Catégorie : 2022

  • La chevauchée de Lady Godiva

    La chevauchée de Lady Godiva

    Quelle était belle la chevauchée qu’aucun œil n’a su percevoir
    Mais qui sut pourtant bravement désarçonner l’autorité !
    Comme une femme débauchée, oser se montrer par devoir
    Entièrement nue crânement et marquer la postérité.

    On dit que les gens par pudeur, mais respectueux par honneur,
    Fermèrent portes et volets et restèrent au fond, reculés.
    Seuls les enfants dont la candeur espérait un peu de bonheur
    Purent par des regards volés témoigner de l’immaculée.

    La nudité devient une arme quand elle est brandie par l’audace
    Un peu comme la vérité lorsqu’elle est dite avec courage.
    Aujourd’hui contre les gendarmes et la police face-à-face,
    Il faudrait, sa témérité, exprimer dans notre entourage.

    (Tableau de Jeffrey Chong Wang.
    Lady Godiva fit souvent appel à son mari, comte de Mercie, qui refusait obstinément de diminuer les taxes dont souffraient les citoyens. Las de son insistance, celui-ci prétendit accéder à sa demande si elle se montrait à cheval, nue. Sa femme osa traverser la ville entièrement nue et le mari supprima les impôts.)

    Image trouvée sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue. Si l’auteur de cette image reconnaît son travail, je serai heureux d’en mentionner le nom avec respect.

  • La révolution mondiale

    La révolution mondiale

    Quand la révolution mondiale autorisera les rencontres
    Entre toutes les positions, des modérées aux extrémistes,
    Quand la distanciation sociale ne se mettra plus à l’encontre
    Des partis en opposition, des uniformes et des nudistes,

    Alors je croirai qu’une fille nue parle avec un militaire,
    Je croirai qu’un politicien montre l’exemple à la maison,
    Que le marteau et la faucille n’étaient qu’un symbole libertaire
    Et que tous les statisticiens finalement avaient raison.

    La fille parlera de guerre et le militaire d’amour ;
    Le président sur son vélo descendra les Champs-Élysées ;
    Les communistes de naguère seront les champions de l’humour ;
    La science ira à vau-l’eau et Dieu sera pulvérisé.

    Mosaïque dans le sanatorium du Comité exécutif central de toute la Russie d’Anatoly Gankevich.

  • Une sirène dans son nid

    Une sirène dans son nid

    Qu’une cigogne fasse son nid tout en haut du faîte d’un arbre
    Et me fasse le pied de grue, tout cela me parait bien normal.
    Mais qu’une sirène, quelle ironie, fasse pareil et reste de marbre
    Me semble à la fois incongru et du genre paranormal.

    Mais voilà ; ce n’est pas un nid mais une bibliothèque basse
    Où la sirène lisait un texte indiqué dans son répertoire.
    Un cyclone sans cérémonie l’a envoyée jusqu’en Alsace
    Et malgré l’absurde du contexte, elle a voulu finir l’histoire.

    Puis elle attendra un marin pour la raccompagner chez elle
    Mais en Alsace, les armateurs sont assez rares à démarcher.
    Heureusement, passe le Rhin ; une chance pour la demoiselle
    Qui trouvera plein d’amateurs de queues de poissons bon marché.

    Tableau de Hanna Silivonchyk.

  • Le monde à l’envers

    Le monde à l’envers

    Et si le temps repartait à l’envers à partir de ce vendredi ?
    Demain jeudi, après-demain mercredi… jusqu’à samedi.
    Le temps renverserait l’univers comme si ç’avait été prédit
    De renvoyer le genre humain vers les poissons de paradis.

    Savez-vous que j’entends les morts ? Et pas que mon père et ma mère !
    Tous mes aïeux, mes ascendants qui n’étaient pas encore des hommes.
    Bien avant le temps de Gomorrhe, à l’époque de l’ère primaire ;
    Premiers amibes condescendants formant nos premiers chromosomes.

    Eh bien, Mesdames et Messieurs, ils nagent tout autour de nous !
    Notre petit bocal terrestre est semble-t-il un châtiment.
    Et tout là-haut, dans d’autres cieux, qui sait si toutous et minous
    Ne voient la Terre sous séquestre en attendant son jugement ?

    Tableau de Samy Charnine.

  • La noctambule

    La noctambule

    Quand vient la nuit caniculaire, quand tout est noir et invisible,
    Mademoiselle se déshabille et reste nue jusqu’au matin
    Sans se montrer spectaculaire et sans aucune pensée nuisible,
    Elle se douche, se démaquille, s’endort dans ses draps de satin.

    Mais voici qu’un voleur l’enlève pour demander une rançon
    Et enferme dans une malle la douce et tendre créature.
    On ne sait pas si elle rêve, personne ne lui fait un pinçon,
    Tandis que le larron l’emballe et la glisse dans sa voiture.

    Le voleur est une voleuse et conduit nue dans son auto ;
    Mademoiselle est somnambule, elle aurait pu le dire plus tôt !
    Les flics connaissent la cavaleuse et la ramènent à son château
    Et recouchent la noctambule, puis disparaissent incognito.

    Tableau de Jan Bosschaert sur https:www.janbosschaert.befr-welkom.html .

  • Gare à l’appel de la louve !

    Gare à l’appel de la louve !

    Dès ce soir sous la Lune rousse, méfiez-vous des loups garous
    Et particulièrement des louves qui, en cohorte, se rassemblent.
    Non seulement elles vous détroussent et vous violentent en plein courroux
    Mais neuf mois après elles couvent un rejeton qui vous ressemble.

    Vous les verrez nues sur la lande à quatre pattes, le cul en l’air,
    Hurler afin de se rallier aux autres pour tenter l’aventure.
    Fuyez avant que ces chalandes à belle croupe populaire
    Réveille en vous le cavalier émerveillé par sa monture !

    S’il est ferré, le mâle est pris, puis connaîtra la jouissance
    Et presque mort rentrera nu, épuisé de s’être accouplé.
    Puis un beau jour le malappris devra verser sans réticence
    Quasiment tous ses revenus à la mère de ses quintuplés.

    Tableau de Jan Bosschaert sur https:www.janbosschaert.befr-welkom.html .

  • Dé-nu-ée de tout talent

    Dé-nu-ée de tout talent

    Si d’autres naissent avec un don et développent leurs talents,
    Moi, je suis née et reste nue sans le moindre autre art que mon corps.
    Mais étendue sur l’édredon à chaque rendez-vous galant,
    Je vous affirme sans retenue : que je sais battre tous les records.

    Oui, bien que j’en sois dépourvue, je suscite le génie des autres ;
    Le peintre qui me prend pour modèle passera à la postérité,
    L’amant doué ou mal pourvu devient de l’Amour son apôtre
    Et le sculpteur qui me modèle aura plus de dextérité.

    Le poète manque d’inspiration ? Me voici, sa muse authentique !
    Et nue comme sa page blanche, son encre vient me féconder.
    Rapidement sa narration devient profonde et romantique
    Jusqu’à provoquer l’avalanche d’admirations dévergondées.

    Tableau de Jan Bosschaert sur https:www.janbosschaert.befr-welkom.html .

  • Récolte temporaire

    Récolte temporaire

    L’eau de la Terre minérale mêlée aux sels de toutes sortes
    Distille le sang dont s’abreuve le premier palier de la vie.
    Vie organique et végétale que Soleil et pluies nous exhortent
    À récolter et voir la preuve par le fruit mûr qui nous ravit.

    La transformation digestive qui fait de nous des alchimistes
    Convertit le sang de la Terre en éléments pour notre corps.
    Nos actions les plus suggestives carburent aux sources optimistes
    De la richesse qu’elle enterre et qui, jusqu’ici, dure encore.

    Combien de temps cet équilibre va-t-il s’étendre ou s’arrêter ?
    Je crois que la Terre s’en moque ; elle fait juste une expérience.
    Elle a créé ses enfants libres de vivre en paix ou s’apprêter
    Demain à battre la breloque du genre humain sans prévoyance.

    Tableau de Daniel Blignaut.

  • Froide fatalité !

    Froide fatalité !

    Si la météorologie augure un brulant avenir
    Et que la science promet un réchauffement de folie,
    Elle, elle use de l’astrologie et des tarots pour voir venir
    Un peu de fraîcheur au sommet de sa boule de cristal polie.

    Fatalité caniculaire ! Il faudrait un tour de magie
    Ou invoquer un démon froid en lui offrant en sacrifice
    Son cul bien perpendiculaire au risque de blennorragie
    Pour qu’il lui fasse avec effroi l’amour au prix d’un maléfice.

    Elle l’a invoqué trois fois, il l’a baisée à chaque fois
    Et la température monte avec un feu au cul des dieux !
    Ce n’est pas un manque de foi mais là, elle reste sans voix
    Et elle commence à avoir honte de son acte miséricordieux.

    Tableau de Harold Forster.

  • Le coup de la lapine

    Le coup de la lapine

    On ne voit bien qu’avec le cœur la vraie valeur à l’intérieur
    Et l’essentiel est invisible aux yeux qui vivent au présent.
    L’absence pèse à contrecœur, imperceptible à l’extérieur,
    Et plus la souffrance est sensible, plus l’absent est omniprésent.

    Un seul lapin vient à manquer et tout le reste est fourvoyé ;
    L’amour n’est pas qu’une carotte, il est la terre, l’air et l’eau.
    Il est aussi le feu flanqué de deux êtres au cœur du foyer
    Où naîtra au fond de la grotte un lapereau nommé Angello.

    Mais pour l’instant son cœur est froid ou ses lapins pas assez chauds ;
    Ils ont dû rester au bistrot soigner leurs cirrhose du foie.
    Alors elle pleure avec effroi les larmes d’un cœur d’artichaut
    Qui s’amourache toujours trop à courir deux lièvres à la fois.

    (Tableau de Ryohei Hase.
    « On ne voit bien qu’avec le cœur, l’essentiel est invisible pour les yeux. » Antoine de Saint-Exupéry.)

    Image trouvée sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue. Si l’auteur de cette image reconnaît son travail, je serai heureux d’en mentionner le nom avec respect.

  • Autoportrait de mon arbre généalogique

    Si j’ouvrais toutes les paires d’yeux qui ont éclairé ma lignée,
    Chacune verrait une partie du puzzle de l’infinité.
    Sans doute montrerait-il Dieu en train d’essayer d’aligner
    Tout le matériel imparti pour procréer l’humanité.

    Chaque fille, chaque mère, chaque grand-mère, chacune des milliards de bouches
    Prononcerait à tour de rôle les légendes de la nuit des temps.
    Sans doute chaque moment éphémère où elles ont gémi sur la couche
    Pour avoir offert leurs corolles à un Roméo promettant.

    Les conduits en colimaçon des labyrinthes des oreilles
    Détermineraient une carte familière à qui sait l’entendre.
    Sans doute les filles et les garçons, avec une ardeur sans pareille,
    En ont suivi chaque pancarte filant sur la route du tendre.

    Tableau de Dan Casado.

  • Sur le départ

    Sur le départ

    Juste avant de mourir j’aimerais retenir
    Mon prochain véhicule et choisir sa couleur,
    Que la peur de la mort ne soit qu’un souvenir
    Et puis nourrir la Terre de mon corps de douleurs.

    Juste avant de quitter mon existence brève,
    J’aimerais emporter un fragment d’intuition
    Que je retrouverais dans le cours de mes rêves
    Et qui serait l’atout pour mes compétitions.

    Juste avant de partir je voudrais revenir
    Sur mes actes manqués et mes erreurs passées ;
    Enterrer le passé, préparer l’avenir
    Et oublier la mort à jamais compassée.

    Tableau d’Igor Medvedev sur http:touchofcolorr.blogspot.com201511igor-medvedev.html .

  • Le club des belles perdrix – 2

    Le club des belles perdrix – 2

    L’été, le club des belles perdrix marie les plaisirs de la mer,
    Entre-deux-mers et vin des sables, Bordeaux, Cassis et vins de Corse.
    Sous le soleil d’Alexandrie, se déshabillent les mémères ;
    Leur nudité indispensable s’accorde au vin et le renforce.

    Le vin, divin et naturel, s’accorde avec le naturisme ;
    Un grand cru se déguste nu pour le gouter de tout son corps.
    Ce phénomène culturel fait l’apogée du féminisme
    Et ceux qui s’en sont abstenus, tant pis s’ils ne sont pas d’accord !

    Au pied du verre, chaleur oblige, les maillots alors se dérobent
    Et les tanins donnent à la peau une couleur rouge et cuivrée
    La tenue d’Ève est de prestige car le vin fait tomber les robes
    Et moi, je tire mon chapeau devant ces parties enivrées.

    Tableau de Ronald West.

  • Le club des belles perdrix – 1

    Le club des belles perdrix - 1

    La Perdrix royale au sang bleu et à la couronne d’argent
    Se vêt d’étoile sur les ailes de plumes turquoise assorties.
    Mais ce n’est pas en cordon-bleu cuisiné à la Tour d’argent
    Mais entre dames et demoiselles que la perdrix est de sortie.

    Un phallocrate gastronome prétendait qu’une candidate
    Ferait une convive infâme pour savourer un mets divin
    Car appréciant moins qu’un homme
    à goûter les chairs délicates.
    Il interdit son club aux femmes qui ne savent pas goûter le vin.

    Maria Croci et ses amies créèrent « La belle perdrix »,
    Un club de vingt gastronofemmes
    pour boucher un coin aux messieurs.
    Je ne sais s’ils furent ennemis ou compétiteurs attendris
    Mais j’aurais aimé être une femme
    pour voir la tête de ces prétentieux.

    (Tableau de Donna Young.
    À la suite de la décision de Camille Cerf du Club des Cent de n’admettre aucune femme dans les réunions hebdomadaires, Maria Croci (1874-1965) et ses amies ont créé La belle Perdrix en 1928. Selon Gaston Derys cet ostracisme reposait sur l’idée que «la femme [était] moins capable que l’homme d’apprécier une chair (sic) délicate, de goûter un grand vin» https:fr.wikipedia.orgwikiClub_des_belles_perdrix?wprov=sfti1 .)

    Image trouvée sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue. Si l’auteur de cette image reconnaît son travail, je serai heureux d’en mentionner le nom avec respect.

  • À chaque maison son chat

    Les chats noirs, par superstition, se cachent des gens trop crédules
    Et vont reprendre des couleurs, d’un air matois, indifférent,
    En allant prendre position à la fenêtre du vestibule
    Pour mater leurs souffre-douleurs ; oiseaux, souris et chiens errants.

    Ils surveillent autant leurs maisons que le respect de leurs pitances
    Car l’aliment rythme le temps et règne sur leurs digestions.
    Peuvent varier les saisons, les journées en concomitance,
    Rien ne remettra pour autant leurs habitudes en question.

    Chat sur le toit donne le temps, chat souvent varie en automne
    Selon la patte sur l’oreille ou la queue dressée en antenne.
    Chat sur le toit, c’est important pour parer des jours monotones
    Aux pluies soudaines sans pareille qui vous maintiennent en quarantaine.

    Tableaux de Marta Orlowska sur https:www.behance.netgallery4262059Surreal-Storybook-Ladies .

  • Rêverie en bleu et rose

    L’histoire qui toujours recommence avec le lever du soleil
    Est comme l’eau de la rivière ; tout dépend de la pluie d’hier.
    Et s’il a plu une romance, un conte au pays des merveilles,
    Alors nous sommes à la lisière d’un moment clef intermédiaire.

    Mais la belle n’est pas réveillée et reste à rêver au passé ;
    Sans doute croit-elle que sa journée sera conforme aux précédentes ?
    Elle se rendort sur l’oreiller et continue à rêvasser
    Et l’heure continue de tourner dans une torpeur obsédante.

    Peu à peu les limbes s’écartent et la léthargie se dissipe ;
    Elle se redresse mais à grand peine dans les images éparpillées
    Pareilles à un château de carte dont les figures anticipent
    Une révélation soudaine sur la fille déshabillée.

    Mais voici que son ventre rond frémit lorsqu’elle se relève.
    Bien sûr ! Notre reine est enceinte et vient d’entendre le prénom
    Qui fait écho en son giron à sa rêverie qui s’achève
    Et lui a révélé l’empreinte d’un grand chevalier de renom.

    Tableaux de Daniel Ludwig sur https:poramoralarte-exposito.blogspot.com201808daniel-ludwig_20.html?m=1 .

  • Quand le chat danse, les souris s’en vont

    Quand le chat danse, les souris s’en vont

    Lorsque le chat mène la danse, toutes les souris disparaissent
    Car elles ne sont qu’amuse-gueule quand les matous sont sur leur faim.
    Pour les chats riches, l’abondance, la gourmandise et la paresse
    Restent tant que les souris veules traversent des crises sans fin.

    Car le chat connaît la musique, c’est toujours les mêmes combines ;
    Mieux vaut une mauvaise guerre pour lancer la hausse des prix.
    Comme les souris sont amnésiques, elles continuent, courent et turbinent
    Encore bien plus vite que naguère et comme on le leur a appris.

    Les danses s’arrêtent en été pour que s’amusent les cigales
    À voyager pour leurs vacances avec ou sans parcimonie.
    À la rentrée, fort hébétées par des mesures inégales,
    Elles découvrent l’extravagance des fourmis nanties dans leur nid.

    Tableau de Jorge Mascarenhas.

  • Les potiches à leurs places et les vaches seront bien gardées

    Soyez belle et taisez-vous donc, vous, la fine fleur du palais
    Qui n’avez le droit de régner que par le charme et la beauté !
    Faites taire ces faux-bourdons qui forment un étrange ballet
    Autour de vos grâces, imprégnés comme une bande d’empotés !

    Si belle que soit la vérité, elle ne peut être révélée.
    Si elle bouscule l’ordre établi, cachez-la sous un paravent !
    Dans un vase d’austérité, elle sera bien mieux recélée
    Et quand la rose aura faibli, tout redeviendra comme avant.

    Tableaux de Michael Cheval.

  • L’Ouvre-Nuit d’équinoxe

    L’Ouvre-Nuit d’équinoxe

    Si le char mené par Hélios déroule le jour sur le ciel,
    L’Ouvre-Nuit ferme le crépuscule et déploie son rideau de toile.
    Oiseau sacré, plutôt véloce, même parfois circonstanciel
    Lorsque l’heure d’hiver bouscule le bal estival des étoiles.

    D’ailes en nuages qui moutonnent en queue de météore battant,
    L’Oiseau-Minuit, son autre nom, se voit bien mieux sur la banquise.
    L’aurore boréale d’automne et l’aurore australe de printemps
    Lui ont consacré son renom auprès des fées qu’il a conquises.

    Ouvre-Nuit, tous les soirs j’attends ta traversée silencieuse
    Qui assombrit les heures bleues comme un peintre en période obscure.
    Je guette l’embrasement latent des planètes capricieuses
    Jupiter, l’astre fabuleux, et puis Mars, Vénus et Mercure.

    Tableau de Hanna Silivonchyk sur https:www.liveinternet.ruusers4248621post178925949 .

  • L’exposition finale de Septembre

    L’exposition finale de Septembre

    Septembre a fait fructifier les feuilles qu’Août avait semées
    Et les restitue au centuple pour les teindre en Octobre rouille.
    Septembre aura sanctifié l’été aujourd’hui clairsemé
    Dont les souvenirs se décuplent, se ramifient et puis s’embrouillent.

    Septembre, un peintre nostalgique, Octobre un peintre impressionniste
    À ce jour je ne sais encore si l’élève dépasse le maître.
    Mais la nature léthargique choisit les vents ascensionnistes
    Pour emporter dans le décor tous ses morts pour un jour renaître.

    Depuis le vingt-deux Septembre jusqu’aux premières journées d’Octobre,
    La Terre a le cœur en balance, son équinoxe est équivoque.
    Les nuits commencent à s’étendre, le Soleil de plus en plus sobre
    S’en va briller d’équivalence aux antipodes qui le convoquent.

    Illustration du calendrier d’Olga Ert sur https:www.behance.netgallery186943calendar .

  • Mozart et la Sirène-de-la-Nuit

    Mozart et la Sirène-de-la-Nuit

    Une sirène dans une rose, – c’était une rose marine –
    Avec deux jambes apanagée, est née au début du printemps.
    Les petits poissons l’air morose du matin au soir lui serinent :
    « Comment feras-tu pour nager sans queue ni nageoire à plein temps ? »

    Alors elle se confie aux roses qui savent consoler ses pleurs
    Et lui conseillent d’être studieuse et de perfectionner son chant.
    Elles lui composent d’une prose écrite en langage des fleurs,
    Sur ondes longues et mélodieuses, un tube touchant et attachant.

    Et notre sirène taciturne enchaîne tant de vocalises
    Que la mer les transmet aux vents qui soufflent tout autour de la Terre.
    Mozart composant un nocturne fait tout aussitôt ses valises
    Pour suivre ce chant émouvant jusqu’au fin fond du Finistère.

    Arrivé en terre bretonne, il cherche dans les courants d’air
    La voix aux douces harmonies de l’aurore jusqu’à minuit.
    « Jolie sirène, tu chantonnes tant tes aiguës si légendaires
    Qu’à ma prochaine symphonie tu seras Sirène de Nuit ! »

    Illustration de Jasenski.

  • L’apprentie-sirène

    Pour devenir une sirène, elle apprend d’un aréopage
    De poissons rouges dans leur bocal toutes les ficelles de l’ouïe.
    Elle plonge la tête sereine, authentifiée sans dopage
    Par l’émérite du local : un poisson prénommé Louis.

    Une fois qu’elle a plongé la tête, elle se redresse toute droite
    Et tant que l’eau ne coulera, de grands progrès effectuera.
    Elle ne respire pas ; elle tète les poissons d’une bouche adroite
    Qui, bien plus tard, embrassera le beau marin… qu’elle tuera.

    Tableaux de Ken Wong et Belén Ortega.

  • Madame Landru

    Madame Landru

    Madame Landru tue ses amants pour leur voler leurs vêtements.
    D’abord elle séduit ces couillons, puis elle les cuit au court-bouillon
    Après les avoir tous tondu afin que les crânes aient fondu.
    Mais elle garde les pieds et les mains… Pourquoi ? Vous le saurez demain…

    Après avoir passé la nuit à sécher sans le moindre ennui,
    Elle les pendouille sur les toits – sans la tête, ils ont l’air pantois.
    Le lendemain, de ses menottes, avec aiguilles, dés et pelotes,
    Elle faufile leurs paluches au bout des manches en peluche.

    Toujours vêtue de robe blanche, elle les expose tous les dimanches
    Et en profite pour repérer – c’est une artiste invétérée –
    Ses prochains modèles à chérir qui seront chefs-d’œuvre à périr
    D’une exécution prestigieuse par leur amante religieuse.

    Tableau de Hanna Silivonchyk.

  • Le temple

    Par le petit bouton nacré que depuis longtemps je contemple,
    Je prononcerai le sésame pour ouvrir sa villosité.
    Par la porte humide et sacrée, je pénétrerai dans ton temple
    Et Dieu redeviendra la femme qu’ « Il » a d’ailleurs toujours été.

    Je le prierai de tous ses seins en les oignant de mes baisers
    Et puis je m’agenouillerai devant l’entrée du sanctuaire,
    Devant le seuil du Saint des Saints jusqu’à ce que soit apaisée
    Mon attirance énamourée aux allégresses somptuaires.

    Il y a longtemps, Dieu était vierge. Je ne sais qui l’a fécondée…
    « Sans doute », dirait Lapalisse, « qu’il devait être hermaphrodite… »
    Moi, j’y planterai bien mon cierge d’une manière dévergondée
    Non pas par esprit de malice mais pour goûter son eau bénite.

    Sculpture de Fidelma Massey sur http:www.fidelmamassey.combronzes .

  • La fille aux yeux de kaléidoscope

    La fille aux yeux de kaléidoscope

    Après toutes les religions qui lui ont montré le visage
    D’un Dieu catholique, islamique, protestant, hindou ou hébreux,
    Sa vision, devenue légion sur tous bons et mauvais présages,
    Devint kaléidoscopique au regard d’un beau ténébreux.

    Elle vous fait tourner la tête comme le jouet éponyme
    Qui qualifie sa clairvoyance et la déploie à l’infini.
    Posez lui n’importe quelle requête, elle vous répondra magnanime
    Soit qu’elle en voit la flamboyance, soit un bel embrouillamini.

    J’en avais entendu l’histoire dans une chanson féerique
    Dont quatre garçons dans le vent s’étaient fait les anecdotiers.
    Ce souvenir prémonitoire est devenu ésotérique
    Depuis que je l’ai vue devant la vitrine d’un miroitier.

    Photo de Mikhail Shestakov sur https:500px.compshestakovm?view=photos .

  • Fécondation in color

    Fécondation in color

    Lorsque le jour sera levé sur nos deux corps tachés d’amour,
    Lorsque l’aube révélera nos accouplements sur les draps,
    Lorsque un vent aura relevé les rideaux épais de velours,
    Alors tu te réveilleras et, sur mes pigments, t’étendras.

    Mes fleurs de passions sur tes cuisses, mes branches autour de ton bassin,
    Tes rouges baisers répandus comme auréoles de cerises,
    Quelques grappes de fruits qui glissent de ta poitrine entre les seins,
    Puis vers la vallée défendue d’un buisson ardent de surprises.

    Alors tu seras fécondée de toutes ma vie en couleurs,
    De ma façon de voir le monde et de mes reflets enchantés.
    Bientôt de ton corps inondé naîtra sans un cri de douleur
    L’exposition la plus profonde de notre chef d’œuvre enfanté.

    Tableau de David Agenjo.

  • L’œil tombé du ciel

    L’œil tombé du ciel

    Imaginez que vos prières ne soient pas entièrement perdues
    Mais accumulées au dossier des affaires urgentes à régler.
    Pour mieux assurer nos arrières, Dieu, dans un moment éperdu,
    Nous envoie un œil associé à son dévouement aveuglé.

    Pour une fois qu’il lui tombe un œil pour contempler ses créatures,
    Nous comptions plutôt sur un ange qu’à un fléau tombé du ciel.
    Comment lui faire bon accueil et quelle est donc la procédure
    Pour expliquer à cet étrange envoyé nos maux essentiels ?

    Faut-il d’abord se repentir ? Faut-il se faire pardonner ?
    Comment gagner son paradis autre que par ce bel hommage :
    « Merci Seigneur de nous mentir ! Merci de nous avoir donné
    Toutes tes saintes maladies et créé l’homme à ton image ! »

    Illustration de Paul Lehr sur https:70sscifiart.tumblr.com.

  • La dame des carreaux

    Voir l’avenir dans les carreaux de sa cuisine n’est pas banal ;
    Les devins lisent dans les entrailles, d’autres dans le marc de café.
    Même en lisant le Figaro aux pronostics toujours bancals,
    Ce sont surtout les funérailles qui font les papiers parafés.

    Sans doute la dame des carreaux lit-elle son destin à l’office ;
    Ici, dans un carré d’agneau et là dans un cubi de vin ?
    Mieux que les cartes et les tarots, elle trouve un meilleur bénéfice
    En observant tous les signaux de l’art culinaire et divin.

    Tableaux d’Andrey Remnev.

  • Les Rois-boulons au mat rivés

    Les Rois-boulons au mat rivés

    Les Rois-boulons avaient ce vice de comparer leurs pas-de-vis
    Et se resserrer les écrous pour des broutilles, ni peu ni prou.
    Ils s’interchangeaient leurs rondelles dès qu’elles n’étaient plus fidèles
    Et tout cela leur tournaient la tête jusqu’à mutuelle défaite.

    À force de se faire dévisser, en avoir les poils hérissés,
    Ils inventèrent un jeu maboul, mélange d’échecs et de boules
    Sur un échiquier empilées, bien aplaties et compilées
    Par ordre de forme et de taille pour les livrer à la bataille.

    J’y ai joué, j’y ai perdu dans une partie éperdue
    Où ma reine en colimaçon se démontait à sa façon ;
    Elle m’a trahi pour un piton même pas en or mais en laiton
    Et m’ont tourné au triboulet, puis éjecté comme un boulet.

    Tableau de Leszek Andrzej Kostuj sur http:funtema.rublogillustrations15281.html .

  • Les échecs ridicules

    Au jeu des échecs ridicules, les cavaliers sans queue ni tête
    Se ruent avec les reines nues aux quatre tours de l’horizon.
    Les pions basculent et gesticulent – ils voudraient que la guerre s’arrête –
    Et un lapin, sans retenue, triche dès sorti de prison.

    Finalement quand vient la nuit, les échiquiers dessus de lit
    Permettent à tous de se coucher dont les pions en plein désarroi.
    L’escargot des cases s’ennuie et tombe en pleine mélancolie
    Depuis que les oies effarouchées ont été plumées par les rois.

    Tableaux de Judith Clay.

  • L’Étoile de mon cœur

    L’Étoile de mon cœur

    J’ai capturé le soleil fou que j’avais pourtant redouté
    Au début de notre rencontre de peur de m’y brûler les yeux.
    Je n’ai jamais aimé que vous, Madame, vous vous en doutez
    Et j’aime me blottir tout contre votre galbe pur, soleilleux.

    Lorsque mon cœur s’est fait piéger par l’attraction inéluctable
    De votre charme magnétique et la grâce de vos attributs,
    J’ai laissé l’amour m’assiéger par ses promesses délectables
    Et ma reddition extatique fut la rançon de mon tribut.

    Irradié par la chaleur de votre cœur incandescent,
    Je sens vos rayons transpercer mon corps qui se métamorphose.
    Vous m’avez changé de valeur par votre amour iridescent
    Qui, dans mon âme, a dispersé une étoile d’ivresse rose.

    Tableau de Stoffberg sur https:stoffberg.bigcartel.comproducts .

  • La Reine de la Pleine Lune

    La Reine de la Pleine Lune

    « Si la pleine Lune vous aime, pourquoi vous soucier des étoiles ? »
    Ce petit proverbe africain s’adapte parfaitement à ma reine.
    Premier quartier, d’un stratagème pusillanime, elle se dévoile ;
    Dernier quartier, d’un air mesquin elle s’amenuise, elle est sans-gêne.

    Et durant toute une semaine, elle me fait languir tous les soirs.
    Plus tard, elle montre un bout de pied, une jambe ou même une demi-cuisse.
    Sournoise, hypocrite, inhumaine, mon cœur est pris dans son pressoir
    Enfin elle sort son marchepied pour m’aimer autant qu’elle puisse.

    Gibbeuses, joyeuses et heureuses, nos amours dureront sept nuits ;
    Nulle étoile ne brillera plus fort que sa brillance sur les plaines.
    Vingt-et-une journées malheureuses me replongeront dans l’ennui ;
    J’attendrai encore et encore lorsque la Lune sera pleine.

    Tableau de Darlene McElroy sur http:www.artclassicsltd.commm5merchant.mvc?Screen=CTGY&Store_Code=acl&Category_Code=_DarleneMcElroy .

  • Les chaînes de l’amour

    Croyez-vous que l’amour enchaîne le prisonnier à sa geôlière ?
    Croyez-vous que les chaînes d’or sont plus difficiles à briser ?
    Si les querelles se déchaînent sur le chemin des écolières,
    Tout va mieux dès que l’on s’endort après s’être au lit dégrisé.

    L’amour physique est fantastique et, on le dit, spirituel.
    Puisque deux chairs valent mieux qu’une, honorons la fusion des sens !
    Joignons l’utile à l’érotique en faisant l’amour rituel
    Et séparons-nous sans rancune après sa sainte jouissance.

    Nous sommes fruits d’une expérience où l’amour puise l’énergie
    Qu’il transmet avec l’amitié, la compassion, l’affinité.
    Pour expliquer sa luxuriance, il nous suffit, en synergie,
    De réunir chaque moitié et sentir leur divinité.

    Sculptures d’Adam Martinakis sur https:www.martinakis.com .

  • Femme infiniment

    La femme au miroir comparée ouvre une porte sur l’univers
    Quand elle est face à sa psyché qui démultiplie sa beauté.
    Et je ne saurais séparer entre l’endroit et son envers
    Lequel m’a le plus aguiché dans chaque plan escamoté.

    Dans une infinité de vies et une infinité de femmes,
    L’amour serait assurément éternel pour leur rendre hommage.
    Sans doute est-ce ce que Dieu vit lorsqu’il éclaira de sa flamme
    Un monde démesurément équivalent à son image.

    Dans ce miroir j’ai découvert où mon idéal féminin
    Se répétait jour après jour à chaque moment de ma vie.
    Mon cœur s’est simplement ouvert à ce phénomène bénin
    Qu’est l’infinité de l’amour lorsque ma femme me ravit.

    2 Photos anonymes et 1 Photo de Pauline Greefhorst.

  • Riches et pauvres complémentaires

    Riches et pauvres complémentaires

    Désormais les pauvres et les riches, habitant le même bateau,
    Connaîtront les mêmes tempêtes et partageront leurs inquiétudes.
    Les pauvres resteront en friche mais c’est cerise sur le gâteau
    Grâce la poudre d’escampette pour les riches en vicissitude.

    Les pauvres n’ayant plus de chemise suivront la mode des sans-culottes,
    Les riches vivront dans l’abondance puisque seul ce qui est rare est cher.
    La société sera promise à une vie moins rigolote
    Sauf pour tous ceux dont l’ascendance aura droit à la bonne chère.

    Si déjà le pauvre fait honte, le riche attire tous les regards
    De la Jetset et des vedettes, des stars de la télévision
    Dont la prospérité remonte depuis qu’ils savent que les gares
    Accueillent aussi bien les pépettes que ceux qui n’ont plus d’illusion.

    Tableau de Rene Magritte.

  • Infiniment femme

    Marianne, l’infiniment femme, Marianne, l’infiniment mère
    Nous montre un futur répété de ce qui ne change jamais.
    Car dans ses prévisions infâmes, on n’ voit rien d’extraordinaire
    Rien que des cadres décrétés pour remplir un vide essaimé.

    Marianne nous montre le revers de la médaille plutôt que l’avers
    Et parle de fin de l’abondance avec des fesses callipyges.
    Il faudrait se montrer sévère envers ce qui va de travers
    Mais c’est toujours les chats qui dansent quand les souris sont en litige.

    Tableaux de René Magritte.

  • L’ampoule à poisson

    L’ampoule à poisson

    Mettre ma maison en ampoule ne me demande pas plus d’efforts
    Que mettre Paris en bouteille en amalgamant plein de « Si… ».
    Je sais donner la chair de poule en écrivant des métaphores
    Qui aurait charmé à merveille même Léonard de Vinci.

    Dès que tombe un quartier de Lune, j’attends le tram trente-trois-un-tiers,
    Un train de rêve à la station des voyages interstellaires.
    Les bancs de sardines communes forment un réseau ferroviaire
    Qui dessert chaque constellation dont notre Terre est titulaire.

    Je croise souvent l’ami Pierrot qui a accroché sa chandelle
    À un bout du croissant lunaire, suspendue au fil de son ancre.
    Quand je passe, il fait le fiérot avec sa plume d’hirondelle
    Qui écrit des mots lacunaires car constamment en manque d’encre.

    Illustration de Noelle.T.

  • Comme un poisson dans l’eau

    Elle avait tant d’eau dans la tête ou tant d’air – on ne sait pas trop –
    Qu’auraient pu voler des vélos ou nager des poissons-volants !
    Elle n’avait ni l’air à la fête ni l’eau au pastis du bistrot ;
    Plutôt des amours à vau-l’eau ou des amants peu convolant.

    Mais, m’a mis la puce à l’oreille, un poisson rouge assez ténu
    Qui est entré d’un pavillon à l’autre dans tous ses dédales.
    Dans cette cervelle sans pareille, il a vu son cœur détenu
    Par la passion d’un papillon apeuré dans son amygdale.

    Un papillon blanc amoureux qui ressemble à sa thyroïde
    Et s’est noyé dans un chagrin, si jeune à peine chrysalide.
    Il bat ses ailes, langoureux, en brassant les corticoïdes
    Qui donne au vague à l’âme un grain de folie et qui l’invalide.

    Son amant, le papillon blanc, ne mourra pas, évidemment,
    Il quittera son hippocampe pour les ventricules du cœur.
    Bien à l’abri, sans faux-semblants, il pourra faire galamment
    Sa cour sous les feux de la rampe… et la fille perdra sa rancœur.

    Tableaux de Ken Wong et Shiori Matsumoto.

  • Le trouble ver

    Le trouble ver

    Attention en lisant ce texte : il est pourri de trous de ver
    Et vous tombez entre les lignes avant la note en bas de page !
    C’est fait exprès dans le contexte ; ainsi les rimes et les vers
    Vous enlacent de façon maligne par son sujet anthropophage.

    J’ai découvert il y a longtemps ces trous de ver dans les bouquins
    Qui vous enferment entre leurs pages au cours d’après-midis entières.
    Je commence un livre au printemps et puis, jusqu’à la Saint-Frusquin,
    J’y reste l’été à la plage rivé à la table des matières.

    Il existe des livres en anneau comme la roue de la fortune
    Où des créatures érotiques vous piègent l’animal-lecteur.
    Et vous tombez dans le panneau sans la moindre chance opportune
    D’échapper au piège diabolique du mange-livre collecteur.

    Tableau de Wojtek Siudmak sur https:www.tuttartpitturasculturapoesiamusica.com201109wojtek-siudmak-1942-polishfrench.html .

  • Sentinelles félines

    Après l’heure entre chien et loup vient l’heure entre chat et lion.
    Tous les matous deviennent gris par la magie du crépuscule.
    Mais ils se montrent assez jaloux quand les chattes cherchent un champion,
    Un beau chevalier Mistigri qui rendra les autres ridicules.

    Maintenant à la nuit tombée, on s’est griffé, on s’est battu,
    On a entendu des batailles et des miaulements de détresse.
    Les chattes ont-elles succombé aux mâles félins courbatus ?
    On suppose que, dans la pagaille, certains ont trouvé leurs maîtresses.

    Tableaux d’Erin Vest.

  • Diane au crépuscule

    Diane au crépuscule

    Durant l’heure entre chien et loup, la chasse est ouverte aux chimères
    Et tous les démons de la nuit qui dansent entre les arbres en nombre.
    Puis la Lune au halo jaloux, d’un rayon vert dans l’outremer,
    Donne un signal et tous s’enfuient pour se cacher parmi les ombres.

    Silence opaque dans la nuit. Personne ne bouge ni ne respire.
    Seul un œil noir dans les ténèbres, seule une ombre dans l’obscurité.
    Trois flèches sorties de l’étui, trois cris d’agonie qui expirent
    Suivis d’une plainte funèbre d’un loup par solidarité.

    L’arc et les flèches sont rangés et Diane arrête ses pensées
    Le regard vide et reposé sur le soleil au crépuscule.
    L’étrange lueur orangée de l’astre essaie de dispenser
    Ses derniers rayons supposés semer l’éther de corpuscules.

    Tableau de Susan Seddon-Boulet sur http:artilo-artilo.blogspot.com201207susan-seddon-boulet.html .

  • Expressions corporelles

    Ça me faisait froid dans le dos, torse nu derrière le rideau,
    À en avoir la chair de poule, avoir peur de perdre la boule.
    Pourtant je dois me prendre en mains sinon j’y suis jusqu’à demain
    Et je dois faire ce qui se doit au risque de m’en mordre les doigts.

    Mais je me sens bien dans ma peau, je me rapproche des drapeaux,
    J’avance, sans baisser les bras, tortiller la danse du cobra.
    Je ne sais sur quel pied danser mais j’préfère ne pas y penser
    Et puis je repars d’un bon pied sans m’laisser marcher sur les pieds.

    Et brusquement ça saute aux yeux, il s’en est fallu d’un cheveux !
    Ça pend au nez, ça prend la tête et finalement c’est tout bête.
    Je tiens ma langue, reste sans voix, le trac me souffle et me renvoie
    Mais j’n’l’entends pas de cette oreille et pousse dans l’ plus simple appareil.

    Mon tape-à-l’œil, c’est essentiel, vous a fait lever les yeux au ciel !
    Vous avez mis le nez dehors et moi, j’ai battu les records.
    Si mon spectacle vous tient à cœur, moi ça me met du baume au cœur.
    Mais veuillez garder la tête froide, gare à ma prochaine escouade !

    (Tableaux d’Arnaud Bauville
    Expressions corporelles sur https:francebienvenue2.comexpressions-2expressions-corporelles .)

    Images trouvées sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue. Si les auteurs de ces images reconnaissent leurs travaux, je serai heureux d’en mentionner les noms avec respect.

  • Diane à l’aurore

    Diane à l’aurore

    Tandis qu’elle cherche sa victime aux premiers rayons qui poudroient,
    L’autre partie de son cerveau accomplit des gestes complexes.
    Il s’établît un lien intime entre la chasseuse et sa proie
    Lorsqu’elle remet à niveau les deux parties de son cortex.

    Pour ainsi dire, elles sont deux, elles sont trois ou même quatre
    Comme la prudence associée à la force par la tempérance.
    Aucun sentiment hasardeux ne vient la troubler pour combattre
    Ni crainte ne vient dissocier ou faiblir sa prépondérance.

    La cible est déjà circonscrite, et dans son œil, et dans son cœur
    Et lorsque la flèche est lâchée, la proie fait partie de son corps.
    Son histoire à jamais inscrite au florilège des vainqueurs
    Restera toujours attachée aux légendaires plus grands records.

    Tableau de Susan Seddon Boulet sur http:artilo-artilo.blogspot.com201207susan-seddon-boulet.html .

  • La peinture en lui, l’aquarelle en elle

    Puisqu’on veut décider son sexe, sa race et son appartenance,
    Pourquoi ne déciderait-on pas le coloris de sa peau ?
    Une combinaison complexe de colorations et nuances
    Et de variations de bons tons selon des goûts bien à propos !

    Finis les jaunes, noirs et blancs et vivent les bariolés !
    Osons au front nos bleus de l’âme ! Risquons un sourire rugissant !
    Teintons des cheveux ressemblant à un pinceau patafiolé,
    Échevelés en oriflamme flottant aux valeurs rouge sang.

    Photos de Werdn Occulta sur https:www.deviantart.comwerdnocculta .

  • Ubiquités

    Ubiquités

    Souvent les cloisons disparaissent de la résidence où je vis
    Et j’entends les voisins chanter par le plafond de ma cuisine.
    Je vois des gens qui apparaissent sur le palier en vis-à-vis
    Et des odeurs diligentées par le balcon de ma voisine.

    Tiens ! Le voisin reçoit sa copine – elle a du chien et même un gros ;
    Ah, l’ado du haut met sa musique – pour une fois, il a bon goût ;
    À côté, on boit sa chopine, on rit, on entonne allegro ;
    Midi, la voisine amnésique cuisine son énième ragoût.

    En effet, je vis avec eux ; leurs chiens, leurs enfants sont les miens ;
    Nous sommes comme une grande famille – ses luttes et ses rivalités.
    Les gens deviennent belliqueux et s’engueulent comme des bohémiens
    Puis chacun sort de sa coquille et s’apaise en finalité.

    Tableau d’Andrius Kovelinas sur https:www.tuttartpitturasculturapoesiamusica.com201011andrius-kovelinas.html .

  • Sur la crête

    J’ai retenu du Petit Prince sa façon de crapahuter
    De planètes de plus en plus grandes en étoiles de plus en plus belles.
    Sur les crêtes de plus en plus minces, je cours comme catapultée
    Afin de m’offrir en offrande aux dieux des montagnes rebelles.

    Et je cours de plus en plus vite et je sens le vent qui s’engouffre
    Et je me sens pousser des ailes et je suis un aéroplane.
    Mais par la force qui gravite et l’air qui s’élève du gouffre,
    Je pique tout droit en chandelle et je remonte en deltaplane.

    Tableaux de Michael Whelan sur http:www.michaelwhelan.com .

  • La revanche des plus-lourds-que-l’air

    La revanche des plus-lourds-que-l’air

    Il ne souhaitait pas voyager mais demeurer à la maison ;
    Il avait peur de s’affronter à l’incertitude du temps.
    Derrière son enclos grillagé, il s’était fait une raison
    Et se moquait des effrontés qui trouvaient son goût rebutant.

    Un matin ils ont disparu ; la bastide et le propriétaire.
    Personne n’a rien entendu, personne n’a fait attention.
    Tous les voisins ont comparu devant Monsieur le commissaire
    Qui a classé la prétendue mystérieuse disparition.

    Ce sont des oiseaux migrateurs qui ont rencontré dans le ciel
    Une montgolfière de pierre tractée par des feuilles géantes.
    Ils ont vu le navigateur, un vieux monsieur résidentiel,
    Accompagné comme équipière d’une jardinière bienséante.

    Ensemble, ils s’en vont convolant, malgré sa frousse radicale,
    Sur les nuages triompher tout en restant à la maison
    Avec des feuilles d’arbres volants des forêts vierges tropicales
    Qu’elle a réussi à greffer au toit, à la belle saison.

    Tableau de Christian Schloe.

  • Le moulin aux sourires de Louisette

    Le moulin aux sourires de Louisette

    Pour être quatre fois plus heureuse, elle tient un moulin aux sourires
    Qui multiplie chaque mimique lorsque lui prend son vertigo.
    Pour paraître plus chaleureuse, elle est également prête à rire
    En tournant de façon comique les pales à tire-larigot.

    Elle tient entre ses doigts le manche que son mari lui a offert
    Et fébrilement l’appareil fait tourner ses quatre risettes.
    Ainsi du lundi au dimanche, dans une drôle d’atmosphère,
    Le tournis n’a pas son pareil pour faire sourire Louisette.

    Or – catastrophe – quand il pleut, le moulin ne fonctionne plus !
    Tous les sourires disparaissent et perdent tout leur potentiel.
    Mais dès que revient le ciel bleu – et surtout lorsqu’il a bien plu –
    Les sourires réapparaissent dans un délire d’arcs-en-ciel.

    Tableau de Catrin Welz-Stein.

  • Par le sein bleu !

    Je ne jure que par le sein bleu, issu du saint des saints royal.
    Par la poitrine de Cléopâtre ou le buste de Shéhérazade.
    D’ailleurs le terme « Palsambleu » est resté conforme et loyal
    À tous les hommes qui idolâtrent les seins nus des belles naïades.

    Par les tétons de Madelon qui servait à boire aux garçons !
    Par les mamelles de la pucelle qui botta les Anglois de France !
    Par les seins ronds comme des melons qui appâtent comme un hameçon !
    Par les poitrines de toutes celles qui mettront leur doudounes en transe !

    Alors fini le rouge à lèvres, vive le bleu à mamelon !
    Turquoise estompé sur le galbe et, sur le téton, outremer.
    La femme gagnée par la fièvre du bleu fera dans les salons
    Un chef-d’œuvre des plus admirables d’azur si intense et mammaire.

    Tableaux de David Bromley.

  • Femmes aux couleurs de nuit

    Si la nuit tous les chats sont gris, qu’en est-il à propos des souris ?
    Pénétrons par le trou de serrure discrètement, non sans douleur.
    Pour orner les soirées aigries, afin que la dame sourit,
    Allons voir en lumière obscure le secret des femmes en couleur.

    Mon p’tit oiseau les a vues vertes, bleues, indigo ou violacées
    Offrant au regard une teinte impressionnante et soutenue.
    Elle est si belle la découverte des coloris entrelacés
    Sous une lampe demi-éteinte égayant ces peaux toutes nues.

    Femme du soir, couleur d’espoir, femme du matin, cheveux châtains.
    Entre les deux, tout est pervers du rouge jusqu’à l’ultraviolet.
    J’ai noté sur mon répertoire l’instant où l’orgasme est atteint
    Par une palette de vers embrassées entre les volets.

    Tableaux de John Holcomb sur https:johnholcomb.com .