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  • Au pays des aveugles, les femmes sont nues

    Lorsque la lumière s’éteint et lorsque les yeux lâchent prise,
    Je me reconnecte au réseau de la vie avant la naissance.
    L’esprit comme un miroir sans tain laisse apparaître des surprises
    Prédécoupées par les ciseaux de mes anciennes connaissances.

    Dans ce monde nu de science et dépouillé de tout langage,
    Je ne vis aucune expérience mais la légèreté de l’être.
    Qu’il est bon d’ôter sa conscience et ne garder pour tout bagage
    Ce qui fond dans la luxuriance des mots dénués de toute lettre.

    Les femmes nues sont souveraines ; j’en suis leur aveugle sujet.
    Je ne m’en fait aucune image à la couleur des sentiments.
    Chaque nuit j’épouse une reine qui fait de moi son homme-objet ;
    Mon inconscient lui rend hommage dans mes poèmes les plus cléments.

    Illustration d’Ernst Stöhr.

  • L’ingénue au soleil

    Je ne rêve ni de saison, ni de lumière particulière,
    Ni même en teinte dominante mais de stimuli plus discrets.
    Les yeux n’ont pas toujours raison et d’autres émotions singulières,
    D’une attention déterminante, suscitent mes désirs secrets.

    Des images sentimentales dans des nuances aux bleus de l’âme
    Forment mes îles enchanteresses peuplées de femmes ingénues.
    Mes amours expérimentales se matérialisent et s’enflamment
    Dans une apparence aux caresses de couleurs les plus soutenues.

    Tableau de Denis Chernov sur https://www.risunoc.com/2013/06/sovremennyye-khudozhniki-ukrainy-denis.html

  • Debout les morts !

    J’entendis le réveil sonner au milieu d’un rêve émouvant,
    Maudissant l’ordre autoritaire qui détonait tel une bombe.
    Je restais là, tout étonné, de me retrouver mort-vivant
    M’extirpant des mottes de terre où était enfouie ma tombe.

    Un par un, nous nous sommes levés, hommes et femmes ressuscités,
    Après quelques génuflexions pour nous réveiller tout à fait.
    Tandis qu’un archange élevé contre toute caducité
    Suscitait notre réflexion, le cœur et l’âme stupéfaits.

    Eh bien voilà, tout recommence. Autres lieux, autres circonstances.
    Comment sera le paradis ? Est-il vraiment comme on le dit ?
    Va-t-on revivre une romance ou faire l’amour à distance ?
    Renaître est-ce une bonne affaire même si, les autres, c’est l’enfer ?

    Arcane XX du tarot PreRaphaelite sur http://www.marytcusack.com/maryc/decks/html/Tarot/PreRaphaelite.html

  • Des ténèbres à la lumière

    Désormais, nous pouvons l’admettre, Dieu, créant la femme en premier,
    Était par conséquent femelle puisqu’elle était à son image.
    Et tout ce qu’elle a pu commettre était forcément coutumier
    Aux aberrations informelles dont Elle seule nous porte dommage.

    Et d’où venaient donc les ténèbres avant que la lumière soit
    Sinon, de son propre dessein, qu’elle l’emporte sur le mal ?
    Et je propose qu’on célèbre l’évènement qui va de soi
    En reconnaissant que les saints sont tous issus de l’animal.

    Les voies génitales de Dieu, apparemment impénétrables,
    Proviennent du Saint Utérus, Sainte Matrice Virginale.
    Moi-même miséricordieux, je respecte mes vénérables
    Mères qui m’ont donné le virus de la vision originale.

    Illustration de S.V. Mitchell sur https://svmitchell.com/portfolio/drawings

  • La diablesse et le tonnerre

    Elle cheminait sans parapluie mais avec une jupe évasée
    Et proposait à qui voulait son corps pour se mettre à couvert.
    Quand je l’ai croisée sous la pluie, elle a dit pour m’apprivoiser :
    « Prenez-moi, Monsieur Riboulet, mes fuseaux vous sont grand-ouverts ! »

    Sans penser aux sous-entendus quand la belle vint à ma rescousse,
    Je lui ai donné tous mes sous pour un peu d’abri en chemin.
    J’attrapai le pépin tendu en séchant l’eau de ma frimousse,
    Les yeux fixés sur ses dessous tout juste à portée de mes mains.

    J’étais de petite noblesse, j’habitais une gentilhommière,
    Seul face à ma mélancolie mais toujours prêt à en découdre.
    Et c’est ainsi que la diablesse éteignit toutes les lumières,
    Puis tous deux, mouillés dans mon lit, eûmes ensemble un coup de foudre.

    Illustration d’Alexandre Mahboubi sur https://www.artstation.com/alex-mabb

  • La goutte d’eau de Damoclès

    Quand l’eau potable et salutaire, puisée aux frais de la princesse
    En dépit des peuples assoiffés, est revendue aux pays riches,
    Ceux qui se croyaient propriétaires de leur légitime richesse
    Se retrouvent le crâne décoiffé au visage réduit en friche.

    La goutte fait déborder le vase lorsque, pompée aux antipodes,
    Elle est transportée par les airs sans probité ni écotaxe.
    Or à mesure que l’on transvase l’eau aux maisons à digicodes,
    La Terre deviendra un désert et basculera sur son axe.

    Sculpture de Nazar Bilyk sur https://dailygeekshow.com/artiste-statue-pluie/?amp=1

  • La coopération

    Un jour viendra où les plus lents demanderont aux plus rapides
    De les aider à avancer dans l’épanchement des réseaux.
    Les vieux escargots chancelants, sur de jeunes poissons intrépides,
    Pourront ainsi concurrencer les plus véloces des oiseaux.

    Cependant en contrepartie les traînards devront s’adapter
    Ou à l’inverse ralentiront ceux qui sont constamment pressés.
    Cette synergie répartie entre ces deux forces impactées
    Sera cruciale aux environs de la fin d’un monde oppressé.

    Tableau d’Ani Mnatsakanyan sur https://www.saatchiart.com/art-collection/Painting-Photography-Collage/Contemporary-Surrealists/782019/103514/view?crlt.pid=camp.1aR0WyDS9qrw&epik=dj0yJnU9TVFpV0tyUVV5MDljdnRsSV93eHJlMTQ5aXFldE03cWYmcD0wJm49cEx0S18wbW1Ma1ExZXlVOGJ2QWZzUSZ0PUFBQUFBR01BZVhz

  • Les roses de paradis

    Chaque jour j’achetais des roses pour les semer à tous les vents,
    Les voir s’envoler sur la mer d’une vague rouge enflammée.
    Jusqu’à en avoir la névrose d’associer au soleil levant
    L’œuvre que mon art éphémère se plaît au ciel à déclamer.

    Car j’aime déclarer ma flamme par devant les quatre éléments
    Comme une vestale d’amour qui veille sur son feu sacré.
    Plaise à mon cœur, plaise à mon âme de consacrer obstinément
    Chaque pétale de velours à sa demande consacrée.

    Mes roses forment une prière qu’évoquent toutes leurs corolles
    Par des tons plutôt que des mots et des litanies de couleurs.
    Les épines restent en arrière, les pétales portent mes paroles
    Qui me lavent de tous les maux qui ont crié mille douleurs.

    Texte inspiré des « Roses de Saadi » de Marceline Desbordes-Valmore

    Tableau de Jonas Burgert sur http://improvvisazionipoetiche.blogspot.com/2017/03/la-linea-di-piombo-jonas-burgert-al.html

  • La femme qui venait de l’azur

    Belles sirènes dont l’existence n’est connue que des initiés,
    Vos cousins pionniers intrépides sont partis conquérir l’azur !
    Leurs corps prirent la consistance des pluies et des vents nourriciers
    Et leurs yeux autrefois limpides bleuirent au fur et à mesure.

    Sirènes d’air aussi légères que des nuages ascensionnels
    Et dont les tribus tout entières ont quitté les marées esclaves,
    Peuplent mes envies passagères et mes rêves les plus passionnels
    De m’affranchir de la frontière d’une gravité qui m’enclave.

    L’une d’elles a croisé ma route lors d’une chute dans les montagnes
    Et m’a soutenu dans l’éther dans une étreinte anesthésique.
    Mon corps désormais en déroute du souvenir de sa compagne
    Me laisse le cœur solitaire et l’âme à jamais amnésique.

    Illustration d’Alexandre Mahboubi sur https://www.artstation.com/alex-mabb

  • Biographie d’une femme-fleur

    Déjà bébé, la femme-fleur, aux pétales tout potelés,
    Séduit d’un sourire charmant, toujours aux anges évidemment.
    Premières larmes, premiers pleurs et la voici remodelée
    À coups de serpes et de sarments que la vie porte vaillamment.

    À l’heure des jeunes filles en fleur, on la célèbre sous toutes formes ;
    Bouquet discret de séduction, bouquet sacré de mariage.
    Bouquet de toutes les couleurs, gerbe aux nuances uniformes,
    Bouton d’or en introduction au plus érotique voyage.

    La femme-fleur ne fane pas. N’est-elle pas une fleur immortelle ?
    Fleurette qui s’altère le nuit ressuscitera au matin.
    Elle s’épanouit sans faux pas sous autant de plis, de dentelles,
    S’évanouit, puis s’amenuit le soir dans ses draps de satin.

    Tableaux de Anna & Elena Balbusso sur https://www.tuttartpitturasculturapoesiamusica.com/2014/02/Anna-Elena-Balbusso.html

  • Dans la famille Fleur, je voudrais…

    Dans la famille Fleur, je voudrais une rose
    En couleur irisée de gouttes de rosée.
    Arrosée de mes pleurs sous un soleil morose
    Au fond d’un cœur brisé et l’âme névrosée.

    Cette fleur qui grandit d’amour immaculé
    Refleurit dans mon corps un matin de printemps.
    Pétales d’organdi où vont s’accumuler
    P’tits bonheurs en accord au ton de l’air du temps.

    Mais la rose se fane sans perdre de beauté,
    Puis ride son calice et dessèche sa tige.
    Le jardinier profane lui croit sa vie ôtée ;
    Le rêveur, sans malice, y voit fleur de prestige.

    Tableaux d’Anna & Elena Balbusso sur https://www.tuttartpitturasculturapoesiamusica.com/2014/02/Anna-Elena-Balbusso.html

  • La boule à mémoire

    Chaque année notre mappemonde ressemble à une boule à neige
    Que les actualités chamboulent dès qu’on a dépassé les fêtes.
    Et notre pauvre petit monde, si malmené dans ce manège,
    Nous semble alors perdre la boule à nous donner mal à la tête.

    Bien sûr, on change de décor qu’on peint aux nouvelles couleurs
    Pour nous faire croire au changement et au bonheur qui va s’ensuivre.
    Mais malgré d’insidieux raccords dissimulés sous les douleurs,
    Ce sont les mêmes événements qui nous imposent la marche à suivre.

    Telle année, une pandémie agite notre planisphère ;
    Telle autre année c’est une crise qui appauvrit notre panier.
    Cette année qui sera l’ennemi à montrer pour nous satisfaire ?
    Peu importe car c’est la surprise qui nous divise pour mieux régner !

    Tableau de Shiori Matsumoto

  • Les piliers du ciel

    Nos gaulois ne craignaient qu’une chose : qu’un de ces quatr’ jours leur échoit
    Un ciel leur tombant sur la tête à cause de leurs dieux innombrables.
    Mais depuis la métamorphose du latin en langue de bois,
    Ce sont nos énarques esthètes qui se montrent indésirables.

    À tant faire qu’obéir aux lois qu’ils nous imposent en soutien
    Aux catastrophes programmées pour le bonheur des hommes riches,
    Il semblerait de bon aloi de veiller au bon entretien
    Des avantages amalgamés – cela va sans dire – à de la triche.

    Et je propose de planter des poteaux au bord de la mer
    Pour mieux soutenir l’horizon qui pèse sur l’immigration ;
    Et nos retraites supplantées au profit des gens d’outremer
    Et, au cas où, mettre en prison les rebelles à l’intégration.

    Image trouvée sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue.
    Si l’auteur de cette image reconnaît son travail, je serai heureux de le créditer.

  • L’hélice rose

    J’ai offert mon hélice rose à une sirène helvétique
    Qui m’a attiré dans le lit de sa rivière aux eaux dormantes.
    Puis, après ma métamorphose en un nouvel homme aquatique,
    Je l’ai aimée à la folie, ma douce princesse charmante.

    Et mon bateau à la dérive a navigué fidèlement
    En suivant le sens du courant du Rhin jusqu’à la mer du nord.
    Il est resté dans ses eaux vives poussé par le ruissellement,
    Puis vers l’océan concourant au point où défier la mort.

    Parfois l’hélice rose tourne dans notre palais englouti
    Mon bateau en pèlerinage revient à chaque anniversaire.
    Pourtant jamais je ne retourne vers mon passé inabouti
    Car je vis dans ce nouvel âge dont ma sirène fut l’émissaire.

    Image trouvée sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue.
    Si l’auteur de cette image reconnaît son travail, je serai heureux de le créditer.

  • Le bateau qui posait des questions

    Revenait tous les vendredis la même éternelle question :
    « Verrais-je sortir la sirène avec ou sans provocation ? »
    Bien sûr, rien ne le contredit malgré l’étrange suggestion
    D’un bateau virant de carène comme point d’interrogation.

    Pourquoi cette interrogation ? À l’évidence le pêcheur
    Est amoureux de sa chimère qu’il ne voit qu’un’ fois par semaine.
    En guise de provocation pour éloigner les empêcheurs,
    De tourner en rond, victimaire, il ép’ronne tout énergumène.

    Enfin seul avec sa sirène, il continue de tournoyer ;
    Sans doute une danse nuptiale pour conquérir sa dulcinée.
    Il vivra des amours sereines, n’ayant pas peur de se noyer,
    Mais pass’ra six journées cruciales à patienter et fulminer.

    Image trouvée sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue.
    Si l’auteur de cette image reconnaît son travail, je serai heureux de le créditer.

  • Faux-chat et chaud-lapin

    Au pays des faux-lapins blancs, les chauds lapins ont le beau rôle ;
    Les chats faux qui sont échaudés se réfugient à la maison
    Car dès qu’ils sortent en tremblant, ils passent à la casserole
    Et force leur est d’échafauder des ripostes en toutes saisons.

    On appelle la semaine pascale, la Saint-Barthélemy des chats
    Car les lapins en chocolat, distribués dans les jardins,
    Font une chasse radicale – sans faire de prêchi-prêcha –
    Aux matous sous les pergolas en les fourrant de leurs gourdins.

    Tableau de Marta Orlowska sur https://www.behance.net/gallery/4262059/Surreal-Storybook-Ladies

  • Couleurs paradisiaques

    Saurais-je passer, par la foi, du rêve à la réalité
    Comme passer du noir et blanc à la couleur puis, la 3D ?
    Il me manque tout à la fois tant à ma sensualité
    Qu’il me faut des sens rassemblant tout l’univers sauvegardé.

    Ou peut-être juste une miette de poussière de création
    Recueillie au cœur des étoiles d’où tout notre monde est issu.
    Poser sur mes yeux ces paillettes et partir en récréation
    Où tous les secrets se dévoilent pour créer ce que j’ai conçu.

    Tableaux d’Elena Kotliarker sur https://fineartamerica.com/featured/queen-lillie-elena-kotliarker.html?epik=dj0yJnU9YkMxN3ZHN2h3bW5ZbzNkTWhPWGc1M0EwQnROZHpjMVcmcD0wJm49ZDdyamdiZnFfNFROZDB3WmRXU1RyQSZ0PUFBQUFBR01lenN3

  • Joyeuses vigneronnes

    Pour fêter la fin des vendanges, les petites-filles de Demeter
    S’incarnent en Vénus callipyge aux fortes fesses en étau
    Qui bénissent les fûts en vidange, prêts à boire le sang de la Terre
    Des grains qui donnent le vertige par leurs arômes végétaux.

    L’honneur vient à la plus charnue de nous entraîner au foulage
    Sous l’action de cuisses costaudes et de puissants coups de mamelles.
    Puis de petits démons cornus enivreront tout l’entourage
    Dans l’antique transe rustaude d’une sainte liqueur femelle.

    Tableau de Frantisek Kupka alias Frank Kupka et François Kupka

  • La renaissance de l’Univers

    Admettons un Dieu féminin qui aurait créé en son sein
    Toutes les étoiles de l’Univers, les cieux, le Soleil et la Terre.
    Des nonnettes et des nonnains et tous les anges sacro-saints
    L’auraient accouchée en hiver dans une froideur planétaire.

    C’est à la naissance du monde que la lumière s’est déclenchée
    Car l’enfant-cosmos apparut beau comme un astre, bien entendu.
    Et Lucifer, la bête immonde, n’était qu’ampoule mal branchée
    Dont la clarté a disparu par trop de satan répandu.

    Sculptures d’Adam Martinakis sur https://www.martinakis.com

  • L’ange de la vigne

    Dans ma comporte de vendange, toute blottie, la fée des vignes,
    Toute endormie durant l’attente de la grand’fête du foulage.
    Aussi innocente qu’un ange, elle attend là, superbe et digne,
    D’aller s’immerger sous la tente dans le pressoir qui la soulage.

    Car il faut voir ses jambes nues teintées du raisin rouge sang
    Qui lui remonte tout le corps des pieds jusqu’aux yeux insatiables.
    Comme elle est belle l’ingénue dont les spectateurs rougissants
    La portent au livre des records du vin de charme appréciable !

    Hallali sur la lie-de-vin et dans un lit des plus divins
    Car la fatigue du travail exige repos compensateur.
    Que fallait-il donc qu’il advint afin que l’amour intervint ?
    Un peu d’ivresse, vaille que vaille, et de breuvage tentateur !

    Photo de Pavel Szenk

  • La Reine Blanche et le Roi de Carreaux

    La Reine Blanche sans-culotte débattait de révolution
    Tandis que le Roi de Carreaux cherchait à noyer le poisson,
    Sa Reine Noire dans la menotte et l’autre cherchant des solutions,
    En se grattant d’un air faraud l’ menton d’un’ drôle de façon.

    À force de circonlocutions répétées comme un perroquet,
    Il s’égarait dans des impasses et des échecs en escaliers.
    À force de circonvolutions, il ne pouvait même plus roquer
    Malgré ses tours de passe-passe et ses assauts peu cavaliers.

    Mais le Roi perdit sa chemise, troublé par la Reine impudique
    Et répudia sa Dame Noire au profit de sa conquérante.
    Or pour honorer sa promise, son jeu devint plus méthodique
    Et l’on retînt dans les mémoires une Reine Blanche prépondérante.

    L’art dans la rue de Natalia Rak

  • Chaud lapin

    « Alice au pays des merveilles » ? Un conte cousu de fil blanc !
    Lewis Caroll avec talent mais en nous trompant l’a dépeint ;
    Sous prétexte qu’il nous éveille aux casse-têtes les plus troublants,
    Mathématiquement parlant, il n’était autre qu’un chaud lapin.

    Ainsi au début de l’histoire, pour apaiser ses arrogances,
    Il prend la fuite pour attirer sa proie sur son propre terrain.
    Puis, par la suite, il est notoire de constater les manigances
    Qu’il sème pour lui soutirer le fruit blotti entre ses reins.

    Le chat évoque son ego et sa passion des stratagèmes ;
    L’heure du thé ? Liquide intime pour l’endormir de ses faveurs.
    Les jumeaux expriment tout de go la dualité du système
    Entre le bourreau et sa victime afin d’en être son sauveur.

    Tableau de Steven Kenny http://art-et-cancrelats.blogspot.com/2011/09/steven-kenny.html

  • L’autre Alice

    Dans une autre histoire inédite, Lewis déguisé en lapin
    Troque son cœur et sa raison pour deux loups lubriques et vicieux.
    Son stratagème s’accrédite par la manière dont le grappin
    S’abat sur ses défloraisons au cours du conte malicieux.

    Dans cet épisode inconnu, un chaperon rouge revêt Alice
    Et les deux bêtes lui font la cour d’un appétit concupiscent.
    Mais sous la cape, notre ingénue, entièrement nue avec malice
    Les séduira par le concours de son piège-à-loup turgescent.

    Illustrations de Chelsea Greene Lewyta sur https://www.escapeintolife.com/artist-watch/chelsea-greene-lewyta

  • Où est le chat de l’écrivaine ?

    Il est là où il ne faut pas et n’est pas là où on l’attend
    Mais quand le maître est écrivain ou la maîtresse, femme de lettres,
    Alors le chat n’est pas sympa et devient suppôt de Satan
    Ou égérie de droit divin selon le souffle à lui transmettre.

    Celui de Shakespeare, coquin, était un matou choupinou ;
    Le chat scénique de Molière manifestait beaucoup d’humour ;
    Ceux des auteurs américains dorment toujours sur leurs genoux
    Et ceux des femmes romancières miaulent sur les romans d’amour.

    Illustration de Trina Schart Hyman

  • Cœur d’étoile

    Du vide est venue la lumière et la parole, source de vie,
    Créées dans le cœur des étoiles où un dieu forgea son empire
    D’une symphonie de matière dans un tempo inassouvi
    Dont les anges ont tissé la toile pour le meilleur et pour le pire.

    Et je sens l’écho dans mon cœur comme une vibration fantôme
    Accordée au verbe divin dont mon âme se fait l’essence ;
    Petit esprit alambiqueur qui aspire à être l’atome
    Qui constituera le levain pour élever la connaissance.

    Mon cœur d’étoile s’est ouvert lorsque j’ai brisé la coquille
    De mes contrôles et mes limites qui m’occultaient ma subconscience.
    Par cet interstice entrouvert de fêlures qui me fendillent,
    Je vois l’origine des mythes et l’insoutenable omniscience.

    Tableau de Heather Thornton

  • Obsession féminine

    J’ai longtemps cherché l’héroïne qu’était l’idéal féminin
    Parmi les brunes et les blondes, les rousses aux cheveux embrasés.
    Un marc gorgé de caféine au malt saturé de tanins
    M’a révélé des furibondes âmes-sœurs à apprivoiser.

    J’ai pris les chemins de traverse parmi les mondes fantastiques
    À la recherche de ma promise bien loin de mes contrées natales.
    J’ai pérégriné de converse avec des filles bombastiques
    Mais j’y ai mouillé ma chemise sans trouver la femme fatale.

    J’ai vécu avec une meuf qui m’a capturé dans sa toile
    Et m’a conservé vingt-six ans pour élever nos deux enfants.
    Mais en traversant le Pont-Neuf, la tête ailleurs dans les étoiles,
    J’ai fait un plongeon suffisant pour fuir ce foyer étouffant.

    Justement, dans les hautes sphères, au-delà des chaînes alpestres,
    J’ai rencontré ma dulcinée, artiste-peintre passionnée.
    Dans cette nouvelle atmosphère, au milieu des vallées sylvestres,
    Mes pauvres ailes calcinées ont pu se reconditionner.

    Comics américains un peu partout sur la planète

  • Prête-moi ta plume

    Le pied du mur voit son maçon, le clair de Lune voit son poète,
    Le lac voit son temps suspendu et le ciel ses chasseurs d’étoiles.
    Je collecte ainsi ma moisson de petits bonheurs où je souhaite
    Redécouvrir l’inattendu et ses mystères qui s’en dévoilent.

    La plume en guise de canot sur une étendue insipide
    M’offre toujours un imprévu qui crève l’écran de l’azur.
    L’encre en manière des canaux s’agite en vagues intrépides
    Qui, d’un reflux de déjà-vu, grandissent au fur et à mesure.

    Pareil à Morphée qui m’endort, ma muse m’envoûte et m’emmène
    Derrière les coulisses terrestres vers les royaumes de l’invisible.
    L’esprit paré de toison d’or redécouvre maints phénomènes
    Que mon cœur et mon âme orchestrent en aventures imprévisibles.

    Illustrations d’Akira Kusaka sur https://akira-kusaka-illustration.tumblr.com

  • Merde !

    Ce n’est pas l’homme qui bousille chaqu’ jour un peu plus sa planète
    Mais Dieu qui a créé le monde avec maintes contradictions.
    Métrosexuels en bas résille, femmes modernes et proxénètes
    Ne seront plus jugés immondes mais victimes à leurs addictions.

    Car Dieu nous a créé le mal pour en devenir dépendant
    Au point de tuer père et mère et bien plus si affinités.
    Ce côté obscur animal, tapi à notre corps défendant
    Dans notre chair douce et amère, nous marque de sa divinité.

    Alors après tout bousillons, dégénérons, multiplions
    Puisque tel est notre objectif et la raison de notre vie !
    Merci, Ô Dieu, et oublions avec tes anges trublions
    Ce prétendu « bien » subjectif qu’ Tu nous baratine à l’envi !

    Illustration d’Agim Sulaj

  • L’imposition des mains

    Tous ceux qui m’imposent les mains ne l’ font pas pour ma guérison
    Mais pour m’obliger à me taire au cœur du troupeau de moutons
    Et remettre sur le droit chemin – à défaut de mettre en prison –
    Rebelles et contestataires, fiers et prognathes du menton.

    Hélas Dieu aime tout le monde ce qui oblige tout chrétien,
    Tout musulman, bref tout déiste à abuser de Sa Puissance.
    Toutes les religions immondes ne signifient que le maintien
    Des multitudes populistes dans le respect, l’obéissance.

    L’imposition est un impôt de bonne foi qui nous endort
    Par aréopage d’anciens, à toutes pensées, rétrogrades.
    La crédulité est un pot pire que la boîte de Pandore
    Où croyants et politiciens entassent les maux les plus crades.

    Illustration de Lisa Aisato

  • L’heure des poissons-volants

    L’heure entre chien et loup-de-mer marque un étrange rendez-vous
    Lorsque la lumière bleuit sous l’influence crépusculaire.
    Le ciel lourd d’embruns doux-amer devient l’hôte qui se dévoue
    Pour que les poissons ébahis s’éveillent et s’envoient en l’air.

    Et puis, divine et magnifique, tenant la barre de sa jonque,
    S’avance leur ange-gardienne perchée sur son colimaçon.
    Tous s’apprêtent à l’honorifique rassemblement de toutes conques
    Qui vont jouer en file indienne un concerto pour infrasons.

    Entends-tu les cornes de brume dont les sons glissent sur les eaux ?
    Ils émanent des mille coquilles des olifants de l’océan.
    L’écho qui jaillit de l’écume et qui se déploie en réseau,
    Provient de l’illustre flottille qui le soir ressort du néant.

    Tableau de Laura Diehl

  • Quand rôde la sirène

    Quand elle rode entre deux eaux, cachée derrière les roseaux,
    Nul ne saurait l’apercevoir ni même ne saurait prévoir
    La nature de ses intentions à moins de faire très attention
    Aux cris des oiseaux qui trahissent l’avancée de l’instigatrice.

    Quand vous apercevrez son corps, sans doute vous pourriez encore
    Fuir et rejoindre la terre ferme avant que ses bras vous renferment
    Contre sa poitrine opulente et sa plastique corpulente
    Pour vous proposer d’en jouir avant de vous évanouir.

    Trop tard ! Et ses lèvres pulpeuses goûtent votre chair sirupeuse ;
    Ses doigts enserrent votre sexe, vous abandonnez tout réflexe
    Et quand vient la petite mort, alors que la sirène mord,
    Par le meilleur, elle vous déguste à pleine dents dans votre buste.

    Tableau de Barbara Tyson

  • L’invitation génétique

    J’ai reçu cette invitation dans les messages génétiques
    Inscrits dans la correspondance entre l’existence et la mort.
    À la fin de ma prestation, je quitterai ma pathétique
    Robe de chair en discordance avec une vie sans remords.

    Ainsi, nu(e) je nais, nu(e) je meurs et nu(e) je rejoins ma maison
    Où je retrouve la famille de tous ces « moi » que j’ai été.
    Ensemble dans la bonne humeur, je vis ma cinquième saison ;
    Celle où les années s’éparpillent dans une infinité d’étés.

    « Dieu » n’était que mon majordome et ses anges, mes jardiniers
    Qui m’ont assisté(e) à renaître et vivre en toutes circonstances.
    J’ai voyagé parmi les hommes, conquis mille carabiniers,
    Pour mener de mon propre maître les récits de mon existence.

    Tableaux de Rafal Olbinski

  • Ô Lotus !

    Fleur de lotus, reine sacrée, cueillie il y a dix-mille ans,
    Tu es demeurée immortelle dans mes mémoires maternelles !
    Image pure et consacrée aux vies qui vont s’assimilant
    À tous les enfants qui constellent ta progéniture éternelle !

    Fleur de lotus, originelle, rebelle aux lois de la science,
    Tu te moques des religions officielles ou ésotériques.
    Vaillante et sûre sentinelle qui sait éveiller ma conscience
    Aux indénombrables légions de mes âmes fantasmagoriques.

    Tableau de Louis Kronberg

  • La Capitaine de la Licorne

    On n’a jamais rien retrouvé de la première centurie
    Que commandait la Capitaine de la Licorne disparue.
    Cette absence pourrait prouver que vents et vagues en furie
    Ont enseveli par centaines des marins pourtant fort férus.

    Toutefois les légendes perdurent et de nombreux témoins ont vu
    La Capitaine entièrement nue naviguer en figure de proue
    Et affronter vents et froidures jusqu’à les prendre au dépourvu
    Dans le grand nord où l’inconnu demeure impudent, peu ou prou.

    Âgée de cinq ou six-cents ans, il parait qu’elle est toujours belle,
    Les cuisses et les seins aussi fermes qu’une licorne adolescente.
    Je l’imagine terrorisant tous les touristes en ribambelle
    Venus corroborer à terme leur vanité obsolescente.

    Tableau de Wojtek Siudmak

  • Avec ou sans clarinette, telle est la question

    Après le retour de bâton d’un opéra interminable
    Où la ballerine fatiguée s’écroule à même le plancher,
    En dépit du qu’en-dira-t-on, elle goûtera une inestimable
    Détente souvent prodiguée avec un instrument anché.

    Anché comme une clarinette plutôt qu’haubois ou saxophone.
    Ne me demandez pas pourquoi… sans doute son corps longiligne
    Dont l’extrémité choupinette ferait penser au sexophone
    Semblable à l’organe adéquat pour quelques délices malignes.

    Tableaux de Rakhmet Redzhepov

  • Duo de dames

    Pourvu d’un mécanisme Suisse et d’une interprète helvétique,
    Le duo de dame donnait un sens au chant alémanique.
    Le luth posé contre la cuisse dompté d’un archet frénétique
    Vibrait, sonnait et bourdonnait sur d’anciennes lieds germaniques.

    Le violon accordé au dos de sa compagne musicienne
    L’accompagnait en continu de toute sa gamme étendue ;
    Do Ré Mi Fa Sol La Si Do, répondaient les notes italiennes.
    Mais pourquoi jouer les seins nus ? Mais pour le charme, bien entendu !

    Tableau d’Igor Samsonov

  • Dans le métro

    Le métro, grand collectionneur de tous types d’individus,
    Se nourrit du désir d’aller dans le sens de sa destinée.
    Direction au petit bonheur ou itinéraire assidu ?
    Lui, ne fait que bringuebaler ses échantillons coltinés.

    Beaucoup de quidam dans leurs bulles, isolés dans leurs téléphones,
    Ou cherchant à communiquer ou vampiriser leurs victimes.
    On y croise des somnambules parmi l’hétéroclite faune
    De saintes-nitouches paniquées à la vue de parties intimes.

    Comme un transit intestinal, le métro digère ses gens ;
    Toujours ses mêmes aliments ensommeillés et malpolis.
    Lorsqu’il arrive au terminal après sa douche au détergent,
    Il rêve à son rapatriement au paradis des wagons-lits.

    Illustration de Tony Sart

  • Fantasmes emprisonnés

    Dans le secret de sa raison, chacun y bâtit sa prison ;
    Cachots secrets pour assouvir tout ce que l’on aime asservir
    Juste pour rêver ses fantasmes et l’addiction à ses orgasmes
    Qui lient tant l’esprit à la chair et à ses désirs les plus chers.

    Derrière le masque des yeux tout parait toujours merveilleux ;
    Les personnes les plus honnêtes ne paraissent jamais malhonnêtes
    Mais si l’on franchit la limite et gratte derrière le mythe,
    On y découvre les horreurs du cynisme et de la terreur.

    Paradoxalement les gens probes cachent des penchants ivres d’opprobre ;
    Barbe-Bleue habite parmi nous juste à quatre pas de chez vous.
    J’ai mon propre jardin secret mais il se montre assez discret ;
    De temps en temps je vous en livre une captive que je délivre.

    Image trouvée sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue.
    Si l’auteur de cette image reconnaît son travail, je serai heureux de le créditer.

  • Lilith et la Lune Noire

    Dans les livres secrets apocryphes, l’histoire de la création
    Est décrite d’une autre manière que celle écrite dans la Genèse.
    Lilith avait montré ses griffes et renié l’agréation
    De sa réclusion prisonnière pour cause de parthénogenèse.

    Elle n’avait pas besoin d’un homme pour procréer ses propres enfants ;
    Juste besoin d’un luminaire gérant le cycle menstruel.
    Avec l’aide d’un ange astronome d’une mémoire d’éléphant,
    Elle déroba l’astre lunaire juste vêtue d’un sarouel.

    Bien sûr, c’était la Lune Noire que Lilith emportait au loin
    La troquant pour la Lune Blanche qui brille en notre firmament.
    Puis elle regagna son manoir, l’ trésor porté par son adjoint,
    Et enfanta une avalanche de filles issues de leur maman.

    Que sont ses filles devenues ? Ont-elles engendré à leur tour ?
    Personne ne se le rappelle, ce n’est pas écrit dans la bible.
    Mais des sorcières m’ont soutenu qu’en faisant des allers-retours
    Lorsque la Lune se renouvelle, elles les savaient reproductibles.

    Tableaux d’Andrej Mashkovtsev sur https://foxword.livejournal.com/166536.html

  • Infiniment vôtre

    Les années succèdent aux années, les mêmes images se répètent
    Comme l’absolu des miroirs qui s’interrogent l’un et l’autre.
    Douze mois déjà surannés par une force centripète
    Sont déjà rangés au tiroir, salués d’un infiniment vôtre.

    Douze autres mois pleins d’avenir vont passer au moulin du temps
    Et ressasser les mêmes guerres, mêmes crises et mêmes terreurs.
    Les anciens jours du souvenir parleront aux jours débutants
    Sans toutefois comme naguère éviter les mêmes erreurs.

    Cette hideuse répétition ressemble à l’enfer de Sisyphe
    Roulant sa Terre jusqu’au sommet pour repartir au même rythme.
    Casser cette malédiction serait une action décisive
    Pour s’éveiller à point nommé d’après un nouveau paradigme.

    Image trouvée sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue.
    Si l’auteur de cette image reconnaît son travail, je serai heureux de le créditer.

  • L’année de l’avenir

    Quand la fin d’année se rapproche, j’observe la navigation
    De mon vaisseau spatial terrestre dans sa cabine de vigie.
    J’attends que mon regard accroche la treizième constellation
    Soumise au signe de Sylvestre dont mon chat dresse l’effigie.

    Minuit moins soixante secondes, dernière minute de l’année ;
    Nous fonçons à travers l’espace à la vitesse du futur.
    Quelques étoiles vagabondes escortent une micellanée
    De météorites qui passent pour célébrer l’investiture.

    Minuit sonnantes tous azimuts, nous franchissons l’étroit passage
    Qui petit à petit s’écarte dans les bras de la galaxie.
    Çà et là des astres permutent leurs phares suivant le traçage
    Que je relève sur les cartes, tous les sens en catalepsie.

    Enfin voici le nouveau monde d’un espace-temps inédit
    Où nous pourrions changer de vie pour une autre organisation
    Sortant des conditions immondes d’un passé lourd de discrédits
    Pour le quitter sans préavis et rallier l’illumination !

    Images trouvées sur Pinterest sans indication de provenance et de source inconnue.
    Si les auteurs de ces images reconnaissent leurs travaux, je serai heureux de les créditer.

  • Les femmes-chamanes du nord

    Au-delà du cercle polaire, pays de la nuit éternelle,
    Lorsque le soleil pour six mois ferme le rideau de ténèbres,
    Dans des igloos alvéolaires, les cérémonies maternelles
    Préparent les femmes en émoi aux rituels qui les célèbrent.

    Depuis le pôle magnétique jusqu’aux grands réseaux telluriques,
    Elles dirigent l’énergie de toutes les mères du monde
    Au patrimoine génétique enrichi des forces ferriques
    Qu’elles stimulent en synergie de mille transes furibondes.

    Et lorsque revient la lumière, elle rendent grâce à l’Univers
    Qui a transformé leurs demandes en fait accompli, désormais.
    Elles restent toujours les premières à braver été comme hiver
    Ce froid que leur corps recommande pour les conserver à jamais.

    Illustrations de Jean-Sébastien Rossbach sur https://www.cfsl.net/chamanes-le-nouveau-livre-de-jean-sebastien-rossbach

  • Les femmes-chamanes du sud

    Dès le tropique du cancer où la chaleur est souveraine,
    Vivent les filles du Soleil, filles de Lune et des étoiles.
    Toutes pratiquant de concert les vieilles traditions pérennes
    Où les prêtresses se relayent par leur beauté qui se dévoile.

    À l’équateur, l’astre solaire parle aux vestales solitaires
    Qui vivent nues pour recevoir l’émanation qui les nourrit.
    Leur nudité protocolaire leur offre un grade autoritaire
    Que leur tribu sait percevoir au même rang que les houris.

    Jusqu’au tropique du Capricorne, sous la forêt amazonienne,
    Se sont répandues les guerrières, gardiennes des terres sacrées.
    Sacralisées de doubles cornes, arborant leur région pubienne,
    Elles vivent des transes aventurières d’hommes à la semence nacrée.

    Illustrations de Jean-Sébastien Rossbach sur https://www.cfsl.net/chamanes-le-nouveau-livre-de-jean-sebastien-rossbach

  • Dimanche, la muse cornue

    Quand elle se montre d’humeur absente de la moindre veine poétique,
    Il m’est inutile de croire qu’elle m’inspirera ce dimanche.
    Mon encre et ma plume s’exemptent de toute envie hypothétique
    Qui ne saurait faire qu’accroire le bourdon de la page blanche.

    Alors je l’imagine ailleurs dans un décor blues & morose,
    Vêtue de toilettes françaises et coiffée d’une cornemuse.
    Je plonge son regard railleur dans une prose à l’eau de rose
    Afin que la douche écossaise brusquement déride ma muse.

    Aussitôt elle renvoie la balle de toute sa rage intérieure
    Que je m’attrape en pleine poire par l’effet miroir attendu.
    Aussitôt ma plume s’emballe de mes mémoires antérieures
    Qui se dévident d’une encre noire aux reflets-vers inattendus.

    Tableau de Michael Cheval sur http://chevalfineart.com/portfolio/new-releases

  • Le joli temps rosé du dimanche

    Un joli calicot rétro pour un bustier à l’eau de rose
    Et je sens toutes mes racines fleurer des photos argentiques
    Avec leurs portraits magistraux des élégantes un peu moroses
    Dont l’étrange regard fascine encore d’un air nostalgique.

    La mode s’enfuit éperdue à la recherche du futur
    Tandis que les modèles s’ancrent dans les mémoires démodées.
    Pourtant le temps n’est pas perdu et j’aspire à voir la suture
    Entre l’avenir qui s’échancre et le passé raccommodé.

    Tableau de Catrin Welz-Stein sur http://artsdumonde.canalblog.com/archives/2016/03/12/33502041.html

  • À problème de cochon, sa solution de lapin

    Puisque dans l’cochon, tout est bon, confions-lui l’orientation
    Car son odorat légendaire sait guider chaque mouvement.
    Les femmes à l’esprit pudibond pourront même sans contestation
    En faire leur référendaire pour tout affaire en jugement.

    Pareillement chez les chauds lapins – bien plus encore que le cochon –
    Il suffit d’une simple carotte pour le rendre plus perceptif.
    Ainsi sans le moindre pépin, sans se monter le bourrichon,
    L’animal par simple jugeote saura foncer sur l’objectif.

    Sitôt les lapins en action, les solutions se multiplient
    Bien plus vite que les problèmes se soulèvent en fédération.
    Évidemment en réaction, seront également accomplis
    Autant de sources de dilemmes issus des proliférations.

    Tableaux de Margo Selski sur https://hamptonsarthub.com/2012/12/29/margo-selski-explores-myths-of-her-own-making

  • À l’heure des thés

    À l’heure du premier thé vert, j’ai le cœur encore à l’envers ;
    Mes cauchemars ont transformé mes inquiétudes déformées
    Qui ont macéré la semaine toute mon aventure humaine
    Et répandu sur mes nuits blanches tous mes soucis en avalanche.

    À l’heure du second thé rose remontent les pensées moroses
    Et je me mets à ressasser le présent mêlé au passé.
    Toutes ces mémoires ancestrales, tragicomiques et théâtrales
    Se rejouent sans interruption comme un mal qui fait éruption.

    À l’heure du dernier thé noir, finis cafards et idées noires
    Qui ont tellement infusé que leur poison s’est transfusé
    Dans tous les canaux collecteurs qui se sont montrés protecteurs
    En expulsant mille douleurs qui m’ont redonné mes couleurs !

    Tableaux de Catrin Welz-Stein sur http://artsdumonde.canalblog.com/archives/2016/03/12/33502041.html

  • Changer les règles

    Tous ces échecs consécutifs concernant la constitution
    Devraient inciter à changer toutes les règles de l’échiquier
    Et limiter l’exécutif du roi par sa destitution
    Lorsqu’il vous parait étranger qu’il favorise les banquiers.

    Et puis, une assemblée de pions qui acquiescent les projets de lois
    Fidèlement sans renâcler ni écouter l’opposition,
    C’est déléguer à ces champions de la plus stricte mauvaise foi
    Notre pouvoir d’achat bâclé sous le coup des impositions.

    Tableau de Michael Cheval sur http://chevalfineart.com/portfolio/new-releases

  • Allo, les réseaux sociaux ?

    Les synapses contactent un neurone à des milliers de connexions
    Et celui-ci fait la synthèse pour choisir une solution.
    Chez les hommes, la testostérone leur permet de faire objection
    Aux informations sur les thèses qui mènent à la révolution.

    Si le cerveau est complotiste – puisqu’il se renseigne pour agir –
    Les hommes, en troupeau de moutons, élisent leur loup-président.
    Les « sauve-qui-peut » humanistes mettent longtemps à réagir
    Avant que, nous le redoutons, il bouffe tous ses résidents.

    Illustrations d’Oksana Grivina sur http://www.dripbook.com/grivina/style/illustration-portfolios

  • Les deux Vendredies

    D’ores et déjà vendredi revient systématiquement
    Annoncé, en fin de semaine, par deux sirènes en pêle-mêle.
    Je le dis et je le redis : « ce jour est thématiquement
    Voué, par leur nature humaine, à deux femmes-poissons jumelles.

    Deux sirènes qui se ressemblent comme deux gouttes d’eau, c’est drôle !
    Comme le reflet d’un miroir ou deux clones sans contredit.
    Elles vivraient toujours ensemble en s’admirant à tour de rôle ;
    Elles sont connues dans leur terroir sous le nom des deux Vendredies.

    Tableau de Nicoletta Ciccoli