Catégorie : Autres œuvres

  • L’écho de la Lorelei

    L’écho de la Lorelei

    Auprès des eaux endormies où j’allais en rêvassant,
    Était-ce un jour, une nuit ? Mes souvenirs s’évaporent !
    Toutes mes mémoires hormis, sont fragments embarrassants
    Lorsqu’ils trompent mon ennui en quête d’un égrégore.

    Je ne l’ai pas entendue, je ne l’ai pas aperçue.
    Je la prenais pour un songe échappé de mes fantasmes.
    Mais elle m’a attendu, elle m’avait si bien perçu,
    Immergé dans les mensonges de tous mes faux ectoplasmes.

    Elle m’a dit : « Réveille-toi ! » Elle m’a dit : « Ouvre les yeux !
    Car la porte du présent est, de toutes, la plus étroite ! »
    Je restai un peu pantois devant l’écho impérieux
    Résonnant omniprésent à mon âme maladroite.

    Comment pourrais-je décrire ce que mon cœur ressentit
    À la beauté fabuleuse de cet ange féminin ?
    J’ai presque honte à écrire ce que mon cœur pressentit
    Car son âme était violeuse et moi, simple masculin.

    Elle m’a dit : « Tu ne peux pas, par tes sens humains comprendre !
    Le chemin derrière la porte n’est pas un chemin humain. »
    Elle m’a dit : « Tu ne veux pas, par tes barrières entendre !
    Mais souffre que je t’apporte quelques pouvoirs surhumains ! »

    J’ai reçu un cœur nouveau pour entendre son silence,
    J’ai acquis un nouveau corps pour comprendre sa substance.
    J’eus l’accès au renouveau comme un prix de l’excellence
    Dont je conterai l’accord lors de mes prochaines stances.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • La belle désabusée

    La belle désabusée

    Elle avait l’air renfrogné et des seins bien tristounets,
    Une moue mal dessinée sous cet austère visage,
    Un regard bien grognonné à cause d’un camerounais,
    Ou je ne sais quel minet, qu’aurait raté son baisage.

    Un pauvre abrupt laideron qui ne croyait plus à l’amour,
    Qui fermait sa porte à clef et son cœur à double tour !
    Mes amis, nous aiderons cette femme en désamour,
    Cette ode à l’amour bâclé aujourd’hui et sans détour !

    En chemin, à l’improviste, par un sombre jour de pluie,
    Je m’arrangeai pour croiser la dame sans parapluie.
    Comme j’étais positiviste, pour contourner la sévère
    Et pour mieux l’apprivoiser, je lui déclamais mes vers :

    « Femme étrange, ton image fait remonter de mon cœur
    Mille mots, mille pensées que je veux coucher sur l’heure !
    Je veux faire de ton grimage, un sonnet des plus vainqueurs
    Dont les vers, sans t’offenser, vibreront de mots hurleurs ! »

    Je l’ai mise sur mon lit et j’ai ôté ses habits,
    J’ai aussitôt fait rimer ses seins, ses cuisses et son sexe
    Dans des strophes embellies et du plus bel acabit.
    Lentement, ma déprimée devenait un peu perplexe…

    Il me fallut une nuit entière de poésie
    Pour redonner le sourire à la belle désabusée.
    Mais j’ai vu, après minuit, émergeant de l’amnésie,
    Sa vraie beauté accourir sans en avoir abusé.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • À cherche-mouton

    À cherche-mouton

    Il s’est tant amusé à compter les moutons
    Qu’il a trop navigué, loin, au pays des rêves.
    Tandis que son rusé agneau, un peu glouton,
    S’en allait endiguer son appétit sans trêve.

    Et voilà le bonhomme, perdu dans ses pensées,
    Debout devant sa rose et les cheveux aux vents.
    Son mouton gastronome est parti compenser
    Sa nature morose en mangeant sous l’auvent.

    « Dis-moi, Rose-des-Vents, où chercher mon ami ?
    J’ai soif de sa présence et de son amitié ! »
    Mais la fleur ci-devant répondit : « Que nenni !
    Je n’ai ni la plaisance ni la moindre pitié ! »

    « Allez, Rose-des-vents, ne fais pas la jalouse !
    Montre-moi le chemin que tu connais si bien ! »
    Et le cœur émouvant de cette rose en blues
    Lui répliqua : « Demain, tu comprendras combien ! »

    Le soleil s’est levé, le rêve est terminé
    Et l’agnelet glouton a regagné sa boîte.
    Ce qu’il faut relever dans ce conte halluciné,
    C’est qu’les amours de mouton sont souvent maladroites.

    Tableau de Maryvon Riboulet

  • La fée coquelicot

    La fée coquelicot

    Vous ai-je raconté ce souvenir intime
    Quand j’habitais à Mende en terre Margeride ?
    Je vivais sans compter, sans le moindre centime,
    Je mangeais des amandes suivant l’éphéméride.

    J’allais souvent marcher autour du lac Charpal,
    Soit très tôt le matin ou vers le crépuscule.
    Je m’en allai chercher comme plat principal
    Quelques branches de thym et quelques radicules.

    J’aimais bien caresser les pétales si doux
    De ces coquelicots qui rougissaient la lande.
    Sur ma peau, compresser ces délicats doudous,
    Cordons ombilicaux de mes intimes glandes.

    C’est lors d’un effeuillage de ces rouges boutons,
    Que ma main câlina une douce peau tendre.
    Cachée dans les feuillages, frisée comme un mouton
    Et parée de grenats, une fée vint s’étendre.

    D’une peau veloutée comme mes doux pétales,
    Elle laissa ma main s’aventurer plus loin.
    Jamais ne redoutait que mes baisers s’étalent
    Sur le doux parchemin de son tendre pourpoint.

    Le jeu plut à ma mie qui m’accorda trois vœux.
    Le premier, je le pris pour connaître l’amour,
    Le deuxième promis, pour un baiser baveux,
    Mon troisième surpris ma jolie fée glamour.

    C’est avec toi ma belle que je veux désormais
    Partager et le lit et le gîte et la vie.
    Elle ne fut pas rebelle à mon souhait gourmet
    Et la fée m’accomplit mon vœu inassouvi.

    C’est ainsi qu’aujourd’hui je vis dans sa patrie
    Où les prairies sont vertes et les montagnes blanches.
    Mes amours m’ont conduit à vivre dans sa fratrie
    Et elles sont recouvertes d’une douce avalanche.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • L’œil dévoilé

    L’œil dévoilé

    Échappant à la rigueur des traditions séculaires,
    Il voulait s’épanouir dans un monde sans frontière.
    S’évadant avec vigueur d’un cachot vestibulaire,
    Il voulait s’évanouir sur la terre tout entière.

    L’œil était un peu rebelle à truquer la vérité,
    Il voulait communiquer, regarder et observer.
    Sous une mèche d’ombrelle en toute familiarité
    Il se mit à tourniquer pour pouvoir tout conserver.

    Depuis lors la jeune fille qui se cachait dans ses murs,
    Ne sut résister au charme de cet investigateur.
    Véloce comme une anguille, bondissant dans un murmure,
    Réalisa, sans alarme, ses rêves navigateurs.

    C’est son cœur, ce tendre organe, qui maîtrisait sa vision,
    Laissant à l’esprit frivole la raison et les pensées.
    Et ce cœur, fils de Morgane, savait faire provision,
    Par son amour bénévole, des merveilles à recenser.

    Depuis, son œil est son maître qui se pare d’intuition ;
    Il sait choisir les couloirs dont son cœur connait la clef.
    Et si vous voulez connaître les chemins de sa vision,
    Laissez le cœur le vouloir, suivez-le sans renâcler.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • La fille aux mille fleurs

    La fille aux mille fleurs

    D’une ineffable tristesse, elle dissimulait ses pleurs
    Sous les milliers de couleurs d’un bouquet de fleurs des champs
    Qu’elle disposait dans ses tresses pour leur donner de l’ampleur
    En atténuant ses douleurs et ses larmes asséchant.

    J’ai su connaître l’histoire de cette fille éplorée
    En me déguisant en fleur juste à l’orée des forêts.
    Caché sur mon promontoire, je ne pouvais déplorer
    Cette fille aux mille pleurs mouillant ses cheveux dorés.

    Quand elle effleura ma main en découvrant mes épines,
    Elle cria sa surprise et couru vers le bosquet.
    Je restai sur le chemin en guettant la galopine
    Dont mon âme était éprise et que je ne voulais offusquer.

    Je le refis tous les jours pour tenter d’apprivoiser
    La demoiselle en détresse et comprendre ses tourments.
    Tant que dura ce séjour et sans vouloir pavoiser,
    Elle devint ma maîtresse et moi son prince gourmand.

    Elle fuyait les paroles, les mots et les beaux discours
    Qui faisaient tourner la tête et n’étaient que des promesses.
    Passer à la casserole par des coqs de basse-cour
    Sonnaient comme une quintette d’une foire de kermesse.

    Pour expliquer à la belle mes sentiments véritables,
    Je pris des coquelicots pour mettre son cœur en joie.
    Pour séduire ma rebelle par un bouquet profitable
    J’ajoutai tout illico des bleuets luxembourgeois.

    C’est ainsi que nous parlâmes d’amour et toutes ces choses
    Par des bouquets triomphants de fleurettes et de boutons.
    Pour lui déclarer ma flamme, j’apportais quatorze roses
    Et pour lui faire un enfant, je dessinais un mouton.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • La cuisine de Margueritte

    La cuisine de Margueritte

    Elle s’appelait Margueritte et j’aimais la rencontrer
    Le soir entre chien et loup dans une intime atmosphère.
    Pour effeuiller la petite, pas besoin de vous montrer
    Comment moi, fier andalou, je m’y prenais pour le faire.

    Vêtue comme un artichaut d’une robe en pétales,
    Chauffée dans un bain-marie, elle s’ouvrait sans surprise.
    J’apportais le gaspacho dans une boîte de métal
    De la Comtesse Du Bary pour croquer ma belle éprise.

    Si tu n’as jamais goûté la chair tendre des sépales
    Sous les dessous féminins, tu n’as jamais rien goûté !
    Il faut laisser dégoutter quand l’amour mouille ses pales
    Pour faire monter le venin qui donne son velouté.

    Je sais bien les cuisiner, moi, toutes ces demoiselles !
    Il faut savoir les cueillir à la rosée du matin.
    Impossible à usiner ! Seule la main de l’oiselle
    Peut branler sans tressaillir et sans paraitre catin.

    Pour revenir à ma belle, c’est comme avec les oignons !
    Ne jamais quitter des yeux même en pleurer quelquefois !
    Elle m’a fait une ribambelle de petits enfants trognons
    À qui j’apprends, tout joyeux, la cuisine d ‘autrefois.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • L’illumination

    L’illumination

    À force d’avoir dirigé ses pas toujours vers l’ouest,
    Il est arrivé au bout de cette terre des hommes.
    Et le soleil, affligé, illumine sans conteste
    Ce petit prince debout, l’interpelle et le résomme.

    Est-ce la fin de sa quête ? A-t-il atteint son destin ?
    Sa vie n’était-qu’une fuite ? Une fuite sans retour ?
    Je n’aurai qu’une requête bloquée dans mes intestins :
    À quoi sert cette poursuite s’il faut mourir sans détour ?

    Mais le prince est en accord, arrivé sur cette plage,
    Son corps brûle de l’ardeur qu’il a mise dans son voyage.
    Son cœur l’élève encore dans ce divin découplage
    Qui unit le trimardeur au prochain appareillage.

    Toutes ses cellules chantent au diapason de la Terre,
    Ses émotions l’illuminent et font exploser son cœur.
    Des pensées folles l’enchantent dans le secret du mystère
    Et son âme a bonne mine dans ce tourbillon des chœurs.

    Il a trouvé la réponse dans ce présent immobile
    Qui unit Dieu à la terre, qui unit l’homme au Divin.
    Si au passé il renonce, au futur rend sa sébile,
    Sa vie devient volontaire et il en est l’écrivain.

    Tableau de Maryvon Riboulet

  • Ces petites fleurs jaunes

    Ces petites fleurs jaunes

    Elles sont le seul souvenir d’un samedi soir oublié,
    Une invitation aux chandelles dans un petit jardin secret.
    Je n’ai pas vu la nuit venir dans l’ombre des érabliers
    En regardant les hirondelles chassant les insectes indiscrets.

    Il n’y avait pas une étoile ni même une fraction de lune,
    La nuit habillée d’un noir d’encre s’amusait à nous aveugler.
    À tâtons j’ai palpé un voile, j’en remerciais cette opportune
    Qui me retenait comme une ancre tout en m’empêchant de beugler.

    Une main posée sur ma bouche puis un baiser pour tout bâillon
    Et voilà qu’une autre m’entraîne dans un labyrinthe obscurci.
    Puis on m’allongea sur la couche et l’on m’ôta mon médaillon
    Pour ne pas rester à la traine en tâtant mon sexe endurci.

    Elle fit un jeu de lumières en déposant quelques bougies
    Sur le tapis d’herbes sauvages et ces petites fleurs jaunies.
    On aurait dit une prière avec des lumignons rougis,
    Pieusement sur le dallage comme une sainte cérémonie.

    J’ai dit « Je vous salue Marie ! Pierre m’avait loué votre grâce !
    Je crois en vous et à vos seins, permettez que je les embrasse ! »
    Elle n’a rien dit, elle a souri, m’a embrassé sur l’herbe grasse
    Et s’accroupit sur mon bassin pour que plus rien nous embarrasse.

    Depuis ces fleurs font mille échos quand je les aperçois dans l’herbe,
    Comme un chant sacré solennel qui me rappelle cette rencontre.
    Elles me font penser aux bécots que j’ai reçus avec superbe
    Et cet amour compassionnel que je garde dans le cœur, tout contre.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • Le coquelicot solitaire

    Le coquelicot solitaire

    Ça faisait un an déjà que je courtisais ma belle.
    Je la rencontrais le soir lovée dans son habit rouge.
    Pour n’avoir pas l’air goujat, j’apportais des mirabelles
    Qu’on mangeait sans rien surseoir sous l’ombrage des carouges.

    Elle ôtait sa pèlerine d’une couleur écarlate
    Et l’étendait sur la mousse dans un mouvement de grâce.
    En ouvrant grand les narines, en haussant les omoplates
    Et riant de sa frimousse sur le tapis d’herbes grasses.

    Je l’appelais « Coquelicot », pour ses lèvres vermillon.
    « La cousine du Pavot », pour ses pommettes vermeilles.
    Je l’appelais « Mon Œillette », pour ses hanches en papillon.
    Elle était mon « Argémone », qui régnait sur mon sommeil.

    Pour honorer son pistil et préserver ses pétales,
    J’étalais sa robe rouge comme chasuble sacrée.
    Je mettais beaucoup de style à dévoiler cet étal
    Car je suis né à Montrouge et je m’y suis consacré.

    Elle avait une peau blanche, satinée comme une pèche
    Avec des lèvres grenat et des mamelons corail.
    Entre ses bras, la pervenche voulait que je me dépêche
    À grimper au Nirvana dans son caravansérail.

    Quand nous avions épuisé nos provisions de baisers
    Et tari toute la source qui abreuve l’amourette,
    Nos sens tout amenuisés n’étaient qu’à peine apaisés,
    Nous n’avions d’autre ressource que fumer une cigarette.

    Les coquelicots ne durent que l’espace d’un printemps
    Et la chaleur estivale enflamma ses oriflammes.
    On vit fondre la soudure de nos deux cœurs éreintants
    Et ce rouge adjectival me darda ses lance-flammes.

    C’est la fleur que je préfère et qui brûle dans mon cœur.
    Quand je goûte ses pétales, je repense à ma passion.
    Il n’y a plus rien à faire, il n’y a pas de rancœur,
    Quand les amours sont létales, elles meurent en compassion.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • Cœur alchimiste

    Cœur alchimiste

    J’avais amassé tant d’or dans mon coffre-cœur de pierre
    Qu’il s’est enflammé un soir sous cette charge explosive.
    Comme une boîte de Pandore sous les coups d’une rapière
    Qui sous ses coups de poussoir serait devenue corrosive.

    Toute une vie de calculs et de fougues cérébrales
    Me l’avaient tant desséché qu’il ne parlait à personne.
    À trop lire de fascicules sous de peines palpébrales
    Ne pouvaient que dépêcher un morose glas qui sonne.

    Il a fallu que se brise cette forte carapace
    Pour que l’esprit tyrannique soir exilé en déroute.
    Et qu’enfin comme une brise se faufilant dans cet espace
    Une voix inorganique me fasse changer de route.

    C’est une étrange gazelle qui courait dans les montagnes
    Qui réveilla le dormeur enfoui sous les décombres.
    Pour ravir la demoiselle, moi, le prince de Bretagne,
    Je suis devenu charmeur et je suis sorti de l’ombre.

    Si elle m’a rejeté, m’ignorant de son silence,
    Elle m’a ressuscité de cette prison de glace.
    Et mon cœur s’est projeté de toute sa corpulence
    Et a su me susciter l’amour que rien ne surclasse.

    Aujourd’hui, en bonne entente, dans le cœur et dans l’esprit,
    Nous aimons donner au corps la parole désormais.
    Le cœur fait l’âme contente, tous se sont enfin compris
    Nous formons le bel accord dont l’écho fait le cornet.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • Les fleurs égoïstes

    Les fleurs égoïstes

    Mes jolies fleurs clairsemées ont toutes beaucoup à dire.
    Trop grosse ou bien trop charnue ? Chaque fleur a son histoire.
    Unique ou bien parsemée ? À louer ou affadir ?
    Sublime ou bien biscornue ? Laide ou bien adulatoire ?

    Dans nos jardins de famille, chaque cicatrice reste
    Et les années de printemps n’en effacent pas la trace.
    Toutes les jeunes charmilles grandissent plus ou moins prestes
    Et se gênent en s’éreintant pour régner sur les terrasses.

    On charme le jardinier, on captive le fleuriste.
    Tant pis s’il faut ombrager les candidates en friche !
    Sous le soleil matinier, on loue le pépiniériste
    Pour se faire encourager et admettre au clan des riches.

    Chaque fleur a ses affaires et se croit unique au monde.
    Le bouquet n’est qu’un réseau qui doit l’écouter se plaindre.
    Les roses qui prolifèrent ont des épines immondes
    Mais unies par des tréseaux hypocrites à complaindre.

    Elles faneront un jour, desséchées dans l’amertume,
    Rejetant la faute aux autres si elles n’ont pas eu leur gloire.
    C’est le pire des séjours de chercher l’honneur posthume
    Et jouer les bons apôtres dans un bocal étrangloir.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • Le petit prince

    Le petit prince

    En habit d’explorateur, brandissant bien bas son sceptre,
    Le petit prince est paré pour de nouvelles aventures,
    Avec son air d’orateur, le fils de la belle Électre,
    Et son air désemparé d’un héros en miniature.

    Il est tombé des étoiles de son beau vaisseau d’argent
    Naufragé involontaire, un Robinson de l’espace,
    Observant la moindre voile, sur l’horizon émergeant,
    Pour une aide humanitaire de crainte qu’il ne trépasse.

    C’est d’un coucou en acier échoué d’une tempête
    Que son ange est arrivé par une nuit déprimante.
    Un aviateur finassier, un amateur de trompette
    Qui avait trop dérivé, balloté par la tourmente.

    Petit prince s’est caché du monstre métallisé
    De peur qu’il ne se réveille et l’avale goulûment,
    Puis sa peur s’est relâchée sous l’effet des alizées
    Et le voilà qui surveille son sauveur résolument.

    L’aviateur était artiste et grand-maître du pinceau.
    Il sut dessiner la route qui menait à sa maison.
    Aidé par le trompettiste, l’enfant couru les rinceaux,
    Représentés sur la croûte, qui faisaient la liaison.

    Quand vous le rencontrez, éperdu sur votre route,
    Ayez toujours à portée quelque chose à regarder ;
    Des crayons à liseré pouvant servir de biroute
    Et les moutons confortés seront sagement gardés.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • Couleur poivre

    Couleur poivre

    Corps luisant et sanglant, à la peau satinée,
    Dont la chair est un feu à ma bouche gourmande,
    Bourgeonnant comme un gland à ses vices platinés,
    Comme ardent boutefeu de la langue allemande.

    Tantôt jaune, orangé, tantôt rouge, émeraude,
    Comme des oriflammes sur le souffle des vents,
    Au goût vif, étranger qu’à ma faim me taraude
    Et fait cracher des flammes à travers les évents.

    Piment rouge, piment fort je te croque, tu me mords,
    Tu m’as communiqué ton paprika glamour,
    À grands coups de renforts, par la petite mort
    Qui m’a fait tourniquer la chaleur de l’amour.

    Je sais de tes arômes et toutes ses essences
    Empreindre mon palais sur un parfum d’extase.
    C’est la force de l’homme ténue dans sa semence
    Faisant au chevalet jouir mon épitase.

    Fier de ta forme étrange et de son goût suave,
    Tu enflammes ma langue au profond de ma bouche.
    Es-tu démon ou ange ? Intrépide ou bien zouave ?
    Mon cœur et mon corps tanguent quand je perce ta couche.

    Poivre noir, poivre blanc, qu’importe ta couleur
    Si tu sais relever les goûts et les saveurs.
    Dans ma main, tout tremblant, c’est un peu de douleur
    Quand tu vas t’élever et devenir baveur.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • L’écoute silencieuse

    L’écoute silencieuse

    Elle écoute à l’intérieur dans l’oreille de mon cœur,
    Elle observe les non-dits par l’intuition de mon âme,
    Elle pressent tout l’extérieur, naturelle et sans rancœur,
    Elle perçoit les interdits dans le souffle de sa flamme.

    Tout derrière la cloison intime de mes pensées,
    Dans les cavités du cœur et ses émotions profondes,
    Elle échappe à ma raison mais n’est jamais offensée,
    Souriant d’un air moqueur d’une tendresse féconde.

    Le soir avant de plonger dans l’abîme de mes rêves,
    Elle déroule mon âme pour en faire sa tunique.
    Elle sait bien prolonger les images les plus brèves,
    Elle dédouble sa flamme pour retisser l’être unique.

    Dans la souffrance excessive, elle parle à mon oreille
    Comme un ange protecteur qui psalmodie ma douleur.
    Dans les ombres dépressives, c’est à nulle autre pareille
    Qu’elle éclaire les projecteurs et met mes nuits en couleur.

    C’est l’écho de mes racines qui remonte aux origines
    Et me relie à moi-même bien avant que je m’incarne.
    Elle vibre et me fascine dans mes fibres androgynes,
    La divinité qui m’aime dans cette intime lucarne.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • L’œil musicien

    L’œil musicien

    Quand l’œil se met à l’écoute, à l’écoute du présent
    Et qu’il ferme les paupières de ses oreilles au temps,
    Alors l’âme, au compte-goutte, voit l’esprit omniprésent
    Qui transforme en cœur de pierre l’être intérieur impotent.

    Quand la musique est douleur et que la souffrance sonne,
    Il ne faut pas résister mais non plus s’y résigner.
    Car la pire des couleurs enfermée dans la personne,
    C’est nier et persister la partition désignée.

    Je l’ai entendue le soir qui hurlait dans les couloirs
    Tandis que j’étais lié dans un corps endolori.
    Je ne pouvais y surseoir ni trouver de défouloir
    À ce mal fort délié me clouant au pilori.

    Parfois la marche funèbre éclatait de mille cors
    Comme une aubade tragique perpétrée en La mineur.
    Je plongeais dans les ténèbres anéanti dans mon corps
    En chantant des liturgiques et le cœur tambourineur.

    J’ai appris à l’écouter d’un œil sain, sans jugement ;
    J’en ai trouvé les richesses de l’écho à l’extérieur ;
    J’ai appris à la goûter et senti les changements
    Que procure la vieillesse de l’éternel intérieur.

    Tableau de Maryvon Riboulet

  • Cœur d’or

    Cœur d’or

    Un cœur d’or sonnait Ding-Dong sur le clocher de ma vie ;
    Les ventricules gonflés du sang vermeil de l’amour.
    Sur des vieux airs de folksong de l’ancienne Yougoslavie,
    J’en reconnaissais ronfler ses systoles pur glamour.

    Moi aussi, je l’ai sonné, son carillon d’espérance
    Pour porter mon oriflamme sur des citadelles fières.
    Des cœurs carapaçonnés derrière des vies en errance
    Qui refroidissaient ma flamme d’une âme austère de greffière.

    Il a résonné longtemps comme un glas de circonstance
    Qui a creusé ses sillons dans la chair de mes souffrances.
    Son balancier remontant sans trouver de résistance
    Parmi les microsillons gravés pour ma délivrance.

    Qu’est ce qui donne la valeur ? Qu’est ce qui dore son blason ?
    Qu’est-ce qui rend l’âme légère ? Qui est son mètre étalon ?
    Fi de ces contrevaleurs qui faussent le diapason
    Fi des monnaies étrangères, des talents et des gallons.

    Alors je l’ai libéré, j’ai tranché ce qui l’attache,
    Je l’ai laissé s’envoler libre de toute folie.
    Mon âme s’est libérée de ses soucis multitâches
    Et m’a ouvert les volets, chassant la mélancolie.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • Un amour de Coccinelle

    Un amour de Coccinelle

    Mon matou est amoureux, mon matou est passionné.
    Coccinelle de printemps, coccinelle des amours,
    Berce son cœur langoureux, d’un amour attentionné
    Sous le soleil éreintant dans la chaleur des mamours.

    Dodelinant sur sa tête, mettant la puce à l’oreille,
    Elle lui murmure des mots doux dans un langage secret.
    Sur des chansons de quintette, chœurs à nuls autres pareils,
    Elle enchante mon matou en élans très indiscrets.

    Je l’ai vue ouvrir ses ailes en effeuillage érotique
    Faisant glisser chaque pois comme ardentes excitations.
    Mon félin fervent de zèle suivait la bête hypnotique,
    Queue levée en contrepoids, prunelles en dilatation.

    Tel un pilote intrépide menant par le bout du nez,
    Elle conduit son matou là où la raison l’ignore.
    D’une démarche rapide, elle emmène mon minet
    Avec ses meilleurs atouts pour épouser son signor.

    Tous les soirs quand vient la nuit, sous la lanterne lunaire,
    Écoutez le doux ronron d’un cœur félin qui soupire.
    Couché dans les belles-de-nuit, en période solunaire,
    Le phallus hors du giron et sa belle s’y accroupir.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • Les Fées-mères

    Les Fées-mères

    Elles sont invisibles car on ne les voit pas,
    Elles sont silencieuses, on ne les entend pas,
    Elles sont éphémères, viennent et puis s’en vont
    Et quand elles sont parties, nous nous en émouvons.

    J’en ai à la maison une preuve formelle,
    Elle peint des tableaux quand je ne regarde pas.
    Ses cheveux indociles sont couleur caramel
    Et ses foulards soyeux emballent ses appâts.

    Si vous cherchez à voir comment elle travaille,
    Vous la prendrez pour folle ou comme femme-enfant.
    Laissez-la à son rythme, et voyez les trouvailles
    Qu’elle invente en pouffant son rire triomphant.

    Si elle vous parle un peu, prêtez bien votre oreille
    Car sa voix est fluette et raisonne en son cœur
    Comme un ruisseau murmure et nulle autre pareille
    Vous dira des merveilles sans blâme et sans rancœur.

    Maintenant je vous quitte, je l’entends qui m’appelle !
    Elle a besoin encore d’un peu d’inspiration.
    D’abord un peu d’amour pour nourrir sa chapelle
    Et puis un peu de rêve pour son admiration.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • Souvenirs de Bretagne

    Souvenirs de Bretagne

    Te souviens-tu de ces vents fous qui tentaient de nous séparer ?
    Nous luttions, les mains enlacées, pour résister à leurs assauts.
    Te souviens-tu de ces remous qui risquaient de nous égarer,
    Dont nous n’étions jamais lassés et dont nous étions leurs vassaux ?

    Ces souvenirs des jours heureux, je les ai gravés dans mon cœur ;
    Le vent y souffle toujours plus fort et les courants, également.
    S’il y eut des jours malheureux, je les ai gommés sans rancœur ;
    Ils étaient tracés sans effort sur sable gris, tout simplement.

    Ce sont nos routes de Bretagne, bordées de vagues outremer,
    Où nous avons marché ensemble vers des aventures incertaines.
    Puis j’ai regagné mes montagnes, tandis que tu gagnais la mer.
    Mais, fréquemment, les nuits je tremble quand je pense à mon capitaine.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • L’éternel féminin

    L’éternel féminin

    Puis soudain, l’horizon s’embrase dans la déchirure du temps,
    D’un éclat troublant le silence dans cette atmosphère écrasante.
    C’est la vie dictant sa prophrase qui fait un écho percutant,
    Un verbe édicté sans violence dans la lumière fertilisante.

    J’en oublie tous ces temps d’attente, mais ces temps-là n’existaient pas,
    Je n’étais qu’une ange-apprentie, pas encore promue chérubin.
    Juste une jeune débutante, je faisais mes premiers faux pas,
    Jusqu’à ce qu’Il m’ait pressentie pour épouser mon concubin.

    Je suis née de fleur de lumière, pour éclairer la création ;
    Je suis née de flamme essentielle dans la cinquième dimension.
    Si les ombres dans la poussière n’y voient là que procréation,
    Leurs théories providentielles ne sont pavées que d’intentions.

    C’est ainsi que souffle la vie sur les paysages endormis,
    C’est ainsi qu’anime la flamme sur les cœurs en mélancolie.
    Jusqu’au fond des âmes asservies des espoirs à jamais hormis,
    C’est moi qui brandis l’oriflamme des obscurantismes abolis.

    Souffrez qu’aujourd’hui je m’efface, je vous ai montré le chemin.
    Mon pouvoir inspire vos âmes car je l’ai béni de mon sceau.
    En tous coins, en toutes surfaces, c’est écrit sur vos parchemins :
    « La confiance est votre sésame ! » Gravez-le sur vos panonceaux !

    Tableau de Fabienne Barbier

  • De paysages en paysages

    De paysages en paysages

    De paysages en paysages, ce temps qui passe m’hypnotise
    Dans ses reflets en clair-obscur que mon esprit tarde à connaître.
    J’en ai oublié les visages, et leurs finesses, et leurs sottises,
    Dans leurs navrantes sinécures qui passent devant ma fenêtre.

    Mon âme a planté son hamac dans les montagnes immobiles
    Et mon esprit, qui fait du vent, s’évapore dans la chaleur.
    Mon corps a pris de l’estomac dans ce silence indélébile
    Et mon cœur s’en va dérivant bercé par le chant des haleurs.

    Ce paysage continu sans commencement et sans fin
    Voudrait m’emporter avec lui jusqu’au-delà de l’horizon.
    Mon esprit est discontinu, mon âme reste sur sa faim,
    Je voulais un coin de parapluie, je n’ai trouvé qu’une prison.

    Dans cette enceinte du présent murée d’hier et de demain,
    L’inertie passe où rien ne passe et les chemins vont nulle part.
    Partout, je suis omniprésent, je suis les voies et les chemins,
    Je me transvase dans l’espace, je vole au-dessus des remparts.

    Il n’y avait rien à entreprendre, il n’y avait rien à discuter,
    Mais écouter ce paysage qui raconte la vie sur Terre.
    Je ne cherche pas à le comprendre, je m’abandonne à l’écouter,
    Car d’affûtage en aiguisage, il berce mon cœur libertaire.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • Le secret de la sirène

    Le secret de la sirène

    Vêtue de sa peau de sirène qui soutient ses seins merveilleux,
    La petite reine se baigne dans son costume imaginaire.
    Tandis que son corps de murène devient quelque peu écailleux
    Dans la mer mystérieuse où règne une vie extraordinaire.

    Déjà ses mamelons se durcissent sous la caresse des courants
    Qui s’insinuent entre ses cuisses et lui complimentent le sexe.
    Tandis que nageoires s’esquissent dans son dos à contrecourants
    Et libèrent une onde qui bruisse en forme d’accent circonflexe.

    Maintenant les rayons de lune font miroiter ses jolies fesses
    Qui ondulent au-dessus des dunes sur le rivage de minuit.
    Tandis que ses pieds se transforment et que ses deux cuisses s’affaissent,
    Délivrant une queue caudiforme comme un poisson belle-de-nuit.

    Savez-vous qu’ainsi les sirènes ont besoin de se ressourcer
    Et laisser savourer leur corps de la tendresse de la mer ?
    Mais pour redevenir humaines, elles doivent bouleverser
    Le cœur des marins pour, encore, perpétuer leurs vieilles chimères.

    La voilà qui guette ce soir quelques bateaux à l’horizon.
    Elle va chanter nue et hautaine en dodelinant les mamelles.
    Elle n’a pas besoin d’accessoire pour enfermer dans ses prisons
    Le cœur du vaillant capitaine qui fera d’elle sa femelle.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • La belle arménienne

    La belle arménienne

    Pour ce nouveau prototype fabriqué dans la mer noire,
    On a invité les mages venus des quatre horizons.
    Sa marraine est l’archétype d’une vieille bassinoire
    Qui fait briller son image et en donne les frissons.

    On l’appelle « l’Arménienne », la voiture de l’année !
    Elle a cent chevaux-vapeurs prêts à vous éperonner !
    On fait une bonne moyenne sur la Méditerranée !
    Le pied sur l’accélérateur, écoutez-la ronronner !

    Son pilote, c’est Albert ! Le roi de la livraison !
    Pour offrir à ses clients une pizza cuite à point,
    Il la gare au réverbère, pour charger sa cargaison
    Et l’apporte à bon escient dans son habit de pourpoint.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • Les cygnes d’étang

    Les cygnes d’étang

    Ce sont les cygnes d’étang qui vont toujours deux par deux.
    Ce sont des signes des temps qui font fuir les cafardeux.
    Le col des cygnes s’étend pour tracer un cœur d’amour.
    L’école des signes s’entend résonner jour après jour.

    Ô mon bel oiseau parfait, fais-moi une place sur ton dos !
    Emporte-moi au-delà loin de ces temps oubliés !
    Loin de ce monde surfait, mets sur mes yeux ton bandeau
    Pour ne plus fixer cela et n’en plus rien publier.

    J’ai marché dans les rivières, j’ai traversé mille ponts,
    Mes amis sont les canards, mon allié est le héron.
    Sous les coups des étrivières qui ont forgé mes crampons
    J’avance en père peinard jusqu’aux marches du perron.

    La blancheur de ton plumage n’a jamais été souillée
    Par la boue des immondices qui jalonnent les rivages.
    Tu fais fi de ces ramages sans jamais être vasouillé
    Malgré tous les préjudices qui t’attristent et te ravagent.

    Moi, j’ai laissé mes racines disparaître aux quatre vents,
    J’ai choisi pour domicile ton pays et tes forêts.
    Et cette fièvre assassine que j’avais auparavant
    S’est mutée en codicille qui pousse mon mascaret.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • La geisha aux trois couleurs

    La geisha aux trois couleurs

    Je l’ai souvent vue assise toute nue sur sa terrasse,
    La geisha aux trois couleurs, rayonnante de lumière.
    Dans cette pénombre grise d’où se détache sa trace
    Me laissant mille douleurs dans mon cœur chargé de pierres.

    Ses mouvements en cadence jouent musique dans l’espace ;
    Une expression artistique de figure féminine.
    Regardez quand elle danse, regardez quand elle passe !
    Quand ses bras en élastique jouent la jolie figurine.

    Un sein rond couronné d’or, un sein lourd auréolé
    Sous deux épaules au soleil qui en caresse les dunes.
    Au moment où je m’endors d’un esprit « Olé, Olé »,
    Je rêve à ces deux merveilles que je tète sous la lune.

    Quand la geisha se repose, ses trois couleurs se mélangent
    Dans une teinte d’albâtre lumineuse de la nuit.
    Quand la geisha tient la pose, sa peau, blanche comme un ange,
    M’appelle et je dois combattre mes cauchemars de minuit.

    De l’aurore au crépuscule, ma geisha sonne l’accord
    Par les reflets des rayons qui dessinent mille gestes.
    Majuscules ou minuscules ? Le langage de son corps
    Brouille et corrompt mon crayon et mes rimes font le reste.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • La danse de pluie

    La danse de pluie

    Ma voisine d’en face est une vraie sirène.
    Dès les premières gouttes, elle se déshabille
    Puis, vient sur sa terrasse, apaisée et sereine,
    Sous la pluie qui m’envoûte en pure jeune fille.

    C’est pour moi qu’elle danse nue devant ma fenêtre
    Pour m’aimer en silence sans rien laisser paraître.
    C’est pour moi qu’elle ondule son corps qui vient de naître
    Pour m’extraire de ma bulle, je dois le reconnaître.

    Ces gouttes de plaisir qui glissent sur ses seins,
    Qui mouillent sa plastique, qui perlent aux mamelons,
    Qui ruissellent à loisir jusqu’au creux de ses reins,
    Qui nettoient et astiquent jusqu’au bout des talons.

    Mais lorsqu’elle s’allonge en écartant les jambes
    Pour jouir de l’extase du flux et du reflux,
    Je crée une rallonge que l’onde me détrempe
    Et mon cœur est en phase et l’amour y afflue.

    Mais lorsque l’arc-en-ciel irradie ses cheveux
    Et que le soleil perce à enflammer son corps,
    Cette danse essentielle s’arrête sur un aveu :
    J’apprécie les averses et encore et encore !

    Tableau de Fabienne Barbier

  • L’amante papillonne

    L’amante papillonne

    Papillon du soir, bonsoir !
    Papillon de nuit, espoir !
    Papillon de jour, bonjour !
    Papillon d’amour, toujours !

    J’aime m’accrocher à ton dos
    Et m’agripper à tes ailes,
    Virevolter quelques rondeaux,
    Cramponné à tes mamelles.

    Papillon de lune, dis-moi…
    Papillon d’étoile, crois-tu…
    Papillon soleil, crois-moi…
    Papillon je t’aime, sais-tu ?

    Ouvre bien grand tes antennes,
    Déploie bien grand tes deux ailes,
    Ouvre ton cœur de fontaine,
    Je t’aimerai avec zèle.

    Papillon de l’air, écoute ;
    Papillon de l’eau, regarde ;
    Papillon de terre, tu goûtes ;
    Papillon de feu, me garde !

    Tableau de Fabienne Barbier

  • L’oiseau printanier

    L’oiseau printanier

    Ô joli diapason de la nature intime,
    Toi qui a le secret de tirer du sommeil
    La partie de la Terre qui repose en victime
    Sous le rideau d’hiver d’une neige vermeil.

    Depuis combien de nuits, luttes-tu avant l’aube,
    De peur qu’une patrouille te surprenne en délit ?
    J’entends ta douce aubade qui me charme les lobes
    Et résonne l’accord juste au périhélie.

    Que tous nos compagnons recouvrent le sentier !
    Tous ces petits cœurs chauds au matin de leur vie.
    Que ces milliers de pattes reprennent leurs chantiers
    Pour continuer encore leur mission de survie !

    Que croyez-vous qu’il guette avant le point du jour ?
    Une damoiselle oiseau et sa flamme à aimer ?
    Ce petit prêtre en plumes veille sur le séjour
    De l’étoile du matin dans l’azur essaimé !

    C’est au cœur de l’hiver, dans le froid absolu,
    Qu’il naît d’une raison qui nous échappe encore.
    Mais nous savons, qu’au cœur du mal, est résolu
    Cet amour qui extrait, du vide, ses avant-corps.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • Cœur de comète

    Cœur de comète

    Aussi profond que mon âme qui m’accompagne inconsciente,
    Aussi loin que mes racines qui s’enfoncent à l’infini,
    Aussi ancien que mes rêves d’une passion alliciante,
    Aussi aimant que la vie de l’univers transfini.

    Cette comète d’amour n’a jamais été créée ;
    Bien antérieure au passé et postérieure au futur.
    Elle marque l’origine, la nature procréée,
    Elle trace la portée jusqu’à l’ultime suture.

    C’est la loi de l’attraction qui s’exerce à travers elle,
    Celle qui unit l’amour depuis la cinquième essence ;
    Jusqu’au sixième palier que nous sommes avec zèle
    Et vers ce septième ciel dont rêve notre conscience.

    Création délibérée d’une volonté divine,
    Ou mécanique céleste, ou mécanique quantique ?
    Elle a des milliers de noms et des milliers d’origine,
    Mais elle est universelle et sonne comme un cantique !

    Cet écho de permission qui résonne dans l’espace
    Accorde à ceux qui l’entendent la course d’évolution.
    Sentez-vous sa vibration dedans votre carapace ?
    C’est le geste du pardon, le cœur de révolution.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • Infusion de cœurs

    Infusion de cœurs

    Un remède de bonne femme mais qui serait efficace ?
    La barre peut paraître bien haute à tous ces sots misogynes,
    Mais j’aspire à témoigner comme intime dédicace
    Que seul l’amour d’une femme guérit les maux androgynes.

    Comme un Saint-Graal féminin, une coupe aphrodisiaque
    Qui dégagerait des bulles légères en forme de cœur.
    De ce verre de nectar, au parfum paradisiaque,
    J’aime sentir sur mes lèvres papilloter la liqueur.

    Prenez le trois fois par jour, buvez le trois fois par nuit,
    Jusqu’à ce que son effet, vous donne envie de voler !
    Vous en prendrez quelques gouttes dans votre bain de minuit
    Jusqu’à ce que les étoiles vous incitent à convoler !

    J’en ai senti les fragrances jusqu’au soleil de midi,
    Des arômes hermétiques dans leur flacon bien fermé.
    Mais l’essence de l’amour peut faire cas d’apatridie ;
    Elle traverse les frontières et n’est jamais enfermée.

    Cet élixir de jouvence aux mille cœurs effervescents
    Est le reflet de mon âme, comme un double inconscient.
    J’en ai appris la recette d’un hymen interressant
    Qui m’a transformé l’esprit jusqu’au profond subconscient.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • Le puits des amours

    Le puits des amours

    Dans ce puits, j’ai semé une pluie de présents ;
    Quelques pièces d’argent pour un peu de confort
    Qui s’entassent au fond depuis que j’ai treize ans
    Et quelques pièces d’or pour plus de réconfort.

    Quand mon cœur était pris pour une jolie fille,
    J’y jetais mes pensées et mes rêves d’amour.
    Si la vie me privait de ses jolies pupilles,
    J’y versais mes sanglots noyés de désamours.

    Deux fois, il est sorti une étoile filante
    Qui m’a douché le corps et émerveillé l’âme.
    Deux enfants sont sortis, une nuit jubilante,
    Pour, un peu de bonheur, alimenter ma flamme.

    Un jour je suis tombé au fond de ses entrailles
    Et de mes os brisés j’ai entendu la voix.
    Une sorte d’écho qui perçait les murailles
    Comme à l’âme un fanal et au corps un pavois.

    J’y reviens tous les jours interroger l’oracle ;
    Je n’entends plus sa voix si ce n’est sa présence.
    Mais la confiance est grande et je crois au miracle
    D’un présent éveillé comme intime plaisance.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • Vers les plus hautes branches

    Vers les plus hautes branches

    Cette pompe à chaleur bat le cœur de la sève,
    Un capillaire astral braqué sur le soleil.
    Inexorablement, il porte tous mes rêves
    Pour les réaliser au sortir du sommeil.

    Ils sont là, tous mes vœux, tous mes espoirs intimes ;
    Je les ai semés hier dans le profond respect
    En priant l’univers de toute mon estime
    Pour purifier mon âme envers tout irrespect.

    Sentez le sol trembler de l’énergie divine,
    De la Terre qui lève ses arbustes flambeaux !
    De la Terre au Soleil, les ruisseaux des ravines
    Transportent le courant par ses moindres lambeaux.

    Ce soir j’irai prier sous les plus hautes branches
    Ces prêtres végétaux qui parlent aux étoiles.
    J’arroserai mon arbre des pensées les plus franches
    Qui coulent de mes os aux tréfonds de la moelle.

    Suis-je frère de sang ou bien frère de sève ?
    C’est toujours l’eau du ciel qui draine la matière.
    Cet ascenseur divin constamment me relève,
    Il protège mon bras comme une cubitière.

    Cubitière : Partie de l’armure à plates qui protège le coude (garde-bras).

    Tableau de Fabienne Barbier

  • Goûter à l’audace

    Goûter à l’audace

    Quelques bouteilles de liqueur, un paysage à ma fenêtre
    Et je voyage dans un train qui me transporte vers l’orient.
    Quelques verres et l’ennui me saoule, pour un petit bonheur à naître
    Dans une rencontre impromptue, un visage me souriant.

    Une bousculade fortuite, je me retrouve dans les bras
    De cette passagère en fuite à la poursuite de son cœur.
    Quelques paroles échangées, un sésame « abracadabra »
    Et je l’invite pour m’éviter de demeurer soliloqueur.

    De cette table inanimée nous avons fait notre terrain.
    Terrain de jeux pour commencer, pour un peu nous apprivoiser.
    Puis, comme sur un échiquier, disposant nos couverts d’airain,
    Nous avons posé nos valeurs sans toutefois en pavoiser.

    Quelques formules d’ouverture pour nous orienter sur les cartes,
    Je mets mes maux entre mes mots, elle met ses peurs contre son cœur.
    De découverte en découverte, nous nous dévoilons nos pancartes,
    Mes maux deviennent du bonheur, ses peurs disparaissent en chœur.

    L’aurais-je laissée s’échapper sans oser demander sa main ?
    Je n’aurais pas un seul instant regretté d’accomplir le geste.
    Je l’ai rattrapée sur les quais, suivant son odeur de jasmin
    Et puis je l’ai accompagnée pour cette vie et pour le reste.

    Et depuis lors, sur notre table, toutes nos bouteilles témoignent,
    Tous nos verres au garde-à-vous célèbrent ensemble notre audace
    D’avoir osé croire au bonheur, de l’avoir pris à pleine poigne
    Et de marcher sur le chemin de l’euphorie plein les godasses.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • Le cygne blanc

    Le cygne blanc

    Ma caravelle n’a qu’un mât, tout en voilure de plumes ;
    Un fier vaisseau amiral, en recherche d’aventure,
    Accomplissant au printemps, pour un peu plus de volume,
    Cygne blanc ou cygne noir, sa quête de progéniture.

    Ce cou en moitié de cœur sur un corps tout en panache
    Ne demande qu’à s’assembler pour dessiner sur les ondes
    Le symbole de l’amour mais sans l’ombre d’un ganache
    Que renverrait le miroir aveugle comme une sonde.

    Inutile de songer à contempler son image
    Et penser être complet comme un auto-mariage !
    Ce reflet quoiqu’inversé n’en est pas moins un mirage
    Où le Narcisse imbécile perdrait son coloriage.

    Si le reflet réfléchit, n’est-ce pas pour explorer
    Une part de son passé qui serait restée trop sombre ?
    Comme un flambeau sur le dos, aux arrières déplorés,
    Qui éclaire les manières enfouies sous les décombres.

    Mais le cygne indifférent à tout ce que je raconte
    S’en vint hautain et distant dans sa course solitaire.
    Le soir il partit danser sans demander un acompte
    Avec sa belle dulcinée et leurs échos s’agitèrent.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • Le printemps imaginaire

    Le printemps imaginaire

    Le retour des hirondelles sur la crête des collines,
    Les gazouillis en aubade juste avant le point du jour,
    Les paysages fleuris comme robe crinoline.
    Pas de doute c’est sa marque, je la reconnais toujours !

    Des effluves embaumés dès le soir sur les terrasses,
    Des fragrances délicates le matin à ma fenêtre,
    Des arômes qui serpentent sous ce soleil si vorace.
    Il n’y a plus d’incertitude, je sais bien la reconnaître !

    Les oiseaux volent en tandem au raz de l’eau, en surface,
    Tous ces petits animaux qui s’enfuient bras-dessus bras-dessous,
    Les cygnes traçant des cœurs de leurs longs cous qui s’enlacent.
    Je n’ai plus d’hésitation, tous mes doutes sont dissous !

    Nul ne peut l’apercevoir s’il n’oublie ses préjugés,
    Nul ne pourra la toucher s’il ne fait pas confiance,
    Nul ne pourra l’approcher de ses bras centrifugés,
    Elle vibre au diapason des humains sans défiance.

    Depuis la cour de l’école dans le creux d’un marronnier,
    Elle était l’amie fidèle qui me contait les saisons.
    Aujourd’hui quand je m’envole, elle aide le prisonnier
    À retrouver ses racines et hâter sa floraison.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • L’œil neuf

    L’œil neuf

    Tandis que l’œil du cœur tourne autour de l’orbite,
    L’œil de l’esprit renaît pour une autre aventure.
    Bienvenue à la vie, adieu pensées morbides !
    Bonjour jeunes couleurs aux reflets d’argenture !

    Attention ! Mon petit oiseau va s’envoler
    Pour joindre l’horizon à mon cœur en éveil.
    Tout chargé d’émotions, il a pris sa volée ;
    À tire-d’aile, il file au pays des merveilles.

    Il pleuvait ce matin, le soleil a percé.
    Tous les nuages gris se sont éparpillés.
    Les chagrins de la veille, à mon cœur transpercé,
    Se sont évaporés en nues écharpillées.

    Mes oreilles n’entendent que le chant des sirènes
    Et sont sourdes aux misères qu’apporte le monde.
    Je ne vois que les joies positives et sereines
    Qui assainissent mon cœur de ces troubles immondes.

    On dit que je suis fou, que je vis dans mes songes ;
    Que les simples d’esprit n’ont pas les pieds sur terre.
    Mais mon œil neuf sait voir vérité et mensonge ;
    Le bonheur est acquis à mon cœur libertaire.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • La Joconde brunette

    La Joconde brunette

    Un sourire complice sur sa bouche pincée,
    Un reflet de malice posé sur son regard,
    La Joconde jeunette a encore évincé
    Un prétendant en herbe, ridicule et ringard.

    Pas besoin de chercher parmi le clair-obscur !
    Nulle part elle n’aura l’aspirant de son choix.
    Ni Castor, ni Pollux, les enfants Dioscures,
    N’ont eu plus de succès que le bandit manchois.

    Laissez-moi vous conter qu’un pompier intrépide,
    Voulant briser la glace, mit le feu à son cœur.
    Hélas, le feu de paille devint vite insipide
    Et le pauvre sapeur digéra sa rancœur.

    Une autre fois ce fut un gredin de Sicile
    Qui pensait l’enlever sur son île déserte.
    Mais pour le déjouer, ce ne fut pas difficile
    De l’envoyer balader d’une fable diserte.

    Moi, fort heureusement, je ne suis que son père !
    J’ai le seul privilège de ne jamais déplaire.
    Je suis le détenteur de ses rêves prospères
    Et je reste un pilier calmant pour lui complaire.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • L’ondine gourmande

    L’ondine gourmande

    Comme il pleuvait aujourd’hui, j’ai proposé à ma blonde
    D’aller la promener nue sous cette pluie torrentielle.
    Elle s’est déshabillée, s’est précipitée sous l’onde
    En s’aspergeant avec joie de cette eau providentielle.

    Elle est fille de sirène et la mer est son berceau ;
    Elle a les yeux de sa mère et sa longue chevelure.
    Elle est née fille des vents sous le signe du verseau ;
    Elle a la bouche de son père et sa fine dentelure.

    L’eau est son besoin vital de particulière essence !
    Il lui faut de l’eau du ciel pour fournir sa subsistance.
    La moindre ondée lui déclenche une crise d’effervescence ;
    Elle va promener nue sans peur et sans résistance.

    Il faut la voir se vautrer dans les flaques avec délices,
    L’eau gouttant de ses tétons comme fontaine ineffable !
    Arquant son bassin sacré comme happé par une hélice
    Vers les cieux condescendants et leur protection affable.

    Pour la soustraire aux regards des curieux indésirables,
    Nous habitons près d’un lac dans la Cordillère des Andes.
    Moi, je guette les nuages dans ce repaire admirable
    Et j’engendre les orages avec ma verge gourmande.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • La sirène aux seins doux

    La sirène aux seins doux

    Chaque fois qu’elle s’accoude au rebord de la piscine
    Et que ses seins généreux défient l’anti gravité,
    Mon regard, pourtant hautain, retombe au pied des glycines,
    Soumis à leur tentation et leur attractivité.

    Seuls peuvent rivaliser ses beaux yeux myosotis ;
    Cette flamme bleue intense qui m’impose le silence ;
    Tandis que ses mamelons n’ont pas besoin de notice
    Pour m’ordonner le respect fors de cette ambivalence.

    Mais la sirène est muette et ne sait dire « je t’aime »
    Elle ne sait que sourire et hypnotiser ses prises.
    Ça commence par les yeux, son plus précieux système,
    Et s’achève par les seins dans une double surprise.

    Pour apprivoiser la nymphe, il faut passer par derrière,
    Prendre les seins dans ses mains et les masser tendrement.
    Lorsqu’elle ferme les yeux, ne pas faire machine arrière
    Et l’embrasser sur la bouche un peu plus allègrement.

    Beaucoup d’hommes ont essayé et beaucoup d’hommes ont péri.
    La sirène n’admet pas qu’il puisse y avoir un faux pas.
    Si j’ai su plaire à son cœur contre toutes intempéries
    C’est en lui goûtant son lait et savourant ce repas.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • La fille aux yeux papillons

    La fille aux yeux papillons

    Un joli papillon posé sur son visage
    Comme un masque placé pour dissimuler ses peurs.
    Qui saura quelles fins déterminent l’usage
    De ce voile fébrile insolite et trompeur ?

    Quand les craintes animent un doux visage ardent
    Pour recouvrir ses yeux de deux ailes troublées,
    Il faut croire à l’audace perçue en regardant
    La vision timorée mais pourtant redoublée.

    Mais le masque n’est qu’une beauté éphémère
    Qui s’envolera bientôt pour d’autres fleurs sauvages,
    Laissant la fille en fleur un jour devenir mère
    Et quitter sa jeunesse pour un autre esclavage.

    Je l’ai connue enfant, insouciante et rebelle,
    Courant dans le soleil et poursuivre ses rêves.
    Aujourd’hui elle vit, la frêle colombelle,
    Dans la saison confuse, adolescente et brève.

    Seul le temps nous dira qu’a fait le papillon…
    Est-il resté gardien fidèle et implacable ?
    Ou bien l’a-t-il laissée franchir le portillon
    Pour vivre ses amours et sa vie immanquables ?

    Tableau de Fabienne Barbier

  • L’appel du printemps

    L’appel du printemps

    Sur un air de Vivaldi qui courrait sur la campagne,
    Une gerbe de rayons réveilla les fleurs sauvages.
    Les danseuses aux pétales, comédiennes et compagnes,
    Ont bondi sous le faisceau de l’étincelant breuvage.

    Ô Printemps, si ta musique ressuscite les fantômes,
    Répands-la dans les esprits qui languissent dans les villes.
    Illumine les ruelles, renouvèle les symptômes
    Qui font fleurir le bonheur dans les affaires civiles.

    Entendez-vous les violons, les altos, les violoncelles
    Qui sèment leurs partitions sur tous les champs de la terre ?
    Voyez-vous entre les branches, les discrètes étincelles
    Qui annoncent les bourgeons sur les arbres sédentaires ?

    Quand les fleurs jouent les cymbales dans la danse du soleil
    Et que les papillons d’or font voltiger leurs baguettes,
    Les percussions des bourdons, qui flirtent avec les abeilles,
    Mettent une ambiance de joie dans les forêts aux guinguettes.

    C’est le sacre du printemps qui réveille les dormeurs
    Et les sort de leurs effrois, de leurs plaintes et leurs chimères.
    Ouvrez bien grand vos fenêtres, aérez bien vos demeures !
    Laissez entrer dans vos cœurs cette hardiesse primaire !

    Tableau de Fabienne Barbier

  • La Madone aux étoiles

    La Madone aux étoiles

    Créatrice éphémère d’un univers sans fin,
    Amoureuse éternelle des anges butineurs,
    La Madone aux étoiles étreint jusqu’aux confins
    Du firmament de glace ses amants patineurs.

    Un jet de lait furtif cristallise le fruit ;
    J’en observe la trace une nuit sans étoile !
    Les saintes mamelles ont le goût de l’usufruit
    Qui nourrit ses enfants et les couvre de toiles.

    Si Dieu est féminin aréolé de saints,
    Je demande à goûter encore la jouissance
    De ses seins nourriciers qu’Il me montre à dessein
    Mais avec la tendresse de sa magnificence.

    La Madone est ainsi, amoureuse éternelle ;
    Et plus je le redis, plus j’apprécie l’extase
    D’un amour ineffable, tendresse sempiternelle,
    Qui conseille et conduit mon âme vers l’épectase.

    Enfin, c’est là que j’aime aller aux quatre vents
    Quand mon esprit n’est plus qu’un souvenir de braise.
    Que m’importe d’user mon corps à contrevent
    Si l’ivresse m’élève comme un alcool de fraise.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • Vilaine aux jolis seins

    Vilaine aux jolis seins

    Elle s’appelait Vilaine, jamais je ne l’oublierai.
    Quand elle me regardait de ses jolis seins pointés,
    Pour me préserver les yeux de leur éclat déliré,
    Je les fermais chaque fois à mon cœur désappointé.

    Pour préserver cet amour et le nourrir chaque jour,
    Je ne devais pas lever le regard sur sa beauté.
    Je me fiais à l’odeur qui fusait à contrejour
    De ses mamelons fleurés sur sa gorge chapeautée.

    Mais un soir au crépuscule, d’une passion trop intense,
    J’ai osé la regarder pour mieux la mémoriser.
    Ses deux tétons turgescents étaient de telle importance,
    Qu’ils brillaient comme un soleil pour mieux me martyriser.

    Aveuglé par l’éminence de la poitrine obligeante,
    Je baladais à tâtons ma main entre ses tétons.
    C’est ainsi qu’en pétrissant cette chair encourageante,
    Je l’ai gravée en partant avec mes petits petons.

    Aujourd’hui j’y vois plus clair mais la cicatrice reste
    Et quand je ferme les yeux, il m’apparait le fantôme
    De ces mamelons avides à l’émergence si preste !
    Et l’empreinte restera comme un cruel hématome.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • L’Archi-Capricorne

    L’Archi-Capricorne

    « Capri, c’est pas fini et bientôt ça prend forme ! »
    Telle est la loi réglée de l’Archi-Capricorne !
    Tout est né de l’idée de prendre la terre informe
    Et de la transformer en magique Licorne.

    Par ses capacités mentales et concrètes
    Elle fait apparaître la conscience du temps.
    Et avec la durée, par sa patte discrète,
    Son capital grandit bien loin du débutant.

    Si la maturité apparaît dès l’enfance,
    Cet Archi-Capricorne sera bon gestionnaire.
    Mais son aspect sera bientôt mis en balance
    Avec austérité et rigueur nécessaires.

    Ce sont ses liens sociaux et ses valeurs communes
    Qu’elle partagera qui donnera le charme
    D’une capacité à séduire les unes
    Et attirer les autres sans verser une larme.

    D’un aspect de puissance et d’élan créateur,
    Elle s’est renforcée dans le creux de son âme.
    Mais beaucoup de tensions d’esprit transformateur
    Lui fera rechercher l’harmonie de la femme.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • La forêt endormie

    La forêt endormie

    Tout doucement s’éveillent, à la nuit de l’hiver,
    Les frêles pâquerettes un peu matutinales.
    Les bourgeons apparaissent sur les branches olivaires,
    Le grand sommeil s’éteint sur une aube finale.

    Les grands arbres s’étirent et baillent doucement ;
    Les oiseaux les excitent dès la pointe du jour.
    À l’abri des ombrages dans les renforcements,
    Les œufs couvés frétillent prêts à dire bonjour !

    Février sonne l’heure des premières prémices
    Comme l’horloge suisse au quatrième top.
    Quand vient la pleine lune, la charmante Artémis
    Frappe Odin d’une flèche et lui marque le stop.

    L’avez-vous entendu, le coucou du matin,
    Bien avant que l’aurore vous pâlisse le ciel ?
    Dès qu’il sonne l’appel et que son cri m’atteint
    Je regarde s’éclore la nature matricielle.

    Les fées tissent les toiles emperlées de rosée,
    Les elfes ressuscitent le bestiaire hiberné.
    La mort s’en va honteuse sur sa faux nécrosée,
    Vers d’autres hémisphères où devoir giberner.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • Les invitations de ma jeunesse

    Les invitations de ma jeunesse

    Le phonographe du temps jouait inlassablement
    Cette vieille partition sur laquelle je gravais
    Mes ballades nostalgiques pour sempiternellement
    Inviter quelques amies pour un goûter aggravé.

    Un élixir de malices, juste pour les enivrer ;
    Quelques fruits aphrodisiaques, juste pour les exciter ;
    Des coupes en forme de calice aux parures d’or givrées ;
    Quelques chaises accommodantes, pour mes jolies invitées.

    Il fallait une banane pour de l’autosuggestion ;
    Un petit panier de fraise pour en croquer un lopin ;
    Cinq kiwis, une pastèque, pour hâter la digestion ;
    Et une poignée d’amandes accompagnées de lupins.

    Une liqueur d’ananas décantée la veille au soir ;
    Avec du sirop de figue cueillies à la pleine lune ;
    Un avocat de rigueur pour assurer mes espoirs
    Et enfin une grenade pour mes idées opportunes.

    Si tout s’était bien passé, je servais à mes nanas
    Un petit café serré et des petits chocolats.
    Pour finir, en digestif, une liqueur de guarana.
    À la sieste nécessaire je gagnais ma tombola.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • Le tact de la potière

    Le tact de la potière

    L’important, c’est de tourner autour du pot la main leste !
    Il faut bien juger le galbe et la taille de la cruche ;
    Il la faut bien évidée afin d’y joindre le geste
    Qui travaillera ses formes dans les rayons de la ruche.

    L’important, c’est de palper et bien sentir la matière !
    Juste assez sur les côtés, bien répartir au culot ;
    Car, pour servir de nourrice à une famille entière,
    Il faut pouvoir contenir et s’adapter au goulot.

    L’important, c’est revenir plusieurs fois sur son ouvrage !
    Les meilleurs pots resteront ceux qu’on aime retrouver.
    Si tu sais bien les remplir jusqu’au calice, sans bourrage,
    Les cruchons bien éduqués n’auront plus rien à prouver.

    L’important, c’est le premier contact avec la texture !
    Que de bonnes intentions et point de pensées impures !
    Il ne faut jamais brusquer sous peine de déconfiture
    Les pots-aux-roses en bouton pour les meilleures boutures.

    L’important, c’est le pied ferme, enroulé dessous les formes ;
    La jambe bien repliée à l’aise dans le giron.
    Tu verras que tôt ou tard si le bassin se déforme
    C’est pour mieux te rassasier et alors mes pots t’iront.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • L’ange décalé

    L’ange décalé

    Par le décalage horaire, il a le regard absent ;
    Dans l’écartement du tendre, son esprit part en morceaux ;
    Dans l’espace d’un instant, son cœur est obsolescent ;
    Dans l’intervalle du temps, il en a plein les dorsaux !

    Mais comment s’imaginer qu’on puisse dire « je t’aime »
    Et puis un jour retirer sa pensée d’un coup de gomme.
    Comment oser publier sans être enduit d’anathème
    Que l’amour peut se reprendre comme on pèse quelques pommes ?

    C’est la faute à Stupidon, l’ange bancal de l’amour !
    Ce maladroit qui décoche ses flèches tordues et voilées !
    C’est la faute à tous les hommes qui se perdent dans l’humour ;
    C’est la faute aux bonnes femmes qui n’osent se dépoiler.

    Tout le monde parle d’amour mais chacun dans son langage.
    L’un le confond à l’humour, l’autre au sexe et au glamour.
    D’autres le traitent comme un jeu où pratiquer le tangage
    Mais tout ça c’est des paroles qui riment avec désamours.

    Mes amis, il est grand temps de remédier au problème
    Et je propose de faire un peu de compréhension.
    L’amour est indélébile, c’est un honneur, un emblème
    Et oser le retirer fait preuve de dissension.

    Tableau de Fabienne Barbier

  • Paysage mouillé

    Paysage mouillé

    Promenant mes souliers près d’un lac singulier
    Et les ayant trempés pour m’être rapproché
    Un peu trop de ses rives aux roseaux penduliers,
    Je tentais d’en sortir sans me le reprocher.

    Ainsi je me hâtais vers des terres plus fermes
    Pour avoir les pieds secs et les idées plus claires.
    Sur cet oasis sec se dressait une ferme,
    Portes et volets fermés, un peu patibulaire.

    Je m’aventurais donc sur ces terres incertaines
    Quand une voix aigüe me fit tendre l’oreille ;
    Une jeune paysanne d’une allure hautaine
    Et vêtue de surcroit du plus simple appareil :

    « Si ta queue est aussi mouillée que tes chaussures,
    Viens auprès de mon feu, je vais la réchauffer ! »
    S’exprimant d’un sourire pendu aux commissures
    Qui argumentait bien de quoi philosopher…

    Alors je suis allé me sécher les godasses ;
    Je me suis mis tout nu pour plus de sûreté.
    Et la chaudasse a su faire preuve d’audace
    En me suçant tout cru en toute impureté.

    Mes enfants, vous irez marcher dans la nature,
    Vers ce lac imbécile en chaussant bien vos bottes !
    Mais si vous préférez plutôt une aventure
    Ne portez ni chemise, ni caleçon, ni culotte !

    Tableau de Fabienne Barbier