Catégorie : 2022

  • Ciel intemporel

    Qui de la Terre ou bien du Ciel exerce-t-il son plus bel art ?
    La Terre féminine enfante ce que le Soleil lui engendre.
    Comme si le geste essentiel du dessin suivait un scénar
    Écrit par la vie qui enchante de tout son talent à revendre.

    Quel enthousiasme au crépuscule quand le soleil salue le monde
    Sous les applaudissements dorés de la nature rougeoyante !
    Puis, au moment où il bascule, à la toute dernière seconde,
    Un rayon vert sur les forêts, ultime ovation chatoyante.

    Tableau de Leo Gestel

  • À rayer de vos listes

    J’ai retrouvé ce vieux carnet de toutes mes conquêtes incarnées
    Avec ses rayures et ses coches au grenier dans un vide-poches.
    Quelques photos un peu jaunies qui ne m’ont pas très rajeuni
    Et en postface évocatrice, leurs propres notes réprobatrices.

    Nos désirs font interférence mais après tout, quelle différence ?
    L’homme serait-il dépareillé à voir sa femme ainsi rayée ?
    Les rayons aux cuisses fessues et l’ombre bras-dessus bras-dessous
    Forment un érotisme subtil sur les courbes les plus ductiles.

    Photo de Feri Lukas

  • Saint-Valentin Fleurie

    Pour effeuiller la Marguerite, ôtez-lui chacun des pétales ;
    Pour dévêtir la Valentine, laissez-lui faire son strip-tease
    Avec sa musique favorite jusqu’à la phase capitale
    Où, comme un coup de guillotine, paraît l’objet de convoitise.

    Dansez, bandez sans trop penser ; cueillez l’amour et son pistil !
    Butinez, goûter, pénétrez dans son petit jardin secret !
    Arrosez sans vous dépenser ; les fruits nécessitent un subtil
    Entretien sans cesse perpétré durant neuf mois à lui consacrer !

    Photo de charme vue sur https://sacredcharm.tumblr.com

  • Prométhée-nous la Saint-Valentin

    Prométhée exprima sa flamme à Valentine, sa bonne âme
    Qu’il comptait éblouir d’un feu – du moins tel était-il son vœu –
    Mais Zeus jugeant cet acte infâme – voler le feu pour une femme –
    L’aurait condamné quasiment à un terrible châtiment.

    Fort heureusement sa promise, pendant ce temps s’était permise
    De survoler le Mont Caucase en chevauchant ce bon vieux Pégase.
    Et c’est ainsi qu’à chaque fois que l’aigle voulait gober le foie
    Elle lui ruait dans les brancards et ce, jusqu’au prochain rencard.

    Finalement tout s’arrangea et même Zeus les dédommagea
    Après l’incident passager et leur permit de partager
    Avec les hommes ce feu sacré à condition d’y consacrer
    Une journée dédiée à la femme pour en perpétuer la flamme.

    Photo de charme vue sur https://sacredcharm.tumblr.com

  • L’impossibilité d’une île

    Mon cœur rêve d’îles désertes où l’on vit nu dans l’insouciance
    Comme si le singe, tapi en moi, restait dans son arbre éploré.
    Mon âme se montre diserte pour refouler l’insignifiance
    Du progrès qui met en émoi l’esprit sans cesse amélioré.

    Redevenir homme des bois et retourner à la nature ?
    Il semblerait qu’il soit trop tard car le temps reste irréversible.
    Les remords font le contrepoids avec la triste conjoncture
    Aux regrets toujours en retard sur ses effets imprévisibles.

    Tableaux d’Anne Delplace sur http://www.anne-delplace.com/peinture-huile.php

  • Rêveries en rémission

    La nuit, capté par l’inconscient, le flux de mes rêves s’anime
    Et passe à travers la passoire de l’esprit en demi-sommeil.
    Il puise dans mon subconscient mes désirs les plus unanimes
    Et se répand dans ma mémoire puis, fond comme neige au soleil.

    Entre l’émetteur mystérieux et le récepteur défaillant,
    Beaucoup de songes se précipitent dans l’abîme des trous du savoir.
    Combien de messages impérieux, transmis d’un souffle prévoyant,
    Tombent dans l’âme décrépite qui n’a pas su les promouvoir ?

    Tableaux d’Anne Delplace sur http://www.anne-delplace.com/peinture-huile.php

  • Et tangue le navire

    Les monstres marins ressurgissent quand on ne s’y attendait plus ;
    On les avait dit disparus, éradiqués par le progrès.
    Pourtant les alarmes rugissent comme s’ils étaient en surplus
    Et pour cette fois apparus annoncer le temps des regrets.

    Autant de fléaux sont passés et ont englouti nos cités
    Et l’humanité n’a cessé de recommencer son histoire.
    On ne compte plus les trépassés, les guerres et les atrocités
    Sans que la vie ait progressé par-dessus-tout vers sa victoire.

    Aujourd’hui la moindre tempête est synonyme d’apocalypse ;
    Le moindre rhume qui éternue menace toute la Terre entière.
    On prend la poudre d’escampette et l’intelligence s’éclipse
    Devant un virus inconnu qui franchit toutes les frontières.

    Tableaux de Francisco Fonseca

  • Au fil de l’eau de l’océan

    Bientôt ma ville submergée vivra d’une vie aquatique ;
    Mon long courrier naviguera vers des latitudes sereines.
    Mais je le verrai converger par les couloirs sud-Atlantique
    Surtout lorsqu’il rappliquera pour ensemencer nos sirènes.

    Cette nuit, ma ville sous-marine allume ses feux de positions
    Et attire ainsi mon navire qui vire de tribord à bâbord.
    Le capitaine alors s’arrime à l’ancre à sa disposition
    Et hèle celles dont le cœur chavire mais accepte de grimper à bord.

    Un an plus tard, sur le retour, les sirènes avec leurs enfants
    Qui ont affermi leurs poumons reviennent aux eaux maternelles.
    Chacun de plonger à son tour afin de rentrer triomphant
    Retrouver leurs hommes-saumons dans leurs abysses paternelles.

    Tableaux de Francisco Fonseca

  • La danse de l’homme-zèbre

    À force de courber l’échine et accepter les oppressions
    Braillées par les ânes dociles qui entretiennent sa folie,
    L’homme devient une machine qui s’agite selon les pressions
    Exercées par des imbéciles dans une sourde mélancolie.

    Pareil au zèbre dont les rayures le distinguent dans la savane,
    L’homme oppressé devient la proie des fauves qui ouvrent la chasse.
    Pour échapper à la souillure, il passe à des actions profanes
    Pour s’enfuir du chemin de croix vers lequel l’étau/l’état le pourchasse.

    Tableau de Robert Heindel

  • Le paradis intoxiqué

    En vérité, tout est toxique, tout est poison écornifleur
    Malgré une belle apparence et l’envie de croquer dedans.
    La beauté paraît dyslexique avec le langage des fleurs
    Dont la grammaire fait carence à dater de la pomme d’Adam.

    Tous les petits démons sucrés n’y font pas, non plus, exception ;
    Leur séduction nous turlupine et nous abuse à contrecœur.
    Même si le féminin sacré est d’immaculée conception,
    Telle une rose et ses épines, sa flamme vous brûlera le cœur.

    Tableaux de Michael Cheval sur http://chevalfineart.com/portfolio/new-releases

  • La chatte de Madame Seguin

    La chatte de Madame Seguin serait la plus belle du monde
    D’après les on-dit répétés que j’ai perçus dans l’escalier.
    Combien en ont eu le béguin ? Combien d’amoureux à la ronde
    Sortent par ces mots hébétés, las, essoufflés sur le palier ?

    J’ai souhaité connaître la chose et sous un prétexte un peu sot,
    Je sonnai en catimini et entrai l’air intéressé…
    Une femme nue prenait la pose, sa chatte agitait un pinceau
    Et m’annonça : « Presque fini ! Pourquoi êtes-vous tous si pressés ?

    Tableau de Jeanne Saint Chéron

  • Ondes rouges

    Dans le noir et blanc de mes rêves, souvent se détache une teinte
    Qui souligne en fausses couleurs un message issu de mon âme.
    Quelquefois la nuance est brève mais souvent elle met son empreinte
    Comme pour accentuer la douleur d’un cri qui surgit de la trame.

    Marquées au fer rouge du cœur, combien de blessures profondes
    Remontent étrangement la nuit après des années d’amnésie ?
    Comme si l’eau de la rancoeur après avoir rejoint d’autres ondes
    Passées sous les ponts de l’ennui se teint d’une encre de jalousie.

    Tableaux d’Izumi Kogahara sur http://touchofcolorr.blogspot.com/2015/11/izumi-kogahara.html?m=1

  • Le phénix de glace

    À l’instar du fameux phénix qui renaît toujours de ses cendres,
    L’équivalent existerait mais qui renaîtrait de ses glaces.
    Sans démonstration trop prolixe, il suffit d’attendre décembre
    Et voir en quoi consisterait le spécimen qui le remplace.

    Dès l’instant des premiers frimas, vient comme une mort à rebours,
    Une sorte de printemps renversé qui apparaît lors du solstice.
    Alors dans ce microclimat dans les campagnes, loin des bourgs,
    Renaît la chimère inversée qui évoque un phénix factice.

    Photo de Tammy Shrive sur https://www.thefabulousweirdtrotters.com

  • Moi, mes souliers

    Tant mes souliers ont voyagé depuis l’aube de mes premiers pas,
    Tant mes souliers se sont usés d’avoir couru sur les remparts.
    Mes pieds s’y sont apanagés avec ampoules et sparadrap
    Et tout mon cuir désabusé se craqueler de toutes parts.

    Mais ils m’ont tellement soutenus que je n’ saurais prétériter
    Leur soutien en toute occasion, sauts d’obstacles et ainsi de suite.
    Et les pieds d’une femme nue, observés avec témérité,
    Me prétextent une conclusion ou l’envie de prendre la fuite.

    Tableau de René Magritte

  • Rien à dire

    Rien à dire contre le silence qui lui tient lieu de forteresse
    Comme un interdit humiliant qui la hisse au-delà de moi.
    Malgré toute ma vigilance à trouver ce qui l’intéresse,
    Je me heurte au mur résiliant qui met tous mes sens en émoi.

    Tous mes essais pour contourner son nid d’aigle le furent en vain ;
    Hautes murailles garnies de ronces, gens protecteurs de toutes sortes.
    Alors je m’en suis retourné lentement comme il en convînt
    Car, n’obtenant nulle de réponse, il fallait bien que je m’en sorte.

    Tableau d’Izumi Kogahara sur http://touchofcolorr.blogspot.com/2015/11/izumi-kogahara.html?m=1

  • Sainte Nitouche

    Je l’ai zoomée à la folie de mon télescope indiscret,
    La Sainte-Nitouche d’en face de l’autre côté de la rue.
    Elle trouble ma mélancolie en me dévoilant les secrets
    De l’intimité efficace d’un sein brusquement apparu.

    Pourtant elle sait que je l’observe et le soir en levant nos verres
    Nous trinquons ensemble à distance avec un sourire convenu.
    Cependant elle, sur la réserve, me signifie d’un doigt sévère
    Qu’elle m’oppose toute résistance même en s’affichant toute nue.

    Tableau de Thierry Marchal sur http://www.marchalexpo.com/oeuvres_thierry_marchal.htm

  • La bergère en colère

    Beaucoup trop d’histoires ont coulé dans l’eau sous les ponts de chez nous
    À propos des coups de colère pour la bergère envers ses chats.
    Depuis tout le temps écoulé, il apparaît que son courroux
    N’était pas si spectaculaire que celui qu’on lui reprocha.

    Si les chatons buvaient son lait, à peine trait de ses brebis,
    Ils chassaient aussi tous les rats en échange de leur pitance.
    Mais son mari, homme fort laid, obnubilé par le débit
    Traquait les chats, ces scélérats, et les maintenait à distance.

    Alors la bergère en colère chassa son avare de mari
    À grands cris et coups de bâton qu’on entendit sur plusieurs lieues.
    Depuis, les chants épistolaires l’ont échauffée au bain-marie
    Et le lait du pauvre chaton s’y est répandu au milieu.

    Tableau de Thierry Marchal sur http://www.marchalexpo.com/oeuvres_thierry_marchal.htm

  • L’arbre de la connaissance

    J’eusses aimé croquer comme Adam dans le fruit de la connaissance,
    Découvrir le péché de chair, la gourmandise et la luxure !
    Faire, en premier, tout un ramdam, semer la désobéissance
    Parmi les angelots si chers en en leur jetant les épluchures.

    J’eusses aimé vivre sans retenue avec Lilith en naturistes
    Au paradis revendiqué au nom de notre liberté.
    Puis, Ève et ses sœurs, toutes nues, aux perspectives futuristes,
    Auraient vécu sans polémiquer leur éternelle puberté.

    Tableau de Rafal Olbinski sur https://www.tuttartpitturasculturapoesiamusica.com/2016/12/Rafal-Olbinski.html

  • L’ombre jaune

    L’art de conjuguer sa maison à sa voiture donne raison
    À la tendre similitude d’agrémenter ses habitudes.
    Un vaisseau de pierre immobile, un véhicule automobile,
    Pour profiter du temps qui passe, repasse et qui courbe l’espace.

    Jaune citron, un peu acide dénote un caractère lucide
    Comme un soleil en solitaire qui roule tout autour de la Terre.
    Monsieur, Madame, couple charmant, ont dû échanger le serment
    De ne voir pour tout coloris qu’un jaune paille ou canari.

    Photo de @hytha.cg

  • L’Esprit de l’Afrique

    Dans la nuit soudaine et violette, chacun se retrouve au point d’eau
    À l’heure lunaire indiquée à la Corne de Rhinocéros.
    Les animaux sur la sellette, les prédateurs en commandos,
    Un curieux mélange imbriqué de faune paisible et féroce.

    Éléphants et hippopotames et tous les autres pachydermes
    Chacun conduit sa caravane sous la houlette des léviathans.
    Puis, quand l’obscurité entame, d’une nuit qui tombe à son terme,
    Sa primauté sur la savane, l’Esprit de l’Afrique les attend.

    Tableau de Robert Heindel

  • Ô Lotus !

    Fleuri de rose vénitien, le Grand Canal semble tranquille
    Sous l’odeur des lotus éclos qui l’endort dans ses rêves roses.
    Un marchand de sable phénicien coupe les eaux de la presqu’île
    Afin de gagner son enclos sous un ciel d’aurore morose.

    Originaire de Phénicie, au sable si rose et si fin,
    Il répand les parfums d’orient tout autour de l’Adriatique.
    Le tourisme bénéficie jusqu’à ses ultimes confins
    De ce trafic répertoriant toutes les dépendances hypnotiques.

    Venise fleurie

  • Chatonades

    Dans la nuit noire, les chatons excellent au jeu des silhouettes ;
    Velours au bout des ripatons, ils aiment jouer les girouettes.
    Eux, savent d’où vient la lumière qu’ils renvoient pareil à un phare
    Postés au bas d’une chaumière d’une fixité que rien n’effare.

    Minet, derrière sa fenêtre, joue comme à la télévision
    Et prend son temps pour reconnaître où voler quelques provisions.
    S’il observe le temps qui passe, la météo et les infos,
    Il cherche à faire un coup d’audace car à tout âge, les chats sont faux.

    Photo d’Andofuchs

  • Promenade naïve

    Je m’accompagne naïvement le cœur d’enfant dans les contrées
    À la recherche d’un espace où le temps n’a pas d’importance.
    Je communique tardivement mais il est temps de rencontrer
    Cette entrevue que j’outrepasse à travers le temps à distance.

    Tiens ! Me voici sous le grand chêne avec l’ami imaginaire
    Qui était promu seul confident et détenteur de tous mes biens.
    Et moi je rétablis la chaîne entre mon présent ordinaire
    Et mon passé se dévidant vers l’avenir qui est le mien.

    Je me souviens de son guichet qui s’ouvrait à même son tronc
    Et son visage souriant suivant mes pensées surannées,
    Ma timidité affichée et mes allures de poltron,
    Sans savoir que l’ami brillant, c’était moi, dans plusieurs années.

    Tableaux de Paul Corfield

  • La reine entre deux rois

    Le roi de droite hache le temps pour ne pas perdre une seconde.
    Son temps, précieux comme l’argent, est minutieusement compté.
    Économe du moindre instant, il fait payer à tout le monde
    Un impôt qu’il va partageant avec ses amours escomptées.

    Mais la Reine, elle ne compte pas ; l’amour ne sait pas ce défaut.
    La Reine attend impatiemment que son roi cesse cette addiction.
    Le temps, quand il part au combat, suspend son vol en porte-à-faux ;
    Elle s’en va chercher galamment un réconfort à l’affliction.

    Le roi de gauche, d’un amour ivre, ne fait pas les choses à moitié ;
    Dans sa tête, le temps peut trotter avec ses courses contre la montre !
    Lui, c’est un homme du temps de vivre, du temps d’aimer et de châtier
    Et quand la Reine vient s’y frotter, impétueuse est la rencontre.

    Tableaux de Victor Nizovtsev

  • L’éternité perpétuelle

    Il est interdit de mourir sous peine d’aller en prison
    Car la mort devient illégale et votre vie obligatoire !
    L’idée n’a cessé de nourrir cette suprême guérison
    Que l’homme espère sans égale, orgueilleuse et jubilatoire.

    Mais l’homme dans cet ouroboros devra réviser sa copie
    Car l’excès de reproduction devient super population.
    À moins que la mort, plus féroce, vienne braver cette utopie
    Et passe à la surproduction de virus en circulation.

    Illustration de Yulya Shironina

  • Le passe en manque d’air

    Dans un pays imaginaire, l’air est imposé par l’état
    Qui vous oblige à respirer au moyen d’un adaptateur ;
    Grosse machine poitrinaire mais encore en version bêta
    Dont le design est inspiré de nos anciens aspirateurs.

    Évidemment tout le monde triche car le sommeil n’est pas taxé
    Et le virus du sommeil frappe tous les systèmes immunitaires.
    Et comme on ne prête qu’aux riches, ceux-ci se trouvent surtaxés
    À cause des pauvres qui s’attrapent tous un coma communautaire.

    Tableau de Robert Heindel sur http://todaysinspiration.blogspot.com/2013/11/another-look-at-robert-heindel.html?m=1

  • Ève et la licorne

    Quand Dieu parlait aux animaux, ceux-ci l’écoutaient en silence
    Mais ses échanges avec Ève lui donnaient du fil à retordre.
    Il en parla à demi-mot, car il n’aimait pas l’insolence,
    À Adam, son meilleur élève, afin qu’il y mette de l’ordre.

    Celui-ci à bout d’arguments s’en alla trouver la Licorne
    Lui proposant d’intervenir grâce à son don de télépathe.
    Ainsi dans un grand dénuement, Elle alla proposer sa corne
    À Ève qui la vit venir se dandinant des quatre pattes.

    Avec Ève, l’organe phallique fit des miracles coutumiers
    Comme y réussissait son homme quand il désirait décharger.
    Mais le serpent machiavélique les invita sous le pommier
    Et embrocha autant de pommes que la licorne pouvait charger.

    Elles mangèrent le fruit défendu en bénissant l’initiative.
    Ainsi Dieu punit le serpent, Adam et Ève, puis, la licorne.
    Les trois premiers furent descendus de toutes leurs prérogatives
    Et la licorne, à ses dépens, perdit et son nom et sa corne.

    Sculpture d’Elya Yalonetski sur https://www.artfinder.com/artist/yalonetski/?epik=dj0yJnU9UzF4ZnFPcUhzaTJuMmE0SkNpN0JwQ2lBQmJVd3NuY2cmcD0wJm49OUZRY0NvdERBUlFTYUhyQkdTWGR5USZ0PUFBQUFBR0hFTG8w

  • Vendredi en bocal

    Il faut pêcher vers l’extérieur encore plus loin, en haute mer
    Car les poissons ont disparu de nos rivières et nos étangs.
    Et moi, cloîtrée à l’intérieur de mon confinement amer,
    J’ai trop d’étiquettes parcourues, labellisées au fil du temps.

    Le thon a payé son octroi à l’imposition de la pêche ;
    Le hareng sort de temps en temps garni de sauce rémoulade ;
    La sardine à l’huile à l’étroit avec les pilchards escabèche
    Et le saumon sont mécontents du mercure qui les rend malades.

    Illustration de Marija Tiurina

  • Cupidonia

    Cupidonia largue ses flèches toutes ensemble en une seule fois
    Pour décocher le maximum de prétendants à ses avances.
    Si d’aventure elle se pourlèche à l’idée de plusieurs renvois
    De consentements optimums, elle devra tenir la cadence.

    Cupidonia, organisée, possède plusieurs cordes à son arc ;
    Autant de chambres, autant de lits afin d’accueillir tout le monde.
    Comment peut-elle totaliser tant d’amours et mener sa barque ?
    Répondez donc à sa folie et… attendez qu’elle vous réponde.

    Source : https://issuu.com/lofficiel_levant/docs/ol62/71?epik=dj0yJnU9RkcwLWF3Q0Jyd2RxZlh0Wm5JSTB6TTBKUTZaNWcyOC0mcD0wJm49b2VLNl9RRVgxUl8yN2t4UzZWSjdUZyZ0PUFBQUFBR0hDNzV3

  • L’homme qui s’en allait ailleurs

    Souvent, je me sens invisible par l’indifférence agressé
    Comme si je n’existais guère qu’un rêveur en apprentissage.
    Mais si derrière, imprévisible, surgit un voyageur pressé,
    Je deviens prétexte de guerre à réclamer droit de passage.

    Imperceptible ou importun caractérisent mes semblables ;
    Nous ne sommes que figurants par rapport aux rôles principaux.
    Serais-je donc inopportun de supposer invraisemblable
    Que mon rôle le plus fulgurant soit celui du dernier repos ?

    Tableau de Vladimir Kush sur https://www.tuttartpitturasculturapoesiamusica.com/2012/10/Vladimir-Kush.html

  • Croisements et transits

    Enfermé dans sa tour d’ivoire, il regardait passer le temps,
    Regarder s’écouler le fleuve de son impassible existence.
    À chaque heure il savait prévoir les habitudes des habitants
    Qu’il fasse soleil ou qu’il pleuve… Ô éternelle inconsistance.

    J’en ai vu des maisons semblables avec les mêmes locataires
    Qui comptabilisent le monde comme une gare ferroviaire.
    Les histoires invraisemblables animent leurs vies terre-à-terre,
    Spectateurs à chaque seconde du temps au fil de la rivière.

    Tel est, condamné dans sa tour, le sort de notre ancien champion
    Qui a chuté au jeu de l’oie sur la case de la prison.
    Dès lors, Il doit passer son tour en attendant qu’un autre pion
    Tombe sous le coup de la loi et lui ouvre son horizon.

    Tableau de Richard Johnson sur http://www.richardjohnsonillustration.co.uk

  • La mécanique du kamasutra

    Dans la machine de l’amour, les engrenages se déchaînent ;
    Toutes les articulations entraînent un moteur de plaisir.
    Un peu d’huile, un soupçon d’humour, oindront jusqu’à l’année prochaine
    Les rouages de la passion sur tous les ressorts du désir.

    Le kamasutra mécanique, soumis aux lois de la physique,
    Demande beaucoup d’énergie et planifie ses rituels.
    Au début, un peu de technique mais, après beaucoup de pratique,
    Le tout s’anime en synergie d’un mouvement perpétuel.

    Et pour fêter la chandeleur, étalez-la comme une crêpe ;
    Elle tiendra le manche de la poêle bien huilée et toute brûlante.
    Par petits gestes batifoleurs, fourrez-la de crème et de cèpes
    Et digérez l’ensemble à poil au cours d’une sieste succulente.

    Image trouvée sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue. Si l’auteur de cette image reconnaît son travail, je serai heureux d’en mentionner le nom avec respect.

  • La femme qui partait en fumée

    Au printemps, les filles de joie en amour font feu de tout bois ;
    En été, les filles embrassées rougissent et leurs cœurs s’embraser ;
    À l’automne, fille devient femme et les grands sentiments s’enflamment ;
    En hiver, d’amours consumées, les femmes partent en fumée.

    Le cœur agit comme un creuset où les passions sont abrasées
    Puis, chauffées aux feux de l’amour toute la nuit jusqu’au petit jour.
    Enfin sous l’empire des sens, le corps brûle de toute son essence
    Et l’esprit vient s’acheminer par l’âme en forme de cheminée.

    Photo de Smwallday

  • Toute la misère du monde

    Les Africains, les Kosovars et tous les désorientés
    N’apportent pour toute richesse qu’un ADN à bonifier.
    Jamais de France et de Navarre, l’assaut ne fut tant commenté
    Par ceux qui se désintéressent d’une planète à unifier.

    Aujourd’hui beaucoup d’animaux sont acclimatés à la ville
    Et commencent à frapper aux portes pour réclamer un pied-à-terre.
    Ainsi les besoins minimaux de notre société civile
    Vont s’adapter, en quelque sorte, à tout habitant de la Terre.

    Tableau de Marion Peck sur http://miroirmagazine.com/2012/11/04/marion-peck

  • La princesse et le marque-page

    « La princesse et le petit pois » reste le moyen efficace
    Pour reconnaître la fine fleur parmi les boutons putatifs.
    J’avance un argument de poids chez les libraires perspicaces
    À glisser, d’un mot qui affleure, un marque page figuratif.

    Seule une lectrice assidue remarquera le madrigal
    Et appréciera la valeur du cœur d’un galant bouquiniste.
    Et tous les autres individus resteront frustrés sans égal
    D’une vie sans la moindre chaleur d’une romance opportuniste.

    Tableau de Vladimir Kush sur https://www.tuttartpitturasculturapoesiamusica.com/2012/10/Vladimir-Kush.html

  • Le cœur sur la main

    Tout ce que j’ai à vous offrir et qui me vient de mes parents
    Est réduit à mon appareil reproducteur et génital.
    Mais combien de fruits à mûrir dans ce jardin accaparant
    Qui sonnent, à nul autre pareil, comme un suprême récital !

    Serait-ce le fruit du hasard ou sagesse de l’évolution
    Qui font recombiner nos gènes en transmutations héritables
    Vers l’excellence d’un Mozart qui ferait sa révolution
    Ou le génie d’un Diogène qui cherche un homme véritable ?

    Tableau de Ekat sur http://www.ekat.fr/peinture-blanches.html

  • Tout ce qui me passe par la tête

    Une fois le grand nettoyage effectué dans ma maison,
    Dans tout le cœur, dans tout le corps, reste celui de mon esprit
    Où ont dormi, gens de voyage, anges et démons en déraison,
    Qui ont battu tous les records pour remporter le premier prix.

    Infos, intox, non recyclables iront à l’incinérateur ;
    Vos mises en boîte de conserve dans les containers à métaux ;
    Vos convictions invraisemblables feront rire les narrateurs
    Et j’autorise qu’ils s’en servent sans qu’il n’y ait droit de veto.

    Illustration de Marija Tiurina

  • En déballant ce que j’ai dans le cœur

    Au printemps, les grands nettoyages permettent de vider tout le corps
    De tout ce qu’il a assimilé durant toute la morte saison.
    À commencer par un voyage pour aller battre des records
    Dans ce qui est dissimulé dans mes mémoires sans raison.

    Puis, tout ce que j’ai sur le cœur est vidangé par les artères ;
    Après, je purge la vieille cave, la veine et le système porte ;
    La bile, cette amère liqueur, et tous les fluides délétères
    Finissent dans la fosse concave en compost de natures mortes.

    Quand tout est lavé et vidé, je remplis de petits bonheurs ;
    Belles images dans la mémoire, avec coups de cœurs en folie ;
    Les amitiés consolidées sont inscrites au tableau d’honneur
    Et j’efface de tous mes grimoires toute trace de mélancolie.

    Illustration de Marija Tiurina

  • Trois matins de Shéhérazade

    Au gui l’an neuf tout recommence, Shéhérazade se met en transe
    Après sa nuit bleue et profonde, elle déguste un thé au jasmin.
    Elle redémarre une romance avec intrigues à outrance
    Pour que le Sultan se morfonde à patienter jusqu’à demain.

    À Pâques ou à la Trinité, la vie, la mort s’enchaînent encore
    Comme une éternelle routine qui vit qui meurt et puis, renaît.
    Perpétuelle féminité qui rythme neuf mois de son corps
    Depuis les prémices enfantines dont les amours tambourinaient.

    À Noël comme au réveillon, Shéhérazade se fait vieille ;
    Les mille-et-une nuits corrodent un peu le cœur, beaucoup la femme.
    Elle guette le premier rayon d’un soleil que trop longtemps veillent
    Ses yeux fatigués émeraude brillant sur les bleus de son âme.

    Costumes du ballet « Shéhérazade » de Nicolas,Rimsky-Korsakov par Boris Israelevich Anisfeld

  • Jardinières des quatre saisons

    Comment avoir une main verte lorsque j’ai le cœur à l’envers ?
    Peut-être avec des fleurs à rire, rire jaune de préférence.
    Les Jonquilles me déconcertent, les tournesols sont un calvaire
    Lorsque je les vois parcourir d’Est en Ouest leurs révérences.

    Comment paraître un peu fleur bleue lorsque j’affiche un air morose ?
    Sans doute avec des fleurs couleur d’un ciel d’azur et pastoral.
    Les hortensias trop globuleux, les myosotis pas assez roses
    Et l’agapanthe d’une pâleur à me rabaisser le moral.

    Comment écrire à l’eau de rose quand j’écris des poèmes tristes ?
    Probablement des fleurs du mal trempées dans un parfum de joie.
    J’ai des coquelicots dans ma prose avec des épines du christ
    Mais si leur rouge est optimal, l’encre est d’un effet rabat-joie.

    Et comment offrir des fleurs blanches à celle qui se marie demain
    Et qui me blesse ainsi le cœur par les épines du mariage.
    Hélas je pleurerai dimanche et jetterai sur le chemin
    Toutes mes bouquets avec rancœur et ma boîte de coloriage.

    Photos d’Endo Ayumi

  • Cachés, masqués, violés

    Pour vivre heureux, vivons cachés mais pas ensemble, s’il vous plaît
    Car je sens des mains baladeuses et des intentions impudiques.
    Jamais ne pourrez détacher cette attraction qui vous complaît
    Arguant la nature galvaudeuse et le beau sexe fatidique.

    Aujourd’hui tout est inversé ; pour vivre heureux, vivons masqués ;
    Cachons notre naïveté derrière un passe sanitaire
    Jusqu’à ce que soient renversés ces polichinelles fantasqués
    Qui nous plongent en lasciveté dans un régime totalitaire.

    Illustration de Marija Tiurina

  • En queue de poissons rouges

    Tout finit en queue de poisson quand tout débute par la peur
    Car à trop noyer le poisson, il finit cuit à la vapeur.
    Fi de ces sérums incolores, ces eaux de mer pour V.I.P.,
    Ces catastrophes indolores et la vaccinothérapie !

    Et si tous ces milliards de doses finissent par aller dans la mer,
    Les poissons auront l’overdose d’effets secondaires amers.
    Bientôt quand j’irai à la pêche, je risque à mon tour d’être happé
    Par tous les revanchards revêches de la lignée des rescapés.

    Image trouvée sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue. Si l’auteur de cette image reconnaît son travail, je serai heureux d’en mentionner le nom avec respect.

  • Le bal des sirènes sans-gène

    J’ai reçu une invitation dans l’aquarium de mon poisson.
    Une enveloppe bleue nacrée, toute petite et qui flottait
    Presque comme en lévitation, à la surface comme un glaçon.
    Je lus ce petit mot sacré avec la voix qui chevrotait :

    « Cher Monsieur, vous êtes invité au bal des sirènes sans-gène.
    Lundi soir, juste après la douche, approchez-vous, nu, du bocal.
    Plongez dans sa concavité et n’ayez crainte pour l’oxygène ;
    Nous vous ferons du bouche-à-bouche pour un petit bonheur buccal. »

    Illustration de Scott Gustafson sur http://madamkartinki.blogspot.com/2012/12/scott-gustafson-1.html

  • Ses vendredis à elle

    Elle voulait changer d’atmosphère et se retirer de ce monde
    Où ne reste nulle île déserte ni oasis en plein désert.
    Les montagnes ou la stratosphère lui donnant des nausées immondes,
    La mer apparut plus ouverte et les poissons pas moins diserts.

    Elle a échangé son local qui sentait trop l’air confiné,
    Étanchéifié ses fenêtres et rempli d’eau l’appartement.
    Puis elle a passé le bocal avec deux doigts d’air comprimé
    Enfin elle s’est sentie renaître et son poisson, également.

    Photo de Sophie Black

  • La beauté du futur

    Hier, les critères de beauté flattaient les grasses silhouettes
    Et les grands peintres ont exposé leurs plus aimables corpulences.
    Mais aujourd’hui, mal fagotées, les femmes se montrent fluettes
    Au risque d’être indisposées et emmenées en ambulance.

    Gageons que la mode optera pour le retour des rondelettes
    Et Barbie-Boudin relookée rendra aux grosses leur prestige.
    Jamais ton gras ne cachera, finies les cuisses maigrelettes
    Et bienvenue sur le Touquet Ô Vénus aux fesses callipyges !

    Photo de Carolina Mizrahi

  • Saint-Michel-l’Ange

    Quand le matin, les mots s’échappent dans le brouillard de mes pensées,
    Je lâche prise au descriptif de ce spectacle féerique.
    Pas une émotion ne réchappe à l’œil du cœur récompensé
    Justifiant ce droit perceptif par son pouvoir allégorique.

    Et lorsque la lumière change, les mots se vident de leur sens
    Car ils me paraissent éphémères devant la beauté indicible.
    J’écoute le vent qui échange ses impressions dans cette essence
    Où le verbe ne peut que se taire sinon d’une prose invisible.

    Photos de Mathieu Rivrin

  • Amsterdam

    Drôles de dames à Amsterdam dans chaque immeuble, à chaque étage !
    Comme une maison de poupées issue d’un faux conte de fées.
    Car ne vous trompez point de dame ! Ces fées-ci ne sont pas très sages !
    Plutôt fessues, tête coupée, plutôt sorcières échauffées.

    Elles traversent les cloisons et communiquent par les greniers,
    Par les toits et les cheminées et par les caves les plus proches.
    Le Sabbat en toutes saisons se fête avec les chaudronniers
    Qui se sont tous acheminés pour mourir d’amour à la broche.

    Photo de Arden_nl

  • Et Dieu a dit « volez ! »

    Combien sont-ils affolants, ces merveilleux fous volants
    Dans leur drôles de machines qui nous font dresser l’échine.
    Sur les ailes de la foi, plus près de Dieu toutefois,
    Ils ne craignent le vertige, eux, les rois de la voltige !

    Si tu as le vent en poupe et que rien ne te la coupe,
    Choisis ton baptême de l’air dans un avion similaire.
    Tu y croiseras les anges et, si l’avion les dérange,
    Ils t’accorderont tes ailes si le pilote fait trop de zèle.

    Source clipmass.com

  • L’hôtel du virage

    Ce n’est pas l’hôtel du rivage mais plutôt celui du virage
    Et la marée est remplacée par des coups de freins bien placés.
    Venez y dormir toutefois, ne serait-ce qu’au moins une fois,
    Pour assister aux accidents célèbres dans tout l’Occident.

    Ne cherchez pas ! Il est en Suisse. Hélas je crains que l’on ne puisse
    Y loger sans passe sanitaire ! Dommage, il était salutaire
    D’y dormir la fenêtre ouverte afin de faire comme découverte,
    La montée des non-rescapés par-delà les monts escarpés.

    L’hôtel Belvédère est un hôtel situé sur la route du col de la Furka près du glacier du Rhône dans le canton du Valais en Suisse – Photographié par Tom Juenemann

  • Au pas de la pie

    Au pas de la pie qui chante, la queue basse, la tête haute,
    Avec la garde montante, nous marchons sans faire de faute.
    Sonne trompette éclatante, sonne, résonne et tressaute
    Sous la cadence battante du tambour qui ravigote !

    À l’école des maraudeurs, des voleurs, des chapardeurs,
    Nous apprenons la discipline sous l’égide de la pie voleuse.
    Marchant au pas du rôdeur, pas feutrés avec ardeur,
    Entraînés pour la rapine, c’est nous la Garde Enjôleuse.

    Photo de Fatihcindemirrr