Catégorie : Poésie du dimanche

  • Ô réseaux sociaux magiques !

    Mon chat et moi, nous connaissons beaucoup d’amis sur les réseaux.
    À lui, les petites souris ; à moi tous les jolis minets.
    Mon chat et moi, nous conversons avec de nombreux noms d’oiseaux
    Aux intentions souvent pourries qui sont sitôt éliminées.

    Si je suis souvent sanctionnée, mon chat fait patte de velours.
    Je n’en retire que des censures ; lui, n’en reçoit que commentaires.
    Sachant comment cela fonctionnait, sous le pseudo un peu balourd
    De « chatte soignant les blessures », j’expose mon cœur de panthère.

    Illustration de Marija Tiurina sur https://www.behance.net/gallery/81309017/Artwork-born-during-my-art-residency-in-Finland?tracking_source=best_of_behance_big_covers

  • Rouge-Vert-Bleu

    Ma vie en rouge, je la revois dans mon passé qui se contracte
    Où plus rien ne saurait changer, rien que le fruit de l’expérience.
    Car la jeunesse rien ne prévoit ; elle s’amuse et se dévontracte,
    Inconsciente d’avoir échangé insouciance contre clairvoyance.

    Ma vie en vert, je la subis dans mon présent presque immobile
    Que je peux encore modifier sous les contraintes qu’on m’impose.
    Mes aspirations, mes lubies, mes objectifs et mes mobiles
    Peuvent encore se personnifier selon tout ce dont je dispose.

    Ma vie en bleu, je la suppose dans un futur hypothétique
    Où auront été accomplies mes tentatives et stratégies.
    Mais mon cœur et mon corps s’opposent à trouver la voie prophétique
    Entre une vieillesse assouplie ou une mort en léthargie.

    Tableaux d’Izumi Kogahara sur http://touchofcolorr.blogspot.com/2015/11/izumi-kogahara.html?m=1

  • Connaissez-vous Marie-Antoinette ?

    Connaissez-vous Marie-la-Mode ? Celle, à la mode de chez nous,
    Qui faisait trembler tout Versailles tant elle ne restait pas en place ?
    Ses exigences malcommodes mettaient ses servantes à genoux
    Et les murs encore en tressaillent jusqu’à la Galerie des Glaces.

    Quant à l’affaire du collier qui aurait fait perdre la tête
    À son ministre des finances sur leur régime marital,
    Les chansonniers et paroliers en ont écrit tant d’épithètes
    Que pour en voir la pertinence, il faudrait une boule de cristal.

    Marie-Antoinette dépensière ? Les deux termes assez se ressemblent !
    Évidemment la femme triche pour mieux compenser ses souffrances.
    Si « romancière » et « financière » en amour riment souvent ensemble,
    Son cœur est resté en Autriche mais sa tête à jamais en France.

    Photos d’Alexia Sinclair sur https://beautifulbizarre.net/2015/02/20/alexia-sinclairs-rococo-black-eye-gallery

  • L’école du charme

    La sirène, devenue moderne, séduit les femmes plus que les hommes
    Sauf que, plutôt que les noyer, elle les enchante, s’il vous plaît !
    Fi des marins, vieilles badernes, vivent les coquines amazones
    Dont l’amour sait s’apitoyer d’orgasmes vocaux décuplés !

    Celles qui cherchent la bonne école de la jouissance au féminin
    N’ont pas besoin de GPS à la voix de fausse sirène.
    Demandez Madame Nicole, au 4, rue Saint-Saturnin,
    Et découvrez, je vous l’ confesse, le chant langoureux d’une reine.

    Tableau de Gustave Gélinet extrait de la BD « La Sirène des pompiers » dessinée par Zanzim

  • Sirénologie

    Depuis que j’ai approfondi mes connaissances sur les sirènes,
    Elles m’acceptent à condition de prendre un poisson pour parrain.
    J’en ai choisi un, arrondi, que j’appelle « Simon de Cyrène »
    Car il me croit, sans conviction, grand ambassadeur des marins.

    J’ai donc passé mes examens à l’université Neptune
    Et j’ai été promu « Triton » lors du grand bal de fin d’année.
    Je n’suis plus qu’à moitié humain mais à l’apparence opportune
    D’un amphibien en demi-thon et demi-homme simultanés.

    Illustration de Charles Santore

  • Vivre avec une sirène

    J’avais commandé sur le Net une « Femme-Poisson authentique »
    Garantie à vie, s’il vous plaît, et « satisfait ou remboursé » !
    Écologique pour la planète, elle a traversé l’Atlantique
    Pour me parvenir au complet dans une caisse renforcée.

    « Avant le tout premier usage, baignez-la trois jours et trois nuits ! »
    Collé comme avertissement pour obtenir « bon résultat ».
    J’ai commencé son arrosage que j’ai terminé à minuit
    Et pris un rafraîchissement glaçons et triple-margarita.

    Soixante-douze heures passées, elle frétillait là, dans mon lit
    Et moi, comme un poisson dans l’eau, j’ai honoré sept fois ma reine.
    Quant à elle, elle s’est surpassée et m’a aimé à la folie
    À en devenir ramollos, ma queue et celle de la sirène.

    Kristen Mcmenamy photographiée par Tim Walker sur http://visualoptimism.blogspot.com/2013/12/far-far-from-land-kristen-mcmenamy-by.html?m=1

  • Toutes ces autres sirènes

    Dans le Grand Livre des Sirènes – que Dieu n’aurait pas imprimé –
    Existent d’autres créatures que la femme en queue de poisson
    Qui n’ont pas besoin d’oxygène ni de belle voix pour s’exprimer
    Sans faire offense à la nature ni lui faire de contrefaçon.

    Les femmes au corps de raie manta préfèrent les eaux tropicales
    Et leurs belles ailes delta permettent les belles prouesses.
    Elles ont acquis leur potentat après des luttes syndicales
    Grâce à leur voix de célesta qui ont fait d’elles des déesses.

    Les femmes-pieuvres – ou femmes-poulpes – vivent dans les eaux boréales
    Dans les abysses où leur fortune est de récolter des godasses.
    Il paraît que c’est là leur coulpe d’avoir volé les céréales
    Du jardin privé de Neptune qui les a puni de l’audace.

    Illustrations de Viccolate, HTG17 et Ryan Firchau

  • La nuit dans la forêt

    Dans la forêt des nuits profondes aux arbres peints en clair-obscur,
    Jamais étoile ne pénètre fors un petit rayon de Lune.
    Mais quelques herbes vagabondes tendent leurs limbes et leurs nervures
    Vers l’astre pour s’y reconnaître ; bruyères, genêts et callunes.

    Petite musique de Lune jouée sur un halo léger
    Semble animer des feux follets entre les bois reconnaissants.
    Quelques farfadets de fortune se mettent alors à galéjer
    Et soudain s’enfuient, affolés, au premier cri du jour naissant.

    Tableau de Jan Sluyters

  • Éternel Saint-Michel

    Dominant les quatre éléments, le Mont-Saint-Michel ne déroge
    Ni aux lois des flux telluriques ni à la règle des marées.
    Même le cours du temps véhément ne ralentit pas son horloge
    Qu’il soit météorologique ou d’un présent contrecarré.

    Plusieurs histoires s’y rencontrent dans le dédale de ses rues
    Depuis l’époque gallo-romaine jusqu’à Arthur et Pendragon.
    Même les dieux vont à l’encontre de leurs religions disparues ;
    Seule une force surhumaine maintient Michel et son dragon.

    Photo de Mathieu Rivrin

  • Conjonction Lune-Soleil

    Jeudi, les quartiers de la Lune croissent ou décroissent à volonté.
    Les éphémérides le confirment et l’astronomie en fait foi.
    Quoi qu’il en soit, cette opportune faculté de désorienter
    Son monde, à mon avis, affirme que l’astre nous ment plusieurs fois.

    Vendredi, le Soleil, la Lune et la Terre avaient rendez-vous
    Et l’astrologie en profite pour m’annoncer plein de bonheur
    Bien qu’une chance inopportune se soit glissée, je vous l’avoue,
    Comme une éclipse à la va-vite pressentie en bien tout honneur.

    Samedi, j’attends les étoiles qui mentent nettement moins souvent
    Et j’en appelle à la Grande Ourse sans pour autant la prendre au mot
    Car voici qu’un nuage voile le ciel au moment émouvant
    Où elle me révèle la source originelle de tous mes maux.

    Tableaux de Lilly Nilly

  • De marée haute à marée basse

    Lundi, je sens le blues qui monte avec la première marée
    Qui m’apporte du vague à l’âme à l’idée de recommencer
    À rajouter à mon décompte un nouveau jour à démarrer,
    Attiser, surveiller sa flamme sans pour autant le romancer.

    Mardi, le cœur à marée basse fait l’inventaire de la place
    Qu’il occupe sur cette plage, sur cette tranche de ma vie.
    J’observe tout ce qu’il s’y passe, chaque seconde qui remplace
    La précédente au recyclage et qui se répète à l’envi.

    Mercredi, j’ai oublié l’heure et j’ai raté la marée haute.
    Tant mieux car Madame la Lune m’agace avec ses haut-le-cœur.
    Je cesse d’obéir au leurre de monter ou baisser la cote
    De mon moral à la fortune des phases de l’astre moqueur.

    Tableaux de Francisco Fonseca

  • L’impossibilité d’une île

    Mon cœur rêve d’îles désertes où l’on vit nu dans l’insouciance
    Comme si le singe, tapi en moi, restait dans son arbre éploré.
    Mon âme se montre diserte pour refouler l’insignifiance
    Du progrès qui met en émoi l’esprit sans cesse amélioré.

    Redevenir homme des bois et retourner à la nature ?
    Il semblerait qu’il soit trop tard car le temps reste irréversible.
    Les remords font le contrepoids avec la triste conjoncture
    Aux regrets toujours en retard sur ses effets imprévisibles.

    Tableaux d’Anne Delplace sur http://www.anne-delplace.com/peinture-huile.php

  • Rêveries en rémission

    La nuit, capté par l’inconscient, le flux de mes rêves s’anime
    Et passe à travers la passoire de l’esprit en demi-sommeil.
    Il puise dans mon subconscient mes désirs les plus unanimes
    Et se répand dans ma mémoire puis, fond comme neige au soleil.

    Entre l’émetteur mystérieux et le récepteur défaillant,
    Beaucoup de songes se précipitent dans l’abîme des trous du savoir.
    Combien de messages impérieux, transmis d’un souffle prévoyant,
    Tombent dans l’âme décrépite qui n’a pas su les promouvoir ?

    Tableaux d’Anne Delplace sur http://www.anne-delplace.com/peinture-huile.php

  • Et tangue le navire

    Les monstres marins ressurgissent quand on ne s’y attendait plus ;
    On les avait dit disparus, éradiqués par le progrès.
    Pourtant les alarmes rugissent comme s’ils étaient en surplus
    Et pour cette fois apparus annoncer le temps des regrets.

    Autant de fléaux sont passés et ont englouti nos cités
    Et l’humanité n’a cessé de recommencer son histoire.
    On ne compte plus les trépassés, les guerres et les atrocités
    Sans que la vie ait progressé par-dessus-tout vers sa victoire.

    Aujourd’hui la moindre tempête est synonyme d’apocalypse ;
    Le moindre rhume qui éternue menace toute la Terre entière.
    On prend la poudre d’escampette et l’intelligence s’éclipse
    Devant un virus inconnu qui franchit toutes les frontières.

    Tableaux de Francisco Fonseca

  • Au fil de l’eau de l’océan

    Bientôt ma ville submergée vivra d’une vie aquatique ;
    Mon long courrier naviguera vers des latitudes sereines.
    Mais je le verrai converger par les couloirs sud-Atlantique
    Surtout lorsqu’il rappliquera pour ensemencer nos sirènes.

    Cette nuit, ma ville sous-marine allume ses feux de positions
    Et attire ainsi mon navire qui vire de tribord à bâbord.
    Le capitaine alors s’arrime à l’ancre à sa disposition
    Et hèle celles dont le cœur chavire mais accepte de grimper à bord.

    Un an plus tard, sur le retour, les sirènes avec leurs enfants
    Qui ont affermi leurs poumons reviennent aux eaux maternelles.
    Chacun de plonger à son tour afin de rentrer triomphant
    Retrouver leurs hommes-saumons dans leurs abysses paternelles.

    Tableaux de Francisco Fonseca

  • Ô Lotus !

    Fleuri de rose vénitien, le Grand Canal semble tranquille
    Sous l’odeur des lotus éclos qui l’endort dans ses rêves roses.
    Un marchand de sable phénicien coupe les eaux de la presqu’île
    Afin de gagner son enclos sous un ciel d’aurore morose.

    Originaire de Phénicie, au sable si rose et si fin,
    Il répand les parfums d’orient tout autour de l’Adriatique.
    Le tourisme bénéficie jusqu’à ses ultimes confins
    De ce trafic répertoriant toutes les dépendances hypnotiques.

    Venise fleurie

  • Chatonades

    Dans la nuit noire, les chatons excellent au jeu des silhouettes ;
    Velours au bout des ripatons, ils aiment jouer les girouettes.
    Eux, savent d’où vient la lumière qu’ils renvoient pareil à un phare
    Postés au bas d’une chaumière d’une fixité que rien n’effare.

    Minet, derrière sa fenêtre, joue comme à la télévision
    Et prend son temps pour reconnaître où voler quelques provisions.
    S’il observe le temps qui passe, la météo et les infos,
    Il cherche à faire un coup d’audace car à tout âge, les chats sont faux.

    Photo d’Andofuchs

  • Promenade naïve

    Je m’accompagne naïvement le cœur d’enfant dans les contrées
    À la recherche d’un espace où le temps n’a pas d’importance.
    Je communique tardivement mais il est temps de rencontrer
    Cette entrevue que j’outrepasse à travers le temps à distance.

    Tiens ! Me voici sous le grand chêne avec l’ami imaginaire
    Qui était promu seul confident et détenteur de tous mes biens.
    Et moi je rétablis la chaîne entre mon présent ordinaire
    Et mon passé se dévidant vers l’avenir qui est le mien.

    Je me souviens de son guichet qui s’ouvrait à même son tronc
    Et son visage souriant suivant mes pensées surannées,
    Ma timidité affichée et mes allures de poltron,
    Sans savoir que l’ami brillant, c’était moi, dans plusieurs années.

    Tableaux de Paul Corfield

  • La reine entre deux rois

    Le roi de droite hache le temps pour ne pas perdre une seconde.
    Son temps, précieux comme l’argent, est minutieusement compté.
    Économe du moindre instant, il fait payer à tout le monde
    Un impôt qu’il va partageant avec ses amours escomptées.

    Mais la Reine, elle ne compte pas ; l’amour ne sait pas ce défaut.
    La Reine attend impatiemment que son roi cesse cette addiction.
    Le temps, quand il part au combat, suspend son vol en porte-à-faux ;
    Elle s’en va chercher galamment un réconfort à l’affliction.

    Le roi de gauche, d’un amour ivre, ne fait pas les choses à moitié ;
    Dans sa tête, le temps peut trotter avec ses courses contre la montre !
    Lui, c’est un homme du temps de vivre, du temps d’aimer et de châtier
    Et quand la Reine vient s’y frotter, impétueuse est la rencontre.

    Tableaux de Victor Nizovtsev

  • Trois matins de Shéhérazade

    Au gui l’an neuf tout recommence, Shéhérazade se met en transe
    Après sa nuit bleue et profonde, elle déguste un thé au jasmin.
    Elle redémarre une romance avec intrigues à outrance
    Pour que le Sultan se morfonde à patienter jusqu’à demain.

    À Pâques ou à la Trinité, la vie, la mort s’enchaînent encore
    Comme une éternelle routine qui vit qui meurt et puis, renaît.
    Perpétuelle féminité qui rythme neuf mois de son corps
    Depuis les prémices enfantines dont les amours tambourinaient.

    À Noël comme au réveillon, Shéhérazade se fait vieille ;
    Les mille-et-une nuits corrodent un peu le cœur, beaucoup la femme.
    Elle guette le premier rayon d’un soleil que trop longtemps veillent
    Ses yeux fatigués émeraude brillant sur les bleus de son âme.

    Costumes du ballet « Shéhérazade » de Nicolas,Rimsky-Korsakov par Boris Israelevich Anisfeld

  • Jardinières des quatre saisons

    Comment avoir une main verte lorsque j’ai le cœur à l’envers ?
    Peut-être avec des fleurs à rire, rire jaune de préférence.
    Les Jonquilles me déconcertent, les tournesols sont un calvaire
    Lorsque je les vois parcourir d’Est en Ouest leurs révérences.

    Comment paraître un peu fleur bleue lorsque j’affiche un air morose ?
    Sans doute avec des fleurs couleur d’un ciel d’azur et pastoral.
    Les hortensias trop globuleux, les myosotis pas assez roses
    Et l’agapanthe d’une pâleur à me rabaisser le moral.

    Comment écrire à l’eau de rose quand j’écris des poèmes tristes ?
    Probablement des fleurs du mal trempées dans un parfum de joie.
    J’ai des coquelicots dans ma prose avec des épines du christ
    Mais si leur rouge est optimal, l’encre est d’un effet rabat-joie.

    Et comment offrir des fleurs blanches à celle qui se marie demain
    Et qui me blesse ainsi le cœur par les épines du mariage.
    Hélas je pleurerai dimanche et jetterai sur le chemin
    Toutes mes bouquets avec rancœur et ma boîte de coloriage.

    Photos d’Endo Ayumi

  • L’étoile mouvante

    Que ne suis-je tortue, ma maison sur le dos
    Avançant lentement au rythme des saisons ?
    Que ne suis-je escargot dont la seule libido
    Est d’être hermaphrodite sans aucune raison ?

    Mais je ne suis que torture et je cours et je cours
    À la course à l’argent à la course du temps.
    La vie prend ma valeur pour en suivre le cours,
    Lui faut monter la cote par des krachs rebutants.

    Suis-je encore vivant quand j’arrête la course
    En voyant tous les autres accélérer leur pas ?
    Hors du temps désormais autour de la Grande Ourse,
    Je ne suis qu’une étoile échappée du combat.

    Illustration de Marija Tiurina

  • L’oiseau et son modèle

    Vêtue de robe de rosée, fleurie d’un rayon de soleil,
    Elle apparut au maître-oiseau comme un modèle, comme une idée.
    La muse métamorphosée en déesse en demi-sommeil
    Émergeant entre les roseaux inspira l’artiste décidé.

    L’oiseau, un peintre méconnu dont la carrière battait de l’aile,
    Livra une toile immortelle malgré la critique timorée.
    Hélas pour la belle ingénue, celle-ci n’eut droit à pareil zèle
    Et retourna dans l’éternelle et bien mystérieuse forêt.

    Illustration d’Emmanuel Lepage

  • Amours d’antan, d’hier et d’aujourd’hui

    Amours d’antan, datant d’autant d’années que de nouvelles lunes
    Résonnent encore dans l’Histoire, Égypte ancienne et Rome antique.
    Reines et rois omnipotents ou gentilshommes de fortune
    Nous ont légué ce goût notoire pour les épopées romantiques.

    Amours d’hier et d’avant-hier restent sur les photographies
    Le témoignage des passions de nos grands-pères pour nos grand-mères.
    Familles pauvres ou condottières avec ou sans biographies
    Nous ont laissé la compassion envers d’impossibles chimères.

    Les amours d’aujourd’hui s’accordent avec les rêves de princesses,
    Avec l’argent et les voyages, avec les shows télévisés,
    Avec ruptures et discordes, avec problèmes de grossesses…
    Pour rire après le troisièmes âge de toutes nos billevesées.

    Illustrations de Mike Willcox

  • Mes ballets d’école

    Si j’endors tous ces petits « moi » qui veulent diriger ma vie,
    J’arrive alors à retrouver le chemin de mon âme pure.
    Et je retrouve avec émoi tous ces fragments avec envie
    Qui se réveillent pour m’éprouver et m’allouer cette coupure :

    Dans le globe de mon enfance, dansaient des ballets merveilleux
    Sur des musiques féeriques et des pays imaginaires.
    Mes petits neurones sans défense, encore en état sommeilleux,
    Pensaient en idées génériques pas encore extraordinaires.

    Dans le flou de l’adolescence, ils se sont mis à tournoyer
    Sous l’effet de testostérone dictée par mes pressentiments.
    Tous mes sens en effervescence s’en retrouvaient soudain noyés
    Afin que le cœur fanfaronne à éprouver ses sentiments.

    Aujourd’hui le cœur accélère ou bien la Terre tourne trop vite
    Et moi, j’orbite dans mon refuge autour d’un ballet endiablé.
    Toutes mes pensées parcellaires quittent mes neurones et lévitent
    Sous cette force centrifuge produite par un monde accablé.

    Photos de Tim Walker

  • Lune profonde

    Après neuf mois de traitement sous l’effet de l’action lunaire,
    Mon enfant est né cette nuit au bord de la mer silencieuse.
    J’ai commencé l’allaitement et senti mon lait liminaire
    Couler par un courant induit par une force délicieuse.

    J’aime venir me recueillir dans cette profonde moiteur
    Tamisée par la Pleine Lune qui nous inonde de lumière.
    Je laisse l’enfant t’accueillir de ses petits yeux convoiteurs
    Qui découvrent sur la lagune ta resplendissance première.

    Tableau de Tair Zairov

  • Lune extatique

    Pleine, Ô ma Pleine, Lune, Ô ma Lune, arrose-moi de ta pâleur !
    Baigne ma peau d’opalescence, oins-moi de ton argent nacré !
    Je viendrai à l’heure opportune t’offrir mon corps et sa chaleur
    Afin de t’offrir mon essence issue du féminins sacré !

    Je viendrai, nue, sur la colline recevoir la bénédiction
    Que tu as enfantée de l’astre par son amour illimité.
    Couchée sur les fleurs violines, j’écouterai les prédictions
    De cette graine qui s’encastre dans ma profonde intimité.

    Tableau de Karl Bang

  • Totale immersion – 2

    La femme arrosée par amour embellira sa pépinière ;
    À l’abri d’une protection contre la grêle et les tempêtes !
    Bien orientée selon le jour ou les nuits de Lune plénière
    Et entretenue d’affection, voire même de galipettes.

    La femme emballée par amour deviendra femme à part entière ;
    Toutefois sans l’asphyxier et la priver de liberté !
    Au contraire, faites-lui la cour en la libérant des frontières
    Et en sachant l’apprécier au point d’en être déconcerté.

    La femme écrite avec amour nourrira vos rêves d’azur ;
    Toutefois sachez varier et agrémenter son empire.
    Pimentez-lui avec humour la vie au fur et à mesure
    Et vous serez appariés pour le meilleur et pour le pire.

    Photos de Patty Carroll sur https://www.anothermag.com/art-photography/gallery/10112/patty-carroll-domestic-demise/2https://www.anothermag.com/art-photography/gallery/10112/patty-carroll-domestic-demise/2

  • Totale immersion – 1

    La femme implantée dans l’amour deviendra bonne jardinière ;
    Toutefois faites attention à bien conserver la main verte !
    Arrosez-la au fil des jours de votre passion coutumière ;
    Cédez à toutes ses prétentions et sa fleur vous sera ouverte.

    La femme plongée dans l’amour deviendra la fée du logis ;
    Toutefois avec vigilance, ne faites pas tourner la sauce !
    Agrémentez-lui son séjour avec tact et psychologie ;
    Sachez pratiquer l’abstinence quand ses humeurs sont à la hausse.

    La femme rimée par l’amour devient cantique des cantiques ;
    Toutefois cent fois sur le métier, vous remettrez-vous à l’ouvrage !
    L’amant au cœur de troubadour trouvera l’amour authentique
    En commençant par l’amitié pour terminer en mariage.

    Photos de Patty Carroll sur https://www.anothermag.com/art-photography/gallery/10112/patty-carroll-domestic-demise/2https://www.anothermag.com/art-photography/gallery/10112/patty-carroll-domestic-demise/2

  • Au jeu du chat et la souris

    Au jeu du chat et la souris, j’aimerais bien jouer à trois…
    Tantôt le chat, ce gros matou qui niche au creux de ton giron ;
    Tantôt la souris bien nourrie au fond de ton boyau étroit ;
    Tantôt la femme aux beaux atouts et ses amants, joyeux lurons.

    Au jeu du chat et la souris, j’aimerais bien jouer à quatre…
    Déguisé en un chat qui dort et qui te pelote les seins ;
    Baiser la bouche qui me sourit par ma langue vive et folâtre
    Qui, comme ton conquistador, pénètre au creux du saint des saints.

    Tableau de Anna Silivonchik sur https://www.thinkfeelart.com/anna-silivonchik

  • Le vieil homme, la sirène et la mer

    Le fabuleux combat épique entre un vieil homme et un Merlin
    Eut pour témoin une sirène qui suivit de près leur embrouille.
    Santiago, vieux pêcheur typique et un jeune garçon, Manolin,
    Partaient en mer, l’âme sereine mais rentraient tous les soirs bredouilles.

    Le vieux partit tout seul au large pour mettre fin à sa malchance
    Et mena une lutte acharnée contre un espadon gigantesque.
    Mais il ne put le mettre en charge et la sirène eut l’obligeance
    De lui conseiller d’ajourner son opération titanesque.

    Elle lui redonna du courage car il était temps qu’il s’arrête
    Et le soigna par ses massages, oui mais en tout bien tout honneur.
    Elle l’aida au découpage et de la tête et de l’arête
    Afin d’offrir par ce message qu’il avait trouvé son bonheur.

    Tableau de Anna Silivonchik sur https://www.thinkfeelart.com/anna-silivonchik

  • Comme un lundi bourgeonnant

    Lundi aurait pu être vert s’il était dédié au soleil
    Afin d’honorer la nature du premier jour de la semaine.
    Avec l’accord de l’Univers qu’un vent de comètes balaye,
    Lundi serait la signature de notre société humaine.

    Lundi aurait pu être rose s’il était dévoué aux fleurs
    Afin d’adorer les jardins et le bonheur à la campagne
    Qui réjouirait les cœurs moroses vidés de douleurs et de pleurs
    En invitant les citadins entre compagnons et compagnes.

    Lundi aurait pu être d’or s’il était coté à l’amour
    Plutôt qu’au fric qui fait l’affront d’être la seule raison de vivre.
    Mais le dimanche, tout le monde s’endort pour courir dès le petit jour
    Pour, à la sueur de son front, gagner le ticket pour survivre.

    Photos de Blake Kathryn sur https://trendland.com/blake-kathryns-sleek-3d-collaboration-with-fendi

  • Comme un lundi fleuri

    Lundi, jour bleu de la semaine, darde tout son soleil d’azur
    Aux premières heures du matin loin de la grisaille des villes.
    Cependant la marée humaine bat la cadence et la mesure
    Pour obtenir le quota atteint de son existence servile.

    Lundi, jour en accord au « La » de la nature chromatique
    Aux premiers oiseaux de l’aurore qui saluent la pointe du jour.
    Toutefois, l’homme est déjà las d’une expression fantomatique
    À écouter ceux qui pérorent pour lui oppresser son séjour.

    Lundi, jour au goût velouté de la primeur du potager
    Aux premières grappes mûries qui nous embaument les jardins.
    Néanmoins à n’en pas douter, l’homme passe son temps partagé
    Entre le risque de pénurie, le chômage et son coup de gourdin.

    Photos de Rhonda Buss sur http://rhondabuss.blogspot.com/2014/03/monday-morning-inspiration_24.html

  • Le cerf blanc morose

    Au pays des biches moroses, les cerfs sont blancs évidemment
    Mais quand celles-ci sont aux abois, ceux-là ne les entendent pas.
    On leur peint les sabots en rose afin que les sourdingues amants
    Leur fassent des signes avec les bois et puissent devenir papas.

    Il faudrait bien trouver la cause à une telle absurdité ;
    Les éleveurs perdent patience et tout le cheptel diminue.
    Qu’est-ce qui provoque leur psychose et entraîne leur surdité ?
    Sans doute qu’ils ont pris conscience de leur friande déconvenue…

    Tableaux de Daria Petrilli

  • La clef du cœur

    Lorsque vient le temps des secrets, la pudeur devient primordiale
    Et le cœur, sur sa défensive, exige la fidélité.
    Seul, un petit oiseau s’agrée des communications cordiales
    Par son allure inoffensive et sa célèbre intégrité.

    Bien sûr ! C’est l’oiseau messager, qui distribue les confidences
    Selon si la clef qui s’agréée correspond à l’expéditeur.
    Si les petits flirts passagers cherchent encore leurs correspondances,
    Ils ont beau faire de simagrées, ils ne seront point créditeurs.

    À chaque amour, chaque alliance, une combinaison éprouvée
    Dont seul l’amant et seule l’amante peuvent s’affranchir comme un tampon.
    Hélas il y a des défaillances et il aurait été prouvé
    Que des fausses clefs infamantes circuleraient sous les jupons.

    Tableau de Daria Petrilli

  • Le fol amour à Paris

    Décidément la Tour Phallique attire encore les amoureux
    Du mois de mars au Champ-de-Mars jusqu’aux confins automne-hiver.
    Le feu au cul des basiliques laisse Cupidon langoureux
    Décochant ses flèches éparses en les lorgnant d’un œil sévère.

    Après tout la Dame de Fer peut s’imposer en chaperon
    Puisqu’elle veille sur Paris et tous les couples illégitimes
    Qui vraiment n’ont pas à s’en faire car Elle bénit ces fanfarons
    Qui viennent tromper les maris et les épouses légitimes.

    Remercions Monsieur Eiffel d’avoir posé ce baromètre
    Qui note le temps des amours et les passions dans les chaumières.
    Car il suffit d’une étincelle pour faire monter le thermomètre
    Des coups de foudre au petit jour sur Paris, la ville lumière.

    Tableaux d’Andrei Protsouk

  • Aquatic love – 3

    Depuis les lacs verts de Bavière jusqu’enfin le Lac de Constance,
    Nous suivrons la route du tendre en naviguant sur ses cours d’eau.
    Nous remonterons les rivières jusqu’à leurs sources en circonstance
    Pour faire fondre sans attendre l’éclat de notre libido.

    La Suisse, côté allemand, nous y boirons dans ton calice
    Les eaux-de-vie alémaniques vives comme tes cuisses fraîches.
    Nous irons dans le Lac Léman nager lorsque le soir pâlissent
    Les chaînes de montagnes titaniques qui l’abreuvent de torrents revêches.

    En descendant par l’Italie, du Piémont à la Vénétie,
    Nous prendrons les lacs romantiques aux coups de foudre surannés.
    Et quand sonnera l’hallali de nos douces péripéties,
    Nous vivrons d’amours authentiques dans la mer Méditerranée.

    Illustrations de Lorenzo Mattotti

  • Le temps des câlins

    Le temps des câlins

    Que vienne le temps des câlins après une vie de labeur
    Lorsque la mort m’embrassera le cœur en paix, l’âme ravie !
    Même si c’ n’était pas très malin d’avoir entretenu ma peur
    De mourir quand s’arrêtera le dernier souffle de ma vie.

    Durant ma vie paradoxale, j’ai aimé la petite mort,
    Celle qui succède aux fantasmes après le plaisir de l’amour.
    Mais pour l’issue philosophale d’une existence sans remords,
    Oserais-je comme ultime orgasme, mourir de rire non sans humour ?

    Mais quand je quitterai ma vie, j’en aurai les jambes coupées ;
    J’embrasserai celles qui restent, qui m’aiment et que j’ai bien aimées.
    De la première qui m’a ravi à ma dernière jolie poupée
    Pour lesquelles mon dernier geste sera un rencard programmé.

    Sculpture de Bruno Bruni.

  • Sortie de l’ombre

    La vie serait née de l’espace brassée dans le coeur des étoiles ;
    La lumière serait la divine créatrice de notre univers.
    Je ne sais pas ce qui se passe derrière la science et son voile
    Mais mon petit doigt en devine tous les secrets les plus divers.

    « Fiat lux ! Que la lumière soit ! » Ces mots ont surgi du néant
    Comme une explosion d’énergie d’où se déversa la matière.
    Puis, s’étendît par-devers soi l’espace-temps comme un géant
    Qui se réveille en synergie avec un monde à part entière.

    Tableaux de Remedios Varo

  • Coopération et création

    Tandis qu’il répand la semence composée de poudre d’étoiles,
    Le créateur transmet la vie à la planète nourricière.
    Il attend que tout recommence pour que l’avenir lui dévoile
    La maintenance et le suivi de la part des bénéficiaires.

    Aussitôt qu’elle reçoit l’onde génératrice de la vie,
    La génitrice alors arrose la terre promise à l’essor.
    Elle déverse l’eau féconde qui assurera la survie
    Des filles aux pétales de rose, des garçons aux choux … et consort.

    Tableaux de Christian Schloe

  • Pervers Regards

    Regard sévère, regard amer voilà le prix de la souffrance
    Quand l’amour n’a pas eu son dû ou n’en a pas eu son content.
    Regard bleu-vert presque outremer ou fluorescent à outrance
    Pour marquer sans sous-entendu un litige qui se paie comptant.

    Regard de face en face-à-face voilà le prix de l’amertume
    Quand la tromperie se dilue dans l’eau de rose polluée.
    Regard tordu, plein de grimaces, saumâtre et d’un zeste d’agrume
    Pour mesurer l’huluberlu d’un sentiment dévalué.

    Regard qui s’en va de travers voilà le prix d’indifférence
    Quand elle veut taire les mots qu’elle n’ose pas prononcer.
    Regard qui renvoie à l’envers les fallacieuses déférences
    Qui écriront, chargé de maux, un chagrin d’amour romancé.

    Images trouvées sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue. Si les auteurs de ces images reconnaissent leurs travaux, je serai heureux d’en mentionner les noms avec respect.

  • Tintin pour la Suisse !

    À peine franchi la frontière, je croyais maîtriser les langues
    – Puisqu’elles sont universelles en ce qui concerne l’argent –
    Pour naviguer ma vie rentière sur les eaux d’un euro qui tangue
    Entre les monnaies qui excellent et un franc suisse, départageant.

    Au début, leur langue curieuse ressemblait assez à la mienne ;
    Un peu plus lente entre les phrases avec un patois des alpages.
    J’eus alors une envie furieuse pour plaire à mes concitoyennes
    De parler la langue genevoise afin de paraître à la page.

    Mais à la frontière des langues, l’affront que j’essuie salement
    Me donne le pire des maux avec une langue imbuvable.
    Bien que ce pays me harangue de parler le suisse-allemand,
    Je n’en comprends pas un seul mot sinon un dialecte improbable.

    Parodies et hommages à Hergé

  • Comme un poisson dans l’eau…

    Heureux comme un poisson dans l’eau… mais limité à son bocal
    Qui paraît tellement fragile qu’il pourrait voler en éclats.
    La pollution va à vau-l’eau, et le gouvernement bancal
    N’est qu’un colosse aux pieds d’argile pour qui, déjà, sonne le glas.

    Et nos petites vies tranquilles que nous pensions inébranlables
    Se fissurent sur les frontières et à l’intérieur de nos villes.
    Nous pensions nos règles utiles mais les voici incontrôlables
    Aux mains d’autorités altières sur des groupuscules serviles.

    Tableau de Jacob A. Pfeiffer

  • Vu d’ici

    À vue d’œil derrière un écran, je vois mes propres opinions ;
    Je me vois, l’esprit mis à cran, privé de toutes réunions.
    À vue de nez derrière un masque, je sens mes propres excrétions ;
    Je me sens, une âme fantasque, asphyxiée sous l’oppression.

    À vue d’oreille derrière un casque, j’entends mes propres cris du cœur ;
    J’entends s’élever la bourrasque d’un peuple qui crie sa rancœur.
    À vue de goût, c’est le dégoût d’avaler ma propre nausée
    Envers ceux qui frappent des coups sur une foule ecchymosée.

    Tableau d’Arantzazu Martinez

  • L’embarcadère de rêve

    Un rêve qui ne manque pas d’air serait d’attendre un dirigeable
    Directement sur ma terrasse contiguë à l’embarcadère.
    Pour un voyage hebdomadaire avec billets interchangeables
    Afin que je me débarrasse des tracasseries légendaires.

    Puis, selon la boussole folle qui tournicote au gré des vents,
    Je m’embarquerais sans valise juste mes chaussures à la main.
    Et dans l’azur dont je raffole, je m’élancerais aux devants
    De l’aventure sans balise, sans destination pour demain.

    Et puis, à l’intérieur du rêve, s’entrouvrirait un autre monde
    Où disparaîtraient les frontières pour ne laisser que l’inconnu.
    Les heures, d’ordinaire si brèves, dans une course vagabonde,
    D’allongeraient la vie entière pour l’honneur d’un cœur ingénu.

    Tableaux de Stanislav V. Plutenko sur http://malaguetasur.blogspot.com/2015/03/stalinlav-plutenko-pintor-ruso.html

  • L’invitation au voyage

    Quand le cœur appelle,
    Quand il interpelle,
    L’invitation au voyage,
    Le corps lui répond
    « Partons au Japon,
    Courrons à l’appareillage ! »
    La raison s’efface
    Sans perdre la face
    Dans un simple lâcher prise
    Et l’âme s’éveille
    Devant les merveilles
    Issues de cette entreprise.

    Là, tout le sel de la Terre
    Charme le voyage en solitaire.

    Au hasard des rues,
    La peur disparue,
    J’irai à la découverte
    De nouveaux regards
    Aux yeux pleins d’égards
    Pour mes intentions ouvertes.
    Je rencontrerai,
    Je recouvrerai
    Cette âme-sœur en attente
    Qui m’attend là-bas
    Peut-être à Cuba
    Sur la plage miroitante.

    Là, le voyage solitaire
    Goûte le sel de la Terre.

    Quand je reviendrai,
    Quand je rejoindrai
    Mes amis et ma famille,
    Je leur offrirai
    Ces vers inspirés
    De l’odeur de la vanille.
    Je repartirai,
    Sans aucun regret,
    Vers de nouveaux paysages,
    Pour voir triomphants
    Grandir mes enfants
    De tout ce qu’ils envisagent.

    Là, le voyage reprend,
    Tout le monde se comprend.

    Au soir de ma vie,
    Mon âme ravie
    Connaît sa dernière étape,
    Elle largue les voiles,
    Va vers les étoiles,
    Personne ne la rattrape.
    Ce dernier voyage
    N’est qu’un nettoyage
    De l’essence tout entière
    Qui renaît demain
    Qui me tend la main
    Pour une vie sans frontière.

    Là, le voyage sans fin
    Trouve son plaisir enfin.

    Tableaux de Stanislav V. Plutenko sur http://malaguetasur.blogspot.com/2015/03/stalinlav-plutenko-pintor-ruso.html

  • La météorologiste

    J’aimais ses cumulonimbus sous son manteau en peau de nuit
    Qui épousait les dépressions et les sommets de sa poitrine.
    Mais au moindre cunnilingus, qui lapait doucement son huis,
    Sa bouche s’ouvrait d’une expression semblable à un lèche-vitrine.

    Quand l’amour parsème à tout vent, les corps subissent la tempête
    Dans les folles précipitations de l’effervescence des sens.
    On y revient le plus souvent dès que l’orage monte à la tête
    Aussitôt que l’excitation met les cœurs en incandescence.

    Illustration « Ter » de Dubois & Rodolphe

  • La chasse aux météores

    En ce temps-là, nonchalamment, perchés au sommet de la piste,
    Nous dénombrions les météores, pluies, grêles, ouragans et tempêtes.
    J’y accompagnais galamment ma belle météorologiste
    Comme deux anges égrégores assis sans tambour ni trompette.

    La nuit venue, secrètement, juchés sur un esquif fragile
    Nous naviguions sous le prétexte d’améliorer nos connaissances.
    Mais pour parler concrètement nous nous échappions des vigiles
    Pour nous aimer dans un contexte plus en rapport avec nos sens.

    Illustrations « Ter » de Dubois & Rodolphe

  • L’amour flou, flou, flou

    L’amour fait chavirer le cœur et en aveugle la raison
    Par interférences avec moires dans les souvenirs partagés.
    J’en veux pour preuve avec rancœur les errances en toutes saisons
    Dont j’ai gravé dans ma mémoire les mésaventures outragées.

    Ève voyait flou, Adam myope, ils n’ont pas reconnu la pomme,
    Ont croqué le fruit défendu dans un paradis de brouillard.
    S’ils avaient été nyctalopes ou bien consulté les Prud’hommes,
    Ils auraient été entendus par un avocat débrouillard.

    Voilà pourquoi l’amour est flou voici pourquoi l’amour voit double.
    Dieu nous a brouillé l’œil du cœur en nous privant de connaissance.
    C’est ainsi, l’homme devient fou ; c’est ainsi, sa femme le trouble
    Mais peu importe la liqueur pourvu que l’ivresse des sens.

    Tableaux d’Egor Ostrov

  • Souveraine matin, midi et soir

    Au matin la reine s’éveille encore éperdue dans les songes
    Dont les souvenirs disparaissent de sa mémoire vaporeuse.
    Il suffit d’un peu de soleil pour faire traiter de mensonge
    La nuit aux ténèbres épaisses fors d’une attente langoureuse.

    À midi, la reine s’habille encore baignée de rosée
    Avec des pétales de rose et leurs arômes inégalés.
    Juste un éclat sur les pupilles sur une joue couperosée
    Qui lui efface l’air morose de rester seule en son palais.

    Le soir, la reine au crépuscule encore en attente du roi
    Dont le retour imprévisible deviendrait presque indispensable.
    Sans un seul mot, son cœur bascule, affolé, en plein désarroi
    D’une émotion intraduisible et d’une envie imprononçable.

    Tableaux de Joshua Burbank