y repense sans trêve, plus les idées viennent sereines
    Nourrir mon âme et prodiguer une exaltation qui redouble.

    Si je vous disais que je songe à échanger mon genre humain
    Pour une queue et des branchies pour faire mille galipettes,
    Ce ne serait pas un mensonge d’avouer ce désir surhumain
    Qui me libère et m’affranchit de tous les cons qui se la pètent.

    Jamais ne mangerai de marin ; j’ai connu de sacrés menteurs
    Qui racontaient au cabaret leurs amours avec millésime.
    Mais sans me monter au tarin, leurs récits des plus enchanteurs
    M’ont tant fait rire que j’ai barré leur profession de mon régime.

    J’ai tant rêvé de ce fantasme à me dorer le cul à l’air
    Sous un crépuscule orangé sur mer aux vagues émeraude,
    Que la nuit j’en ressens l’orgasme dresser ma croupe populaire
    Comme une queue verte frangée de cette extase qui me taraude.

    Tableaux de Jim Warren sur https:www.facebook.comJimWarrenArtist .

  • Tea Time at sea o’clock

    Tea Time at sea o’clock

    At sea o’clock, tout l’monde s’arrête, poissons, mollusques et méduses
    Voici venue l’heure de bonté à savourer dans les abysses.
    Alors on se détend l’arête et l’on commande à la cambuse
    Un vers imbibé de bon thé que l’on trempe dans du pain bis.

    Bien sûr, la sirène parade sur deux jambes chaussées de bottes ;
    En fait une illusion optique par la lumière ballotée.
    Tout le monde est bon camarade et les monstres marins barbotent
    En cet instant catalytique produit par l’eau dopée au thé.

    Assise comme une londonienne, minijupe et coiffe excentrique,
    Elle attend son triton charmant, vêtu d’un kilt kitch écossais.
    Heureusement, calédonienne à l’œil très colorimétrique,
    Elle repère son amant lorsque les poissons écossés.

    Illustration de John Alcorn.

  • La vlie à dleux

    La vlie à dleux

    La vlie à dleux, c’lest plas flacile sul la telle comme dans l’eau ;
    Palfois il faut polter un masque mais ça limite les blaisers.
    Et même en me montrant gracile, affable comme un angelot
    Si je devais porter un casque, l’amour en serait malaisé.

    Aimer une femme poisson et vivre dans son élément,
    Demande plus qu’une adaptation pour se plonger dans son milieu,
    Mettre de l’eau dans ma boisson et parler simultanément
    Sa langue avec ostentation sans me montrer trop sourcilleux.

    Si un appareillage idoine un de ce quatre jours m’échoie,
    Jamais je ne ressemblerai à un habitant des abysses.
    Si l’habit ne fait pas le moine, je n’ai hélas pas d’autre choix :
    Demain je me transformerai et que l’océan m’estourbisse !

    Tableau de Giulio Ingrosso.

  • Les mondes de la sirène

    La Terre est ronde, la mer aussi. Entre les pôles, c’est chasse-à-l’homme ;
    Les sirènes de tous azimuts pourchassent les marins revêches.
    On se dispute, on négocie pour se partager le royaume
    Et si nécessaire, on permute, les zones de chasse et de pêche.

    Par exemple dans la mer Baltique, les sirènes rousses à la queue grasse
    Mangent les matelots à la crème en dansant une sarabande.
    Celles d’Océan Atlantique, qui chantent et tuent avec grâce,
    Ne pratiquent aucun carême même si Dieu le leur demande.

    Mais un contre-exemple flagrant, dans la mer Méditerranée,
    Montre que les sirènes blanches, noires et jaunes cohabitent.
    Elles vivent en paix en intégrant ce vieil adage suranné
    Qui dit qu’au soleil du dimanche, les hommes préfèrent la mort subite.

    Tableau de Lindsay Bernard Hall.

  • Tempête dans un verre d’eau

    Tempête dans un verre d’eau

    Je ne sais si vendredi treize porte malheur comme on le dit ;
    Toujours est-il que catastrophes et inondations ont eu lieu.
    Les orages ont noyé la braise des barbecues du samedi ;
    Le dimanche étant limitrophe, l’eau a jailli en plein milieu.

    Dès le lundi, la coupe est pleine ; l’eau n’est pas prête à s’écouler.
    Toutes nos villes sont Venise et nos montagnes sont des îles.
    On ne sait plus où sont les plaines submergées sous les giboulées ;
    Ce qui évidemment galvanise les fous nageant hors des asiles.

    Mais les Lorelei sont ravies et ont invité les sirènes
    À déguster toutes ressources qu’elles ont trouvées dans le pays.
    De Bavière et de Moravie, toutes sont arrivées sereines
    Pour apprécier depuis leurs sources les liqueurs de nos abbayes.

    Tableau de Mike Worrall sur https:www.mikeworrall.comprints-available .

  • Entre nous, c’est assez !

    Entre nous, c’est assez !

    Pas de sirène ce vendredi ; elle aurait lâché le grappin
    Et s’rait partie se cache-à-l’eau afin que l’histoire s’arrête.
    Alors le marin contredit qu’on lui ait posé un lapin
    Alla chasser le cachalot ; faute de poisson et d’arête.

    Le léviathan, un vieil ami de la sirène déconfite,
    Avait une dent contre l’homme ou plutôt ses fanons tendus.
    Il fonça droit sur l’ennemi dont le bateau donnait du gite
    Et le précipita au royaume du roi Neptune, bien entendu.

    Emmené par le cétacé par-devant la cour de justice
    Pour des accusations tordues, relatives à son impuissance,
    Le marin cria « C’est assez ! Je vous demande un armistice
    Car la sirène m’a mordu au nœud de l’affaire en instance. »

    Tableau de Tom Walters.

  • La sirène à queue de paon

    La sirène à queue de paon

    Une sirène qui fait la roue ! Quoi de plus beau dans les abysses ?
    Une sirène à queue de paon ! Quoi de plus noble au bout du compte ?
    Si l’organe souffre peu ou prou d’absence de pieds et de cuisses,
    Il met tout son charme en suspens d’après tout ce qui se raconte.

    Sur les nageoires, les yeux de paon trompent poissons et crustacés
    Et hypnotisent l’hippocampe qui s’attarde au bout de sa queue
    Ainsi que tous les occupants des abords et les cétacés
    Qui instantanément décampent vers un meilleur milieu aqueux.

    Mais le pot-aux-roses irisé se dévoile à tout quémandeur
    Qui vient voir les poissons artistes qui jouent à l’encre de ses yeux
    Trempés dans les pieuvres égrisées par l’ivresse des profondeurs
    Qui saoule les instrumentistes d’un magnétisme fallacieux.

    Tableau de Holly Sierra.

  • La sirène hallunecinée

    La sirène hallunecinée

    En Pleine Lune, la sirène sent les premiers préliminaires
    Entre les courants ascendants, balancés et puis descendants.
    Sous l’énergie la plus sereine des quatre périodes lunaires,
    Son cœur est plus condescendant envers les marins prétendants.

    Sans doute l’appétit charnel supplante sa gloutonnerie
    Et l’eau dilue ses phéromones en maintes circonvolutions
    Pour que son désir maternel jouisse de polissonneries
    Avec un parfum d’anémone pour en hâter l’évolution.

    Mais déjà la Lune décroît et la sensualité s’éteint ;
    Les instincts reprennent le dessus et la faim rapplique soudain.
    Si l’envie revient de surcroît ce sera pour faire un gratin
    Du pauvre marin alors déçu de finir en peau de boudin.

    Image trouvée sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue. Si l’auteur de cette image reconnaît son travail, je serai heureux d’en mentionner le nom avec respect.

  • La sirène métamorphosée

    Quand la Lune sera croissante, la sirène nourrira sa peau,
    Puis fera couper ses cheveux et épiler sa queue nacrée.
    Après deux semaines angoissantes, elle sentira fort à propos
    L’astre réaliser tous ses vœux et notamment le plus sucré :

    Quand la Lune sera décroissante, la sirène se purifiera
    Pour faire repousser ses écailles et sa chevelure ondulée.
    Passé la semaine harassante, sa poitrine s’intensifiera
    Et de ses mamelons corail perleront des gouttes de lait.

    Images trouvées sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue. Si les auteurs de ces images reconnaissent leurs travaux, je serai heureux d’en mentionner les noms avec respect.

  • La sirène médusée

    La sirène médusée

    Je fus complètement médusé par celle-là qui prit mon cœur,
    Qui m’étreignit entre ses bras, m’enlaça dans sa queue d’écailles.
    Si de moi, elle a abusé, je n’en garde aucune rancœur
    Bien que son lit, faute de drap, exhale un parfum de poiscaille.

    Mais l’odorat n’agit dans l’eau pas comme sur la terre ferme,
    Tandis que l’ouïe et le toucher dépassent de loin le barème.
    Mon sexe, hier assez branlo, connut l’exaltation du sperme
    Qui, par la sirène embouché, m’a donné un plaisir extrême.

    Le coup de grâce n’a pas eu lieu ; elle avait l’air d’être déçue
    Prenant le goût de ma semence, ni trop sucré, ni trop amer,
    Ni trop salé pour son milieu, comme un puissant coup de massue
    Car, avant que je recommence, elle courut tout droit vers la mer.

    Illustration de Hope Hokulani sur https:www.etsy.comfrshopHopeHokulani .

  • Dépucelage chimérique

    Dépucelage chimérique

    C’était au cours de ma jeunesse, plus précisément vers la fin,
    Lorsque j’étais adolescent mais pas vraiment l’âme sereine.
    J’avais gagné à la kermesse un poisson rouge d’un aigrefin,
    Un forain fou me confessant qu’il s’agissait d’une sirène.

    Sait-on jamais ? Délicatement mon poisson rouge déposé
    Dans l’onde tiède de ma baignoire, je sortis sans faire de bruit.
    Minuit sonna exactement à l’instant même supposé
    Où naquit parmi les eaux noires comment vous dirais-je… le fruit.

    Lumière ! La sirène est là et comme elle n’a pas l’air farouche
    Je m’en approche, je tends la main, elle la saisit et m’encourage.
    Et puis après tout bascula et d’un goût salé dans ma bouche
    Je sentis mon corps de gamin perdre plus que son pucelage.

    Tableau d’Alisa Williams sur https:fineartamerica.comprofilesalisa-williams .

  • Quand les sirènes voyagent en boîte

    Quand les sirènes voyagent en boîte

    À l’instar des humains en boîte, stockés dans leurs avions de lignes,
    Les sirènes voyagent aussi de conserve, entre autres en low-cost.
    Un peu serrées mais elles s’emboîtent, toutefois pas assez malignes
    Quand les marins leur négocient un tour qui vire à l’holocauste.

    Si vous trouvez sur votre table une boîte à sardines « Mermaid »,
    Ouvrez-la délicatement et laissez sortir les sirènes.
    D’abord leur goût est détestable après le fâcheux intermède
    Qui a haussé suffisamment leur trouillomètre dans leur carène.

    Non seulement reconnaissantes, elles seront dévouées à vie
    Et à l’escale de Gibraltar vous signaleront comme vedettes
    Car ce sont des adolescentes qui vivront, à mon humble avis,
    Tellement longtemps que tôt ou tard elles vous rembourseront leurs dettes.

    Illustration d’Alinabeska sur https:www.deviantart.comalinabeska .

  • Sirènes en boîte

    Vous pensiez les sirènes grandes, à l’échelle humaine et normales
    Mais elles sont en réalité de toutes petites ondines.
    Dans les pêcheries de Guérande, à cause de leur taille minimale,
    Il est d’éventualité de les prendre pour des sardines.

    Chaque fois que j’ouvre une boîte, je fais attention à frapper,
    Puis d’ouvrir délicatement la clef de peur d’en effrayer.
    D’autant que l’huile, inadéquate à tenter de les attraper,
    Les ferait sauter directement et ce n’est pas très conseillé.

    De temps en temps, j’ai de la chance et j’en recueille à l’occasion
    Lorsqu’elles proviennent de France mais pas de Suisse, ni de Bavière.
    En toute bonne intelligence, je leurs permets leur évasion
    Et je mets fin à leurs souffrances en les plongeant dans la rivière.

    Parfois elles restent une soirée à me raconter leurs projets
    Lorsqu’elles auront regagné les abysses qui les préservent.
    Un jour vous aussi vous croirez, vous n’ pourrez pas y déroger,
    Et trouverez dans le panier une sirène de conserve.

    Images trouvées sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue. Si les auteurs de ces images reconnaissent leurs travaux, je serai heureux d’en mentionner les noms avec respect.

  • La sirène polluée

    La sirène polluée

    Que les sirènes soient en voie de disparition fait dilemme ;
    On doutait de leur existence, voilà qu’il faut les protéger !
    C’est pourquoi l’on entend des voix monter des eaux à l’heure même
    Où l’on subit les conséquences de la pollution agrégée.

    La mer, devenue la poubelle des êtres humains, va se venger
    En nous recrachant sur les côtes tout ce qu’ils y ont balancé
    La fameuse sirène Arabelle va repousser les étrangers
    Qui ont commis toutes ces fautes et ne font que recommencer.

    Avec la Marine Abyssale et son armée de cachalots,
    Ils vont renvoyer les déchets et les remonter des rivières,
    Puis établir des succursales un peu partout au fil de l’eau
    Pour dégueuler par les brochets notre merde jusqu’en Bavière.

    Vendredi treize, pas de chance ! Toutes les rivières ont débordé
    À cause des pluies abondantes, même un peu trop pour la saison.
    Pour Arabelle, il y a urgence ! Toutes ses troupes vont aborder
    Chargées d’épaves incommodantes à verser devant vos maisons.

    Tableau de Waldemar von Kozak.

  • La Selkie « Peau-de-phoque »

    La Selkie « Peau-de-phoque »

    Revêtue d’une peau de phoque dont le crâne faisait son bonnet,
    Une Selkie sortit des eaux en s’accrochant même à ma barque.
    De toutes mes rencontres loufoques auxquelles j’étais abonné,
    Celle-ci entrait dans le réseau des grands succès du cirque Hipparque.

    Car je suis souvent dans la Lune et reçois beaucoup de visites
    De séductrices chimériques selon mon imagination.
    Sirènes, filles de Neptune et créatures composites
    Appartiennent à mon homérique exigence en divination.

    Ses yeux de chien-de-mer battu lui donnaient un air de guerrière
    Et son sourire trahissait sa propre envie de copiner.
    Sans m’être un instant débattu, je l’ai laissée monter derrière
    Tandis que je me hérissais de ce fantasme inopiné.

    Et comme nous sommes vendredi treize, méfiez-vous car c’est le jour
    Où elle sort pour tenter sa chance parmi les beaux marins hardis.
    Restez chez vous avec Thérèse – ou tout autre prénom de l’amour –
    Accordez-lui ses exigences et, si possible, jusqu’à mardi !

    (Tableau de Marco Gonzales ;
    Les Selkies sont des créatures mythologiques que l’on trouve dans le folklore des îles Féroé, de l’Islande, de l’Irlande et de l’Écosse.)

    Image trouvée sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue. Si l’auteur de cette image reconnaît son travail, je serai heureux d’en mentionner le nom avec respect.

  • La sirène en vacances

    La sirène en vacances

    Que faire de son hippocampe quand la sirène part en vacances ?
    L’attacher sans appréhension à un corail est impensable !
    Oui mais… selon si elle campe, il n’y aura pas de conséquence
    Mais si elle opte pour une pension, l’animal est-il dispensable ?

    Heureusement dans nos alpages, on aime tous ces compagnons
    Aériens, terrestres, aquatiques sans faire de contestation.
    Nous avons un aréopage d’hôteliers ni rudes ni grognons
    Qui se montrent plutôt lunatiques quant aux hippocampes en question.

    Évidemment pour l’eau de mer, il faudra demander aux vaches
    De leur prêter leurs pains de sels et leur céder quelques mangeoires.
    J’en appelle à toutes les chimères qui aiment voyager sans relâche
    À choisir la Suisse qui recèle tant de lacs comme pataugeoires.

    Image trouvée sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue. Si l’auteur de cette image reconnaît son travail, je serai heureux d’en mentionner le nom avec respect.

  • Quand la sirène s’endort

    Quand la sirène s’endort

    As-tu vu comment la sirène s’endort dans son milieu aqueux ?
    Sa nageoire roule dans son dos comme un petit coussin douillet ;
    Les bras en position sereine autour du fuseau de sa queue ;
    Ses cheveux formant un bandeau pour éviter de pendouiller.

    Mais lorsqu’elle tourne en spirale, profondément elle sommeille
    Et son corps s’en va dériver au gré des courants abyssaux.
    Puis, de manière générale, quelques fidèles poissons veillent
    À ce qui pourrait arriver lors des sommeils paradoxaux.

    Après juste trois petits tours, elle se réveille en bâillant,
    Étire ses bras engourdis et déroule sa queue déployée.
    Puis elle cherche aux alentours de quoi manger, le cœur vaillant,
    Un joli marin dégourdi qu’elle saura apitoyer.

    Tableau de Lelia sur https:www.deviantart.comleliagallery .

  • La sirène vous salue bien – 2

    La sirène vous salue bien - 2

    Quand la sirène vous dit adieu, quelque chose n’a pas marché ;
    Elle ne vous trouve pas à son goût, trop vieux, trop mou ou trop coriace.
    Mais vous pouvez remercier Dieu de vous avoir juste mâché
    Et rejeté avec dégoût avant que ses dents ne vous souillassent.

    Quand la sirène fait sa bégueule, on y perd beaucoup en caresses
    Mais le fait de le raconter vaut mieux que d’y être resté.
    Ne faites pas la fine gueule si vous n’êtes pas au palmarès ;
    L’épreuve est dure à surmonter mais la vie en est infestée.

    Il m’est arrivé une fois qu’une sirène me rabroue
    De notre aventure interlope aux préliminaires salivants.
    J’en reste ravi toutefois car j’en suis sorti peu ou prou
    Débarrassé d’une salope, cœur brisé mais toujours vivant.

    Tableau de Katerina Strokach.

  • La sirène vous salue bien – 1

    La sirène vous salue bien - 1

    Quand la sirène vous salue, elle ne passe pas inaperçue ;
    En effet, le cœur sur la main, elle vous en transmet sa chaleur.
    Mais pour cela, il aurait fallu que vous valdinguiez par-dessus
    La passerelle à mi-chemin du bateau pour votre malheur.

    Admettons que ce soit le cas ; vous vous noyez et – patatras –
    Voici qu’une jolie sirène vous dit bonjour à sa façon.
    Eh bien, soyez heureux mon gars car elle vous reconnaîtra
    Et vous donnera, d’un port de reine, la gratitude des poissons.

    Si vous avez un jour ouvert une fausse boîte à sardines
    Contenant cinq ou six sirènes et vous êtes montré homme probe,
    Vous serez à jamais couvert par l’assurance, non anodine,
    Consentie sur toutes carènes qui naviguent tout autour du globe.

    Illustration de Camilla Ceccatelli sur https:www.facebook.comCamillaCeccatelliIllustrazioni .

  • Femmes ou sirènes ?

    Femmes ou sirènes ?

    Le choix deviendrait cornélien si toutefois je devais suivre
    Les jolies femmes sur la plage ou les sirènes sur les vagues.
    Si ce dilemme machiavélien n’arrête pas de me poursuivre,
    C’est que, concernant l’accouplage, mon cœur tergiverse et divague.

    Faire l’amour à une sirène qui vous fait mourir d’épectase,
    Vaut-il faire mille fois l’amour suivi de mille petites morts ?
    La jouissance, certes sereine, ichtyologique donne l’extase
    Mais si les femmes ont de l’humour, les sirènes n’ont que des remords.

    J’ai opté pour suivre une humaine qui sait nager comme un poisson
    Et dont le jeu de jambes au lit exige des coups de queues ardents.
    Et tout au long de la semaine, nous ne cessons de faire moisson
    De fruits d’amour à la folie qui croquent si bien sous la dent.

    Tableau de Paul Delvaux.

  • Poisson-chat & chien-de-mer

    Les poissons-chats, les chiens de mer font les compagnons agréables
    Pour une sirène isolée dans la vacuité abyssale.
    Entre deux marins victimaires, le temps paraît interminable
    D’où l’envie de se consoler avec ses racines caudales.

    À l’instar des gens de la ville et leurs animaux domestiques,
    Elles s’attachent aux alevins selon leurs couleurs, leur splendeur.
    Des poissons-chats plutôt serviles aux chiens de mer humoristiques,
    Un ami c’est comme du bon vin, ça réanime les profondeurs !

    Tableaux de Diego Fernandez.

  • La sirène méduse

    La sirène méduse

    Environ une fois sur trois, naît une sirène-méduse ;
    Un corps de femme lumineux sur une queue effilochée.
    Ses tentacules qui, je crois, sont toxiques, si je ne m’abuse,
    Fouettent d’un effet prurigineux qui tente de s’en rapprocher.

    Imaginez donc des étreintes pareilles aux feuilles d’orties,
    Une caresse venimeuse qui brûle la peau jusqu’à l’os
    Et qui vous marque d’une empreinte, sur tout votre corps, assortie
    D’une fulguration amoureuse mais peut-être un peu trop véloce.

    Quoi qu’il en soit, nul n’oubliera ce coup de foudre conducteur
    Qui transmet une onde électrique aux bateaux qui voguent alentour.
    Quant au marin, il suppliera ses organes reproducteurs
    À arrêter d’avoir la trique en permanence tous les jours.

    Tableau de Prateep Kochabua.

  • Histoire d’eau

    Histoire d’eau

    Si l’histoire d’eau m’était contée, j’y verrais la carte du tendre
    Prendre les routes maritimes autour des îles de la passion
    Dont une romance escomptée ferait son entrée sans attendre
    Par un mariage légitime avec une femme-poisson.

    Vers le plus isolé du monde des atolls du nord Pacifique,
    Dans un lagon exceptionnel d’eau douce fraîche avec amour.
    Ma belle sirène, pas pudibonde pour deux sous, serait magnifique
    Avec un corps sensationnel, tout ce qu’il y a de plus glamour.

    On dit que l’île de Clipperton correspondrait à ma demande
    Et que les sirènes y abondent dans la lagune du comté.
    Mais d’après Darwin et Newton, la science hélas me recommande
    Que cette folie vagabonde ne soit plus jamais racontée.

    Tableau d’Elsid.

  • La sirène végane

    La sirène végane

    Ce n’est pas une queue de poisson mais une racine de carotte ;
    Pas de cheveux mais du cresson dont elle n’est pas peu fiérote.
    Vous la trouverez au potager se nourrissant de pommes de terre
    Qu’elle contribue à propager par son lait phytosanitaire.

    Les sirènes véganes ont du lait qui perle de leurs seins en poire
    Dont les mamelons ondulés plaisent aux vers qui voudraient y boire.
    Heureuse l’humble jardinière qui la découvre dans une endive
    Et passe de fonction routinière à une activité lascive.

    Si la queue sert à aguicher la jardinière dans son jardin,
    Elle fait office de godemichet et s’agrandit comme un gourdin.
    Si vous passez près des enclos et oyez des gémissements,
    C’est la maraîchère à huis clos qui pousse des trémoussements.

    Illustration de Forest Diver sur https:www.behance.netgallery247706332d-digital .

  • Jumping Mermaid

    Jumping Mermaid

    Sur les rouleaux, on voit l’surfeur et dans le rouleau, très sereine,
    On la voit jaillir sur sa proie laissant la planche à la dérive.
    Tant pis pour le sportif gaffeur qui ne croyait pas aux sirènes
    Maintenant je pense qu’il y croit mais c’est trop tard quoi qu’il arrive.

    Quand la mer fait de grosses vagues, les sirènes chassent en équipe
    Lors des frégates et concours, toutes s’y adonnent en chœur.
    Aussitôt qu’elles voient que divague d’exaltation le pauvre type,
    L’une le fauche dès qu’il encourt la jubilation du vainqueur.

    Pourtant je dois rendre justice, quand même, à son esprit sportif
    Car elle enlève du peloton notamment les brebis galeuses
    Qui auraient porté préjudice par leurs errements abortifs
    En mêlant au phytoplancton leurs cervelles encore moelleuses.

    Tableau d’Anna Podedworna sur https:www.artstation.comakreon .

  • La légende de la Vouivre

    La légende de la Vouivre

    Tombée dans l’étang en bas âge, elle fut sauvée par des grenouilles
    Et fut nourrie au lait de loutres et aux œufs de carpe argentée
    Qui colorèrent son visage comme un fond de teint de vasouille,
    Une peau blanchâtre et, en outre, des cheveux roses endiamantés.

    Comme elle séjourna dans l’eau bien trop longtemps pour une humaine,
    Pieds et mains devinrent palmés par la pratique de la nage.
    Adolescente au teint pâlot, advint un curieux phénomène
    Car rien ne pouvait lui calmer ses excès de libertinage.

    Notre sirène des eaux douces, cachée derrière les roseaux,
    Guettaient les pêcheurs en bateau pour leur souhaiter la bienvenue.
    Quand sortait sa jolie frimousse poussant un chant amoroso,
    Le bonhomme devenait pataud de la voir grimper toute nue.

    Bientôt les femmes des pêcheurs voulurent chasser la sorcière
    Et la tuer quoi qu’il advint malgré tout c’ qui aurait pu s’ensuivre.
    Alors la fille d’un air bêcheur s’échappa de la souricière,
    Gagna le marais poitevin et changea de nom pour « la Vouivre ».

    Image trouvée sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue. Si l’auteur de cette image reconnaît son travail, je serai heureux d’en mentionner le nom avec respect.

  • Sirènes et chimères d’étangs passés et à venir

    De la nature des sirènes et leur instinct de chasseresse,
    La diversité des moyens pour piéger l’homme est légendaire.
    Depuis nos régions riveraines jusqu’aux îles enchanteresses,
    Le décompte des citoyens mystifiés est lapidaire.

    Leur apparence bucolique, douce, naturelle et forestière,
    Attire poètes et artistes qui recherchent l’inspiration.
    Mais la forêt mélancolique est loin d’être primesautière
    Et la sirène pépiniériste les absorbe par macération.

    Sirène des îles, sirènes des champs, entendez-vous dans nos montagnes
    Glousser ces monstres à chair de poule qui viennent près de vos maisons
    Et n’ont pas vraiment l’air méchant mais font du pâté de campagne,
    Une fois que le sang s’écoule, en vous mettant en salaison ?

    Tous les goûts sont dans la nature surtout chez la gente chimère ;
    Les ogres, les croque-mitaines et harpies aux griffes effilées.
    Si ces créatures s’aventurent, arborant leurs appas mammaires
    En France métropolitaine, je vous conseille de filer.

    Tableaux de Władimir Golub sur https:bialczynski.pl20140708bialoruska-wizja-slowianskiej-baji-wladimir-golub .

  • La poussée amoureuse d’Archimède

    La poussée amoureuse d’Archimède

    Heureuse comme une sirène dans l’eau lorsqu’elle rencontre un amant
    Qui fait l’amour entre deux eaux à défaut de septième ciel
    Mais dont le lit de longs rouleaux lui permettra conséquemment
    Des positions amoroso qui offrent tout leur potentiel.

    Un peu comme en apesanteur mais sans conquête de l’espace ;
    Juste libérée de son poids grâce à la poussée d’Archimède
    Tout augmentée par la lenteur d’un coït qui passe et repasse
    Et dont les corps font contrepoids à une série d’intermèdes.

    Le marin finira noyé mais quel bonheur dans l’épectase !
    Quelle magnifique fin de carrière pour un loup de mer en retraite !
    Si cela peut vous apitoyer, sachez que connaître l’extase
    Sexuelle, la queue en arrière, vaut bien un dernier coup d’arête.

    Tableau Art Bay Mythos sur https:www.artbymythos.com .

  • La Grande-Sirène

    La Grande-Sirène

    La Voie Lactée, dans l’Univers, dépend de la Grande-Sirène,
    Mère des eaux disséminées dans les galaxies infinies.
    Quand une lune est en hiver, Elle l’endort d’une sereine
    Éclipse pour éliminer ses trous noirs d’embrouillaminis.

    Dans la mer de sérénité, elle vient souvent s’accrocher
    À l’île de fécondité d’un désir d’insémination
    Auprès d’autres divinités tandis qu’elle rêve sur son rocher
    Aux formes de rotondités que prendront ses constellations.

    Si celle-ci n’existait pas, nous n’aurions pas la connaissance
    Des lois cosmiques appliquées à la Grande Sirène qui sème.
    Pour le comprendre, il n’y a qu’un pas à faire pour suivre la naissance
    Des phénomènes inexpliqués qui se résoudront par eux-mêmes.

    Illustration de Chiara Fedele sur http:chiarafedeleillustrator.it .

  • La véritable histoire de la cabane du pêcheur

    La véritable histoire de la cabane du pêcheur

    Francesca Brel n’a pas tout dit dans sa chanson sur la cabane ;
    Ni que la fille était sirène, ni que le pêcheur, beau parleur
    L’avait trompée ce vendredi en l’invitant sur la rabane
    À passer une nuit sereine qui durerait sept ans de malheur…

    la coupe est pleine, rien ne va plus, dans la cabane du pêcheur
    Et le mélange des couleurs sur les murs n’est plus à son goût.
    Les mauvais rêves lui ont déplu notamment les plus accrocheurs ;
    Trop de chagrin, trop de douleurs qui ne lui laissent que du dégoût.

    Tous fuient en suivant la sirène et ses enfants main dans la main
    Dont le mari, homme incrédule, accuse le dernier épisode.
    Seule la maison paraît sereine de les voir se mettre en chemin
    Et demeure avec la pendule indifférente à cet exode.

    Adieu tabourets nonchalants, adieu chaises insouciantes,
    Adieu objets inanimés, adieu enfants de la chimère !
    Tout le mobilier dévalant la route, d’une allure impatiente,
    Avec la théière abîmée et le pot-à-eau de grand-mère.

    Illustration d’A. Russel.

  • Sérénité sirène

    Sérénité sirène

    Vraiment trop cool d’être sirène et vivre ainsi au fil de l’eau
    En attendant le gars suivant parmi les gars de la marine !
    Bien reposée, l’âme sereine sous le cocotier de l’îlot
    La queue aux pointes décrivant comme des manèges de ballerine.

    Plutôt alors des ballets roses sans le tutu évidemment
    Qui la ferait dès lors confondre avec la méduse pélagique.
    Tintin pour le marin morose qui s’éloignerait avidement
    Et la sirène se morfondre de ses déboires nostalgiques.

    Oui mais à force de rêvasser un bateau au large est passé
    Tant pis ! Ce sera qui dort dîne pour la sirène paresseuse.
    Elle s’en moque ! Il va repasser au retour et vont trépasser
    Tous les marins de « La Sardine » aux tribulations malheureuses.

    Image trouvée sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue. Si l’auteur de cette image reconnaît son travail, je serai heureux d’en mentionner le nom avec respect.

  • Quand la sirène se trahit

    Quand la sirène se trahit

    Si vous soupçonnez votre femme d’être en réalité sirène
    Qui vous a charmé de sa voix pour goûter votre marinade,
    Pas besoin de manière infâme mais, d’une façon plus sereine,
    Quand elle prend son bain chaque fois, observez sa dégoulinade :

    Ce n’est pas sa queue qui frétille mais l’eau du bain qui prend la mer
    Et la sirène devient une île massée du flux et du reflux.
    Chaque vague qui l’émoustille lui donne un souvenir doux-amer
    Du temps où elle vivait tranquille d’aimantes eaux fraîches superflues.

    La mienne a éveillé mes doutes par la salle-de-bains parfumée
    D’un air marin chargé d’embruns qui me rappelait la Bretagne.
    Depuis, tout ce que je redoute c’est partir un jour en fumée,
    Consommé comme un Petit-brun entre les dents de ma compagne.

    Tableau de Kristin Kwan sur https:www.dessein-de-dessin.comles-peintures-surrealistes-et-fantastiques-de-kristin-kwan .

  • Trois sœurs entre deux eaux

    Trois sœurs entre deux eaux

    Quand je plonge en demi-sommeil dans le lac des rêves émeraude,
    Les sœurs de Morphée m’accompagnent jusqu’à la grotte des sirènes.
    Elles n’aiment pas trop le soleil et leur chevelure noiraude
    Ondule tandis qu’elles regagnent avec moi l’abri de leur reine.

    Comme je dors profondément et que j’oublie tout au réveil
    Je les ai chargées de m’écrire le rêve de la nuit dernière.
    Je le transcris conformément sans faire un discours qui pérore
    Mais qui saura mieux vous décrire tout avec l’art et la manière :

    « Dans ce fantasme, tu es le Roi et la souveraine, ta Reine ;
    Ton mariage s’est déroulé il y a vingt ans exactement
    Au fond d’un grand lac Bavarois avec Lorelei et sirènes
    La nuit où tu t’es écroulé, mort de fatigue notablement.

    Depuis tu reviens chaque fois qu’un problème te préoccupe
    Pour lui demander son avis qu’elle t’accordera toujours.
    Qu’elle t’accorde toutefois sous condition – elle n’est pas dupe –
    De revenir toute ta vie, chaque nuit, lui faire l’amour.

    Tableau d’Alexander V. Orlov.

  • Ma tête du vendredi

    Ma tête du vendredi

    Ce vendredi, je suis vaseux, on m’a arraché une dent ;
    J’ai des poissons qui font la fête et nagent dans mon vague à l’âme.
    Un poisson-lune à l’air gazeux me fait un signe préludant
    La fin de ma prise de tête que la température enflamme.

    Dans mon encéphale aquarium, un requin me tape sur le nerf
    De ma molaire justement partie jeudi après-midi.
    Ce n’est plus un planétarium mais l’océan imaginaire
    Où je me noie absurdement dans une trouble comédie.

    Si une sirène m’entend, qu’elle vienne me charmer de sa voix
    Et dévorer à pleine dent mon cœur imbibé d’un sang mièvre
    Heureux tout en l’alimentant de revêtir ses grands pavois
    Pour l’épouser en quémandant de me réveiller de ma fièvre.

    Tableau de Victoria Nahum.

  • La chevelure de la sirène

    La salinité de la mer plaît aux écailles, pas aux cheveux ;
    Au fil des jours, au fil de l’eau, les belles coiffures s’emmêlent.
    Malgré le malt des algues amères et l’huile des poissons baveux,
    La chevelure part à vau-l’eau, tresses et mèches en pêle-mêle.

    Avant que l’eau ait déformé et abîmé sa dignité,
    Un traitement indispensable s’avère urgent pour la sirène.
    Il est temps de se transformer selon ses possibilités
    Grâce à sa queue convertissable en jambes dignes d’un port de reine.

    La queue se fend en tentacules qui se détachent peu à peu
    Délivrant deux jambes superbes qui seront très bien accueillies.
    Lentement dans le crépuscule, elle sent ses cheveux adipeux
    Revitalisés par les herbes et les fleurs fraîchement cueillies.

    Par les rayons directionnels d’un soleil régénérateur,
    Les cheveux d’un éclat nouveau se nourriront de sa lumière.
    Ce phénomène exceptionnel est l’un des signes révélateurs
    Lors d’une remise à niveau dont la sirène est coutumière.

    Tableaux de Jennifer Hrabota Lesser sur https:www.smarterartschool.comjennifer-hrabota-lesser-artist-profile.html .

  • Amazones dans le brouillard du matin

    Amazones dans le brouillard du matin

    Contrairement aux noctambules qui rentrent à l’aurore chez eux,
    Je suis resté dans les faubourgs cherchant la rue Saint-Honoré.
    Soudainement sans préambule dans le quartier des gens taiseux
    Bordant le parc du Luxembourg, je fus alors déshonoré.

    Toute une tribu d’amazones rentrant de l’Opéra Garnier
    Jetèrent sur moi leur dévolu en me déchirant la chemise.
    Comme j’étais hors de la zone de portée de voix des jardiniers
    Leurs lances à fer non émoulu m’ont pris en victime soumise.

    Elles m’ont obligé une à une à satisfaire leur libido,
    À les écouter chanter faux et boire leurs filtres magiques.
    Après m’avoir tout infligé, elles m’ont tatoué sur le dos :
    « Homme charmant, bien comme il faut, du point de vue gynécologique. »

    Tableau de Morton Künstler.

  • Sirènes dans le brouillard du matin

    « Il est cinq heures, Paris s’éveille ; c’est l’heure où je vais me coucher ! »
    Chantait Dutronc qui avait tort car s’il avait juste attendu
    Une heure ou deux, quelques merveilles sur lesquelles on aime loucher,
    Chevauchant licornes et centaures, seraient venues, le sein tendu.

    Le sein tendu, les amazones, moitié femme et moitié sirène
    – Ce qui fait un quart de poisson et trois quarts de femme fatale –
    Venaient ouïr sur plusieurs zones et notamment cirques et arènes,
    Cabarets et lieux de boissons, les chants de leur ville natale.

    Précisément à l’Opéra, chantait la Diva des divas ;
    Arabelle la belle andalouse qui se produisait ce mardi.
    Dommage pour Jacques qui ne pourra jamais adresser ses vivats
    À celle qui aurait rendue jalouse les amies de Françoise Hardy. †

    (Tableau de Dags Vidulejs.
    † Toutes mes condoléances, j’avais écrit ce texte prémonitoire le 27 mai.)

    Images trouvées sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue. Si les auteurs de ces images reconnaissent leurs travaux, je serai heureux d’en mentionner les noms avec respect.

  • La première pécheresse

    La première pécheresse

    Lapsus énorme, inévitable entre « a péché » et « a pêché »
    Et Ève s’est retrouvée paumée avec sa pêche miraculeuse.
    Ç’en est bête et c’est regrettable car elle s’était dépêchée
    Juste après l’avoir empaumé d’en faire une histoire fabuleuse.

    Mais… attendez… je confonds tout ou, au contraire, on nous confond
    Et l’histoire du fruit défendu n’est rien qu’une pêche interdite.
    On nous éduque comme des toutous, des imbéciles bas-de-plafond
    Pour un mensonge répandu par la foi qui nous discrédite.

    Le poisson rend intelligent ; donc : aliment de connaissance !
    Comme quoi lire entre les lignes, lorsque ce sont des cannes à pêche,
    Montre l’impair désobligeant que Dieu a fait avec aisance
    En accusant la femme indigne d’autant que rien ne l’en empêche.

    Tableau d’Alisa Williams sur https:fineartamerica.comprofilesalisa-williams .

  • La sirène assombrie

    La sirène assombrie

    Quand la sirène est d’humeur sombre, elle se réfugie dans l’ombre
    Avec lumière tamisée dans ses abysses organisées
    En salon et lieu de détente afin de tromper son attente
    Et quelque liqueur de folie pour troubler sa mélancolie.

    Quelques poissons clowns arbitraires tenteront tout pour la distraire
    En lui offrant des anémones ointes de subtiles phéromones
    Pour l’enivrer de ses arômes et lui diminuer le syndrome
    De l’apathie qui la chagrine sans les délices sous-marines.

    Mais voici qu’un petit sourire, un rictus de pince-sans-rire
    Et une lueur dans les yeux éclaire son visage ennuyeux.
    Une corne de brume sonne, sitôt la sirène frissonne
    Et sait qu’elle va devoir chanter une mélopée enchantée.

    Un vaisseau riche en matelots, tous prêts à se jeter à l’eau,
    Tous enclins à se saborder ensemble à sa voix accordée,
    Croiser la mauvaise fortune de la dure loi de Neptune.
    Pour la sirène quel festin et, pour les marins, quel destin !

    Tableau de Srdce.

  • Ichtyologie de la sirène

    Ichtyologie de la sirène

    Une sirène, est-ce une femme pourvue d’une queue de poisson
    Ou bien est-ce la greffe d’une femme transplantée sur un gros poisson ?
    Sans doute qu’à l’instar de Jonas un poisson a eu l’occasion
    De satisfaire l’envie tenace d’un sang humain en perfusion.

    Mais la meilleure théorie serait la collaboration
    De deux espèces animales pour un bénéfice commun.
    Des branchies hors-catégorie permettraient la respiration
    Et une silhouette optimale attirerait tout un chacun.

    La femme nourrit le poisson qui donc oxygène la femme
    Et c’est cette contribution qui satisfait les partenaires.
    Et la voix qui fait les passions provient de l’ouïe qui affame
    Le marin par l’attribution de ses branchies imaginaires.

    Illustration de Marisol Diaz.

  • Alix, chasseuse de sirènes

    Tous les matins, la jeune Alix, munie d’un filet papillon
    Et de sa fidèle grenouille, va librement chérir la mer
    Dont les vaguelettes prolixes s’infiltrant sous le cotillon
    Lui gonflent comme une quenouille sa robe en nacre d’outremer.

    Elle est chasseuse de sirènes – c’est du moins ce qu’elle prétend –
    Enrobée comme une baleine dans un scaphandre peu seyant.
    Elle va pourtant l’âme sereine tôt ou tard nous interprétant
    Un coup d’audace hors d’haleine où le rater en l’essayant.

    Mais une fois hors de portée, en revanche, quelle supercherie !
    Elle est enceinte jusqu’aux os et cache un joli embonpoint
    Qu’elle doit depuis longtemps porter, vu les rondeurs qu’elle chérit
    Et qui, flottant entre deux eaux, se délassent hors de son pourpoint.

    Sans doute aura-t-elle une fille qu’elle ramènera dans ses filets
    Comme une preuve irréfutable qu’elle sait pêcher sans hameçon
    Et qu’elle arrive à la cheville des plus grands pêcheurs profilés.
    Mais gare au drame indiscutable si jamais c’était un garçon !

    Illustrations de Rebecca Dautremer.

  • Les jambes de la sirène

    Les jambes de la sirène
    Tous les avis sont partagés quant aux jambes de la sirène ;
    Andersen, au prix de sa voix, se la métamorphose ingambe ;
    Le cinéma la fait nager d’une queue conforme et sereine
    Qui, dès qu’elle emprunte la voie terrestre, elle se transforme en jambes.

    Sans doute les deux ont raison ce qui éclaire notre lanterne.
    Si les sirènes sont parmi nous ; certaines d’entre elles sont muettes ;
    Si d’autres restent à la maison, dans leur baignoire, elles se prosternent
    Tout en se méfiant des minous qui s’en pourlèchent la luette.

    Je n’en ai rencontré aucune, ni de muette ni de mutante ;
    Évidemment loin de la mer, le contact est plus hasardeux.
    Afin de combler mes lacunes, si l’une de vous est partante,
    Venez chez moi, chère chimère, j’ai l’eau courante et parle pour deux.

    Tableau de Hannah Silivonchyk.

  • Bernadette l’ermite

    Combien Bernadette s’ennuie toute seulette dans sa conque !
    Hélas les marins sont partis sans qu’elle ait su les retenir.
    Bien tristement quand vient la nuit, elle n’a toujours pas vu quiconque
    Lui donnerait de la répartie et qui pourrait lui convenir.

    Elle a transmis mille messages par poissons-postiers voyageurs
    Chargés d’adresser ses dépêches à quelque nouvelle amitié.
    Mais le quotidien ramassage n’a eu aucun effet majeur
    Sans doute en raison de la pêche inopinée des chalutiers.

    Un jour Bernadette, centenaire, regrettera d’avoir mangé
    Le prince charmant envoyé la sauver de sa solitude.
    Neptune, ce Dieu débonnaire, s’était avec lui arrangé
    Et avait su l’apitoyer comme il en avait l’habitude.

    Mais Bernadette est trop gourmande et après l’amour consommé
    A croqué son marin tout cru et tout est parti en quenouille.
    Malgré la divine réprimande et son repentir consumé,
    Elle s’est entichée – qui l’eut cru – d’un serpent et d’une grenouille.

    Illustrations de Quentin Grébant.