Catégorie : Pamphlets du samedi

Petits textes satiriques envers qui vous savez

  • Le village des petits bonheurs

    Mon petit village s’enferme hors du temps et des inquiétudes
    Aussi bien en début d’année qu’au fil des mois jusqu’en décembre.
    J’en ai pris plusieurs années ferme pour consommation de quiétude
    Dont l’addiction m’a condamné à y passer ma vie à l’ombre.

    Je suis cerné par des forêts et des collines vallonnées
    Et n’ai que le droit d’exister dans l’éternelle bonne humeur.
    L’aurore à peine dévorée, toutes mes heures sont jalonnées
    D’une direction assistée vers tout plein de petits bonheurs.

    Tableau de Hanna Silivonchyk

  • Le village des complotistes

    Mon petit village s’enferme hors du temps et des conventions
    Dès que les matines ont sonné jusqu’aux heures du crépuscule.
    Entre les maisons et les fermes, les animaux font sécession ;
    Les chiens sont même soupçonnés de comploter en groupuscules.

    Les toutous s’envoient des messages encodés dans leurs aboiements ;
    Ils communiquent avec force en déposant fientes et fèces.
    Et je détecte à leurs passages sur la neige fraîche, un chatoiement
    De petites taches jaunes en morse narrant leurs histoires de fesses.

    Tableau de Hanna Silivonchyk

  • Soigne le serpent, il te mordra quand même

    Dès qu’il faut sauver la planète et qu’il faut me jeter à l’eau,
    Je n’ai pas peur de me mouiller pour soutenir mon président.
    Or, une fois qu’il est aux manettes, je vois cet enfant de salaud
    Me forcer à m’agenouiller et me traiter de dissident.

    Mais si je laisse se noyer le président et ses ministres,
    J’accepte qu’une dictature remplace la démocratie.
    Après, il risque de m’envoyer pour payer les frais du sinistre
    L’impôt, la taxe et la facture du joug de sa suprématie.

    « Max l’explorateur » par Guy Bara

  • Dites-le avec des fleurs

    Pour manifester ma rancœur envers l’état totalitaire
    Qui parle la langue de bois et me traite comme du bétail,
    J’ose le langage des fleurs pour affronter les militaires
    Afin que s’exprime la voix d’un opprimé dans la piétaille.

    Une couronne mortuaire avec mes regrets éternels
    Pour enterrer ma liberté que je présumais immortelle.
    Je poserai sur son sanctuaire quelques œillets sempiternels
    Pour mes espoirs déconcertés par les magouilles et les cartels.

    « Max l’explorateur » par Guy Bara

  • Labyrinthes

    Le progrès en marche nous apporte un bonheur mérité ;
    Le temps inscrit ses marques sur la planète opprimée.
    La science prolonge la vie et nous allons tous hériter
    D’un patrimoine dépassé et d’un futur déprimé…

    Des papiers que le vent promène,
    Des plastiques que la mer transporte,
    Des canettes que les chemins acheminent,
    Des mousses que les rivières emportent
    Des dioxydes de carbone que le trafic propage,
    Des cris que les villes transmettent,
    Des nitrates que l’agriculture parsème,
    Des particules que l’atmosphère colporte,
    Des virus que le tourisme diffuse,
    Des incendies que les forêts transfèrent,
    Des métaux lourds que les nappes transvasent,
    De la rouille que les abîmes renferment,
    Du pétrole que les plages éparpillent,
    De la mort que la vie répercute.

    Illustration de Daniel Garcia

  • Le Brexit

    Messieurs, tirez donc les premiers mais veuillez filer à l’anglaise
    Par un coït interrompu, brisant d’un coup de Trafalgar !
    L’empire dont vous réclamiez tout l’avantage, ne vous déplaise,
    Retombe en argent corrompu qui va déclencher la bagarre.

    Moi, qui habite la boutonnière, dans les Alpages en boutons,
    Comme vous, j’ai ma tirelire bien à l’abri au coffre-fort.
    Je fais l’Europe buissonnière avec mes cochons, mes moutons
    Mais je vous parie mille livres que vous regretterez notre confort.

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    Si l’auteur de cette image reconnaît son travail, je serai heureux de le créditer.

  • Dérapages

    J’ai glissé sur la chrétienté et je me suis cassé la foi ;
    J’ai trébuché sur le bouddhisme et je m’y suis grillé l’esprit ;
    Je me suis rallié à l’islam et j’ai consumé mon essence ;
    J’ai fouillé la mythologie et l’aigle m’a mangé le cœur ;
    J’ai chanté le monde quantique et j’ai chuté dans un trou noir ;
    J’ai fait confiance à la science et je m’y suis brûlé le corps ;
    J’ai subi la force des hommes et je suis devenu ermite ;
    J’ai écouté la voix de Dieu et Jésus crie dans le désert.



    (Sur un mince cristal l’hiver conduit leurs pas
    Le précipice est sous la glace
    Telle est de vos plaisirs la légère surface
    Glissez, mortels, n’appuyez pas.

    « Le Patinage » – Pierre Charles Roy.)

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