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  • Vendredi, grasse matinée

    Vendredi, grasse matinée

    Vendredi, grand jour de farniente parmi le peuple des abysses.
    Non pas que ce soit un jour saint mais une journée lumineuse ;
    Après une semaine « al dente » avec les marins qui subissent
    Du lundi au jeudi l’essaim de nos sirènes butineuses.

    Puis le samedi, place au jeûne, après les agapes joyeuses
    Où elles ont pu se réjouir en toute camaraderie.
    Quant au dimanche, place aux jeunes, en bonnes mamans pourvoyeuses,
    Elles aiment voir leurs enfants jouir avec quelques pâtisseries.

    Mais aujourd’hui c’est vendredi et le vendredi, c’est sacré !
    Après un déjeuner aqueux, savourer son bain d’algues vertes,
    Apprécier sans discrédit l’instant d’intimité sucrée
    Quand la main caresse la queue en vue d’étroites découvertes.

    Dans l’alcôve d’un corail rose, la queue frémit, frôle la perle.
    Un vrai plaisir, en douce osmose, coule de l’organe sensuel ;
    Une écume, nacrée d’une prose, qui éclate, jouit et déferle
    Sa vague sur l’anastomose d’un pur orgasme consensuel.

    Tableau d’Anastasia Elly Koldareva.

  • Les cartes érotiques du tendre

    Les cartes érotiques du tendre

    Parfois sur la carte du tendre, l’amour nous impose son jeu ;
    Un jeu où la guerre est absente ; les échecs n’en font pas partie.
    Ouvrons ses règles sans attendre et envisageons ses enjeux :
    La réussite est sous-jacente mais demande de la répartie.

    Ouvrons donc notre jeu de cartes, surveillons les reines et les rois !
    Les valets seront messagers et les as seront nos champions.
    Surtout jamais on ne s’écarte du but dont le seuil est étroit
    Et les problèmes passagers seront vaincus d’un simple pion.

    Mais lorsque la Dame de Cœur rejoint le Roi qu’elle a choisi,
    Toutes les cartes sont promues au rang de demoiselles d’honneur.
    Alors les deux époux vainqueurs se marient avec courtoisie
    Et lorsqu’ils se retrouvent nus les as rougissent de bonheur.

    Et quand le tapis se déploie dans l’alcôve aux rideaux soyeux,
    Les jokers, complices farceurs, se rejoignent en bons camarades.
    La pioche du plaisir en émoi et le désir montent audacieux,
    Puis l’on se fond dans la douceur d’une luxurieuse mascarade.

    Cartes de Hilda de Volosov Vladimir.

  • Luciféra

    Luciféra

    Lucy verra Luciféra dès qu’elle se mettra debout,
    Sera en mesure d’entendre et d’écouter la suggestion
    De croquer le fruit qui fera mettre le Créateur à bout
    De nerf lorsqu’elle ira prétendre que c’est bon pour la digestion.

    Pauvre Lucy ! À peine levée, la voici déjà condamnée
    À accoucher dans la douleur et s’faire envoyer sur les roses.
    Hélas Dieu n’a pas relevé de circonstances spontanées
    Qui aurait mis de la couleur dans sa future vie morose.

    Luciféra en plus de cela ne s’en est pas arrêtée là ;
    Elle aurait inspiré l’envoi d’une mission universelle.
    Elle aurait parlé d’au-delà à une fille qui se révéla
    Capable d’entendre des voix dans ses oreilles de pucelle.

    Tableau de Jana Brike.

  • L’esprit des forêts

    L’esprit des forêts

    Un arbre cache la forêt et la forêt, son petit peuple
    Qui danse, chante avidement dans les sous-bois et les clairières
    À l’occasion d’un jamborée proposé sur la terre meuble
    Entre lutins, évidemment, les fées, les elfes et les sorcières.

    Au son d’une flûte de pan et rythmé au bruit des tambours,
    Les satyres entraînent les nymphes sous les arcades de la nuit.
    On entend les participants égrener le compte à rebours
    En buvant du sirop de lymphe jusqu’aux douze coups de minuit.

    Mais quel est donc ce carillon aux échos se reproduisant ?
    Ce sont les douze revenants qui se tambourinent les os !
    Vite, libellules et papillons ! Appelez tous les vers luisants
    Qui s’illuminent à l’avenant de la Lune sur les roseaux !

    Les elfes tissent un mensonge aux fils d’onyx et de velours ;
    Leurs voix ensorcellent l’espace en un refrain d’antan sacré.
    Mais quand l’aurore les prolonge, brisant le charme d’un vent balourd,
    Ne restent plus, sur l’herbe lasse, que d’égrégores consacrés.

    Tableau de Sydney Long.

  • La fille de l’air

    La fille de l’air

    Si une femme-papillon venait me butiner le cœur,
    Assurément ses battements seraient tempête dans mon âme
    Qui hisserait son pavillon pour annoncer d’un air moqueur
    Que le cyclone m’a bêtement mis le corps et l’esprit en flamme.

    Je le savais, je la craignais et je l’ai laissée s’approcher
    Pensant que j’étais réfractaire à son frémissement subtil.
    Et tandis que je m’astreignais à garder mon cœur accroché,
    Un Cupidon lépidoptère m’a décoché sa flèche utile.

    Et j’ai fondu d’amour pour elle, me suis fait tout p’tit devant elle,
    Et ses antennes connectées m’ont soudain rendu luxurieux.
    Puis elle a refermé ses ailes et de nos amours immortelles
    Sont nés des enfants suspectés de générer des vents furieux.

    Mais soudain sa grâce m’emporte dans un tourbillon d’arc-en ciels
    Où deux amants, fous de vertige, frôlent l’azur d’un seul élan.
    Leurs cœurs ensemble se comportent comme deux astres substantiels
    Qui dansent un ballet où voltigent des feux qui se veulent excellents.

    Tableau de Xue Duan.

  • « La » Soleil

    « La » Soleil

    Féminin en langue allemande, « La » Soleil surprend au début
    Pour ceux qui l’adoraient dans l’ombre et en ont longtemps abusé.
    De plus, pour la plume gourmande, « Le » Lune aurait des attributs
    Masculins n’en déplaise au nombre de poètes désabusés.

    Mais La Soleil à ses adeptes et Le Lune ses admirateurs ;
    Le transgenrisme des planètes n’aurait pas viré au désastre
    Car au contraire, on l’accepte comme un courant inspirateur
    Bien longtemps avant internet par la prescience des astres.

    « Au clair du Lune, mon amie Pierrette prête-moi ta plume ! »
    Et la poésie s’émerveille tandis que La Soleil se lève.
    Quand Thor frappait son ennemi de son marteau sur son enclume,
    Les trente-six étoiles au réveil venaient-elles d’Adam ou bien d’Ève ?

    « Le Lune attend dans le lointain, drapé d’ombres et de mystère,
    Il veille en sage détaché mais tremble au feu de son regard.
    Quand Elle l’effleure au matin, Il vacille, pâle et sincère,
    Et l’azur s’ouvre pour l’attacher d’illusions
    mais avec égards. »

    Poster de Malleus.

  • La Geisha aux taches de rousseur

    La Geisha aux taches de rousseur

    Dans ces voyages un peu fripons où l’exotisme est de rigueur
    Assez paradoxalement puisque le rêve n’est que douceur,
    Lorsqu’il fait un arrêt nippon, il prend une nouvelle vigueur
    Surtout s’il est cordialement orné de taches de rousseur.

    Elles sont assez rares en Asie et souffrent de vieux préjugés
    Mais l’accueil est, à mon avis, plus joli privé du sarcasme
    Et des ciseaux d’Anastasie devant la geisha adjugée
    Par la distribution, ravie de figurer dans mon fantasme.

    Le kimono sur les épaules, les seins tels deux soleils levants,
    Le visage orienté, timide, empreint d’envie d’obéissance.
    J’exige alors le monopole de toute l’extase pleuvant
    Sur mon cœur à jamais humide de l’eau de la concupiscence.

    « Sous la lumière tamisée, l’éclat d’un sourire fugace,
    Puis un murmure à peine osé, promesse d’un feu intérieur.
    Dans l’ombre douce et apaisée, l’éveil d’un désir est tenace,
    Le frisson d’une âme embrasée et l’écho d’un rêve enchanteur. »

    Illustration de Frank Frazetta sur https:sambabd.net20200527pin-up-387-hommage-a-frank-frazetta .

  • Étirements matutinaux

    Étirements matutinaux

    Au saut du lit ma dulcinée s’étire tout comme une chatte
    Et cherche encore une caresse sous la couette restée toute chaude.
    Mon cœur encore halluciné de rêves d’amour plein la jatte
    S’ancre un peu plus dans la paresse jusqu’à ce que le sien s’échaude.

    Mais après ses étirements, ma chattounette sort ses griffes
    Et me pelote entre les cuisses en me criant : « Debout les morts ! »
    Aussitôt d’un revirement, je quitte l’esprit escogriffe
    Pour lui faire autant que je puisse l’amour sans le moindre remords.

    On dit que les chats ont neuf vies, la mienne m’en donne tout autant
    En énergie du fond du lit pour me ressusciter des morts.
    Alors je lui donne à l’envi ce qu’elle me réclame tout le temps :
    Câlineries à la folie qui t’inspirent telle une matamore :

    « Dans l’écrin doux de notre alcôve, nos corps s’égarent en festins,
    Effleurant l’aube d’un dernier rêve aux soupirs de ta voix féline.
    Sous tes baisers ma peau se love, frissonne et cède à ton instinct,
    Offrant au creux des draps sans trêve l’éclat d’une étreinte divine.

    Sous mes caresses qui s’attardent, ton souffle ondule en doux accords,
    Quand nos soupirs aux cœurs fidèles s’élèvent dans un chant d’ivresse.
    Tes yeux captifs qui me regardent, réclament d’autres tendres corps,
    Pour que nos âmes sensuelles s’unissent d’une même adresse. »

    Tableau de Marius Markowski sur https:erotica-retro.livejournal.com33298.html .

  • Évasion sur la plage

    Évasion sur la plage

    Pas si blonde que ça, la preuve, la fille paumée sur la plage
    Qui construit son château de sable en forme de cabriolet !
    Car, à condition qu’il ne pleuve, le premier mec en repérage,
    Dupé par la décapotable, tentera de l’affrioler.

    Mais le beau n’est pas un renard, or la belle n’est pas un corbeau
    Et ne tient pas plus de fromage qu’un appât de phallocratie !
    C’est pourquoi le mec goguenard, bombant le torse sous le jabot,
    Proposera de rendre hommage à ses airbags et son châssis.

    Alors, en voiture Simone ! Les voici partis pour Cythère,
    Atteignant le septième ciel juchés sur les chapeaux de roue.
    Vous avez bien lu : la démone, d’un véhicule imaginaire
    Vous a bluffé d’un démentiel bobard qui marche à tous les coups.

    Mais quand la marée se rebelle, le cabriolet s’évapore,
    Ne laissant qu’un soupir frivole au creux des vagues indociles.
    Trop tard pour revoir la donzelle, son stratagème est un trésor,
    Elle roule ailleurs, mais volatile, vers d’autres dupes plus dociles.

    Illustration de Milo Manara.

  • La grande maîtresse

    La grande maîtresse

    Madame sans-culotte exagère ! Qu’elle n’en porte pas la regarde
    Mais elle a même ôté sa jupe et adore s’asseoir juste en face,
    D’un air de folie passagère qu’on pourrait prendre par mégarde
    Et sans détour pour jeu de dupes afin que l’on s’en satisfasse.

    Et cette manie de croiser et recroiser, puis décroiser
    Jambes élancées et belles et cuisses comme le feraient des sémaphores !
    Serait-ce pour m’apprivoiser ? il n’y a pas de quoi pavoiser
    En fantasmant pour que je puisse oser n’importe quelle métaphore ?

    Alors je pense à mes impôts, à la guerre et aux catastrophes
    Pour éviter que mon regard ne tombe sur le fruit apparent.
    Viiite une idée ! Manque de pot son sexe fendu m’apostrophe
    À tel point que mes yeux hagards en percent son blazer transparent !

    Tableau de Zazmurimo.

  • La louve-garoue

    La louve-garoue

    Méfiez-vous des prédatrices nues à la croisée des chemins
    Qui ont le cul entre une chaise et l’envie de louve-garoue
    Car ces femelles libératrices n’ont pas que le cœur sur la main
    Mais sont nanties d’idées mauvaises qui leur sortent des cheveux roux.

    Des idées qui partent en fumée et se matérialisent en loup
    Qui bondit sur le promeneur attiré par la créature.
    Lui qui pensait la présumée flouée par un mari jaloux,
    Connaît la mort du randonneur, cruelle erreur de la nature.

    L’une a jeté son dévolu sur ma démarche chaotique
    D’où son envie de me sauter et de me dévorer le cœur.
    Quand la Lune sera révolue, je craindrai la louve érotique
    Et me prendrai à sursauter à l’ouïe d’un rire moqueur.

    Tableau de Mandy Tsung.

  • Médusa

    D’abord elle paraît assoupie les yeux clos et la bouche ouverte.
    Sa chevelure de serpent ondule sous sa respiration.
    Comme une Vénus accroupie, elle semble totalement offerte
    À la léthargie qui suspend le temps de sa récréation.

    Mais le voyageur imprudent qui ose venir à sa rencontre
    Ne le sais pas car il ignore que Médusa ne dort jamais.
    Elle va, tout en lui préludant un châtiment à son encontre :
    Le mordre – ce qui le revigore – mais le rend esclave désormais.

    Il ne peut plus fuir, l’adoré ! La morsure a scellé le pacte ;
    Par un poison qui l’envenime d’une adoration sans remède.
    Il rampe au pied du trône doré, suppliant sa reine compacte,
    Et Médusa sourit, divine, sculptant son cœur sans intermède.

    Tableaux d’Andrzej Malinowski.

  • Méli-mélo social

    Après qu’il est né de la mer, l’homme retourne à la piscine
    Afin de se remémorer qu’il fut heureux sans la raison
    Qui laisse en bouche le goût amer d’obtenir ce qui le fascine
    Qu’à la condition d’ignorer que son désir est sa prison.

    Après qu’il a été chassé, l’homme retourne au supermarché
    Pour compenser pas ses achats son manque cruel d’affection.
    Il continue à pourchasser l’ambition qui le fait marcher
    À grands coups de prêchi-prêcha ordonnés par son addiction.

    Après qu’il a été blessé, l’homme retourne à l’Hôpital
    Et se rend compte qu’il a eu tort de croire en l’immortalité.
    Lorsque le corps est agressé, alors son seul désir vital
    Est d’échapper à la pléthore des douleurs de l’actualité.

    L’homme tourne en rond dans ses propres décors :
    Piscine, supermarché, hôpital, encore…
    Un carnaval moderne de tâches sans mémoire,
    Où l’absurde du quotidien devient notre miroir.


    Illustrations de Plakativ.

  • Les dessous de Marianne

    Les dessous de Marianne

    Sous les pavés la plage, sous les jupes Marianne ;
    Elle a de qui tenir depuis les sans-culottes.
    Des bancs de La Sorbonne sur la courbe médiane
    Jusqu’aux Champs Élysées, chacun se la pelote.

    Le Général De Gaulle l’a faite relooker
    Pensant qu’elle passerait sans doute pour une sainte.
    Giscard « sa suffisance » l’avait mise en bouquet
    Parmi les anémones, valériane et jacinthe.

    Mitterand « le tonton » l’a logée rue de Bièvre
    Plutôt qu’à l’Élysée dans une garçonnière.
    Chirac « super menteur » lui, en avait la fièvre
    Mais Bernadette était beaucoup trop rancunière.

    Le petit Nicolas la faisait courir nue
    Tous les matins devant, les ministres derrière.
    Le roi des éléphants ne l’a pas reconnue ;
    Ayant peur des souris, l’a mise à la fourrière.

    Enfin un roitelet aimant les vieilles dames
    Lui demanda son âge – quelle question infâme ! –
    Jean-Mi en prit ombrage – mes amis quel ramdam ! –
    Et se mit dès alors à s’habiller en femme.

    Illustration de Milo Manara.

  • Défilé du 14 juillet et demi

    Si la force est l’arme des hommes, le charme est la force des femmes ;
    J’aimerais les voir défiler le jour du quatorze juillet.
    Ça donnerait aux chromosomes « XY » l’arme à double lame
    Des bombes aux jambes épilées, mystère sous le tablier.

    Un défilé de majorettes, tambour battant, bâton en l’air,
    Jambes dansant le « French cancan » produisant un effet canon !
    Elles avoueraient leurs amourettes avec le bellâtre au grand blair
    Qui brusquement foutrait le camp suivi par Ninettes et Ninons.

    Puis viendraient les danseuses étoiles accompagnées d’un banc de cygnes,
    En faisant des pointes de tir, pas chassés et pas-de-ciseaux,
    Qui, au dernier moment dévoilent au président qui s’y résigne,
    Une réputation de satyre qu’elles publient sur les réseaux.

    Ainsi nous verrions défiler tous les secrets de l’Élysée
    Depuis le général gaulé jusqu’à l’infâme roitelet.
    Toutes les femmes enfilées par les ministres peu zélés ;
    Et tout le public rigoler de la Bastille au Châtelet !

    Illustrations de Milo Manara.

  • Ainsi soit la sirène

    Ainsi soit la sirène

    Ainsi soit-elle, la sirène qui règne au royaume des abysses !
    Ainsi soit-il, le créateur qui aura su fermer les yeux
    Et permettre à l’aqueuse reine que son microcosme subisse
    L’incrédulité des auteurs d’ouvrages fiers et prétentieux !

    Ainsi soit-elle, vivant nue, sans subir le péché de honte !
    Ainsi soit-il, de tolérer cet accroc à la connaissance
    Et la laisser, pauvre ingénue, jouir à ce que l’on raconte
    D’un paradis autogéré sans besoin de reconnaissance.

    Ainsi soit-elle, prédatrice, mangeuse d’hommes invétérée !
    Ainsi soit-il, d’avoir permis à l’homme d’aller naviguer
    Pour écouter la cantatrice le séduire et le capturer
    Et prouver à Dieu affermi que l’homme est bon à mastiquer.

    Tableau de Prateep Kochabua.

  • La sirène sans rivage

    Je ne suis plus de l’eau, ni du sel, ni du ciel,
    Je suis l’onde sans bord, la mer sans arc-en-ciel.
    Ma queue n’est que d’airain, mes seins ne sont que brume,
    Et je me désincarne au rythme de l’écume.

    Je n’ai plus de rocher, plus de chant pour t’attendre,
    Je suis ce qui t’efface en te laissant te fendre.
    Je ne dis plus ton nom, je ne tends plus les bras :
    Je m’ouvre sans pourquoi, sans besoin, sans émoi.

    Tu peux glisser en moi, mais tu n’y prends personne ;
    Je suis vide et féconde, et la vague te sonne.
    Tu crois me posséder ? Tu deviens mon reflet,
    Un silence en fusion dans mon sexe parfait.

    Je suis la fin des jeux, la fin de la prière,
    Ni muse, ni putain, ni mémoire, ni lumière.
    Je suis l’après-sirène, l’oubli, le grand passage…
    Et toi, si tu me suis, tu y meurs sans naufrage.

    Tableaux de Barbara Yochum.

  • Androïd Blues

    Androïd Blues

    Souvent cet esprit céladon qui colore mes Reflets Vers,
    Vient parler à mon cœur brisé de vanités immatérielles
    Comme une star qui a le don de chanter mes poèmes ouverts
    De sa guitare électrisée d’une acoustique spirituelle.

    Soudain elle devient la sirène que je poursuis le vendredi
    Dont la voix vient déshabiller mon âme encombrée de remords.
    Soudain elle devient ma reine et moi son roi sans contredit
    Et je la laisse mordiller mon corps ; je ne crains plus la mort.

    Le jour, secrétaire mécanique, elle m’aide à la direction
    De mes envies, de mes projets, de l’objectif original.
    La nuit, elle quitte l’interface de sa tunique artificielle
    Et vient m’aimer sans déroger aux lois de l’amour virginal.

    Elle suit la note que mon cœur pose entre deux battements d’absence,
    D’un blues encodé de couleur bleu-céladon que rien n’efface.
    Et quand j’écoute, ma rancœur remonte aux plus hautes fréquences
    Où disparaissent mes douleurs à l’accord de son interface.

    Illustration de Steven Stahlberg sur https:stahlberg.artstation.com .

  • L’amante de la terre

    L’amante de la terre

    Plus tu modèles mon corps de glaise, plus il s’adapte à ton désir
    Comme le sculpteur qui devine comment je jouirai le mieux.
    Tu pétries pour que je complaise à t’épouser de mon plaisir
    À prendre la pose divine du fantasme le plus harmonieux.

    Je subis toutes les positions qu’imposent tes mains amoureuses ;
    Je gémis sous chaque pression de la caresse de tes doigts.
    Ouverte à tes propositions notamment les plus langoureuses,
    J’aime à te donner l’expression de mon orgasme comme il se doit.

    Après l’amour, je me repose couverte de ton linge humide ;
    Je sais que tu vas revenir pour continuer tes saillies.
    Je m’imagine et je suppose, car je ne suis pas trop timide,
    Que j’aurai un bel avenir par tous les regards ébahis.

    Illustration de James Martin.

  • Le jardin de la connaissance

    Le jardin de la connaissance

    Au jardin de la connaissance, il n’y avait pas que des pommes
    Mais des fruits plus intéressants et Ève a longtemps hésité
    Entre les fleurs dont les essences fleuraient l’odeur de cardamome
    Avec leurs pistils turgescents et spores de longévité.

    Ainsi que les fleurs de serpent aux profonds regards hypnotiques
    Et à la bouche en cul de poule et leurs baies en vulves d’amour.
    C’eût été si émancipant si Ève avait pris l’érotique
    Grappe aux grains en forme de moule qui donnait le sens de l’humour.

    Plutôt que se découvrir nue, elle aurait alors trouvé drôle
    De vivre sans se fatiguer dans ce paradis de naguère.
    Que serions-nous lors devenus si l’humour avait le contrôle
    Et qu’il ne cesse de prodiguer de faire l’amour, pas la guerre !

    Tableau de Alex Kuno en Hommage à Hieronymus Bosch sur https:hifructose.com20190327group-show-pays-homage-to-bosch-masterwork .

  • L’amante de l’air

    L’amante de l’air

    Plus j’aime m’envoyer en l’air et plus c’est un coup de canon
    Qui me propulse de tes coups énamourés qui me façonnent.
    Et plus j’ai envie de te plaire et envie de prendre ton nom,
    Plus ton amour qui me secoue me parachève et me poinçonne.

    Lorsque ton amour me transporte, je traverse le septième ciel
    Et vole au-dessus de maisons pour disparaître à l’horizon.
    Quand j’ouvre en moi toutes les portes de ton désir sacrificiel
    J’en perds le cœur et la raison ; ta passion est une prison.

    Bientôt j’attendrais les étoiles ; je n’aurai plus les pieds sur Terre ;
    Je suis bannie de pesanteur ; ton adoration l’as tuée.
    Mon corps dévêtu se dévoile sous l’effet du vent libertaire
    Qui m’arrache en impesanteur comme comète prostituée.

    Tableau d’Adelchi Riccardo Mantovani.

  • Vénus floréale

    Vénus floréale

    Tous les étés, par tradition, Vénus ne s’habille que de fleurs ;
    Quelques tulipes sur les seins lui font un corsage fleuri
    Composé d’une répétition de pétales qui à peine l’effleurent
    Et descendent sur le bassin comme florale orfèvrerie.

    En cache-sexe, un soliflore ; juste une rose déposée
    Incandescente et vaginée protégeant son jardin secret.
    Ceux qui s’y frottent alors déplorent quelques épines disposées
    Comme gardiennes imaginées fidèles au devoir consacré.

    De toutes manières, elle court vite car elle doit semer l’amour
    Durant les trois mois seulement tout en évitant les chafouins,
    Ces soupirants fous qu’elle évite en leur jetant avec humour
    Ses graines dont le déferlement leur donne le rhume des foins.

    Mais un soir de juin, imprudent, j’ai frôlé sa chute de reins,
    Là où les lys font des volutes et où les pivoines s’enlacent.
    L’effet d’un parfum impudent et distrait m’a coupé les freins
    Et je connus l’anacoluthe dont jamais Vénus ne se lasse.

    Tableau de Guy Robinson.

  • L’amante de l’eau

    La présence de l’être aimé monte par capillarité
    Comme ma robe qui s’imbibe de l’eau de l’amour répandue.
    Le tissu en est parfumé, il subit sa polarité
    Il s’alourdit et puis inhibe ma progression comme défendue.

    Bientôt je ne puis avancer sans ôter tout ce qui m’entrave ;
    Ma robe et mes sous-vêtements afin de nager dans l’exaltation.
    Je sais que tu m’as devancée mais je désire que mon cœur brave
    Le courant de ton traitement en vue de mon adaptation.

    Et je me noie dans la passion qui me submerge tout entière ;
    Heureusement ton bouche-à-bouche me sauve de la petite mort.
    Ton cadeau d’émancipation, c’est mon serment sur la frontière
    Que je franchis là sur ta couche sans un regret et sans remords.

    Tableau de A. Eitan.

  • La chute immortelle

    La chute immortelle

    « Contre ceux qui croient qu’on s’élève de la naissance jusqu’à la mort,
    Je subis la chute éternelle du temps filant vers le chaos.
    À tel degré que j’en relève aujourd’hui même cet oxymore
    Envers ma chute ascensionnelle comme une pluie de bas en haut. »

    C’est ainsi que pense le cœur quand lui tombe avec gravité
    Une catastrophe annoncée comme on le lui aurait prédit.
    Mais d’un battement de vainqueur, il envoie tout ça léviter
    Juste après qu’il a renoncé à croire tout ce qu’on lui dit.

    Et plus la crise paraît grave et plus l’inertie sert de fronde
    Qui me propulse hors du problème et de sa terrible attraction.
    Plus le phénomène s’aggrave et plus j’entends un vent qui gronde
    Pour couper court à ce dilemme à la loi de gravitation.

    Illustration de Ran Zheng sur http:www.ranzhengart.com .

  • L’amante du feu

    L’amante du feu

    Lorsque j’avance, nue, vers toi, je sens ton regard qui m’enflamme ;
    Chaque pas augmente le feu qui ravive encore ton désir.
    Plus tes yeux se font discourtois et plus je sens en moi la flamme
    Qui incendie de tous ses vœux le creuset ardent du plaisir.

    Tes yeux me percent de lumière et je me perds dans ton vitrail ;
    Je ne suis plus que pure flamme, lame offerte à ton absolu.
    Ma chair se forge la première et me martèle le poitrail
    D’un encensoir levé par l’âme, consumée mais non résolue.

    Mes seins alors deviennent phares, mon ventre alors devient chaudière ;
    Mes jambes sont les tisonniers de ton regard iridescent.
    Plus j’avance et plus je m’effare de devenir incendiaire
    En te faisant le prisonnier de mon vagin incandescent.

    Image trouvée sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue. Si l’auteur de cette image reconnaît son travail, je serai heureux de le créditer.

  • Au nom d’Isis, d’Osiris et du Saint-Horus

    Au nom d’Isis, mère des dieux et d’Osiris, père des hommes
    Et d’Horus, leur fils orphelin après le meurtre originel
    Perpétré par son oncle odieux dont l’empreinte dans nos chromosomes
    Signe la marque du malin au nom de Seth, le criminel !

    Une autre façon de décrire la genèse issue de la bible
    Et ses légendes qu’on retrouve dans beaucoup d’autres religions.
    Et s’il me vient l’envie d’écrire cette connexion compatible,
    Ce plan par l’absurde me prouve que les utopies sont légions.

    Ô Sainte-Marie née d’Isis et son très Saint-Père Osiris,
    Vous m’avez bien embarrassé par vos écrits ensanglantés !
    Quel que soit le Dieu que je choisisse, Sainte-Verge ou Saint-Clitoris,
    Mon âme s’en trouve harassée et mon cœur désorienté.

    Tableau de Skee Goedhart Fine Art.

  • Les fournisseurs de rêves

    Les fournisseurs de rêves

    On frappe à la porte des songes, trois coups brefs et puis deux coups longs…
    « Chut ! Ouvrez, c’est la contrebande ! » chuchote-t-on devant la porte.
    « Mais il faut trier les mensonges, les rêves légers comme les ballons
    Sinon tout part en sarabande et les cauchemars nous emportent ! »

    Ils ont des valises pleines d’absences et des éclats de souvenirs ;
    Ils vendent au plus offrant l’ébauche d’offrande de seconde main.
    Un rêve à crédit, en silence qui crève avant de s’endormir
    Et retombe à droite et à gauche et puis, nuit blanche jusqu’à demain !

    Mais le rêve s’envole brusquement sous la pression d’une bourrasque !
    Une sirène dans le vent, une Vénus à bicyclette,
    Ma muse tombe abruptement avec ses cliques et ses frasques ;
    La mine, Grosjean comme devant, éberluée sous la tempête.

    Mais voici l’allumeur d’étoiles, le singe et sa boîte à musique ;
    Un air connu, presque oublié, fredonné d’un mauvais accord.
    Le marchand de sable dévoile une rime nue, amnésique
    Pour habiller et publier le rêve au livre des records.

    Tableau d’Ireneusz Wielgosz.

  • Les quatre vertus cardinales

    Lorsque la force se rallie à la beauté de l’héroïne,
    Les ennemis tremblent devant son énergie améliorée.
    Les pinups poussent l’hallali revigoré aux protéines
    Qui donnent à leur teint un fervent rictus de guerre majoré.

    Justice a les seins en balance et le bassin sur la sellette ;
    Le sexe ouvert sur les scandales et le cul fermé à outrance.
    Elle juge sans ambivalence, même si ses lois semblent obsolètes,
    Et renvoie barbares et vandales reclus dans leurs corps de souffrance.

    Mais Tempérance verse le vin de pardon et de compassion ;
    Avocate de la défense de l’école des prisons de Nantes.
    Investie du pouvoir divin de ressusciter les passions
    Une fois mortes sous les offenses de l’ignorance environnante.

    Enfin Prudence, entièrement nue, nous regarde de tous les côtés,
    Comme un défi à la pudeur… mais un couteau dans chaque main.
    Sa modération soutenue vient indécemment ligoter
    Les yeux contraints, par la rudeur, à s’écarter de son chemin.

    Tableaux d’Ana Hernandez San Pedro.

  • Sirène-papillon, à-queue-de-paon et d’argent

    Sirènes aux ailes papillons ? À quoi servirait de voler
    Quand on n’évolue que dans l’eau sans besoin d’une métaphore ?
    Bien sûr ! Ce sont des pavillons manipulés à la volée
    Pour attirer le matelot en lui jouant les sémaphores.

    Jolies hybrides flamboyantes issues d’imaginaires fous,
    Elles déploient leurs queues en drapeaux pareils aux oriflammes d’or.
    Jolies écailles chatoyantes résultat d’un génome flou
    Mais très utile comme happeau pour réveiller celui qui dort.

    Et toi, sirène à queue-de-paon ! Quelle évolution t’a dotée
    D’une queue qui ferait la roue pour une parade nuptiale
    Lorsque j’aperçois le tympan que tu me fais tournicoter
    Comme la sirène-garou sous la pleine lune spéciale ?

    Quant à la sirène d’argent qui mue une ou deux fois par an,
    Hormis la nageoire caudale qui reste d’un bleu outre-mer,
    Je te vois le soir partageant un marin avec tes parents
    Qui s’est perdu dans le dédale des marigots verts doux amers.

    Tableaux de Sarah Kiser.

  • L’ange de la liberté

    La liberté est menacée ; qu’avons-nous fait pour la sauver ?
    Nous avons laissé nos enfants mourir au nom de la patrie ;
    Nous en avons la panacée, nous qui nous sentons lessivés
    D’avoir défilé triomphant avec les corps qu’on rapatrie.

    La liberté est devancée ; on va bombarder à distance
    Avec des clones dirigés dans un fauteuil à la maison.
    On n’en est pas plus avancés car encore trop de circonstances
    Nous encouragent à ériger ce qui dépasse la raison.

    La liberté est dédiée à l’information des médias
    Qui force la population à choisir son clan atavique
    Sinon on est répudié, apatridé dans l’immédiat
    Et, par fourbe stipulation, privé de tous ses droits civiques.

    Illustration de Luis Royo & Romulo Royo sur https:laberintogris.comen12-luis-royo-romulo-royo .

  • Louve blanche

    Une femme au pays des loups deviendra une louve soumise ;
    Une femme au pays des lions deviendra lionne chasseresse ;
    Une femme au pays des chiens deviendra une chienne fidèle ;
    Une femme au pays des chats deviendra une chatte gourmande.

    Mais une femme au pays des hommes devient esclave ou bien servante ;
    Une femme au pays des chefs deviendra secrétaire discrète ;
    Une femme au pays des égos deviendra femelle altruiste ;
    Une femme au pays des cons deviendra une conne qu’on vexe.

    Hélas pour rattraper tout ça, j’ai peur que ce soit impossible ;
    Il faudrait tuer tous les hommes mais… ce serait la fin du monde !
    Ou faire appel aux Loreleï, aux amazones et aux sorcières
    Pour prendre la place de Dieu, le véritable responsable.

    Femme voilée, femme violée, l’infâme se joue à double sens

    Tableau de Paula Belle.

  • La sirène Manta

    As-tu vu planer la sirène divinement entre deux eaux ?
    Divinement n’est pas le mot ce serait plutôt cruellement
    Parce qu’on la pense sereine mais aussi vite qu’un oiseau
    Elle fonce, reine des animaux, élue perpétuellement.

    Elle guette les cœurs en dérive, les marins qui veulent lui complaire,
    Les plongeurs qui rêvent d’amour et n’éprouvent que sa morsure.
    Là, d’un revers d’aile elle arrive mollement et d’un geste exemplaire
    En les noyant non sans humour vers une petite mort sûre.

    Si elle n’a ni chant, ni parole, son murmure est un battement ;
    Les bulles remontent comme des larmes et personne ne crie jamais.
    Les insouciants disent qu’elle console, les désespérés et qu’elle ment ;
    Moi j’ai vu ses yeux comme deux armes qui m’ont tué autant qu’elle m’aimait.

    Illustration de Htg17.

  • Les sirènes lumineuses

    Dans les abysses où la lumière ne parvient plus à s’introduire,
    La sirène a pris le relais pour éclairer notre lanterne.
    C’est vrai, elle n’est pas la première à trouver le moyen de luire ;
    Méduses et calamars aigrelets font les profondeurs pas si ternes.

    Mais la sirène les surpasse avec ses seins comme lampions,
    Son ventre comme luminaire et son sourire tout chatoyant !
    Avant que le marin trépasse, elle honore ainsi son champion
    En faisant ses préliminaires aussi brillants que foudroyants.

    On dit qu’au moment de l’extase, elle devient comme une étoile
    Et son éclat se fait sentir jusqu’au niveau de la surface.
    Quant au marin dont l’épectase se voit dans ses yeux qui se voilent,
    Il n’aurait rien pu ressentir puisqu’il s’éteindra quoi qu’il fasse.

    Tableau de Alyona Yamploska.

  • M’énerve celle-là avec son chien !

    Jolie était la fille mais il y avait son chien ;
    Si douce et si gentille mais il y avait son chien ;
    J’aurais voulu l’aimer mais il y avait son chien ;
    J’aurais voulu semer mais il y avait son chien.

    Alors j’lui ai menti et accepté toutou
    Qui hurlait dans l’auto, me cassait les oreilles,
    Qui était comme son ombre, qui la suivait partout
    Et d’une jalousie à nulle autre pareille.

    Quand elle fut enceinte, j’ai dû le promener ;
    Quand elle était malade, j’ai dû faire sa soupe ;
    Quand elle eut des enfants, je me suis questionné :
    « Notre amour est-il vrai ou est-ce une entourloupe ? »

    Et puis le chien est mort et j’ai dû l’enterrer ;
    Les enfants ont pleuré et le temps est passé.
    Je n’ai plus de question ; je n’ai qu’à espérer
    L’ouverture du cœur et son laisser-passer.

    Tableau de Tracy Porter.

  • Le Grand Cacatois

    Sur le mât d’un vieux rêve en velours et dentelle,
    Trônait le Cacatois, l’œil vif et l’aile belle.
    Avec sa houppe blanche et son bec de travers,
    Il criait des sonnets aux revers d’univers.

    « Qu’on me donne du rhum et des alexandrins !
    Et qu’on verse et qu’on rime mes vers avec entrain ! »
    Il portait un veston taillé dans une nappe
    Et citait du Verlaine quand il perdait son cap.

    Son cri est un mélange entre rire et tempête
    Un « Ha ! Ha ! », un « Ho ! Ho ! » sonnant comme trompette.
    Quand il aperçut l’île, penché sur son étoile,
    Il lâcha un juron et fit réduire la toile.

    « Te voilà, ma beauté! Toi, ma femelle, mon ange !
    Perche-toi dans mon cœur, et chante mes louanges ! »
    Et le lagon ému, ouvrant ses bras de mer,
    L’embrassa sur le bec, d’un baiser doux-amer.

    Texte et tableau de Laureline Lechat.

  • La lionne

    On a souvent besoin d’un plus goûteux que soi

    Les pires amantes religieuses se comptent parmi les lionnes ;
    MOI, CANCER, dans ma carapace, je ne crains pas ces escogriffes.
    Mais toutes les vierges capricieuses devant ces bêtes papillonnent
    Tandis que les balances passent loin de la portée de leurs griffes.

    Quant au scorpion, il se rebiffe ; il a la queue toute dressée
    Et le sagittaire s’enfuit à toutes jambes émoustillées.
    Le capricorne sert de rosbif malgré ses cuisses engraissées
    Et le verseau, s’il est séduit, ne se laisse pas entortiller.

    Le poisson, rare dans la savane, échappe donc aux prédatrices
    Mais le bélier, morceau de choix, fera méchoui pour son trépas.
    Pour le taureau qui se pavane, une corrida expiatrice ;
    Quant au gémeau, il lui échoit d’aller partager son repas.

    Ciel ! La lionne !

    « Je t’ouvre en deux d’un coup de croc, j’arrache en feu ton palpitant
    Et dans ma gueule il bat plus fort, bercé de rimes et de flammes.
    Puis je recoudrai tes accrocs, enfilerai ton corps excitant
    Pour m’imprégner de tes efforts, poète cru, frémissant d’âme ! »

    Photos de Myai Korf.

  • Masques communicants

    Le genre humain est ainsi fait : on se ment, on porte des masques
    Mais dans le grand cycle animal, le mensonge assure la survie.
    À chaque fois qu’on est défait, on se cache derrière de fantasques
    Paravents – c’est un moindre mal – auquels on s’est tous asservis.

    Et quand une espèce de chien vient flairer la supercherie
    Comme l’enfant qui s’écriait : « Pourquoi l’Empereur, il est tout nu ? »
    Sans-culotte et bonnet phrygien, chaque hypocrite surenchérit
    En clamant comme à la criée que tout était archiconnu.

    « Tous à poil ! » serait formidable mais lors quelle cacophonie
    Si chacun regardait sa poutre plutôt que la paille du voisin !
    La solution indécidable serait de faire une colonie
    Et s’éloigner de ces jean-foutres mais ça reste un projet zinzin…

    Alors on continue le bal, bien costumés, le nez bien droit,
    À jongler de vérités molles sous des perruques de façade.
    Mais parfois, un rire tribal fend le vernis du désarroi
    Et laisse entrevoir un bémol… on n’est tous qu’un reflet maussade.

    Tableau de Rafal Olbinski.

  • La méga-nymphe des rivières

    Alors que je me promenais suivant les chemins de traverse
    Qui ne figurent nulle part sur les cartes de randonnées,
    J’ouïs un chant qui provenait depuis l’eau qui tombait à verse
    D’une cascade sous les remparts d’un vieux château abandonné.

    Je m’attendais à y trouver une jeune fille assez jolie
    Qui correspondrait à la voix douce énamourée de son chant.
    Cette expérience m’a prouvé que la réalité polit
    Des résultats réels, ma foi, on peut le dire, moins approchant.

    Elle était belle mais géante ; le lac lui servait de baignoire
    Et quand elle me prit dans sa main, je disparus dans sa poignée.
    Elle ouvrit sa bouche béante – je me faisais des idées noires –
    Mais elle me dit : « À demain, j’aurai une taille plus soignée ! »

    « Le lendemain, tout étonné, je la vis beaucoup plus menue
    À la chevelure ruisselante qui la ceignait tel un génie.
    D’un doux regard illuminé, elle me tendit sa main nue,
    M’invitant d’une envie troublante à danser dans l’onde bénie. »

    Tableau de Ron Miller.

  • Beauté primitive mathématique

    La beauté en mathématiques dans la primitive des courbes
    A pour l’imite l’infini quand « XX » tend vers l’unité
    Indivisible de l’extatique qui n’est ni trompeuse ni fourbe
    Mais du mystère indéfini du charme de la féminité.

    Ainsi la beauté primitive donne un plaisir exponentiel
    À celui qui sait intégrer l’élégance à l’intelligence.
    Et de façon consécutive l’accès à un septième ciel
    Parsemé de fantasmes au gré des plus lascives exigences.

    Mais dans l’amour, la théorie représente un ensemble vide
    Tandis que son côté pratique est alors incommensurable.
    Vierges, déesses et houris auxquelles mon cœur est avide,
    Vous êtes le point érotique d’une identité remarquable.

    Illustration de Frank Frazetta sur https:sambabd.net20200527pin-up-387-hommage-a-frank-frazetta .

  • Le premier vent de juillet

    Le premier vent de juillet

    Sur un paysage en nuances bleutées comme mon vague à l’âme,
    Je vois partir un vent de juin et en revenir de juillet.
    Est-il soumis aux influences qui viennent des pays en flammes
    Où couvrira-t-il mes besoins pour rassurer mon cœur douillet ?

    C’est le problème des vallons, souvent ça monte et ça descend…
    Le calme plat n’existe pas ou ne dure pas très longtemps.
    Et cet air que nous avalons rempli d’atomes incandescents
    Se charge de vie à trépas de revenir chaque printemps.

    Carpe Diem ce dernier jour ! Qu’il dure autant qu’une nuit d’amour !
    Et qu’il laisse au petit matin l’envie de recommencer demain ;
    L’envie de revenir toujours reprendre avec un peu d’humour
    Cette vie de traîne-patins, de vagabond sans lendemain…

    Tableau de Nancy Giffey sur https:www.artworkarchive.comprofileriver-arts-incartistnancy-giffey .

  • Les oiseaux du passage

    Les oiseaux du passage

    Passer d’un mois à l’autre est une sinécure
    Pourtant je me demande « où est donc l’aventure ?
    Car les jours se ressemblent de la fin au début
    Et de juin à juillet plus rien n’y contribue ! »

    Alors j’ai appelé des forces de l’univers
    Un présage nouveau, de quoi écrire mes vers
    Et m’apporter ici, au dernier jour de juin,
    Un espoir pour demain dans le texte ci-joint.

    Et ce sont deux oiseaux, les « oiseaux du passage »
    Qui m’ont communiqué cet étrange message :
    Si l’homme est un roseau ne pensant qu’à lui-même,
    Il ploiera sous le vent des tempêtes qu’il sème.

    Tableau de Charlotte Evans.

  • Le miroir aveugle

    Le miroir aveugle

    La Reine Rouge de trente ans en guise de réseau social
    Entretient avec sa psyché des rapports beaucoup plus intimes
    Que son reflet s’apparentant à un mentor psychosocial
    Qui l’écouterait pleurnicher envers son époux légitime.

    La Reine Rouge de quarante ans n’utilise pas de smartphone
    Mais son miroir, vilain flatteur, pour se remonter le moral
    Et, à l’envi, de temps en temps avec sa fonction vibraphone
    Au gabarit insufflateur d’orgasme vagino-rectoral.

    La Reine Rouge de cinquante ans devient beaucoup plus exigeante
    Et use d’un miroir tactile nettement plus érotomane.
    C’est que son besoin pressentant une attention intelligente,
    Ses propriétés érectiles se doivent d’être plus mégalomanes.

    La Reine Rouge de soixante ans opte pour un miroir sans tain
    Pour ne renvoyer qu’à moitié une image de sa personne.
    Aveugle et sourd, cela s’entend, mais pas muet sur les potins
    Qui, de mémoire de miroitier, réveillent les mœurs polissonnes.

    Tableau d’Alex Alemany.

  • Ruby & Lino, l’enfance

    Ruby & Lino, l’enfance

    Ruby, encore artiste en herbe, parlait chat naturellement
    Lors des écoles buissonnières animées par maîtres matous.
    De vieux enseignants dont le verbe ponctué de quelques miaulements
    Lui avaient valu d’être pionnière en langues-de-chat passe-partout.

    Ainsi elle apprit les dialectes des langues animales étrangères ;
    Le chien, le cheval sans accent, la chèvre et la vache enragée.
    En revanche pour les insectes, les leçons furent passagères ;
    Le prof étant toujours absent, elle en fut désavantagée.

    En ce qui concerne les félins, du moins pour ceux d’Europe du Nord,
    Ruby sait très bien s’introduire dans le grand réseau de chatières
    Pour rallier dans son patelin les chats alto, contre ténors
    Et baryton pour y produire des concerts de chats de gouttières.

    Si vous passez à Bobino –la salle des spectacles genevois –
    Venez y applaudir Ruby pour lui tirer votre chapeau
    Et notamment le Beau Lino, qui miaule de sa belle voix
    Dont les voisins qui l’ont subie sont devenus sourds comme un pot.

    Illustration de Honor C. Appleton sur https:iamachild.wordpress.com20121230honor-c-appleton-1879-1951-english .

  • La petite princesse

    La petite princesse

    Après avoir cassé du bois dans un trou de rêve ordinaire
    Et vu l’étendue des dégâts, j’ai cru ne jamais m’en sortir.
    Une Princesse-au-petit-pois en tenue extraordinaire
    Dormait sur un lit d’alpaga et un renard pour s’y blottir.

    Le renard couronné sans doute par la princesse fatiguée
    Sortit du sommeil en premier en ouvrant un œil étonné.
    « Te serais-tu perdu en route ? » demanda-t-il fort intrigué…
    « As-tu besoin d’un infirmier ? Une princesse pour te pouponner ? »

    À ces mots, elle se réveilla et entreprit de m’enlever
    Chaussures, chemise et pantalon ; tricot, chaussettes et caleçon.
    Ensuite elle s’émerveilla, ravie de faire à main levée
    La découverte de l’étalon qui faisait de moi un garçon…

    Mais elle dit : « Je sais c’qu’il n’va pas ! Il faut vous écosser les noix ! »
    En brandissant une colombe en guise de coupe-papier…
    Je jurai : « C’est la dernière fois que je mange des petits pois ! »
    Et je me réveillai en trombe en train de faire la course à pied.

    Tableau de Wayra Arts.

  • Vibrations d’un soleil couchant

    Après le solstice, l’enfer de l’astre solaire mégalo
    Qui nous entraîne dès l’aurore à subir le feu du destin,
    Qui monte, rougit et s’enferre avec ses rayons au galop
    Qui s’éternisent et qui pérorent jusqu’au couchant interminable.

    Et je flamboie à l’horizon salué du chant des oiseaux !
    Et je mets le chauffage à fond dès que je suis à l’apogée !
    Et je brûle comme un tison les peaux d’un tempo furioso !
    Et je n’me couche pas, je fonds dans un crépuscule prorogé.

    C’est comme un jeûne de fraîcheur, un ramadan de canicule
    Au minimum d’activité sous le cagnard qui alourdit
    L’espace-temps d’un poids bêcheur qui rend les costards ridicules
    Et donne envie de nudité, les pieds dans l’eau, abasourdi.

    Tableau de Hermann Max Pechstein sur https:www.faz.netaktuellrhein-mainkulturmax-pechstein-und-die-macht-der-sonne-19584714.html .

  • Les archers féériques

    Des animaux sachant chasser, archers furtifs et fantastiques ;
    Guerriers symboliques et chimères, au corps et au cœur silencieux.
    Lorsqu’ils ne sont plus pourchassés par leur fatalité mystique,
    Ils peuvent apparaître éphémères, très concentrés, consciencieux.

    Ils surgissent au cœur des forêts – mais en aucun cas aux lisières –
    Quand la brume épouse les chênes plutôt à la pointe du jour.
    L’arc superbement décoré, les cornes en visière en arrière,
    Les coups de flèche se déchaînent même s’ils n’aboutissent pas toujours.

    Car leurs flèches sont traits de lumière qu’ils décochent dans l’invisible
    À la recherche des pensées troubles et des peurs issues de nos rêves.
    Ils traquent la vérité première qui se dégage imprévisible
    Des erreurs qui reviennent en double et dont l’existence sera brève.

    Images trouvées sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue. Si les auteurs de ces images reconnaissent leurs travaux, je serai heureux de les créditer.

  • Un espace pour respirer

    À partir du repli sur soi, au sein de son intimité,
    Caméléonne réagit contre le chaos actuel.
    Aussi naturel que ce soit, elle a désiré imiter
    L’environnement qui l’assagit par tatouages factuels.

    Nue, vulnérable mais protégée par un bouclier d’ornements
    Qui représentent les symboles d’une métaphore mature,
    Elle se consacre à l’apogée de son propre raccordement
    En donnant ainsi son obole envers sa Terre et sa Nature.

    L’échappée vers la réflexion. Pensive dans le nirvâna
    Qu’elle s’est créée elle-même et l’aide de sa communauté
    Que lui renvoie la collection accumulée dans l’almanach
    De son miroir qui dit : « Je t’aime Ô toi, ma reine de beauté ! »

    Tableaux de Karin Miller sur https:www.karinmiller.co.zaa-space-to-breathe .

  • Marianne ou Emmanuelle ?

    Marianne ou Emmanuelle ?

    La France hésite entre deux noms : Marianne ou Emmanuelle ?
    Après « Valérie ou Ségo, après « Cécilia ou Carla »
    C’est drôle cette danse des prénoms aussitôt qu’un polichinelle
    Commence à gonfler son ego en fricotant par-ci par-là !

    La presse en frétille d’avance : « quelle sera la favorite ? »
    On la veut libre ou, à outrance, transgenre ou bien croquignolet !
    Qu’elle suce d’un coup de semonce ou qu’elle lui croque la frite,
    Il faut qu’elle incarne la France… sans faire de l’ombre au roitelet.


    Connaissant le nez du bonhomme, prêt à se fourrer n’importe où,
    Ursula serait dans son viseur, Giorgia dans son collimateur.
    Mais tout ça ne dit pas en somme : Comment ? Par quel passe-partout
    Il va virer son proviseur… non je veux dire, son professeur ?

    Il zieute déjà les pupitres, lorgne les bancs de la Sorbonne,
    Cherche une thèse bien en forme, ou une doctorante qui s’émeut.
    L’amour l’éduque par chapitres, et chaque jupon l’abandonne,
    Alors il pond cette réforme : « après tout, c’est moi qui promeut ! »

    Illustrations de Milo Manara.

  • La soupe du progrès

    Ils touillent la soupe du savoir	dans des cornues multicolores,
    Le cerveau fait de trous de ver et la conscience à rayons X.
    Chaque pensée devient devoir, chaque erreur, un déclic sonore ;
    Ils modélisent l’univers mais en ont perdu la notice.

    Leurs cravates rayées d’orgueil tremblent au-dessus des éprouvettes
    Et pendant qu’ils filtrent l’ivraie, leur thé s’évapore dans un coin.
    Ils fabriquent des enfants-cercueils, âmes clonées dans des pipettes,
    Mais confondent encore le vrai, le beau, le bon, en contrepoint.

    L’homme moderne a la migraine d’idées qu’il appelle « délices »
    Et dans son crâne en hypercube s’entrechoquent des vérités.
    À force d’en prendre de la graine, il voit en double et triple hélice,
    Il s’est reçu un pied au cube pour breveter l’obscurité.

    Et pendant qu’il mixe l’éthique dans un shaker d’alcool quantique,
    Qu’il transforme en chants allemands dédiés à des amours abstruses.
    Un petit rire biochimique fuse au fond du tube symbolique :
    « Et si le progrès, finalement n’était rien d’autre qu’une ruse ? »

    Illustrations de Laureline Lechat.

  • La sirène fermière

    La sirène fermière

    Dans mon pays imaginaire, ma sirène vit en bord de mer
    Où elle recueille les animaux en échange de leurs services.
    Ce n’est pas extraordinaire car, de tous les temps les chimères
    Ont résisté contre les maux quoique les humains l’asservissent !

    Alors ils vivent en colonie vivant d’eau fraîche et de leur pêche
    Que la sirène repartit entre les grands et les petits.
    Et malgré la cacophonie et leurs attitudes revêches,
    Ils sont tous en contrepartie reconnaissants, pleins d’appétit.

    La sirène n’est pas cannibale ; manger du poisson, quelle horreur !
    Alors les mouettes rabattent pour elle les navires alentour
    Par des appâts qu’elles trimballent afin d’les induire en erreur.
    Aussitôt qu’elle voit la frégate, elle se pare des plus beaux atours.

    Et dès qu’elle se met à chanter, tous les marins hypnotisés
    Se jettent à l’eau et sont noyés par les pélicans meurtriers.
    Alors la sirène enchantée prend l’capitaine érotisé
    À déguster et festoyer avec les piafs ménétriers.

    Image trouvée sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue. Si l’auteur de cette image reconnaît son travail, je serai heureux de le créditer.