
Loreleï renaît à chaque appel de son nom qui perce le temps,
Qui sollicite et lui rappelle qu’elle a promis à qui l’attend
De revenir dans les réseaux passés, présents et avenir,
De jaillir entre les roseaux avec l’envie de revenir.
Renaissance sortie de l’écume, de la foudre des profondeurs,
Peu à peu son corps s’accoutume, s’étire, affiche ses rondeurs,
Et se tourne vers l’appelant qui l’a fait émerger de l’onde
Et reconnaît l’ancien galant qui l’a précédée dans ce monde.
Son amoureux, bien qu’amnésique, l’avait retrouvée dans ses rêves
Et ses souvenirs agnosiques qui revenaient souvent sans trêve.
Elle qui avait conservée intacte sa mémoire des temps anciens
Pensait à honorer le pacte envers un poète béotien.
Elle a dû se montrer farouche et l’investiguer fermement
Avant de connaître sa bouche, son cœur et son discernement.
Malgré sa peur, sans hésiter, s’est avancé vers le miracle,
N’a pas voulu lui résister en lui présentant son Oracle.
Je suis venue comme on revient d’un ancien serment dépassé ;
L’ombre d’un amour qui devient la trace qu’on n’a pu effacer
Ton oubli fut une dure épreuve, ton appel m’a ressuscitée
Et me voilà, nue, comme preuve de ma fidèle complicité.
Ton cœur m’a reconnue avant que ta parole ne me nomme
Et j’apprends que tu es vivant et redevenu un autre homme.
Plus l’ancien guerrier obsédé mais celui qui m’écrit des poèmes,
Qui n’aime pas pour me posséder mais pour m’aimer et que je l’aime.
Alors je me suis avancée, sur l’onde guidée par ton oracle ;
Et toi, tu m’avais devancée, tu t’attendais à ce miracle.
« Je suis Loreleï » t’ai-je dit, « ta femme, ton épouse, ta lumière ! »
Et comme je te l’avais prédit, je t’ai embrassé la première.
Illustration de Milo Manara.
Laisser un commentaire