Catégorie : Poésie du dimanche

  • Du côté des belles dames du temps jadis

    J’aime déshabiller le temps et lui ôter la carapace
    De la vieillesse dont il enduit la peau des beautés éphémères.
    Mot fugitif, presque insultant, qui évoque le temps qui passe
    Et qui tristement éconduit le souvenir de nos grands-mères.

    Le curseur du temps dans leurs rides où sont gravées leurs émotions
    Fait chanter l’écho de leurs cœurs avec une ardeur impatiente.
    Combien de jours, de nuits torrides, avec l’amour en promotion
    Ont induit les rires moqueurs de leurs jeunesses insouciantes ?

    Les belles dames du temps jadis, quelque part immortalisées
    Par les vibrations de leurs âmes qui pulsent en ondes maternelles,
    Pour que jamais ne s’affadissent leurs présences cristallisées,
    Nous ont intégré ce sésame comme une intuition éternelle.

    Photos de Marie Doro, Maude Fealy, Ione Bright & Paulette Navier

  • En quête d’ailleurs

    Je suis en transit dans ce monde où je n’accepte nulle attache
    Et où j’attends à chaque instant de sauter dans un train qui passe.
    Mais cela ne prend qu’une seconde ; si ma vigilance s’en détache
    Je reste suspendu au temps et reste coincé(e) dans l’impasse.

    Or, si je n’ai pour tout bagage que le sac de mes souvenirs,
    Si je ne porte que l’habit de mes connaissances acquises,
    Alors aussitôt je dégage et prends le train de l’avenir
    Vers des gens de mon acabit selon mes qualités requises.

    Illustrations de Jean-Pierre Gibrat

  • Réflexions au fil de l’eau

    Toutes ces gouttes au fil de l’eau pareilles au flot de mes pensées,
    Pareilles au flux du genre humain, pareilles aux nuages qui passent,
    Partent dans l’oubli, à vau-l’eau, un autre cycle où dépenser
    Leurs vies vers un nouveau chemin, nouveau monde et nouvel espace.

    Qu’il est hypnotique l’effet de l’existence qui s’écoule
    Et qui m’attire comme un aimant de ressentiments magnétiques !
    Sans doute vers l’univers des fées d’où ma propre magie découle
    Et qui revient comme un amant sentimental et pathétique.

    Illustration de Jean-Pierre Gibrat

  • Les couronnes des reines

    Après avoir tiré les Rois, on continue avec brio
    À se préoccuper des reines non pas vraiment pour les tirer
    Mais les honorer toutes les trois puisqu’elle forment un trio
    Dont l’association pérenne est assidûment désirée.

    Commémorons Épiphanie, Reine magicienne oubliée,
    Puis consacrons la Chandeleur, Reine des crêpes et des chandelles !
    Célébrons enfin Stéphanie, Reine qui n’a rien publié
    À ce jour mais dont la valeur reviendra comme l’hirondelle !

    Que feront les reines au printemps ? Elles prendront leurs quartiers d’été
    Bronzer de Pâques à l’Assomption jusqu’en automne, fin des vacances.
    Puis elles reviendront en leur temps avec leurs trois rois répéter
    Contre toutes nos présomptions, les mêmes faits sans conséquences.

    Tableaux de Georgia Th sur https://justlikehopey.tumblr.com/post/114981137204/georgia-th/amp

  • Les voyages perpétuels

    À la ville, comme à la campagne, les cœurs solitaires s’assemblent
    Pour trouver un terrain d’entente et pour naviguer de conserve.
    Ainsi, compagnons et compagnes cherchent la voie qui leur ressemble
    Et répondra à leurs attentes et à ce que l’avenir réserve.

    Tous les voyages sont chaotiques – on dit qu’ils forment la jeunesse –
    Et l’amour n’aime ni la routine ni le quotidien ressassé ;
    Il se cherche un milieu biotique pour s’épanouir en finesse
    Afin que ses fruits s’agglutinent sur les tuteurs entrelacés.

    Alors les cœurs partent en voyage sur de grandes lignes érotiques
    Ou pour dormir en wagon-lit ou batifoler en croisière.
    Et puisque l’amour n’a pas d’âge, vers une retraite exotique,
    Ils s’aimeront à la folie sur le chemin du cimetière.

    Car l’amour ne s’arrête pas là où la mort figure une escale
    Mais il repart en fusionnant pour procréer un nouvel être.
    Ni Paradis, ni Walhalla, ni aucune évasion fiscale,
    Mais un retour occasionnant des épopées au kilomètre.

    Illustrations de Pascal Campion sur https://positivr.fr/pascal-campion-dessins-couple/?amp

  • La revanche du bonhomme en pain d’épice

    Révolution chez les amantes, les laïques et les religieuses !
    Les bonhommes ne perdent plus la tête pour une partie de jambes en l’air.
    À moins qu’on ne nous le démente par une pirouette prodigieuse,
    Ils sont partis à la conquête des droits dont ils sont titulaires.

    Désormais, pour la parité, ils goûtent avant d’être mangés
    La garniture dont ils enrobent les vêtements de leurs promises.
    Tandis qu’en solidarité, lorsque le tout est mélangé,
    Elle ôte et lui offre sa robe comme si elle lui était soumise.

    Après qu’il eut été mangé, croqué et sucé jusqu’à l’os,
    Il ne resta plus que la tige de ce bonhomme en pain d’épice.
    C’la dut alors la démanger, la fille, de s’enfiler gratos,
    En coupant court à tout litige, son petit bâton de réglisse.

    Tableau de Nicoletta Ceccoli sur https://vigilantcitizen.com/latestnews/disturbing-mkultra-and-child-abuse-paintings-displayed-on-billboards-in-italy

  • L’entre deux mondes

    Monde intérieur imaginaire qui me rappelle d’où je viens,
    Qui fait sonner les expériences acquises de mes vies antérieures.
    J’aime tant son imaginaire qu’à travers lui, je me souviens
    De l’écho d’une clairvoyance vers l’itinéraire ultérieur.

    Monde extérieur immatériel car j’appréhende sa matière,
    Sa dureté et ses dangers à jamais de moi différents.
    Pourtant l’organe sensoriel qui me fait vivre tout entière
    Lui est à la fois étranger et cruellement afférent.

    Je suis ce monde intermédiaire, je suis assis sur la fenêtre
    Avec la peur de basculer dans un destin irréversible.
    Comme une question subsidiaire qui me décidera à naître
    Pour une vie immaculée de mes mémoires inaccessibles.

    Illustration de Jean-Pierre Gibrat

  • L’amante religieuse en herbe

    Comme il faut bien qu’elle s’habitue,
    les bonhommes en pain d’épice
    Sont principales gâteries
    qui enchanteront sa jeunesse :
    « Je te grignote et je te tue
    à petit bout mais sans malice ;
    J’aime ta camaraderie
    et ta saveur toute en finesse ! »

    Elle chantonnait cette comptine
    en dégustant chaque bouchée
    De ses petits amis sucrés
    à la tête aromatisée.
    Petite habitude enfantine
    qui allait plus tard déboucher
    Sur une litanie consacrée
    à ses victimes traumatisées.

    Comme elle n’a pas beaucoup d’amis,
    elle prend son déjeuner au lit
    De la rivière au chocolat
    en compagnie de ses copains ;
    Pour ne pas avoir d’ennemi,
    elle va au bout de sa folie
    En grignotant sans tralala
    sa bonne bouille en massepain.

    Dans son école des Nougatines
    de l’ordre des Saintes Amantes,
    Elle apprendra l’anatomie
    et le meilleur côté des hommes :
    Leurs têtes en chocolatine
    battues dans du thé à la menthe,
    Bases de la gastronomie
    inscrite dans ses chromosomes.

    Tableaux de Nicoletta Ceccoli sur https://ilmondodimaryantony.blogspot.com/2013/08/gli-incubi-celesti-di-nicoletta-ceccoli.html ainsi que sur https://www.irancartoon.com/site/artists/nicoletta-ceccoli

  • Nourrir son imaginaire

    Nourrir son imagination exige en guise d’introduction
    Un sens aussi vrai qu’un mensonge qui grandira avec le temps.
    Le cœur d’enfant en gestation développera son addiction
    Avec des rêves et des songes qui se bousculent à contretemps.

    Bien sûr, au train où vont les choses, son appétit grandit encore,
    Devient de plus en plus exigeant et tout son cœur s’en réconforte.
    Le plaisir se métamorphose en lui transformant tout son corps
    Et son esprit intransigeant envers des émotions plus fortes.

    Au printemps, premières amours, tout son être s’épanouit
    Mais dès qu’on lui pose un lapin, l’imagination se rebiffe.
    Elle se console non sans humour sur ses désirs évanouis
    Avec un pignon de sapin pour un besoin impératif.

    Tableaux de Nicoletta Ceccoli sur https://ilmondodimaryantony.blogspot.com/2013/08/gli-incubi-celesti-di-nicoletta-ceccoli.html

  • La porte intérieure

    Nouvelle Lune de l’année, la porte reste verrouillée
    Suite à on ne sait quel dilemme qui l’avait maintenue bouclée.
    Elle semble vraiment condamnée – d’ailleurs ses gonds sont tous rouillés –
    Pourtant ce n’est plus un problème car on a égaré la clef.

    Mais cette nuit de pleine Lune, six jeunes filles en robe blanche
    Ont accompli le rituel de l’ouverture de la porte.
    Sans autre procédure aucune, on entendit craquer les planches
    Selon le sens spirituel que le chant consacré comporte.

    Une fois la porte entrouverte, les jeunes vierges sont entrées
    Dans le mystère et le silence de la foret du bois-des-chênes.
    Puis la clairière s’est recouverte de ronces tellement concentrées
    Qu’on en a omis l’existence et ce, jusqu’à l’année prochaine.

    Illustration d’Olga Baumert

  • L’amour verdurera

    Partout l’amour verdurera dans la nature déflorée
    Quand le printemps réveillera campagnes, vallées et forêts !
    Partout la vie bourgeonnera et fera jouir les fleurettes
    Que la pluie badigeonnera d’eau fraîche sur les collerettes.

    Revivront d’amours végétales les nouveaux rameaux érectiles
    Qui exposeront leurs pétales autour de leurs pistils fertiles.
    Et mûriront les fruits bénis par d’indispensables abeilles,
    Petites fées dont le génie nous remplit de vie les corbeilles.

    Tableau d’Igor Morski sur https://www.espritsciencemetaphysiques.com/illustrations-controverse-dun-artiste-polonais-revelent-cote-noir-de-societe-moderne.html

  • Ma vie en couleurs

    Je vis en vert la nuit, le jour, entre le cœur et la raison ;
    Quant au blues et aux bleus de l’âme, je les mets en périphérie.
    Qu’il est utopique, le séjour d’un poète resté à la maison
    Qui écrit sur le cœur des femmes dans les bras de son égérie !

    L’égérie voit la vie en rose car, après tout, c’est là son rôle
    Et reste jaune très longtemps dans une jeunesse éternelle.
    Elle a sauvé mon cœur morose – je vous en donne ma parole –
    Qui vit un retour de printemps de ses amourettes charnelles.

    Le soir, ma femme devient violette, comme la couleur des montagnes
    Où la Chèvre de Monsieur Seguin s’enfuit en quête d’aventures.
    Je sèche mon encre obsolète dans l’encrier de ma compagne
    Pour qui j’ai l’éternel béguin au parfum de littérature.

    Photos de Julius Ise sur http://blog.julius-ise.de/colorgames

  • Le choix du Roy

    Le Roi possède tous les droits et c’est normal, il est le Roi ;
    Il est aussi de droit divin né de la cuisse de Jupiter
    Ou de n’importe quel endroit, cheville gauche ou genou droit,
    Quoi qu’il en soit, quoi qu’il advint, le Roi est Maître, pas de mystère !

    La Reine ne possède rien et c’est normal, elle est la Reine
    Mais elle règne dans son lit surtout quand le Roi n’est pas là ;
    Lorsqu’il part chasser les vauriens de ses provinces souveraines,
    Elle y accueille à la folie tous ses amants sans tralala.

    La courtisane fléchit le Roi ; c’est normal, c’est la plus jolie
    Que le Roi séduit sans retard car, des folies, il n’en a guère.
    Là, bien serrés, tout à l’étroit, Il oublie sa mélancolie
    Et lui fait deux ou trois bâtards qui, plus tard, iront à la guerre.

    Les autres cartes font les corvées ; c’est normal elles n’ont aucun titre
    Sinon leurs chiffres décarrés qui tiennent lieu de patronyme.
    Parfois les As sont réservés à faire jouer leur libre arbitre
    Lorsqu’ils s’annoncent en carré d’un consentement unanime.

    Tableaux de Jake Baddeley sur https://www.jakebaddeley.com/collection/paintings/paintings-2007

  • Danse autour du marais salant

    Te souviens-tu, esprit de sel, quand ton âme a quitté ton corps
    Pour s’enfoncer en haute mer vers les abysses ténébreuses ?
    Puis ton fantôme universel peu à peu s’est mis en accord
    Avec l’élément outremer happé par d’essences fibreuses.

    Et tu t’es matérialisée, déesse du marais salant
    Qui danse sur la fleur de sel dans sa métamorphose rose.
    Et puis tu t’es cristallisée dans des fragrances exhalant
    Ce goût divin qui ensorcelle ma soupe et tellement de choses.

    Image trouvée sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue. Si l’auteur de cette image reconnaît son travail, je serai heureux d’en mentionner le nom avec respect.

  • Petit déjeuner au chat

    Au saut du lit je me détends, je m’étire et je me toilette,
    Puis je prépare guilleret mon petit-déjeuner sacré.
    Le rituel se répétant mais sans devenir obsolète,
    Je lui consacre tout l’intérêt des aliments salés-sucrés.

    Tasse de lait dès potron-minet, la première gorgée me sourit.
    Quelques tranches de jambon fumé pour une première mise en bouche
    Que j’ai à peine terminée que je hume sur la cuisinière
    Une omelette parfumée à l’ail des ours et des souris.

    Mais voici que mes maîtres grognent et m’envoient illico presto
    Redescendre au plancher des vaches pour je ne sais quelle raison.
    Alors tant pis, je me renfrogne et abandonne mon resto,
    Puis avec un air de bravache, je m’enfuis hors de la maison !

    Tableau de Kenne Gregoire

  • La soupe à la grimace

    Mon œil, que Marianne soit soumise à ceux qui prétendent épouser
    Ses formes courbes et ses réformes et s’adapter à ses valeurs
    Quand elle se révèle promise à un avenir piquousé
    De rappels pénibles et conformes à plusieurs années de malheur.

    J’ai un mauvais goût dans la bouche à force de m’être alléché
    Aux beaux discours des candidats qui sont devenus mes bourreaux.
    Je crains que la France n’accouche de lois qui me font trébucher
    Dans un ersatz de corrida où j’ai le rôle du taureau.

    Alors si je tire la langue, ce n’est pas par impolitesse
    Mais par fatigue accumulée à subir les mêmes erreurs
    Que l’on m’impose et me harangue à force d’indélicatesses
    Par les médias assimilés à la seule voix de la terreur.

    Tableaux d’Annica Klingspor sur https://ello.co/annicaklingspor

  • Les cœurs en carême

    Après les fêtes on récupère les cœurs demeurés solitaires ;
    On les purge et on les décrasse de toutes mauvaises pensées.
    On les récure et l’on repère les endurcis célibataires
    Afin qu’il ne reste nulle trace de vieilles douleurs expansées.

    Puis on recoud les cœurs brisés, c’est le travail du cœurdonnier
    Qui rafistole les blessures et les fractures du myocarde.
    Une fois qu’ils sont cicatrisés, on les confie aux façonniers
    Qui vont effacer les sutures et rentoiler le péricarde.

    Puis on repeint les cœurs moroses avec la couleur du bonheur
    Qui élimine les bleus de l’âme sous plusieurs couches de vernis.
    On les parfume à l’eau de rose, on les cite au tableau d’honneur
    Et on galvanise à la flamme les carapaces qui ont terni.

    Enfin les cœurs, entrés en cure, passent en thalassothérapie
    Et ne se nourrissent que d’amour durant trois ou quatre semaines.
    Après un temps de sinécure et de kinésithérapie,
    Ils sont remis au goût du jour pour vivre une expérience humaine.

    Illustrations de Heinz Geilfus

  • La route de Samarcande

    Parfois la route de la soie se joue de méandres en lacets
    Qui donnent un peu le mal de mer mais qui valent bien le coup d’œil.
    Il faut garder par devers-soi tous ces virages entrelacés
    Qui apportent un goût doux amer dans un voyage sans écueil.

    Et puis Samarcande apparaît se découpant sur ciel d’azur
    Et ses mosquées, ses mausolées, médersas ornées de faïence.
    L’inquiétude alors disparaît et change au fur et à mesure
    Les appréhensions désolées pour un sentiment de vaillance.

    Illustration de Thomas Thiemeyer

  • Le baiser du dieu-paon

    L’amour est une dimension de l’espace-temps métaphysique
    Dont la lumière a pour valeur l’intensité de l’intention
    Avec deux pôles en extension aux méridiens géodésiques
    Qui en transmettent la chaleur et les couleurs de sa tension.

    Du féminin incandescent au masculin vif et ardent,
    La synergie devient divine dès qu’un baiser est échangé.
    L’univers n’a rien d’indécent quand ses étoiles vont s’attardant
    Vers un trou noir où se devine un futur Big-Bang louangé.

    bodypainting & photos de Bella Volen sur https://bella-volen.com/fine-art-body-painting.html

  • Z’animaux

    D’une lointaine descendance avec Noé et Emzara,
    La Reine Rouge sur son trône surveille la montée des eaux
    Tandis que son chat violet pense à l’aubaine d’un bon débarras
    Pour les chienchiens à leurs patronnes et leurs délits de sale museau.

    Alors on trie de préférence les animaux de compagnie ;
    On vire les hippopotames, les affreux et les déficients ;
    On choisit avec déférence sans faire de zoomanie
    Ceux qui plaisent à Monsieur-Madame et les distraient à bon escient.

    Lui, n’a gardé qu’un chat qui fume en robe noire de havane ;
    Elle, n’a pris qu’un rhinocéros pour un usage cosmétique
    Dont elle abuse et se parfume tandis qu’à côté se pavane
    Une grenouille dont l’air féroce n’est avant tout qu’hypothétique.

    Illustrations d’Enki Bilal

  • Illusio in unguento, in vino veritas

    L’illusion n’émet pas d’odeur malgré son flacon débouché
    Qui laisse sentir l’envoûtement dans des volutes embaumées.
    Point n’ai besoin de décodeur pour voir ce leurre retouché
    À grands coups de glougloutements pulsés de sa fiole empaumée.

    Depuis l’arôme de la pomme, les mensonges sentent le roussi,
    Les tentations empuantissent et les escroqueries empestent.
    J’aspire à lire un nouveau tome dans un paradis sans souci
    Pour que le mal s’anéantisse de lui-même par la malepeste !

    Le vin cache sa vérité sous une robe vermillon
    Qui laisse aviser les rondeurs et tous les charmes de l’alcool.
    Sa force et sa témérité, comme les ailes d’un papillon,
    Créeront un trouble en profondeur dans mes esprits cavernicoles.

    Depuis la cuite de Noé et l’ivresse de la Pentecôte,
    Les mots me font tourner la tête dans des promesses politiques
    En pots-de-vin désavoués qui se décomposent et cocotent
    Avec demandes et requêtes vers un monde apocalyptique.

    « Illusio in unguento, in vino veritas» : Illusion dans le parfum, vérité dans le vin.

    Tableaux de Chie Yoshii sur https://www.chieyoshii.com

  • Les roses de paradis

    Chaque jour j’achetais des roses pour les semer à tous les vents,
    Les voir s’envoler sur la mer d’une vague rouge enflammée.
    Jusqu’à en avoir la névrose d’associer au soleil levant
    L’œuvre que mon art éphémère se plaît au ciel à déclamer.

    Car j’aime déclarer ma flamme par devant les quatre éléments
    Comme une vestale d’amour qui veille sur son feu sacré.
    Plaise à mon cœur, plaise à mon âme de consacrer obstinément
    Chaque pétale de velours à sa demande consacrée.

    Mes roses forment une prière qu’évoquent toutes leurs corolles
    Par des tons plutôt que des mots et des litanies de couleurs.
    Les épines restent en arrière, les pétales portent mes paroles
    Qui me lavent de tous les maux qui ont crié mille douleurs.

    Texte inspiré des « Roses de Saadi » de Marceline Desbordes-Valmore

    Tableau de Jonas Burgert sur http://improvvisazionipoetiche.blogspot.com/2017/03/la-linea-di-piombo-jonas-burgert-al.html

  • La femme qui venait de l’azur

    Belles sirènes dont l’existence n’est connue que des initiés,
    Vos cousins pionniers intrépides sont partis conquérir l’azur !
    Leurs corps prirent la consistance des pluies et des vents nourriciers
    Et leurs yeux autrefois limpides bleuirent au fur et à mesure.

    Sirènes d’air aussi légères que des nuages ascensionnels
    Et dont les tribus tout entières ont quitté les marées esclaves,
    Peuplent mes envies passagères et mes rêves les plus passionnels
    De m’affranchir de la frontière d’une gravité qui m’enclave.

    L’une d’elles a croisé ma route lors d’une chute dans les montagnes
    Et m’a soutenu dans l’éther dans une étreinte anesthésique.
    Mon corps désormais en déroute du souvenir de sa compagne
    Me laisse le cœur solitaire et l’âme à jamais amnésique.

    Illustration d’Alexandre Mahboubi sur https://www.artstation.com/alex-mabb

  • Biographie d’une femme-fleur

    Déjà bébé, la femme-fleur, aux pétales tout potelés,
    Séduit d’un sourire charmant, toujours aux anges évidemment.
    Premières larmes, premiers pleurs et la voici remodelée
    À coups de serpes et de sarments que la vie porte vaillamment.

    À l’heure des jeunes filles en fleur, on la célèbre sous toutes formes ;
    Bouquet discret de séduction, bouquet sacré de mariage.
    Bouquet de toutes les couleurs, gerbe aux nuances uniformes,
    Bouton d’or en introduction au plus érotique voyage.

    La femme-fleur ne fane pas. N’est-elle pas une fleur immortelle ?
    Fleurette qui s’altère le nuit ressuscitera au matin.
    Elle s’épanouit sans faux pas sous autant de plis, de dentelles,
    S’évanouit, puis s’amenuit le soir dans ses draps de satin.

    Tableaux de Anna & Elena Balbusso sur https://www.tuttartpitturasculturapoesiamusica.com/2014/02/Anna-Elena-Balbusso.html

  • Dans la famille Fleur, je voudrais…

    Dans la famille Fleur, je voudrais une rose
    En couleur irisée de gouttes de rosée.
    Arrosée de mes pleurs sous un soleil morose
    Au fond d’un cœur brisé et l’âme névrosée.

    Cette fleur qui grandit d’amour immaculé
    Refleurit dans mon corps un matin de printemps.
    Pétales d’organdi où vont s’accumuler
    P’tits bonheurs en accord au ton de l’air du temps.

    Mais la rose se fane sans perdre de beauté,
    Puis ride son calice et dessèche sa tige.
    Le jardinier profane lui croit sa vie ôtée ;
    Le rêveur, sans malice, y voit fleur de prestige.

    Tableaux d’Anna & Elena Balbusso sur https://www.tuttartpitturasculturapoesiamusica.com/2014/02/Anna-Elena-Balbusso.html

  • Où est le chat de l’écrivaine ?

    Il est là où il ne faut pas et n’est pas là où on l’attend
    Mais quand le maître est écrivain ou la maîtresse, femme de lettres,
    Alors le chat n’est pas sympa et devient suppôt de Satan
    Ou égérie de droit divin selon le souffle à lui transmettre.

    Celui de Shakespeare, coquin, était un matou choupinou ;
    Le chat scénique de Molière manifestait beaucoup d’humour ;
    Ceux des auteurs américains dorment toujours sur leurs genoux
    Et ceux des femmes romancières miaulent sur les romans d’amour.

    Illustration de Trina Schart Hyman

  • Cœur d’étoile

    Du vide est venue la lumière et la parole, source de vie,
    Créées dans le cœur des étoiles où un dieu forgea son empire
    D’une symphonie de matière dans un tempo inassouvi
    Dont les anges ont tissé la toile pour le meilleur et pour le pire.

    Et je sens l’écho dans mon cœur comme une vibration fantôme
    Accordée au verbe divin dont mon âme se fait l’essence ;
    Petit esprit alambiqueur qui aspire à être l’atome
    Qui constituera le levain pour élever la connaissance.

    Mon cœur d’étoile s’est ouvert lorsque j’ai brisé la coquille
    De mes contrôles et mes limites qui m’occultaient ma subconscience.
    Par cet interstice entrouvert de fêlures qui me fendillent,
    Je vois l’origine des mythes et l’insoutenable omniscience.

    Tableau de Heather Thornton

  • Obsession féminine

    J’ai longtemps cherché l’héroïne qu’était l’idéal féminin
    Parmi les brunes et les blondes, les rousses aux cheveux embrasés.
    Un marc gorgé de caféine au malt saturé de tanins
    M’a révélé des furibondes âmes-sœurs à apprivoiser.

    J’ai pris les chemins de traverse parmi les mondes fantastiques
    À la recherche de ma promise bien loin de mes contrées natales.
    J’ai pérégriné de converse avec des filles bombastiques
    Mais j’y ai mouillé ma chemise sans trouver la femme fatale.

    J’ai vécu avec une meuf qui m’a capturé dans sa toile
    Et m’a conservé vingt-six ans pour élever nos deux enfants.
    Mais en traversant le Pont-Neuf, la tête ailleurs dans les étoiles,
    J’ai fait un plongeon suffisant pour fuir ce foyer étouffant.

    Justement, dans les hautes sphères, au-delà des chaînes alpestres,
    J’ai rencontré ma dulcinée, artiste-peintre passionnée.
    Dans cette nouvelle atmosphère, au milieu des vallées sylvestres,
    Mes pauvres ailes calcinées ont pu se reconditionner.

    Comics américains un peu partout sur la planète

  • Prête-moi ta plume

    Le pied du mur voit son maçon, le clair de Lune voit son poète,
    Le lac voit son temps suspendu et le ciel ses chasseurs d’étoiles.
    Je collecte ainsi ma moisson de petits bonheurs où je souhaite
    Redécouvrir l’inattendu et ses mystères qui s’en dévoilent.

    La plume en guise de canot sur une étendue insipide
    M’offre toujours un imprévu qui crève l’écran de l’azur.
    L’encre en manière des canaux s’agite en vagues intrépides
    Qui, d’un reflux de déjà-vu, grandissent au fur et à mesure.

    Pareil à Morphée qui m’endort, ma muse m’envoûte et m’emmène
    Derrière les coulisses terrestres vers les royaumes de l’invisible.
    L’esprit paré de toison d’or redécouvre maints phénomènes
    Que mon cœur et mon âme orchestrent en aventures imprévisibles.

    Illustrations d’Akira Kusaka sur https://akira-kusaka-illustration.tumblr.com

  • Infiniment vôtre

    Les années succèdent aux années, les mêmes images se répètent
    Comme l’absolu des miroirs qui s’interrogent l’un et l’autre.
    Douze mois déjà surannés par une force centripète
    Sont déjà rangés au tiroir, salués d’un infiniment vôtre.

    Douze autres mois pleins d’avenir vont passer au moulin du temps
    Et ressasser les mêmes guerres, mêmes crises et mêmes terreurs.
    Les anciens jours du souvenir parleront aux jours débutants
    Sans toutefois comme naguère éviter les mêmes erreurs.

    Cette hideuse répétition ressemble à l’enfer de Sisyphe
    Roulant sa Terre jusqu’au sommet pour repartir au même rythme.
    Casser cette malédiction serait une action décisive
    Pour s’éveiller à point nommé d’après un nouveau paradigme.

    Image trouvée sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue. Si l’auteur de cette image reconnaît son travail, je serai heureux d’en mentionner le nom avec respect.

  • L’année de l’avenir

    Quand la fin d’année se rapproche, j’observe la navigation
    De mon vaisseau spatial terrestre dans sa cabine de vigie.
    J’attends que mon regard accroche la treizième constellation
    Soumise au signe de Sylvestre dont mon chat dresse l’effigie.

    Minuit moins soixante secondes, dernière minute de l’année ;
    Nous fonçons à travers l’espace à la vitesse du futur.
    Quelques étoiles vagabondes escortent une micellanée
    De météorites qui passent pour célébrer l’investiture.

    Minuit sonnantes tous azimuts, nous franchissons l’étroit passage
    Qui petit à petit s’écarte dans les bras de la galaxie.
    Çà et là des astres permutent leurs phares suivant le traçage
    Que je relève sur les cartes, tous les sens en catalepsie.

    Enfin voici le nouveau monde d’un espace-temps inédit
    Où nous pourrions changer de vie pour une autre organisation
    Sortant des conditions immondes d’un passé lourd de discrédits
    Pour le quitter sans préavis et rallier l’illumination !

    Images trouvées sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue. Si les auteurs de ces images reconnaissent leurs travaux, je serai heureux d’en mentionner les noms avec respect.

  • Les femmes-chamanes du nord

    Au-delà du cercle polaire, pays de la nuit éternelle,
    Lorsque le soleil pour six mois ferme le rideau de ténèbres,
    Dans des igloos alvéolaires, les cérémonies maternelles
    Préparent les femmes en émoi aux rituels qui les célèbrent.

    Depuis le pôle magnétique jusqu’aux grands réseaux telluriques,
    Elles dirigent l’énergie de toutes les mères du monde
    Au patrimoine génétique enrichi des forces ferriques
    Qu’elles stimulent en synergie de mille transes furibondes.

    Et lorsque revient la lumière, elle rendent grâce à l’Univers
    Qui a transformé leurs demandes en fait accompli, désormais.
    Elles restent toujours les premières à braver été comme hiver
    Ce froid que leur corps recommande pour les conserver à jamais.

    Illustrations de Jean-Sébastien Rossbach sur https://www.cfsl.net/chamanes-le-nouveau-livre-de-jean-sebastien-rossbach

  • Les femmes-chamanes du sud

    Dès le tropique du cancer où la chaleur est souveraine,
    Vivent les filles du Soleil, filles de Lune et des étoiles.
    Toutes pratiquant de concert les vieilles traditions pérennes
    Où les prêtresses se relayent par leur beauté qui se dévoile.

    À l’équateur, l’astre solaire parle aux vestales solitaires
    Qui vivent nues pour recevoir l’émanation qui les nourrit.
    Leur nudité protocolaire leur offre un grade autoritaire
    Que leur tribu sait percevoir au même rang que les houris.

    Jusqu’au tropique du Capricorne, sous la forêt amazonienne,
    Se sont répandues les guerrières, gardiennes des terres sacrées.
    Sacralisées de doubles cornes, arborant leur région pubienne,
    Elles vivent des transes aventurières d’hommes à la semence nacrée.

    Illustrations de Jean-Sébastien Rossbach sur https://www.cfsl.net/chamanes-le-nouveau-livre-de-jean-sebastien-rossbach

  • Les femmes-chamanes de l’est

    Franchis au-delà des Carpates avant la chaîne de l’Oural,
    Tu trouveras dans les vallées et les forêts orientales
    Les ancestrales naturopathes, mères herboristes et culturales
    Qui cueillent et distillent l’azalée pour ses vertus fondamentales.

    On les qualifient de sorcières, alchimistes et magiciennes
    Car elles sont initiées des anges à tous les trésors de la Terre.
    Sans doute fières et outrancières mais authentiques praticiennes
    De la magie, cet art étrange, clef des secrets et des mystères.

    Elles incarnent les armes vivantes, soldates du féminin sacré,
    Seins nus afin de confirmer l’appartenance au gynécée,
    Cette sororité savante qui est à jamais consacrée
    À protéger et affirmer leur sexuelle panacée.

    Illustrations de Jean-Sébastien Rossbach sur https:www.cfsl.netchamanes-le-nouveau-livre-de-jean-sebastien-rossbach .

  • Les femmes-chamanes de l’ouest

    Au-delà du pays des Celtes, de l’Ankou et des Korrigans,
    Si tu traverses l’Atlantique en direction de l’occident,
    Tu connaîtras des femmes sveltes aux vêtements extravagants,
    D’une beauté si authentique que l’éclat paraît dissident.

    Parées de plumes et peaux de bêtes sur leurs personnes tatouées,
    Elles détiennent les secrets de la nature sauvagine.
    Parures d’oiseaux sur la tête pour plaire aux dieux amadoués,
    Poitrines aux seins nus consacrées à nourrir leurs fils androgynes.

    Quant à leurs filles immaculées, toutes favorites des dieux,
    Elles sont fécondées à leur tour par des anges érotomanes.
    Ainsi tout est articulé autour du féminin radieux
    Qui règne en paix aux alentours du pays des femmes-chamanes.

    Illustrations de Jean-Sébastien Rossbach sur https:www.cfsl.netchamanes-le-nouveau-livre-de-jean-sebastien-rossbach .

  • L’étreinte fleurie

    L’étreinte fleurie

    Dites-le-lui avec des fleurs, étreignez-la avec des roses,
    Embrassez-la avec des lys, aimez-la avec des lilas.
    Séchez-lui doucement ses pleurs, rassérénez son cœur morose
    Et rappelez-lui les délices qu’un jour son âme assimila.

    Ainsi les fleurs révèlent en elle les secrets de la création ;
    L’homme ne serait qu’une clef et la femme, serrure complexe
    Mais d’une forme originelle qui permet la procréation
    Continuellement recyclée par l’épanouissement des sexes.

    Tableau de Nicolas Nadja.

  • La pêche aux souvenirs

    La pêche aux souvenirs

    J’ai tant de trous dans ma mémoire que je creuse pour la retrouver
    Et parfois j’y découvre un vide où un avion pourrait voler.
    Dans cette énorme cavité noire où mon vertige est éprouvé
    J’envoie toutes mes sondes avides de mes souvenirs envolés.

    Graduellement, des luminaires éloignés s’y sont dépêchés ;
    Régulièrement, la pleine Lune s’y promène en toute innocence.
    D’après les tables solunaires, j’en profite pour aller pêcher
    Des réminiscences de fortune enfouies au fond de mon enfance.

    J’ai recouvré tous les fragments de mon cœur d’étoile brisé
    Quand l’amour allait à vau-l’eau de mes désirs à contresens.
    J’en recolle tous les segments ; il est presque cicatrisé.
    Demain je ferai du vélo dans mon crâne vide de sens.

    Tableau d’Andrej Mashkovtsev sur https:ghoti-and-us.tumblr.compost180996938912andrej-mashkovtsev-her-good-friend-mackerel .

  • Dieu… et ses femmes

    L’épouse de Dieu – car elle existe – est brune et rien ne lui résiste.
    Sans doute sa couleur de cheveux lui octroie de faire ce qu’elle veut.
    Cheveux d’ébène, reflets de jais, d’une main ferme dirigeait
    La maison de la Trinité depuis plus d’une éternité.

    La sœur de Dieu – drôle de frisure – possède une toison d’azur
    Qui s’accorde avec ses yeux pers, parfois turquoise ou outremer.
    D’humeur changeante et sans raison, elle produit en toutes saisons
    Des créatures chimériques, licornes et sirènes d’Amériques.

    La mère de Dieu – il n’en a qu’une – blonde sans hésitation aucune
    A créé fées et Walkyries pour parer aux gamineries
    Des anges qu’elle doit surveiller du matin jusqu’à la veillée
    Et dont elle détient leurs cœurs d’or cachés dans la boîte de Pandore.

    La fille de Dieu – c’est une coquine – espiègle déesse rouquine,
    Garde la faune saine et sauve, protégée de sa robe fauve.
    Elle envahit tous les automnes nos cœurs de langueur monotone
    Qu’elle ravive tous les printemps d’amours à un rythme éreintant.

    Illustrations d’Enki Bilal.

  • Le mariage est-il un échec ?

    Quand il part seul, quand elle part seule, sur le grand chemin de la vie,
    Ni l’un ni l’autre ne connaît les règles et la finalité.
    Le jeu semble cruel et veule, personne n’est du même avis ;
    D’ailleurs chacun se reconnaît agir dans la légalité.

    L’adolescence marque les limites et chacun doit choisir son camp ;
    On fortifie son propre groupe mais on couche avec l’ennemi.
    Tout cela consolide le mythe de tous les corps à corps fréquents
    Et lorsque déborde la croupe, on a tous besoin d’accalmie.

    Mais un combat ne suffit pas, d’autres rencontres sont prévues ;
    Matches amicaux, matches d’intérêts, matches qui comptent pour le mérite.
    Ils durent parfois jusqu’au trépas d’un combattant, c’est l’imprévu
    Où le rescapé atterré ne gagne qu’un triomphe démérite.

    Tout ça pour ça, pour terminer une fin de course en solitaire
    Et toutes les parties perdues laissent toujours un goût amer.
    Restera-t-on déterminé à mettre un sens prioritaire
    Au sexe désormais éperdu, sauveur, sadique et victimaire ?

    Illustrations d’Enki Bilal.

  • Les romans policiers

    Les romans policiers

    J’aime ces livres labyrinthes appelés « romans policiers »
    Truffés de couloirs et d’intrigues qui vous perdent entre les lignes.
    Le suspense devient une étreinte et le lecteur, un justicier
    Car progressivement il brigue d’en interpréter tous les signes.

    Curieusement certains dédales sont bâtis sur le même plan ;
    Une fois qu’il est assimilé, on le parcourt les yeux fermés.
    Une fois le pied sur la pédale, l’ôteur crée des faits ressemblants
    Comme une sorte de fac-similé qui sent un peu le renfermé.

    Ô esprit d’Agatha Christie, esprits de Maurice Leblanc,
    Conan Doyle, Jean-Christophe Grangé, Fred Vargas, Georges Simenon,
    Revigorez-nous, sapristi, thrillers, polars de but en blanc
    Et éloignez ces étrangers au club des auteurs de renom !

    Tableau de Rafal Olbinski sur https:www.designstack.co201702surreal-paintings-that-whisper-message.html .

  • Winterthur in Switzerland

    Une aventure en Switzerland ; départ Winterthur centre-ville.
    Montez en direction du Nord, traversez le Lac de Constance,
    Continuez jusqu’en Hollande, demandez l’officier civil
    Qui se prénomme Éléonore, pour une visite de circonstance.

    Si vous gardez le même cap, vous rencontrerez mes cousins
    À l’embouchure du Saint-Laurent, pays d’un éternel hiver.
    Mais on contourne le handicap en s’entraidant entre voisins
    Ce qui, pour les gens ignorants, est assez rare dans l’univers.

    Tournez tout autour de la Terre, passez l’Océan Pacifique,
    Promenez-vous en Océanie, courez la mappemonde australe,
    Puis regagnez ma salutaire petite ville mirifique
    Et rendez-vous « Chez Stéphanie » pour une tournée magistrale.

    (Illustration de Lilian Caprez ;
    Stéphanie y tient la boutique « Pain & Fromage » et ses dégustations sont délectables.)

    Images trouvées sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue. Si les auteurs de ces images reconnaissent leurs travaux, je serai heureux d’en mentionner les noms avec respect.

  • La fille de Lilith

    Parmi les filles de Lilith qui se sont auto-reproduites,
    J’en ai connu un spécimen qui avait beaucoup de bagout.
    Elle n’était pas très prosélyte et avait changé de conduite
    En préférant vivre un hymen avec un terrien à son goût.

    Elle m’aborda à la terrasse d’un café noir à la vanille
    Et me proposa de la suivre sans autre forme de procès.
    Bien que je ne la désirasse, j’emboîtai le pas à la fille
    Et ce qui aurait dû s’ensuivre s’est avéré un franc succès.

    D’une copulation frénétique, elle prit mon flot séminifère
    Et devint vite rondelette tandis que j’étais en retrait.
    De son patrimoine génétique et l’héritage de Lucifer,
    Elle accoucha d’une angelette qui lui ressemblait trait pour trait.

    Tableaux d’Andrej Mashkovtsev sur https:foxword.livejournal.com166536.html .

  • Mais où sont passées les vestales ?

    Le chat parti, les souris dansent et puis reviennent les vestales ;
    Ce sont nos matous disparus qui sourdent à travers les plinthes.
    Quand vacille la flamme en cadence d’une bougie sur piédestal,
    On voit leurs âmes comparues revenir miauler leurs complaintes.

    Quand ses neufs vies sont dépensées, le chat accède à sa retraite
    Et revient selon les saisons en robe de féminité.
    Mais pour ne pas nous offenser, en apparence de soubrette,
    Il vient fleurir notre maison dans toute sa félinité.

    Toutes les chattes de mon enfance reviennent régulièrement
    À travers portes et volets pour somnoler dans mon armoire.
    Chaque vestale pour ma défense fait fuir spectaculairement
    Démons et autres feux follets, tous délogés de ma mémoire.

    Tableaux de Prasanna Weerakkody sur https:prasannaweerakkody.com#xl_xr_page_gallery%201 .

  • La fuite par le jardin

    La fuite par le jardin

    La petite porte par derrière qui s’ouvre tout au fond du jardin,
    Me fait sortir de la maison discrètement sans être vu.
    Après je remets la barrière qui se bloque à l’aide d’un gourdin
    Et je disparais sans raison à donner, ni vu ni connu.

    Je n’ai plus qu’à faire l’inverse pour revenir furtivement
    Sans que ce soit qui me trahisse et qui apparaisse au grand jour.
    J’aime ce chemin de traverse qui répond impulsivement
    Lorsque des envies m’envahissent pour fuir les dialogues de sourds

    Tableau de Pierre-Auguste Renoir.

  • La chaîne des rêves

    La chaîne des rêves

    La chaîne des rêves à la main, formée de pensées authentiques,
    M’ouvre une voie étroite d’ombres, puis m’entraîne et même m’emporte.
    Et je m’élance sur ce chemin vers des voyages romantiques
    Peuplés de rencontres en nombre de ce que l’amitié comporte.

    Curieusement la nudité de l’être devient un sésame
    Qui sait déverrouiller les cœurs, les corps et les esprits retors.
    Au début, par timidité, je n’osais contacter leurs âmes
    Mais l’amour est toujours vainqueur et ses prouesses sont pléthore.

    J’y vois des brebis égarées, des faunes et des biches aux abois
    Avec lesquelles j’aime apprendre de nouveaux défis à braver.
    Dans ces univers chamarrés, j’y ai croisé au coin d’un bois
    Des anges qui m’ont fait comprendre combien il est doux de rêver.

    Tableau de Beatrice Romaine Brooks sur http:aracelirldeloleoalcincel.blogspot.com202003beatrice-romaine-brooks.html .

  • La tournée du chat bleu-blanc-noir

    La nuit, les chats ne sont pas gris mais carrément ultra-violets
    Presque transparents sur les toits et confondus dans les ruelles.
    Ni malingres, ni rabougris, mais, dans le décor, étiolés
    Prêts à surgir d’un air matois sur leurs proies d’une patte cruelle.

    Potron-minet, sans faux-semblants, les matous guettent le réveil
    Des maîtres en quête de pitance au prix même de quelques rapines.
    Puis, la tête dans leurs culs blancs, ils se mettent en état de veille
    Comme s’ils faisaient pénitence d’une état d’âme galopine.

    Mais à l’heure entre chien et loup, matou se transforme hardiment,
    Prêt pour la tournée du chat noir, pour le grand rôle de sa vie
    Avec tous les minets jaloux et les minettes en ralliement
    Résonneront dans les manoirs leurs doléances à l’envi.

    Tableaux de Jean Metzinger.

  • Vénération féline

    Un gène hérité des panthères – ancêtre aussi noir que salace –
    Se traduit dans cette posture entre deux rayons de lumière.
    Au début, chat complémentaire qui a su occuper sa place,
    Il pose avec désinvolture telle Vesta dans ma chaumière.

    Depuis que je l’ai adopté, son ombre est un souffre-douleur
    Car il s’étale désormais sur tous les murs de la maison.
    Il s’est parfaitement adapté, m’en fait voir de toutes les couleurs
    Et s’est assorti à jamais dans tous les tons de la saison.

    Devenu chat supplémentaire par deux miroirs en vis-a-vis,
    Il s’est dupliqué sans raison dans l’infinité du présent.
    Dans cette optique élémentaire, lui et moi sommes du même avis :
    Je suis de trop dans ma maison face à ce chat omniprésent.

    J’en rêve le jour et la nuit, cauchemar frisant le délire ;
    Il s’émancipe et s’initie en milliard de petits minous.
    Je ne sais plus ce qui me nuit ; sans doute veut-il m’avilir
    À l’adorer comme un messie qui serait venu parmi nous.

    Illustrations de Mitch Itsallinsideus sur https:lustik.tumblr.compost677169715304677376mitch-itsallinsideus .

  • En robe dorée

    En robe dorée

    Au Paradis, lorsque j’y suis, un seul fantasme me poursuit ;
    Je m’y remarie tous les jours avec une femme, chacune son tour.
    Si tous les hommes font comme moi, nos nuits d’amour au fil des mois
    Deviennent lunes de miels dorées avec maintes épouses adorées.

    À coup sûr, parité oblige, les femmes en retour nous infligent
    De sélectionner leurs maris parmi les beaux gosses marris
    De ne pas avoir celles qu’ils veulent d’après leurs critères assez veules.
    Ainsi finalement c’est l’enfer mais franchement faut pas s’en faire…

    Car l’Éternel est féminin et, le ciel se montrant bénin,
    Dieu m’aura, je crois, acculé avec l’âme-sœur immaculée
    Que j’épouse en robe dorée et, pour l’avoir sainte-honorée,
    Une seule chair naturellement nous relie éternellement.

    Tableau de DibuMadHatter.

  • Fragments d’une belle inconnue

    Fragments d’une belle inconnue

    Que reste-t-il après l’amour transmis d’une belle inconnue
    Qui aurait traversé mes rêves durant la chaleur d’une nuit ?
    Quelques fragments au petit jour dans le brouillard qui s’insinue
    Et trouble en trois secondes brèves le souvenir qui s’amenuit.

    Et je remonte le chemin la nuit suivante et les prochaines
    Pour retrouver l’enseignement qui a illuminé mon cœur
    Mais si mon âme perd la main sur les indices qui s’enchaînent,
    J’en sentirai les saignements qui m’égratignent de rancœur.

    Or si j’apprivoise mes songes et si je m’en fait obéir,
    Je trouverai les raccourcis qui me ramèneront à elle
    Sans laisser la voie du mensonge me perturber et m’éblouir
    Mais au contraire m’endurcir d’une rêverie sexuelle.

    Tableau « Danae » de Gustav Klimt.

  • Fluctuations immobilières

    Ces merveilleux fous d’architectes et leurs drôles de mégastructures
    Nous offrent parfois des maisons aussi absurdes que loufoques.
    Leurs fondations paraissent suspectes et s’aventurent vers des ruptures
    Du bon sens et de la raison dans une folie équivoque.

    Les porte-à-faux m’incitent à croire qu’ils vont me tomber sur la tête ;
    Les défis à la gravité me donnent l’impression de tomber.
    Tout ce qui inspire la gloire d’un maître d’œuvre qui s’entête
    Ne sont pas faits pour éviter catastrophes et retombées.

    Mais j’exagère et après tout, le serpent se mordant la queue,
    Je verrai les derniers étages au niveau du rez-de-chaussée,
    Des escaliers vers n’importe où, des ascenseurs si belliqueux
    Qu’ils me retiendront comme otages si je n’me suis pas déchaussé.

    Montages de Victor Enrich sur https:www.pixfan.comvictor-enrich-paysage-urbain-reinvente .